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24/03/2016 | FRANCE | N°15/04307

France | France, Cour d'appel de Versailles, 18èmechambre, 24 mars 2016, 15/04307


No
du 24 mars 2016
18èmeCHAMBRE
RG : 15/ 04307
X... Y... José

COUR D'APPEL DE VERSAILLES
ARRÊT SUR APPEL D'UNE DÉCISION DU JUGE DE L'APPLICATION DES PEINES
Arrêt prononcé en chambre du conseil par Madame DUNO, Président de la chambre de l'application des peines, assistée de Madame MOLINIER, greffier,

en présence du Ministère Public,

rendu le VINGT QUATRE MARS DEUX MILLE SEIZE,
par la 18ème chambre de la Cour,

sur appel d'un jugement du juge de l'application des peines de PONTOISE en date du 06 octobre 2015.

POURVOI

:
COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt,

PRÉSIDENT : Madame DUNO...

No
du 24 mars 2016
18èmeCHAMBRE
RG : 15/ 04307
X... Y... José

COUR D'APPEL DE VERSAILLES
ARRÊT SUR APPEL D'UNE DÉCISION DU JUGE DE L'APPLICATION DES PEINES
Arrêt prononcé en chambre du conseil par Madame DUNO, Président de la chambre de l'application des peines, assistée de Madame MOLINIER, greffier,

en présence du Ministère Public,

rendu le VINGT QUATRE MARS DEUX MILLE SEIZE,
par la 18ème chambre de la Cour,

sur appel d'un jugement du juge de l'application des peines de PONTOISE en date du 06 octobre 2015.

POURVOI :
COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt,

PRÉSIDENT : Madame DUNO,

CONSEILLERS : Monsieur PRESSENSE,
Monsieur GUICHAOUA,
DÉCISION :
voir dispositif
Tous trois désignés par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de VERSAILLES, après avis de l'assemblée générale des magistrats du siège.

MINISTÈRE PUBLIC : Madame KAN, Avocat Général, lors des débats,

GREFFIER : Madame MOLINIER,

PARTIE EN CAUSE

-X... Y... José

fils de : Y... Joao José
et de : X... Maria Augusta
Né : le 17 avril 1969 à VAL DE SENHORA DA POVOA (PORTUGAL)
Domicile déclaré : ...
Profession : Sans profession ; nationalité : française ; situation familiale : séparé ;

Déjà condamné, ... ;

Non comparant, représenté par Maître KAZI-TANI Dominique, avocat au barreau de VERSAILLES, commis d'office.

Vu les articles 712-11, 712-13 du code de procédure pénale ;

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

Par décision du 6 octobre 2015, notifiée au condamné le 6 octobre 2015, le juge de l'application des peines de PONTOISE a :

- Rejeté la demande d'aménagement de peine tendant à l'octroi d'une libération conditionnelle ;

- Rappelé que la décision était assortie de plein droit de l'exécution provisoire.

Appel a été interjeté par :

- X... Y... José le 8 octobre 2015, par déclaration au greffe de la Maison d'arrêt d'OSNY, enregistré le 5 novembre 2015 au greffe de l'application des peines du tribunal de grande instance de PONTOISE.

Ont été régulièrement avisés de la date de l'audience :

- X... Y... José, le 28 janvier 2016 par télécopie au directeur de la maison d'arrêt d'OSNY, reçu notification le 1er février 2016 ;

- Maître KAZI-TANI, le 2 février 2016 par lettre recommandée avec avis de réception, signé le 4 février 2016.

DÉROULEMENT DES DÉBATS

A l'audience en chambre du conseil du 10 mars 2016,

Ont été entendus :

Monsieur GUICHAOUA, conseiller, en son rapport,

Madame KAN, Avocat Général, en ses réquisitions,

Maître KAZI-TANI, avocat du condamné, en ses observations,

Madame le Président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait rendu à l'audience du 24 mars 2016, conformément à l'article 462 du Code de procédure pénale.

DÉCISION

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la Loi, jugeant en chambre du conseil, a rendu l'arrêt suivant :

Par jugement en date du 6 octobre 2015, le juge de l'application des peines de Pontoise a rejeté une requête établie le 30 janvier 2015 par M. José Luis X... Y... aux fins d'octroi d'une mesure de libération conditionnelle.

La décision a été notifiée à l'intéressé le 6 octobre 2015 par l'intermédiaire du greffe de la maison d'arrêt d'OSNY ou il est détenu. Le 8 octobre 2015, M. X... Y... a déclaré interjeter appel du jugement. Le recours est recevable.

Le 1er février 2016, M. X... Y... a eu connaissance de la date de l'audience de la cour. L'avocat commis d'office qu'il avait sollicité pour l'assister ou le représenter a été désigné et convoqué par courrier recommandé en date du 2 février 2016. L'accusé de réception a été signé le 4 février 2016.

En vue de l'audience de la cour, M. X... Y... a adressé des observations. Il était représenté par son avocat lors de l'audience.

* * * * *

Situation pénale :

M. José Luis X... Y... a été écroué le 12 février 2010 à la maison d'arrêt du Val-d'Oise. Il a été condamné par arrêt de la cour d'assises du Val-d'Oise rendu le 16 mai 2012 à une peine de 10 ans de réclusion criminelle pour des faits de tentative d'assassinat.

À la date de la fiche pénale établie le 28 janvier 2016, M. X... Y... était libérable le 8 février 2017. Il avait fait l'objet d'une période de sûreté dont le terme était acquis depuis le 12 février 2015.

Situation personnelle :

M. José Luis X... Y... est né le 17 avril 1969 au Portugal. Il est de nationalité portugaise est arrivé sur le territoire français au mois d'avril 2002. Il s'est séparé de son épouse depuis l'année 2007. Le divorce a été prononcé en 2012. De son union sont nés 3 enfants âgés de 22 ans, 20 ans, et 8 ans. La victime du crime pour lequel M. X... Y... a été condamné était le nouveau compagnon de son épouse. Cette dernière lui avait rendu visite en début d'incarcération mais avait ensuite cessé.

Le condamné entretient des relations épistolaires avec ses enfants mais il a des contacts réduits avec eux.

Avant son incarcération, M. X... Y... travaillait en tant que chauffeur dans les travaux publics. Il aurait donné satisfaction à son employeur qui aurait décidé de lui conserver son emploi. Avant sa détention, il était hébergé par son employeur qui maintiendrait également cette possibilité.

L'employeur du condamné serait titulaire d'un permis de visite et représenterait un soutien important.

Le bulletin numéro un du casier judiciaire de M. X... Y... comporte les mentions de 2 condamnations, la plus récente étend celle de tentative d'assassinat prononcé le 16 mai 2012

Éléments de personnalité :

Le 17 mai 2014, M. José Luis X... Y... a fait l'objet d'une expertise psychiatrique ordonnée par le juge de l'application des peines. Le médecin désigné avait noté dans son rapport que le condamné ne présentait pas d'anomalies mentales ou psychiques, il avait évolué depuis son incarcération et il reconnaissait la gravité des faits qui lui avaient été reprochés. Il n'était noté aucune dangerosité d'ordre psychiatrique, un suivi psychiatrique était jugé utile au moment de l'examen et nécessaire après la libération de l'intéressé, cette démarche lui permettant de mieux gérer sa propre histoire à condition qu'il y adhère. Il était toutefois noté que M. X... Y... n'était pas susceptible de faire l'objet d'un traitement.

Une expertise psychologique avait été réalisée durant l'instruction du dossier, le rapport avait été déposé le 21 septembre 2010. L'expert avait conclu que M. X... Y... était un sujet dont le niveau intellectuel se situait dans l'ordre de la moyenne sur un versant pragmatique davantage que verbal. La personnalité apparaissait mal structurée et immature chez un sujet abandonnique, voire proche d'un état limite avec angoisse de séparation, fragilité affective et narcissique et armature défensive réactionnelle assez rigide.

Les failles de sa structure psychique le montraient aussi particulièrement sensible à l'angoisse d'abandon, le renvoyant au vide, à la perte et aux risques paranoïde à valeur auto et/ ou hétéro agressive. Dans le déroulement des faits criminels, intervenaient des fragilités structurelles de la personnalité en prise avec un dysfonctionnement de couple. Il était recommandé d'entreprendre une démarche psychothérapeutique.

Éléments de la détention :

M. X... Y... ne parlerait pas le français bien qu'il le comprendrait et pour cette raison, il a suivi des cours de langue française entre le 25 mars 2010 et le 13 juillet 2010. Ces cours étend incompatible avec la pratique d'une activité professionnelle, il avait cessé de les suivre.

Il a été affecté en qualité de cuisinier depuis le 10 juin 2010. Il conserverait cette activité et il apporterait satisfaction.

Il est noté au dossier que M. X... Y... a été condamné à payer à titre de dommages-intérêts une somme de 15   584, 10 euros. Il effectuerait chaque mois des versements de 30 € volontairement et à la date du rapport (14 septembre 2015), il aurait payé 3458, 27 euros.

Il est noté en outre que M. X... Y... aurait versé 400 € à l'extérieur, sur son compte bancaire, afin d'honorer des mensualités de crédit souscrit au moment du mariage. Toutefois, il est noté aussi que M. X... Y... ferait l'objet de poursuites afin de rembourser un crédit qu'il a nié avoir souscrit et que son épouse aurait pris en son nom.

Le condamné n'aurait jamais fait l'objet de procédures disciplinaires en détention.

À la demande du juge de l'application des peines, M. X... Y... sollicitait une prise en charge thérapeutique, toutefois, le travailleur social notait qu'en raison des difficultés à communiquer le service médical s'interrogeait sur la pertinence de ce suivi. Sur les conseils du service pénitentiaire d'insertion et de probation, le condamné avait à nouveau pris des cours de français en complément de son travail depuis le 1er décembre 2014 et jusqu'aux vacances scolaires. Il s'était inscrit à nouveau à la rentrée du mois de septembre 2015.

M. X... Y... a bénéficié de 3 permissions de sortir dans le cadre du maintien des liens familiaux. Il s'est ainsi rendu au domicile de son frère de sa belle- sœur. Aucun incident n'a été relevé.

Projet d'aménagement de peine :

Dans le cadre de la demande d'aménagement de peine qu'il avait formulée, M. X... Y... avait proposé de reprendre son activité professionnelle de chauffeur en travaux publics au sein de la société «   EXPRESS LBTP   » dont le siège social est situé 63 rue du golfe à ORMESSON sur Marne dans le Val-de-Marne. Pour autant, l'essentiel de l'activité se situerait à Gretz, Armainvilliers (77).

Outre l'emploi, l'employeur du condamné a confirmé au travailleur social du service pénitentiaire d'insertion et de probation avoir maintenu la possibilité d'hébergement dont le condamné avait déjà bénéficié, il s'agissait d'un pavillon mis à la disposition de plusieurs salariés, à titre gracieux, situé chemin des Vignolles à Gretz, Armainvilliers (77).

Dans le cadre du projet proposé, un contrat de travail du condamné était produit, il avait été signé le 18 avril 2008. Une attestation signée par le gérant de la société le 14 septembre 2015 était jointe au dossier confirmant son intention de reprendre M. X... Y... dès sa sortie dans son poste de chauffeur poids-lourds/ super lourds.

Un extrait K bis de la société été joint au dossier. le dirigeant de l'entreprise étant celui qui avait rédigé l'attestation de reprise d'activité du condamné. En outre, par une note du 14 septembre 2015 la possibilité d'hébergement mentionnée par le conseiller d'insertion et de probation était confirmée.

Avis :

Au terme du bilan effectué par le conseiller d'insertion et de probation, ce dernier se disait favorable à la requête en aménagement de peine présentée par M. X... Y.... La période d'incarcération étant longue, il semblait opportun que le condamné puisse bénéficier d'un aménagement de peine afin de lui permettre de se réadapter à la vie en société. Par ailleurs, il pourrait bénéficier du soutien de son employeur qui s'était montré présent depuis le début de l'incarcération. L'emploi dont disposerait M. X... Y... était jugé peu compatible avec un aménagement de peine très cadrant. Néanmoins, compte tenu de son attitude en détention et durant les permissions de sortir, il était noté que l'intéressé était en capacité de respecter le cadre imposé par une décision de justice.

Éléments du débat contradictoire :

Lors du débat contradictoire qui s'est tenu le 22 septembre 2015, M. X... Y... a comparu assisté par un interprète. Il a précisé que dans le cadre de son activité, il pouvait être amené à ce rendre soit dans la région de Lille soit rester en région parisienne. Il a déclaré être d'accord pour être placé en surveillance électronique mais en indiquant toutefois qu'il rencontrerait alors des problèmes avec ses horaires d'activité. Il était parfois amené à travailler de nuit. Concernant les faits, il a déclaré qu'ils s'étaient produits à la période de la mort de son père, il aurait eu des menaces et c'est pour cette raison qu'il aurait «   dérapé   ». Il a soutenu qu'il était passé à l'acte car la victime l'aurait menacé de mort. Il n'avait pas porté plainte pour ces faits de menaces en raison d'autres plaintes. Concernant des crédits que son épouse aurait souscrits à son nom, il disait être en attente d'une réponse du tribunal devant intervenir la semaine suivant de débat contradictoire. Il déclarait que sa femme signait fréquemment à sa place ou faisait régulièrement des faux documents.

Entendu, le ministère public avait requis en indiquant qu'il ne s'opposait pas à un ajournement de l'examen du dossier pour démontrer que le condamné effectue des efforts de suivi psychologique. L'avocat qui assistait M. X... Y... lors de l'audience avait ensuite eu la parole au soutien de la demande de son client.

Éléments de la décision du juge de l'application des peines :

Dans son jugement dont appel, le juge de l'application des peines a retenu que M. José Luis X... Y... adoptait un comportement irréprochable en détention, il n'avait pas encore effectué un travail thérapeutique nécessaire afin de comprendre et de prévenir tout nouveau passage à l'acte.

M. X... Y... aurait persisté à se contenter de dire qu'il avait commis les faits suite à des menaces alors même qu'il n'avait pas contesté au moment de l'instruction avoir également envisagé de tuer sa femme. La juridiction a par ailleurs relevé qu'interrogé sur son antécédent judiciaire, et alors qu'il avait été condamné pour des faits d'homicide involontaire auparavant, il se contentait d'évoquer un accident de circulation dans le cadre de son activité professionnelle. Si M. X... Y... reconnaissait avoir des difficultés à exprimer ses émotions tant en français qu'en portugais, il mettrait ses difficultés sur le compte d'un faible niveau scolaire alors que l'expertise psychologique aurait mis en évidence un niveau intellectuel situé dans la moyenne. Ces éléments étaient mis en perspective avec la situation conflictuelle qui existait encore avec son ex-épouse laissant craindre un nouveau passage à l'acte violent en l'absence de réflexion approfondie sur les faits pour lesquels il avait été condamné. En outre, M. X... Y... sollicitait une libération conditionnelle qui ne permettrait pas de l'encadrer strictement à sa libération. Dès lors, eu égards à la gravité des faits et au manque de travail de réflexion effectuée sur ces derniers, en l'état, le juge de l'application des peines rejetait la demande d'aménagement de peine dont il était saisi.

Observations du condamné pour l'instance d'appel :

En vue de l'audience de la cour, le 2 février 2016, M. X... Y... a adressé des observations en référence à l'article D 49-41 du code de procédure pénale. Il soulignait qu'il présentait des garanties de réinsertion car son ancien employeur lui conservait un poste dans son entreprise et par ailleurs, il lui assurait aussi un logement. Il était en outre indiqué que le contentieux avec son ex-épouse suivait une procédure civile ordinaire et tenait à sa responsabilité dans un emprunt fait en son nom et durant son incarcération mais il réfutait le risque de récidive à ce propos.

Enfin, il indiquait ne pas avoir pu suivre dans de bonnes conditions les soins d'un psychologue dans la mesure où ils ne s'exprimaient que très difficilement français. Le courrier qu'il adressait à la cour avait été écrit par une autre personne. Il disait joindre des documents concernant le problème civil qu'il rencontrait. Son avocat, a par ailleurs adressé à la cour les documents en cause.

* * * * *

Lors de l'audience, le ministère public a requis la confirmation du jugement entrepris.

En défense, l'avocat du condamné a fait valoir que son client connaissait des problèmes de maîtrise de la langue française et cette situation l'avait gêné dans la mise en œuvre de soins psychologiques en détention. Toutefois, il était noté que des soins pouvaient être effectués à l'extérieur en langue portugaise. En tout état de cause, il était relevé que le dossier permettait de considérer que la dangerosité psychologique de M. X... Y... était nulle, sa dangerosité criminologique serait faible et son évolution depuis son incarcération serait manifestement positive.

Le conseil du condamné a relevé que son client était soutenu par son employeur qui venait notamment le rencontrer en détention. Dans ce cadre, le projet présenterait des garanties importantes de réinsertion tant en ce qui concerne l'emploi que pour l'hébergement qui se situait à distance de celui de l'ex-épouse de M. X... Y.... Son avocat insistait encore sur l'évolution jugée très positive du parcours effectué en détention. Il était ainsi demandé l'infirmation du jugement et l'octroi de la libération conditionnelle qui avait déjà été sollicitée.

* * * * *

Sur la procédure :

Considérant que la loi no 2011-939 du 10 août 2011 a créé l'article 730-2 du code de procédure pénale qui prévoit dans sa rédaction actuelle issue d'une loi du 15 août 2014 que lorsque la personne ayant déposé une requête en libération conditionnelle a été comme en l'espèce condamnée soit à une peine d'emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à dix ans pour une infraction mentionnée à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, la libération conditionnelle ne peut alors être accordée :

1o) Que par le tribunal de l'application des peines, quelle que soit la durée de la détention restant à subir ;

2o) Qu'après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d'une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l'observation des personnes détenues et assortie d'une expertise médicale ; s'il s'agit d'un crime mentionné au même article 706-53-13, cette expertise est réalisée soit par deux experts médecins psychiatres, soit par un expert médecin psychiatre et par un expert psychologue titulaire d'un diplôme, certificat ou titre sanctionnant une formation universitaire fondamentale et appliquée en psychopathologie ;

Considérant que l'article 706-53-13 du code de procédure pénale comporte notamment la mention du crime d'assassinat auquel la tentative est assimilée en matière de répression ;

Considérant que l'article 112-1 du code pénal prévoit que sont notamment applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur, les lois relatives au régime d'exécution et d'application des peines ; toutefois, ces lois, lorsqu'elles ont pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la décision de condamnation, ne sont applicables qu'aux condamnations prononcées pour des faits commis postérieurement à leur entrée en vigueur ;

Considérant que les faits pour lesquels M. X... Y... a été condamné ont été commis avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 730-2 du code de procédure pénale ; que l'application du texte rajoute des formalités plus lourdes à l'examen d'une demande de libération conditionnelle et a pour résultant de rendre plus sévère les peines prononcées par la décision de condamnation et dés lors, les dispositions prévues par le texte en cause ne sont pas applicables au cas d'espèce et c'est donc à juste titre que le juge de l'application des peines a pu statuer ;

Sur le fond :

Considérant que l'article 707 du code de procédure pénale dispose que le régime d'exécution des peines privatives et restrictives de liberté vise à préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne condamnée afin de lui permettre d'agir en personne responsable, respectueuse des règles et des intérêts de la société et d'éviter la commission de nouvelles infractions ;

Que ce régime est adapté au fur et à mesure de l'exécution de la peine, en fonction de l'évolution de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale de la personne condamnée, qui font l'objet d'évaluations régulières ;

Considérant que le texte prévoit en outre que toute personne condamnée incarcérée en exécution d'une peine privative de liberté bénéficie, chaque fois que cela est possible, d'un retour progressif à la liberté en tenant compte des conditions matérielles de détention et du taux d'occupation de l'établissement pénitentiaire, dans le cadre d'une mesure de semi-liberté, de placement à l'extérieur, de placement sous surveillance électronique, de libération conditionnelle ou d'une libération sous contrainte, afin d'éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire ;

Considérant que pour l'examen de la demande d'aménagement de peine soutenue en l'espèce, il faut noter qu'aux termes de l'article 729 du code de procédure pénale, la libération conditionnelle tend à la réinsertion des condamnés et à la prévention de la récidive ; Que les condamnés ayant à subir une ou plusieurs peines privatives de liberté peuvent bénéficier d'une libération conditionnelle s'ils manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale et lorsqu'ils justifient :

1o) Soit de l'exercice d'une activité professionnelle, d'un stage ou d'un emploi temporaire ou de leur assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle ;
2o) Soit de leur participation essentielle à la vie de leur famille ;
3o) Soit de la nécessité de suivre un traitement médical ;
4o) Soit de leurs efforts en vue d'indemniser leurs victimes ;
5o) Soit de leur implication dans tout autre projet sérieux d'insertion ou de réinsertion ;

Que sous réserve des dispositions concernant une mesure de sûreté qui a pris fin en l'espèce depuis le 12 février 2015, la libération conditionnelle peut être accordée lorsque la durée de la peine accomplie par le condamné est au moins égale à la durée de la peine lui restant à subir ;

Considérant qu'étant libérable le 08 février 2017, M. X... Y... a purgé un temps de détention supérieur à la durée lui restant à subir et sa demande de libération conditionnelle est dés lors recevable ;

Considérant que pour apprécier la demande d'aménagement de peine qui avait été formulée, il convient en premier lieu de relever que durant sa détention commencée le 12 février 2010, M. X... Y... a pu travailler de façon jugée satisfaisante mais il a aussi suivi des cours de Français ;

Considérant qu'il occupe depuis une longue période un poste de travail en détention montrant ainsi sa détermination à ne pas rester oisif en détention ;

Considérant que M. X... Y... n'a pas fait l'objet de rapports disciplinaires, il n'a pas fait l'objet de retrait de crédit de réduction de peine et il a bénéficié de réductions supplémentaires de peines octroyées régulièrement par le juge de l'application des peines en application de l'article 721-1 du code de procédure pénale selon le critère d'effort de réadaptation sociale ;

Considérant qu'en ce qui concerne le paiement des dommages et intérêts dus à la suite de sa condamnation, le dossier montre qu'il a effectué des versements notables puisque le montant payé à la date du débat devant le premier juge s'élevait à 3 458, 27 euros sur une somme totale de 15 584, 10 euros ;

Considérant que la cour doit noter que si l'intéressé n'a pas suivi régulièrement de soins psychologiques, il était précisé que le fait que M. X... Y... ne maitrise pas correctement le Français rendait sa prise en charge psychologique difficile ; que toutefois, le conseiller d'insertion lui avait demandé de reprendre des cours ce qu'il avait fait en plus de son travail en détention, montrant ainsi de nouveaux efforts dans le but notamment de faciliter sa prise en charge psychologique ;

Considérant qu'il est rapporté en procédure que le condamné a bénéficié de trois permissions de sortir dont le déroulement n'a pas fait l'objet de remarque défavorable ;

Considérant par ailleurs que la demande d'aménagement de peine sollicitée doit aussi être examinée en fonction des garanties offertes par le projet d'insertion proposé par le condamné ;

Considérant qu'à ce titre, il est justifié que l'employeur de M. X... Y... a maintenu ce dernier dans son emploi et qu'il a aussi proposé de l'héberger dans les conditions indiquées plus haut ;

Considérant que cet hébergement se trouve a distance du domicile de l'épouse du condamné avec laquelle il aurait un litige financier ;

Considérant par ailleurs qu'il faut souligner que l'engagement de l'employeur du condamné peut être constaté dans la durée puisqu'il a été maintenu depuis plusieurs années et l'employeur est aussi venu rencontrer M. X... Y... en détention ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'appréciation de la dangerosité actuelle du condamné, la cour doit observer qu'entre l'expertise psychologique dont le rapport avait été déposé le 21 septembre 2010 et l'expertise psychiatrique réalisée le 17 mai 2014, l'évolution de M. X... Y... est manifeste et le dernier expert a noté cette dernière en écartant un éventuel trouble psychique ou une dangerosité psychiatrique même si un suivi était préconisé au moment de la libération afin que l'intéressé gère mieux sa propre histoire ;

Considérant qu'au vu de ces éléments, la cour doit relever l'existence de réels efforts et gages de réadaptation sociale fournis par M. X... Y... en détention mais aussi au travers des éléments de son projet d'aménagement de peine ;

Considérant dés lors que s'il peut subsister un différend civil entre M. X... Y... et son épouse, ce dernier n'apparaît pas devoir remettre en cause l'octroi d'une mesure d'aménagement de peine alors que le condamné se rapproche de la fin de l'exécution de sa condamnation et qu'il peut encore bénéficier d'une insertion de qualité qui constitue un gage important de prévention de la récidive, un mesure de suivi post-pénal permettant de s'assurer de la poursuite des efforts entrepris ;

Considérant dés lors que la cour estime qu'il convient d'octroyer à M. X... Y... l'aménagement de peine qu'il a sollicité et elle infirmera le jugement déféré en ce sens en prévoyant, outre l'application des obligations générales prévues par l'article 132-44 du code pénal, que le condamné sera aussi astreint au respect des obligations suivantes tirées de l'article 132-45 du même code : une obligation de travail ou de formation, celle de poursuivre le versement des sommes dues à titre civil à la suite de la condamnation et une interdiction de tout contact avec la victime ;

Qu'en outre M. X... Y... devra obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout déplacement à l'étranger (art 132-45-21 du code pénal) et pour tout changement de résidence (D. 534 du code de procédure pénale) ;

Considérant par ailleurs que l'article 731-1 du code pénal dans sa rédaction issue de la loi no2004-204 du 9 mars 2004 en vigueur le 1er janvier 2005 prévoit que sauf décision contraire du juge de l'application des peines ou du tribunal de l'application des peines, un condamné placé en liberté conditionnelle est soumis à une injonction de soins dans les conditions prévues aux articles L. 3711-1 et suivants du code de la santé publique s'il est établi, après l'expertise prévue à l'article 712-21 du code de procédure pénale, qu'il est susceptible de faire l'objet d'un traitement ;

Considérant que M. X... Y... a été condamné pour tentative d'assassinat, l'article 221-9-1 du code pénal dans sa rédaction issue de la loi no2005-1549 du 12 décembre 2005 dispose que les personnes physiques coupables des crimes prévus par la section 1 du chapitre du code pénale concernant les atteintes à la vie encourent également le suivi socio-judiciaire ;

Considérant qu'en l'espèce, l'expertise psychiatrique qui avait été ordonnée par le juge de l'application des peines a conclu à la nécessité d'un suivi psychiatrique du condamné notamment au moment de sa libération et dés lors, celui-ci sera soumis à l'injonction de soins prévue par l'article 731-1 du code de procédure pénale ;

Considérant par ailleurs qu'afin de s'assurer du respect du cadre de la mesure et du maintien de l'évolution favorable du condamné, la cour fera application des dispositions de l'article 732 du code de procédure pénale et elle prolongera d'une année l'application des mesures de contrôle de la liberté conditionnelle qu'elle décide ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt rendu en chambre du conseil,

Vu les articles 712-11, 712-13, 729 et suivants, 732 du code de procédure pénale ;

En la forme,

Déclare l'appel recevable,

Au fond,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau ;

Dit que Jose Luis X... Y... est admis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 1er avril 2016 jusqu'au 08 février 2018, le délai comprenant la prolongation de la durée des mesures de contrôle ;

Fixe la résidence du condamné : Chemin des Vignolles à GRETZ ARMAINVILLIERS (77) ;

Dit que dans le cadre de sa mesure de liberté conditionnelle, M. X... Y... devra respecter les obligations suivantes   :

• Obtenir l'autorisation du juge de l'application pour tout changement de résidence prévue par l'article D. 534 du code de procédure pénale ;

• Répondre aux convocations du juge de l'application des peines ou du travailleur social désigné ;

• Recevoir les visites du travailleur social et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d'existence et de l'exécution de ses obligations ;
• Prévenir le travailleur social de ses changements d'emploi ;

• Prévenir le travailleur social de ses changements de résidence ou de tout déplacement dont la durée excéderait quinze jours et rendre compte de son retour ;

• Obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout changement d'emploi ou de résidence, lorsque ce changement est de nature à mettre obstacle à l'exécution de ses obligations ;

• Informer préalablement le juge de l'application des peines de tout déplacement à l'étranger

Dit que le maintien de la libération conditionnelle est en outre soumis au respect des obligations particulières suivantes   :

• Exercer une activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation professionnelle ;

• Établir sa résidence en un lieu déterminé ;

• Réparer en tout ou partie, en fonction de ses capacités contributives, les dommages causés par l'infraction, même en l'absence de décision sur l'action civile ;

• S'abstenir d'entrer en relation avec la victime du crime pour lequel l'intéressé a été condamné ;

•- Obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout déplacement à l'étranger ;

Dit que M. Jose Luis X... Y... sera par ailleurs soumis à une injonction de soins en application de l'article 731-1 du code de procédure pénale ;

Dit que ces mesures seront mises en œuvre par le juge de l'application des peines du Tribunal de Grande Instance de Melun territorialement compétent en application de l'article 712-10 du code pénal.

Et ont signé le présent arrêt Madame DUNO, Président, et Madame MOLINIER, greffier.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Le 24 mars 2016 :

- Notifié à :
* l'intéressé par LRAR
(Reçu notification le)
* l'intéressé par le chef de l'établissement pénitentiaire
(Reçu notification le)
* son avocat par télécopie ou LRAR
* M. Le procureur général

-Avis à : * JAP
* SPIP
* chef de l'établissement pénitentiaire

La présente décision est susceptible de pourvoi non suspensif au greffe pénal de la Cour d'appel de VERSAILLES, dans les CINQ JOURS de la notification (art 712-15 CPP). La déclaration de pourvoi peut être faite par le demandeur en cassation, un avocat près la juridiction qui a statué, ou un fondé de pouvoir spécial.
Lorsque le demandeur est détenu, le pourvoi doit être formé au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 18èmechambre
Numéro d'arrêt : 15/04307
Date de la décision : 24/03/2016

Analyses

Arrêt rendu le 24 mars 2016 par la 18ème chambre de l'application des peines de la Cour d'appel de Versailles RG 15/04307 L'article 112-1 du code pénal prévoit que sont notamment applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur, les lois relatives au régime d'exécution et d'application des peines. Toutefois, ces lois, lorsqu'elles ont pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la décision de condamnation, ne sont applicables qu'aux condamnations prononcées pour des faits commis postérieurement à leur entrée en vigueur. La cour relève que les faits pour lesquels l'appelant a été condamné ont été commis avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 730-2 du code de procédure pénale créé par la loi nº 2011-939 du 10 août 2011 dans sa rédaction actuelle issue d'une loi du 15 août 2014 lequel rajoute des formalités plus lourdes à l'examen d'une demande de libération conditionnelle et a pour résultat de rendre plus sévère les peines prononcées par la décision de condamnation de sorte que les dispositions prévues par le texte en cause ne sont pas applicables au cas d'espèce.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2016-03-24;15.04307 ?
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