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19/01/2016 | FRANCE | N°12/07776

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 19 janvier 2016, 12/07776


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



AP

Code nac : 55B



12e chambre section 2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 JANVIER 2016



R.G. N° 12/07776



AFFAIRE :



Société DHL FREIGHT FRANCE





C/

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS) Société de droit belge











Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 11 Octobre 2012 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre : <

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N° Section :

N° RG : 2010F00693



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Mélina PEDROLETTI

-Me Patricia MINAULT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE S...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

AP

Code nac : 55B

12e chambre section 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2016

R.G. N° 12/07776

AFFAIRE :

Société DHL FREIGHT FRANCE

C/

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS) Société de droit belge

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 11 Octobre 2012 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2010F00693

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Mélina PEDROLETTI

-Me Patricia MINAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société DHL FREIGHT FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 00022008

Représentant : Me Jérôme DE SENTENAC de la SCP CONSTANT & CONSTANT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J044 -

substitué par Me DE SALINS

APPELANTE

****************

Société N.V. EUROPEAN CONTAINERS SERVICES (ECS) Société de droit belge

N° SIRET : 043 513 150 8

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20120830

Représentant : Me Hervé LAROQUE de la SCP LAROQUE ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0276 -

substitué par Me DUQUESNE

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Novembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,

Courant septembre 2000, la société Danzas a organisé un transport de médicaments des terrains d'exploitation de la société Parke Davis, groupe Pfizer, à [Localité 1] vers la Grande Bretagne.

La société Danzas a sous-traité à la société NV European Containers Services, ci 'après dénommée ECS, le transport du port de chargement vers l'Angleterre au lieu de livraison.

La société ECS a mandaté la société Don Valley Supplies pour réaliser le transport terminal.

Le chargement a été volé en Angleterre dans la nuit du 9 au 10 septembre alors qu'il était entreposé dans la cour de la société Don Valley.

Le 30 septembre 2000, la société Parke Davis a adressé à la société Danzas une note de débit de 44.320,20 euros ttc, 37.057,03 euros ht.

Le 22 novembre, la société Danzas a adressé à la société ECS une note de débit de 44.320,20 euros ttc, 37.057,03 euros ht.

Courant 2001 et 2002, la société Danzas a confié à la société ECS des prestations.

Le 7 mai 2002, la société Danzas a compensé leur montant avec la somme de 44.320,21 euros et payé la somme de 83.538,56 euros.

Par lettre du 27 juin 2002 adressée à la société Marsh, et envoyée par celle-ci à la société Danzas, la société ECS a contesté la compensation.

Par lettre du 9 avril 2003, adressée à la société ECS, la société Danzas a confirmé la compensation des factures émises par la société ECS avec la somme de 44.320,21 euros, déclaré avoir reçu la somme de 16.060,71$, proposé à la société ECS de la lui adresser pour clore le dossier mais indiqué que la différence entre la somme de 44.320,21 euros et celle de 16.080,71 $ devait rester à la charge de la société ECS.

Par courrier du 7 mai 2003 adressé à la société Atlantis, gestionnaire du sinistre, la société Danzas a déclaré être le lésé.

Le 20 mai 2003, elle a versé à la société ECS la somme de 14.747,18 euros au titre d'un « remboursement dossier litige assurance Stolen Cargo Don Valley ».

Par acte du 5 août 2003, la société ECS a fait assigner la société Danzas devant le tribunal de commerce de Bruges afin que la société soit condamnée à lui payer la somme principale de 29.578,08 euros correspondant aux factures impayées.

Par jugement du 13 septembre 2005, le tribunal s'est déclaré compétent mais a jugé que l'action était prescrite.

Par arrêt du 8 février 2007, la cour d'appel de Gand a annulé le jugement au motif que les juridictions belges n'étaient pas compétentes.

Par arrêt du 21 janvier 2010, la cour de cassation belge a rejeté le pourvoi de la société ECS.

Par actes des 4 août et 17 novembre 2010 et 2 janvier 2012, la société ECS a fait assigner les sociétés DHL Holding, DHL Global Forwarding et DHL Freight (France), venant aux droits de la société Danzas, devant le tribunal de commerce de Pontoise.

Par jugement du 11 octobre 2012, revêtu de l'exécution provisoire, le tribunal a mis hors de cause les sociétés DHL Holding et DHL Global Forwarding.

Il a rejeté les exceptions de nullité des assignations et la fin de non recevoir tirée de la prescription formées par la société DHL Freight.

Il a condamné la société DHL Freight à payer à la société ECS les sommes de 29.578,08 euros et de 2.478,97 euros outre intérêts au taux contractuel de 12% à compter du 5 août 2003, les intérêts étant capitalisés.

Il a condamné ladite société à payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 14 novembre 2012, la société DHL Freight France a interjeté appel.

Par arrêt du 18 février 2014, la cour a invité les parties à débattre de la responsabilité de la société ECS à l'égard de la société DHL Freight en qualité de commissionnaire de transport au sens de l'article 1 de la loi belge du 26 juin 1967 visé dans les conditions générales d'ECS et, en particulier, de rechercher si celle-ci est garante de ses substitués transporteurs ou si elle ne répond que de ses fautes personnelles afin de trancher le sort du solde de l'indemnité d'assurance de 29.578,08 euros réclamée de part et d'autre résultant du sinistre de vol survenu en Angleterre le 10 septembre 200 du chef d'un voiturier anglais substitué de la société ECS.

Elle a sursis à statuer sur les demandes.

Dans ses dernières écritures en date du 23 janvier 2015, la SAS DHL Freight (France), ci après dénommée DHL Freight, sollicite l'infirmation du jugement.

Elle invoque l'irrecevabilité des demandes, prescrites, et réclame la restitution de la somme de 101.468,70 euros.

Subsidiairement, elle conclut au rejet de la demande compte tenu de la dette de l'intimée et réclame la restitution de la somme de 101.468,70 euros.

Très subsidiairement, elle demande que l'indemnité mise à sa charge soit fixée à la somme de 29.578,08 euros et assortie des seuls intérêts légaux à compter du 2 janvier 2012, date de l'assignation, et, le cas échéant, que soit réduit le montant des intérêts prévus.

Elle réclame la restitution de la différence entre la somme versée et celle mise à sa charge.

A titre également subsidiaire, elle demande la condamnation de la société ECS à lui payer la somme de 35.792,47 euros.

Elle sollicite le paiement d'une somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société expose qu'en application de la garantie qui lui était due par son transporteur substitué, la société ECS, la société Danzas a réclamé à celle-ci la somme de 37.057,03 euros après déduction de la TVA et que la société ECS lui a indiqué, le 25 janvier 2001, qu'elle n'acceptait de l'indemniser qu'à hauteur des marchandises volées, 35.650,69 euros, dans la mesure où elle ne lui pas facturé le fret. Elle fait état de télécopies échangées entre la société Danzas, la société Atlantis, assureur de la société ECS, et la société ECS aux fins d'indemniser la société Danzas.

Elle indique que, parallèlement, la société Atlantis a mené des négociations avec la société Axa Insurance, assureur du transporteur Don Valley, et que la société Marsh a adressé à son assuré, la société Parke Davis, en septembre 2001 un chèque de règlement que celle-ci a refusé ayant déjà été indemnisée par l'assureur de la société Danzas.

Elle fait valoir que la société Danzas n'a, elle, jamais été indemnisée alors qu'elle a payé la société Parke Davis. Elle indique qu'elle a, alors, procédé le 7 mai 2002 à une compensation de la somme de 44.320,21 euros avec les factures que lui a adressées la société ECS. Elle précise que, compte tenu du paiement de la somme de 16.060,71 $ par la société We Cox, qui aurait dû adresser cette somme à la société Atlantis ou à la société ECS, elle a viré la somme de 14.742, 13 euros à la société ECS et refusé de payer la somme de 29.578,08 euros correspondant à la différence entre la note de débit et le règlement précité.

Elle rappelle la procédure.

Elle soutient que la responsabilité de la société ECS était engagée envers son donneur d'ordres, la société Danzas, qui était donc fondée à obtenir l'indemnisation de sa part.

Elle relève qu'aux termes de ses conditions générales, la société ECS s'engage « uniquement comme commissionnaire de transport au sens de l'article 1.1 de la loi du 26 juin 1967 », déclare qu'aux termes de cette loi, belge, le commissionnaire a un rôle similaire à celui du commissionnaire de droit français et indique qu'aux termes de l'article 38 de la loi, belge, du 3 mai 1999, celui-ci est assimilé à un transporteur en ce qui concerne sa responsabilité et ses obligations ce que confirment l'article 38.1 de la loi qui renvoie à la convention CMR du 19 mai 1956 et les conditions générales de la société ECS.

Elle en conclut que la société ECS doit être assimilée à un transporteur et que sa responsabilité doit être examinée à l'aune de la convention CMR signée le 19 mai 1956. Elle ajoute que, lors de la prise en charge du conteneur, la société ECS a émis une lettre de voiture stipulant que la convention CMR est applicable.

Elle se prévaut de l'article 3 de la convention CMR et en infère que la société ECS est garante de sa substituée soit de la société Don Valley.

Elle soutient également que sa responsabilité est engagée en qualité de premier transporteur routier. Elle affirme qu'elle a émis une lettre de voiture unique couvrant le transport de bout en bout et excipe de l'article 34 de la convention CMR aux termes duquel, si un contrat unique est exécuté par des transporteurs routiers successifs, chacun assume la responsabilité de l'exécution du transport total.

Elle en infère que la société ECS était garante du voiturier Don Valley.

Elle ajoute qu'après le sinistre, elle et ses assureurs n'ont pas contesté sa responsabilité et ont émis une offre de règlement au profit de la société Danzas.

En réponse à l'intimée, elle fait valoir que la qualité de commissionnaire expéditeur invoquée par elle n'est pas visée dans ses conditions générales aux termes desquelles elle s'engage « uniquement comme commissionnaire de transport » et qu'elle ne rapporte pas la preuve d'une dérogation. Elle lui fait également grief de ne pas démontrer qu'elle a sous-traité la première partie du trajet à un voiturier tiers.

A titre principal, l'appelante invoque la prescription annale des articles L 133-6 du code de commerce et/ou 32 de la convention CMR.

Elle déclare que la facture la plus récente date du 27 février 2002 et soutient que la compensation opérée par la société Danzas le 7 mai 2002 a entraîné une interruption de la prescription et non une inversion de ce délai dans la mesure où elle n'a pas émis de « promesse formelle » de s'acquitter de sa dette.

Elle fait valoir que son courrier du 9 avril 2003 ne constitue pas une reconnaissance du droit de la société ECS- qui interrompt la prescription- au motif qu'elle n'a pas annoncé le règlement du solde de 44.320,41 euros mais, au contraire, indiqué que les sommes qui n'avaient pu être récupérées auprès de la société Don Valley resteraient à la charge de la société ECS et qu'elle transmettrait la somme de 16.060,71$ reçue à tort à ECS.

Elle considère en outre que le rappel de la compensation pratiquée le 7 mai 2002 n'a pu interrompre la prescription dès lors qu'elle n'a pas reconnu le droit de la société ECS. Elle admet que la compensation pratiquée le 7 mai a interrompu la prescription car elle a reconnu qu'elle était redevable de la somme de 44.320,21 euros, qu'elle a entendu compenser avec sa propre créance mais prétend qu'en avril 2003, elle n'a pratiqué aucune compensation et n'a pas reconnu devoir la somme de 44.320,21 euros et payer les factures de la société ECS. Elle souligne qu'une reconnaissance de droit doit être non équivoque.

Elle estime que l'intimée le reconnaît en invoquant une interversion de la prescription opérée le 7 mai 2002 par la compensation et excipe du jugement du tribunal de commerce de Bruges.

Elle affirme que le virement de 14.742, 13 euros opéré le 20 mai 2003 n'a aucune incidence sur la prescription à défaut de toute reconnaissance par elle du droit de la société ECS au paiement de ses factures.

Elle conclut que la prescription annale est acquise depuis le 7 mai 2003 et que l'action diligentée en Belgique le 5 août 2003 est tardive et donc irrecevable.

A titre subsidiaire, elle sollicite le rejet de la demande.

Elle déclare qu'intervenue en tant que commissionnaire de transport, la société Danzas a dû indemniser son client et qu'elle doit donc être garantie par ses substitués. Elle soutient que la société Parke Davis n'a jamais été indemnisée par une autre partie ou assureur et indique que la société ECS a proposé d'indemniser la société Danzas les 25 janvier, 14 juin et 22 août 2001.

Elle estime que sa demande n'est pas prescrite, la société ECS s'étant engagée à lui payer la somme de 35.792,47 euros le 22 août 2001 et cet engagement ayant eu pour effet d'inverser la prescription. Elle ajoute que la société Danzas a présenté systématiquement une demande reconventionnelle en Belgique qui a interrompu la prescription.

Elle excipe donc de sa créance pour s'opposer à la demande.

A titre très subsidiaire, elle indique qu'elle a dû payer la somme de 101.468,70 euros au titre du jugement.

Elle reproche à la société ECS de ne pas produire les factures originales au dos desquelles figuraient les conditions générales mais de produire des exemplaires de factures actuelles. Elle soutient donc que la société ne démontre pas que les conditions générales invoquées étaient alors en vigueur, ont été acceptées par elle et lui sont ainsi opposables. Elle en conclut que, conformément à l'article 1153 du code civil, seul le taux d'intérêt légal pourrait assortir sa condamnation et ce à compter de l'assignation qui lui a été délivrée soit le 2 janvier 2012.

A défaut, elle considère le taux de 12% comme manifestement excessif et demande sa réduction en application de l'article 1152 alinéa 2 du code civil.

Elle refuse de supporter la durée très longue de la procédure imputable à la société ECS qui a rédigé une clause de compétence non conforme à la convention CMR.

A titre subsidiaire, elle réclame le paiement de la somme de 35.792, 47 euros proposée par la société ECS les 25 janvier, 14 juin et 22 août 2001.

Dans ses dernières écritures portant le numéro 3 en date du 4 mars 2015, la société ECS conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts.

Elle demande que les intérêts courent à compter du 27 juin 2002 et, subsidiairement, du 5 août 2003.

Elle conclut à l'irrecevabilité de la demande en paiement de la somme de 35.792,47 euros présentée pour la première fois en cause d'appel et à l'irrecevabilité et au rejet de toutes les demandes subsidiaires de la société.

Elle réclame le paiement d'une somme complémentaire de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société ECS précise qu'elle ne figure pas, comme l'a noté la cour d'appel, sur la lettre de voiture CMR.

Elle expose que la société Axa Insurance UK, assureur du voiturier anglais, a réglé le sinistre en accord avec la société Marsh, assureur conseil de la société Danzas, et indique que la société Atlantis n'est pas un assureur mais était le gestionnaire du sinistre pour le compte de la société ECS. Elle souligne que, le 16 septembre 2001, la société Parke Davis a retourné à la société Marsh un chèque de 35.431,34 $ en précisant que les assureurs du transporteur lui avaient payé le coût de sa réclamation et qu'elle ne pouvait, en conséquence, accepter le « chèque de vos assureurs en règlement du conteneur volé ».

Elle affirme que la société Danzas n'a pas justifié avoir indemnisé la société Parke Davis.

La société invoque le mal fondé de la demande relative à la production de factures originales, la société Danzas en ayant été le destinataire, n'ayant jamais contesté devant les juridictions belges leur contenu et leur opposabilité et les avoir reçues et s'étant fondée sur elles pour contester la compétence de ces tribunaux. Elle précise qu'elle n'en a pas la copie et se prévaut du jugement.

Elle conclut à l'irrecevabilité de la demande subsidiaire de paiement de la somme de 35.792,47 euros présentée pour la première fois en appel et observe que la société ne conteste pas ce point. Au fond, elle la conteste aux motifs qu'elle ne s'est pas engagée à la payer et que la société Parke Davis a retourné à la société Marsh le chèque de 35 .431, 34 $ car elle avait été désintéressée par les assureurs du transporteur.

Elle rappelle les dispositions en matière de point de départ des intérêts légaux et se prévaut de son courrier du 27 juin 2002 et, subsidiairement, de l'assignation délivrée devant les juridictions belges, la procédure française n'en étant que la continuation.

Elle invoque le comportement déloyal de la société DHL Freight qui n'a conclu que le 17 novembre 2010 qu'elle venait aux droits de la société Danzas après que la société ECS a assigné deux autres sociétés du groupe. Elle ajoute que la société Danzas, radiée en 2005, a tu cette radiation et n'a pas fait intervenir la société venant à ses droits.

Elle soutient que la prescription décennale est seule applicable compte tenu de la reconnaissance par la société Danzas de son droit.

Elle observe que la société Parke Davis s'est reconnue remplie de ses droits et reproche à la société DHL Freight de lui réclamer une somme supérieure à la réclamation de son client alors même que celle-ci a été vidée par le paiement effectué par l'assureur du transporteur substitué.

Elle s'interroge sur l'applicabilité de l'article L 133-6 du code de commerce mais souligne qu'est en question le recouvrement d'une créance certaine, liquide et exigible résultant de factures adressées par elle dont la plus récente est à échéance du 29 avril 2002. Elle ajoute que la demande de la société Danzas est prescrite au motif qu'elle n'a prétendu que le 7 mai 2002 compenser sa dette avec un sinistre du 10 septembre 2000.

La société invoque une interversion de la prescription, l'obligation du débiteur ne trouvant plus sa source dans le contrat de transport mais dans la reconnaissance de sa dette ce dont il résulte que la prescription est celle, décennale, énoncée par l'article L 110-4 du code de commerce. Elle se prévaut d'arrêts aux termes desquels la reconnaissance de responsabilité même partielle entraîne un effet interruptif pour la totalité de la créance et qu'elle a un effet interversif même si elle ne comporte pas de chiffrage. Elle excipe de décisions appliquant en matière de paiement de frais de transport ce mécanisme d'interversion et fait valoir que n'est exigé qu'un engagement ferme de payer.

Elle soutient qu'une compensation, « même sauvage », constitue une reconnaissance ferme de dette, la compensation étant un mode de paiement et un mode d'extinction normal des obligations.

Elle invoque deux reconnaissances de la société Danzas soit la lettre du 7 mai 2002 à laquelle elle a fait part, le 27 juin, de son opposition et la télécopie du 9 avril 2003 dans laquelle elle reconnaît une nouvelle fois avoir procédé à la compensation. Elle déclare que ces reconnaissances visent, sans distinguer, l'intégralité des factures et ne sont assorties d'aucune réserve.

Subsidiairement, elle invoque une interruption de la prescription par la compensation du 7 mai 2002 dont le principe a été réitéré le 9 avril 2003.

Elle invoque d'autres causes d'interruption. Elle affirme que la société a entendu compenser sa prétendue créance avec l'intégralité des factures ce qui vaut reconnaissance intégrale de celles-ci. Elle considère que le versement de la somme de 14.742,13 euros le 20 mai 2003 s'analyse en une reconnaissance de son droit au paiement de ses factures et vaut donc interruption du délai de prescription.

L'intimée soutient que toute demande reconventionnelle ou de compensation est prescrit en application de l'article L 133-6 du code de commerce ou de l'article 32 de la CMR.

Elle relève que l'appelante soutient que la société Danzas est intervenue en qualité de commissionnaire et fait valoir qu'un commissionnaire de transport peut donc soit régler le litige et se retourner contre ses substitués soit attendre d'être assigné et former des appels en garantie. Elle en infère qu'elle reconnait qu'elle doit exercer son recours contre ses substitués dans le délai d'un an soit avant le 10 septembre 2001 voire le 5 novembre 2001. Elle déclare que son action n'avait pas lieu d'être car elle n'a jamais été assignée et car le sinistre a été réglé par les assureurs du voiturier.

Elle ajoute que la société DHL Freight n'a versé aucune pièce concernant le sinistre sur lequel elle fonde sa compensation et fait état d'une fraude de la société Danzas qui, ainsi que le montre la télécopie de la société Parke Davis du 18 septembre 2001, n'a réglé aucune somme, les assureurs du voiturier ayant réglé le sinistre. Elle invoque donc une créance inexistante.

En tout état de cause, elle soutient qu'elle n'a aucune responsabilité en application du droit belge.

Elle souligne qu'elle ne figure pas sur la lettre de voiture CMR et déclare qu'elle n'a pas elle-même transporté. Elle invoque l'article 1 de la loi belge du 26 juin 1967 qui distingue le commissionnaire transporteur et le commissionnaire expéditeur et affirme être un commissionnaire expéditeur. Elle soutient que le statut de celui-ci est comparable au transitaire du droit français dans la mesure où il n'est pas garant de ses substitués et où il n'est responsable qu'en cas de faute personnelle. Elle indique que ses conditions générales sont génériques et susceptibles de stipulation ou preuve contraire. Elle réfute toute faute personnelle, non alléguée par l'appelante.

A titre ampliatif, si la prescription de son action est retenue, elle fait état d'un enrichissement sans cause de la société Danzas justifiant une action en répétition de l'indu dans la mesure où la société n'a rien payé au titre du litige Don Valley.

Sur la clause pénale, elle invoque les conditions générales figurant au dos des factures et réclame le paiement de ce chef de la somme de 2.478,97 euros.

Elle estime non excessif le taux de 12% et invoque un trouble commercial et ses demandes amiables.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2015.

************************

Sur la demande de la société ECS

Sur la prescription

Considérant qu'en application de l'article L 133-6 du code de commerce, l'action en paiement de ses factures par la société ECS est soumise à la prescription annale ;

Considérant que la facture la plus récente date du 27 février 2002 et venait à échéance le 29 avril 2002 ;

Considérant que la société ECS a fait assigner la société Danzas le 5 août 2003 soit postérieurement à l'expiration du délai annal ;

Mais considérant que la reconnaissance de la dette et la promesse de s'en acquitter entraînent la novation de l'obligation ; que celle-ci n'est plus fondée sur le contrat de transport mais sur la reconnaissance de dette ; que la prescription n'est donc plus annale mais, conformément à l'article L 110-4 du code de commerce alors applicable, décennale ;

Considérant qu'il appartient à la société ECS de rapporter la preuve de cette reconnaissance et de cet engagement de la société Danzas ;

Considérant qu'il résulte de l'article 1289 du code civil que la compensation est un mode de paiement et un mode d'extinction usuel des obligations ;

Considérant que, par lettre du 7 mai 2002, la société Danzas a compensé le montant de ses factures avec sa note de débit consécutive au sinistre et procédé au virement de la somme correspondant à la différence ;

Considérant qu'en procédant à la compensation des factures avec sa créance alléguée, la société Danzas a entendu compenser sa créance avec sa dette résultant des factures ; qu'elle a donc reconnu être débitrice des sommes réclamées au titre des factures ; qu'elle a entendu payer celles-ci par la compensation ;

Considérant qu'elle a donc reconnu sa dette et s'est engagée à la payer étant précisé que la compensation et le virement de la somme excédant sa créance invoquée portent sur l'intégralité des factures litigieuses;

Considérant que la société ECS a, par lettre recommandée du 27 juin 2002, contesté la compensation opérée ; qu'elle n'a donc pas reconnu avoir perçu, par compensation, sa créance ;

Considérant que la présente action de la société ECS n'est ainsi pas fondée sur les factures émises mais sur la reconnaissance par la société Danzas de leur bien fondé et sur son engagement à les payer ;

Considérant qu'elle est donc soumise à la prescription, alors, décennale ;

Considérant que l'action est, en conséquence, recevable ;

Sur le montant de la créance

Considérant que la société ECS a, par lettre recommandée du 27 juin 2002, contesté la compensation opérée ; qu'elle n'a donc pas reconnu avoir perçu, par compensation, sa créance ;

Considérant que le montant principal de la créance n'est pas contesté ; qu'il s'élève, compte tenu du versement de la somme de 14.742,13 euros, à la somme de 29.578,08 euros ;

Sur la compensation

Considérant qu'il appartient à la société DHL de démontrer qu'elle peut opposer à la créance de l'intimée sa propre créance ;

Considérant que cette créance résulterait de l'obligation pour la société ECS de garantir, en tant que substituée, la société Danzas des sommes payées par elle en sa qualité de commissionnaire de transport ;

Considérant qu'un tel recours doit être exercé, conformément aux articles L 132-1 et suivants du code de commerce, dans le délai d'un an du paiement par elle de son client ou solliciter sa garantie après assignation délivrée par celui-ci dans le délai prescrit ;

Considérant qu'elle n'a pas été assignée ;

Considérant que sa demande a été formée postérieurement au délai d'un an prescrit ;

Mais considérant que, dans ses courriers des 25 janvier, 14 juin et 22 août 2001, la société ECS n'a pas contesté devoir garantir la société Danzas ; qu'elle a seulement critiqué l'inclusion dans le montant réclamé des frais de transport, 1.406,34 euros, qu'elle n'a pas réclamés ; qu'elle a demandé l'émission d'une nouvelle facture ; qu'elle a, ainsi, reconnu devoir sa garantie ;

Considérant que s'est donc opérée également une interversion de la prescription ; que, compte tenu des demandes formées par la société Danzas devant les juridictions belges qui ont interrompu la nouvelle prescription, la demande de la société DHL tendant à compenser la somme versée par elle au titre du sinistre avec sa dette du chef des factures est recevable ;

Mais considérant que l'accord de la société ECS pour rembourser les sommes versées par la société Danzas au titre du sinistre est subordonné à la preuve que la société Danzas s'est acquittée de la somme réclamée ;

Considérant, d'une part, qu'une note de débit ' qui peut donner lieu à des écritures postérieures- est insuffisante à justifier d'un tel paiement ;

Considérant, d'autre part, que, par télécopie du 18 septembre 2001, la société Pfizer, client, a écrit à la société Marsh, représentant les assureurs de la société Danzas, que les « assureurs du transporteur » lui avaient payé le montant de sa réclamation et lui a retourné le chèque émis par elle;

Considérant que la société DHL Freight ne rapporte donc pas la preuve que la société Danzas s'est acquittée d'une somme quelconque au titre du sinistre ; qu'elle ne démontre pas l'existence d'une créance sur la société ECS ; qu'elle sera donc déboutée de sa demande tendant au rejet de la réclamation de celle-ci compte tenu de cette créance ;

Considérant qu'elle sera, en conséquence, condamnée au paiement de la somme de 29.578,08 euros ;

Sur les accessoires de la créance

Considérant que la société ECS verse aux débats ses conditions générales qui contiennent les stipulations relatives aux intérêts et à la clause pénale ;

Considérant que ces stipulations figuraient au dos des factures ;

Considérant que la société ECS ne dispose plus des factures originales ;

Mais considérant que les parties sont toutes deux des professionnelles du transport ; que ces sociétés ont eu des relations suivies ; que de nombreuses factures ont été émises ; que la société Danzas n'a jamais contesté les conditions générales de paiement ; qu'elle n'a pas contesté la demande au titre des intérêts et de la clause pénale avant ses écritures en vue de l'audience du 17 novembre 2010 ;

Considérant que, dans ces conditions, en s'acquittant sans réserve de factures renvoyant aux conditions générales et en ne contestant pas les conditions générales, la société a nécessairement accepté celles-ci ;

Considérant qu'elle est donc tenue en application de ces conditions au paiement d'intérêts au taux annuel de 12% et à une clause pénale égale à 15% du montant dû soit 2.478,97 euros ;

Considérant que le taux mentionné dans la CMR est de 5% ; que la société DHL Freight ne rapporte pas la preuve que ces stipulations, dans des conventions conclues entre deux professionnels, caractérisent une peine manifestement excessive ;

Considérant que la lettre de la société ECS en date du 27 juin 2002 ne contient pas une interpellation suffisante pour faire courir les intérêts ;

Considérant que l'assignation à comparaître devant les juridictions belges constitue toutefois une interpellation suffisante ; que ces intérêts seront donc dus à compter du 5 août 2003 ; qu'ils seront capitalisés ;

Sur la demande de condamnation de la société ECS

Considérant que cette demande n'a pas été formée en première instance ; qu'elle est une demande nouvelle ; qu'elle est donc irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement du tribunal sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'appelante devra payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que sa demande aux mêmes fins sera, compte tenu du sens du présent arrêt, rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Déclare irrecevable la demande formée par la société DHL Freight tendant à la condamnation de l'intimée au paiement de la somme de 35.792,47 euros,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 11 octobre 2012 par le tribunal de commerce de Pontoise,

Y ajoutant

Condamne la SAS DHL Freight (France) à payer à la société N V European Containers Services la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne la société DHL Freight (France) aux dépens,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f.f., Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 12/07776
Date de la décision : 19/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°12/07776 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-19;12.07776 ?
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