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09/05/2016 | FRANCE | N°15/02081

France | France, Cour d'appel de Versailles, 4e chambre, 09 mai 2016, 15/02081


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 54D



4e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 09 MAI 2016



R.G. N° 15/02081



AFFAIRE :



Société HERVE THERMIQUE





C/

Société BEAUFOUR- IPSEN INDUSTRIE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2011 par le Tribunal de Commerce de CHARTRES

N° RG : 09/1339



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Martine DUPUIS



Me Pierre GUTTIN









REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE NEUF MAI DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



DEMANDERESSE d...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54D

4e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 MAI 2016

R.G. N° 15/02081

AFFAIRE :

Société HERVE THERMIQUE

C/

Société BEAUFOUR- IPSEN INDUSTRIE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Octobre 2011 par le Tribunal de Commerce de CHARTRES

N° RG : 09/1339

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Pierre GUTTIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE NEUF MAI DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (3ème chambre civile) du 10 mars 2015 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles 4ème chambre civile le 23 septembre 2013 et APPELANTE du jugement rendu le 11 Octobre 2011 par le tribunal de commerce de Chartres

Société HERVE THERMIQUE 'SAS'

N° de Siret : 627 220 049 R.C.S. TOURS

Ayant son siège [Adresse 1]

[Adresse 3]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 1554406 vestiaire : 625

plaidant par Maître Sarah MERCIER substituant Maître Stéphanie BAUDRY, de la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS avocat au barreau de TOURS

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI ET INTIME

Société BEAUFOUR-IPSEN INDUSTRIE

N0 de Siret : 542 950 118 R.C.S. CHARTRES

Ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par Maître Pierre GUTTIN, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 15000277 vestiaire : 623

plaidant par Maître Bertrand LIONEL-MARIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C 0522

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Février 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michèle TIMBERT, président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michèle TIMBERT, Président,

Madame Sylvie DAUNIS, Conseiller,

Madame Marie-Christine HERVIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Nathalie MULOT,

*****************

FAITS ET PROCEDURE,

La SAS Beaufour-Ipsen Industrie, a fait rénover une partie du bâtiment 7 de son site de production à [Localité 3] (28), comprenant 8 bâtiments, et y a fait intégrer plusieurs équipements

industriels.

Elle a confié, suivant contrat de conception-réalisation du 25 mai 2007, la rénovation et le réaménagement de la zone B du bâtiment 7, ainsi que l'intégration de plusieurs équipements industriels, à la société Validapro Europe pour un prix global et forfaitaire de 1.722 566 euros HT, la date de livraison étant fixée au 15 janvier 2008.

La société Validapro Europe a sous-traité, pour un prix global et forfaitaire de 635.000 euros HT, l'intégralité des travaux de bâtiment à la société anonyme Faure Ingenierie. Il a été convenu que la société Faure Ingenierie serait payée, sur la base de bons à payer, validés et

signés par la société Validapro Europe, par la société Beaufour Ipsen Industrie au titre d'une

délégation de paiement.

La société Faure Ingenierie a sous-traité les travaux afférents au "Heating Ventilation and Air Conditioning (HVAC)" et aux fluides à la SAS Hervé Thermique, spécialisée en génie

électrique et génie climatique. La société Beaufour Ipsen Industrie a agréé les conditions de

paiement de la société Hervé Thermique pour les montants de 514.280 euros TTC pour le lot

HVAC et de 17.940 euros TTC pour le lot fluides, soit un total de 532.220 euros TTC.

La société Hervé Thermique a bénéficié, par ailleurs, d'un cautionnement bancaire de

paiement, à hauteur de l'agrément de ses conditions de paiement, par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône (Crédit Agricole).

La livraison a été effectuée avec des réserves le 21 mai 2008, le procès-verbal étant signé par la société Validapro Europe sans observation.

La société Hervé Thermique a demandé le paiement de ses prestations à la société Faure Ingenierie qui a refusé.

Par actes d'huissier de justice des 11 et 12 mars 2009, la SAS Hervé Thermique a fait assigner en paiement les sociétés Faure Ingénierie, Beaufour Ipsen Industrie et le Crédit Agricole.

Par jugement du 11 octobre 2011, le tribunal de commerce de Chartres a :

- Pris acte de ce que la société Hervé Thermique fixe, au titre du contrat de sous-traitance, à la somme de 69.792,78 euros TTC la créance qui lui serait due,

- Pris acte des contestations développées par la société Faure Ingenierie,

- Déclaré la société Hervé Thermique recevable et bien fondée en sa demande à l'égard de la société Faure Ingenierie,

- Fixé la créance de la société Hervé Thermique au passif de la société Faure Ingénierie à la somme de 190.823,12 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter de la date de présentation de la première mise en demeure jusqu'au 11 août 2009, date de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire,

- Débouté la société Hervé Thermique de ses autres demandes à l'encontre de la société Faure

Ingenierie,

- Déclaré la société Hervé Thermique recevable et partiellement fondée en ses demandes à

l'encontre de la Caisse de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes,

- Condamné la Caisse de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à payer à la société Hervé

Thermique la somme principale de 69.792,78 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de présentation de la première mise en demeure et la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Déclaré la société Hervé Thermique mal fondée en ses demandes à l'encontre de la société

Beaufour Ipsen Industrie, l'en déboutant,

- Déclaré la société Faure Ingenierie mal fondée en ses demandes à l'encontre de la société Beaufour Ipsen Industrie, l'en déboutant,

- Débouté la Caisse de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Hervé Thermique,

- Débouté la société Beaufour Ipsen Industrie de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Hervé Thermique.

Sur appel de la société Hervé Thermique, la cour d'appel de Versailles, par arrêt rendu par défaut, du 23 septembre 2013, a :

- Réformé le jugement en ce qu'il a débouté la société Hervé Thermique de sa demande en fixation de sa créance au passif de la société Faure Ingenierie en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Confirmé le jugement pour le surplus,

- Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Fixé la créance de la société Hervé Thermique au passif de la société Faure Ingenierie à la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance

- Rejeté toutes autres demandes,

- Condamné la société Hervé Thermique aux dépens.

Le 17 décembre 2013, la société Hervé Thermique a formé pourvoi contre cette décision rendue par défaut et signifiée le 13 novembre 2013 à l'encontre de la société Beaufour Ipsen, de M. [U] ès qualités de liquidateur de la société Faure Ingénierie et du Crédit agricole.

Par mémoire ampliatif du 17 avril 2014, la société Hervé Thermique s'est désistée de son pourvoi en ce qu'il était dirigé contre le Crédit agricole et M. [U] ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Faure ingénierie.

Par arrêt du 10 mars 2015, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a :

- Cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il déboute la société Hervé Thermique de ses demandes à l'égard de la société Beaufour Ipsen industrie, l'arrêt rendu le 23 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée,

- Condamné la société Beaufour Ipsen industrie aux dépens,

- Condamné la société Beaufour Ipsen industrie à payer la somme de 3.000 euros à la société Hervé Thermique au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour d'appel de Versailles a de nouveau été saisie sur renvoi après cassation par

déclaration du 18 mars 2015.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 26 octobre 2015, la société Hervé Thermique demande à la cour de :

- Condamner la société Beaufour-Ipsen industrie à lui payer une somme de 125.089,90 euros et ce par suite de son action en responsabilité fondée sur les dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, avec intérêts légaux à courir sur cette somme à compter du 1er novembre 2008, date à laquelle elle aurait dû effectuer son paiement,

-Condamner la société Beaufour-Ipsen industrie à lui verser la somme de 17.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Beaufour-Ipsen industrie aux dépens dont distraction.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 19 octobre 2015, la société Beaufour- Ispen industrie demande à la cour de :

- Constater que la société Hervé Thermique était régulièrement déclarée, que ses conditions de paiement étaient agréées et qu'elle bénéficiait de cautionnements de paiement, que l'action directe ne porte qu'à hauteur de 69.792,78 euros TTC sur les prestations prévues par les contrats de sous-traitance conclus entre Faure ingénierie et Hervé Thermique,

- Constater le paiement de 115.542,52 euros TTC qu'elle a fait au bénéfice de Hervé Thermique,

- Constater qu'au jour où elle a reçu la copie de la lettre de mise en demeure adressée par la société Hervé Thermique à la société Faure ingénierie, aucune assiette n'était, compte-tenu de ses créances sur Validapro Europe et Faure ingénierie, disponible pour l'action directe de la société Hervé Thermique,

- En conséquence, dire et juger que l'action directe de la société Hervé Thermique est irrecevable et/ou mal fondée,

- Dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute sur le fondement des articles 14-1 de la loi sur la sous-traitance et 1382 et 1383 du code civil,

- Débouter la société Hervé Thermique de l'intégralité de ses demandes, droits et prétentions à son encontre,

À titre incident,

- Déclarer son appel incident recevable et fondé,

- Réformer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande en réparation pour procédure abusive,

- Condamner, en conséquence, la société Hervé Thermique à lui payer la somme de 10.000 euros pour procédure abusive,

En outre,

- Condamner la société Hervé Thermique à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- Ordonner l'exécution provisoire.

La clôture a été prononcée le 5 janvier 2016.

'''''

MOTIVATION

1°) la demande en paiement formée par la SAS Hervé Thermique

En raison de la cassation partielle intervenue, le litige porte uniquement sur la connaissance par le maître d'ouvrage, la SAS Beaufour-Ipsen Industrie, de la réalisation par la SAS Hervé Thermique, agréée au titre du marché principal en qualité de sous-traitant, de travaux supplémentaires à la demande de la société Faure Ingéniérie.

En effet, la cour de cassation a jugé, au visa des articles 3, 14 et 14-1 de la loi du 31

décembre 1975 que la cour d'appel n'ayant pas recherché 'comme il lui était demandé, si la lettre du 8 juillet 2008 adressée par la société Beaufour à la société Faure, à la suite d'une demande de la société Hervé Thermique, ne démontrait pas que la société Beaufour avait connaissance, à cette date de la commande par la société Faure de travaux supplémentaires exécutés par la société Hervé Thermique pour lesquels cette dernière ne bénéficiait pas d'une délégation de paiement ou d'une caution la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision'.

La SAS Hervé Thermique réclame la somme de 125.089,90 euros sur le fondement de

l'article 14-1 alinéa 1 de la loi du 31 décembre 1975. Elle précise que la somme de 69.792,78 euros qu'elle réclamait sur le fondement des articles 12 et 13 de la même loi lui a déjà été payée par la caisse régionale de crédit agricole mutuel. Ayant renoncé à toute demande à l'encontre de la SAS Beaufour-Ipsen Industrie concernant cette seconde somme, il n'y a donc pas lieu d'examiner les moyens de droit soulevés par les parties à ce sujet.

Elle rappelle disposer en sa qualité de sous-traitant, vis à vis de la SAS Beaufour- Ipsen Industrie d'une action en responsabilité pour les sommes qui lui restent dues au titre de son marché de sous-traitance.

Elle soutient que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie savait qu'elle réalisait des travaux

supplémentaires car :

- elle a demandé à la société Faure de respecter la législation sur la sous-traitance à travers une lettre du 8 juillet 2008 visant ces travaux qui s'ajoutaient au devis initial,

- le paiement direct qu'elle a effectué à son profit en septembre 2008 concerne une partie de ces travaux supplémentaires,

- elle a commandé des travaux modificatifs de ces travaux supplémentaires,

- elle a réceptionné ces travaux supplémentaires le 12 décembre 2008.

La SAS Hervé Thermique affirme que son action en responsabilité à l'encontre de la SAS Beaufour-Ipsen Industrie est fondée en ce que d'une part, il est démontré que cette dernière avait connaissance de la commande des travaux supplémentaires, d'autre part elle n'a pas à prouver que ce maître d'ouvrage avait connaissance de la réalisation de ces travaux. Elle ajoute que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie n'a jamais contesté la matérialité de ces prestations supplémentaires.

Elle précise que son action en réparation à l'encontre du maître de l'ouvrage ne saurait être rejetée du seul fait que celui-ci n'aurait eu connaissance de sa présence qu'après la fin des travaux et a fortiori, après la fin du marché principal, de sorte que n'est pas imposée la délivrance d'une mise en demeure par le maître de l'ouvrage uniquement pendant l'exécution par le sous-traitant des travaux, et qu'en tout état de cause la SAS Beaufour-Ipsen Industrie connaissait sa présence sur le chantier et la réalisation par ses soins de travaux supplémentaires dès l'origine.

Elle affirme que ni la lettre du 20 octobre 2008, ni celle du 8 juillet 2008 , générales et non comminatoires, ne constituent une mise en demeure au sens de la loi du 31 décembre 1975 et que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie aurait dû vérifier que la caution, valant garantie de paiement, avait bel et bien été délivrée.

La SAS Beaufour-Ipsen Industrie rétorque que le projet, traité à prix global et forfaitaire, n'a fait l'objet d'aucune demande de modification de sa part. Elle précise que la société Validapro Europe a livré l'ouvrage avec un retard de 126 jours par rapport à la date contractuelle, ce qui a décalé d'autant le démarrage de la production, et avec de nombreuses réserves. Elle explique avoir notifié le 30 juillet 2008 à cette entreprise des pénalités de retard de 976.710,00 euros et le 31 juillet 2008 que le coût de reprise des réserves s'élevait à la somme de 90.000,00 euros HT. Elle expose avoir commandé à la SAS Hervé Thermique pour 114.635,95 euros TTC de travaux liés à la levée des réserves et la réalisation du dossier des ouvrages exécutés (DOE).

La SAS Beaufour-Ipsen Industrie soutient que la SAS Hervé Thermique est mal fondée en sa demande en paiement de la somme de 125.089,80 euros TTC en ce qu'elle ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute au sens de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975. Elle estime qu'il n'est pas établi qu'elle avait connaissance de la présence de la

SAS Hervé Thermique pour réaliser des travaux supplémentaires ni même connaissance de l'exécution de ceux-ci. Elle soutient que cette connaissance ne peut pas être déduite de l'ampleur et de la nature alléguée de ces travaux. Elle ajoute que les seuls travaux supplémentaires connus étaient ponctuels, se montaient à 6.401,00 euros et ont été payés. Elle fait valoir que l'appelante principale est dans l'incapacité de fournir le moindre écrit justifiant de l'envoi à son profit des commandes supplémentaires passées de sa propre initiative par la société Faure Ingéniérie. Elle rappelle qu'en sa qualité de laboratoire pharmaceutique, elle n'a aucune connaissance en matière de construction.

Elle fait valoir que sa lettre du 8 juillet 2008 ne concernait que ses interrogations au sujet de la somme de 62.934,65 euros TTC et non la somme de 125.089,90 euros TTC. Elle précise avoir mis en demeure la société Faure Ingéniérie de respecter ses obligations vis à vis de son sous-traitant à travers deux lettres des 8 juillet 2008 et 6 octobre 2008.

L'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 dispose :

pour les contrats de travaux de bâtiments, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ses obligations.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la SAS Hervé Thermique a été agréée par la SAS

Beaufour-Ipsen Industrie le 4 décembre 2007 dans le cadre du marché initial passé le 25 mai 2007 entre ce maître de l'ouvrage et la société Validapro, objet d'un premier accord de sous-traitance le 27 septembre 2007 avec la société Faure Ingéniérie.

Il est également établi par les pièces versées aux débats que la société Faure Ingéniérie a adressé à la SAS Hervé Thermique 11 bons de commande supplémentaires entre le 16 octobre 2007 et le 15 avril 2008.

Pour autant, il n'est pas justifié que tant la société Validapro que la SAS Beaufour- Ipsen Industrie ont eu connaissance de ces commandes alors qu'il est bien précisé dans la demande d'autorisation de sous-traiter : 'en cas d'augmentation du montant sous-traité, je m'oblige à en informer le maître d'ouvrage' et dans le contrat initial que les travaux supplémentaires devront faire l'objet d'un avenant.

Aucun des devis établis par la SAS Hervé Thermique, tant pour le marché initial que les bons de commande de la société Faure Ingéniérie, n'est versé aux débats ; pas plus que les comptes rendus de chantier.

Sur le bon de commande référencé BC/MCT/MPA/80163, il est précisé qu'il s'agit de :

' travaux complémentaires au marché de base suite aux demandes exprimées par Faure et Validapro lors de la réunion du 8 avril 2008" mais aucun document concernant cette réunion n'est produit et rien n'indique que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie y a participé. La cour se trouve donc dans l'impossibilité de comparer l'évolution des différentes prestations réalisées. Elle ne peut pas par exemple s'assurer que la commande directement par le maître d'ouvrage le 28 juillet 2008 de la modification d'un drain contaminé correspond au même drain LAV 02 commandé par la société Faure Ingéniérie le 28 mars 2008 ou s'il s'agit d'un autre drain, objet de la commande initiale, le procès-verbal de réception employant le pluriel et parlant des drains contaminés.

La SAS Hervé Thermique déduit, de la lettre du 8 juillet 2008, la connaissance par le maître de l'ouvrage de sa présence sur le chantier pour réaliser les travaux supplémentaires.

Toutefois, cette lettre rédigée par la SAS Beaufour-Ipsen Industrie et adressée à la société Faure Ingéniérie ne vise que la somme de 62.934,65 euros HT, qui correspondant au marché initial a été garantie par la caution bancaire, et non la somme de 125.089,80 euros correspondant aux travaux supplémentaires.

Le fait que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie ait, à travers cet écrit, mis en demeure la

société Faure Ingéniérie de respecter ses obligations légales vis à vis de son sous-traitant ne permet pas à lui seul de déduire qu'elle avait connaissance de la réalisation de ces travaux supplémentaires.

Enfin, la cour constate que la lettre de la SAS Hervé Thermique qui a donné lieu en réponse à la lettre du 8 juillet 2008 n'est pas produite, ce qui limite les possibilités d'interprétation de la réaction de la SAS Beaufour-Ipsen Industrie.

Par ailleurs, il est démontré que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie entre le 30 juillet 2008 et le 28 octobre 2008 a commandé directement des travaux à la SAS Hervé Thermique au titre de la levée des réserves et l'établissement des DOE. Pour autant, les documents produits ne démontrent pas que cette levée des réserves concernait également les travaux supplémentaires demandés par la société Faure Ingéniérie.

En effet, ainsi qu'il ressort de la lecture des devis rédigés à partir du 28 juillet 2008, les mentions 'devis complémentaire' sur le devis n° 337801-1 de la SAS Hervé Thermique en date du 1er septembre 2008 correspondent aux travaux directement commandés par la SAS Beaufour-Ipsen Industrie et pas aux travaux supplémentaires commandés antérieurement au 15 avril 2008 par la société Faure Ingéniérie. Il en est notamment ainsi pour l'installation d'une

ligne d'air comprimé sur le local 27 du bâtiment, objet d'un devis complémentaire du 9 septembre 2008. Il convient d'ailleurs de préciser que les bons de commande de la société Faure Ingéniérie n'étant pas accompagnés des devis correspondant, la cour ne peut pas savoir d'une part s'ils portaient sur cette ligne d'air comprimé, d'autre part si elle n'était pas déjà prévue dans le devis initial de 2007.

Dans ces conditions, le fait que le montant global de ce devis corresponde aux 10 % restant dus par la société Faure Ingéniérie ne saurait à lui seul démontrer que la levée des réserves concernait également les travaux supplémentaires commandés par cette société et que le maître de l'ouvrage en avait connaissance.

Les mises en demeure adressées par la SAS Beaufour-Ipsen Industrie à la société Faure Ingéniérie et à la société Validapro le 20 octobre 2008, compte tenu de leurs termes dubitatifs, ne permettent pas non plus de déduire cette connaissance en ce qu'elle indique 'merci de nous dire ce que nous devons à Hervé Thermique' et précise à cette société dans une lettre du même jour 'il faut que votre créance soit certaine'.

Enfin, en l'absence de production du devis initial n°233941-4 du 10 septembre 2007, la cour n'est pas en mesure d'apprécier l'ampleur des travaux supplémentaires réalisés par la SAS Hervé Thermique à la demande de la société Faure Ingéniérie et d'en déduire que la SAS Beaufour-Ipsen Industrie ne pouvait pas les ignorer.

Il découle de l'ensemble de ces éléments, que la SAS Hervé Thermique est défaillante dans sa démonstration d'une faute commise par la SAS Beaufour-Ipsen Industrie. En conséquence, il y a lieu de la débouter de l'ensemble de ses demandes.

2°) Les demandes de la SAS Beaufour-Ipsen Industrie

La SAS Beaufour-Ipsen Industrie ne démontrant pas en quoi l'action de la SAS Hervé

Thermique a dégénéré en abus de droit, il y a lieu de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Il est équitable de condamner la SAS Hervé Thermique à verser à la SAS Beaufour- Ipsen Industrie la somme de 5.000,00 euros en application de l'article 700 code de procédure civile.

La SAS Hervé Thermique succombant en ses demandes, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant contradictoirement, dans les limites de la cassation intervenue ;

Confirme le jugement rendu le 11 octobre 2011 par le tribunal de commerce de Chartres ;

y ajoutant ;

Déboute la SAS Hervé Thermique de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne la SAS Hervé Thermique à verser à la SAS Beaufour-Ipsen Industrie la somme de 5.000,00 euros en application de l'article 700 code de procédure civile ;

Déboute la SAS Beaufour-Ipsen Industrie du surplus de ses demandes ;

Condamne la SAS Hervé Thermique aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Michèle TIMBERT, Président et par Madame MULOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 15/02081
Date de la décision : 09/05/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 04, arrêt n°15/02081 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-09;15.02081 ?
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