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14/01/2016 | FRANCE | N°14/07369

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 3e section, 14 janvier 2016, 14/07369


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 22G



2e chambre 3e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 JANVIER 2016



R.G. N° 14/07369



AFFAIRE :



[G][P]



C/



[H] [X]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Septembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 14/00650



Expéditions exécutoires>
Expéditions

Copies

délivrées le : 14/01/2016

à :



Me GUERIN



Me LISSARRAGUE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 22G

2e chambre 3e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 JANVIER 2016

R.G. N° 14/07369

AFFAIRE :

[G][P]

C/

[H] [X]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Septembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 14/00650

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 14/01/2016

à :

Me GUERIN

Me LISSARRAGUE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [G], [I] [P] divorcée [X]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 4] (92)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Isabelle GUERIN de la SELARL GUERIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000053 - N° du dossier 205743

APPELANTE

****************

Monsieur [H] [X]

né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 5] (28)

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1554120

Représentant : Me Claude GERBET de la SCP GERBET RENDA GOYAC-GERBET, Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Octobre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne CARON-DEGLISE, président,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller,

Madame Céline MARILLY, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

le délibéré ayant été prorogé du 17/12/2015 au 14/01/2016

Mme [G] [P] et M. [H] [X] se sont mariés le [Date mariage 1] 1990 après avoir conclu un contrat de mariage. Ils étaient soumis au régime de la séparation de biens. Ils ont eu une fille aujourd'hui majeure.

Par jugement du 16 septembre 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chartres a prononcé leur divorce à leurs torts partagés et a ordonné la liquidation de leur régime matrimonial.

Par acte authentique du 30 décembre 2011, Mme [P] et M. [X] ont régularisé devant Maître [M], notaire à [Localité 3], l'état liquidatif notarié de leurs intérêts patrimoniaux et ont procédé au partage des biens et de l'important patrimoine immobilier dont ils étaient propriétaires indivis.

Le 30 décembre 2011, les époux ont également régularisé un document sous seing privé, établi par Maître [M] qui en a conservé un exemplaire ; cet acte qui rappelait que Mme [P] était propriétaire d'un logement au rez de chaussée de l'immeuble situé [Adresse 1], précisait qu'il avait été convenu entre les parties l'accord suivant :

'Mme [G] [P] s'engage à consentir à Melle [S] [X], leur fille, une donation en avancement de parts successorales portant sur cet appartement dans les trois mois des présentes à charge pour Melle [X] de supporter le capital restant dû sur l'emprunt du CIC, ( capital restant dû évalué à ce jour à 143 000 euros),

M. [H] [X] prendra en charge le remboursement de ce prêt, directement ou en le renégociant, ce qui se traduira par une donation équivalente au profit de Melle [S] [X],

Les frais de cet acte de donation, évalués à 5 000 euros, seront pris en charge par chacun pour moitié.'

Il convient de préciser que ce bien est situé dans l'immeuble où Mme [P] disposait déjà d'un appartement où elle demeure et qui lui a été attribué dans le cadre du partage, étant précisé que ce bien qu'elle a acquis en propre- le 24 janvier 2008- pour un prix de 116 000 euros, était l'ancienne loge de la concierge, d'une surface de 19 m² d'après l'avenant à l'acte de prêt contracté auprès du CIC pour financer cet achat et les travaux qui y ont été entrepris à hauteur- initialement- d'une somme de 155 485 euros, remboursable- dans le cadre de cet avenant- en 3 mensualités de 662,32 euros de mars à mai 2011 puis 167 mensualités de 1 271,89 euros, assurance comprise. Ce logement a été aménagé en studio.

M. [X] n'a effectué aucun versement malgré les relances de Mme [P] qui a continué en conséquence d'assurer le paiement des mensualités de cet emprunt.

Par jugement du 3 septembre 2014 dont appel, le tribunal de grande instance de Chartres, saisi par Mme [P] qui sollicitait la condamnation de M. [H] [X] au paiement de dommages-intérêts pour réparer les préjudices subis suite à l'inexécution de son engagement a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, :

* dit nul l'acte sous seing privé conclu par M. [H] [X] et Mme [G] [P] le 30 décembre 2011,

* débouté Mme [G] [P] de l'intégralité de ses demandes,

* condamné Mme [G] [P] à verser à M. [H] [X] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [G] [P] aux dépens.

Mme [G] [P] a régulièrement interjeté appel de cette décision par déclaration d'appel du 10 octobre 2014.

Aux termes de ses dernières conclusions , signifiées par RPVA le 6 octobre 2015, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Mme [G] [P] demande à la cour de :

A titre principal,

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

- constater l'inexécution fautive par Monsieur [H] [X] des engagements souscrits au titre de la convention du 30 décembre 2011,

- donner acte à la concluante de son engagement de régulariser l'acte de donation en avancement de part successorale ayant pour objet le bien sis [Adresse 1],

- condamner Monsieur [H] [X] à lui payer en réparation des préjudices subis:

* Au titre des préjudices financiers,

o 54 mensualités du crédit à hauteur de 1 271,89 euros chacune, soit la somme de 68 682,06 euros,

o Le solde du capital restant dû au 31 octobre 2015, ou à défaut, le montant des

échéances du crédit de 1271,89 euros à compter du 1er novembre 2015 jusqu'au terme du crédit;

* Au titre du préjudice moral, la somme de 30 000 euros,

- condamner M. [X] au paiement des intérêts de droit capitalisés à compter de l'assignation jusqu'au parfait paiement,

A titre subsidiaire,

Vu les dispositions de l'article 1382 du Code civil,

Si par impossible la cour prononçait l'annulation de l'acte sous seing privé litigieux,

- juger que Monsieur [H] [X] a commis une faute en obtenant de son ex-épouse la signature de l'acte, dont il conteste désormais la validité, pour amener cette dernière à signer l'état liquidatif notarié en date du même jour et, en réparation du préjudice subi,

- Voir condamner Monsieur [H] [X] à lui payer la somme en principal de

160 000 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause,

- condamner Monsieur [H] [X] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- le condamner aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Guérin avocats et associés en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées par RPVA le 13 octobre 2015 , auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [H] [X] demande à la cour de :

* déclarer recevable mais mal fondé l'appel interjeté par Madame [P] tant à titre principal qu'à titre subsidiaire,

*Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Chartres le 3 septembre 2014 en toutes ses dispositions notamment en ce qu'il a déclaré nul l'acte sous seing privé entre Monsieur [H] [X] et Madame [G] [P] en date du 30 décembre 2011,

le requalifiant en contrat à titre onéreux, son consentement ayant été donné par erreur,

* Débouter Madame [G] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions à titre principal et à titre subsidiaire,

* Débouter Madame [P] de sa demande de préjudice moral qu'elle fixe à 30 000 euros,

* Condamner Madame [P] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de préjudice moral,

*Débouter Madame [P] de sa demande de 4 000 euros formée sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

* Condamner Madame [P] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

* Condamner Madame [P] aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée avant l'ouverture des débats, à l'audience du 15 octobre 2015, les parties indiquant qu'il n'existait aucune difficulté quant à la signification de leurs dernières écritures.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

Sur la demande d'annulation de l'acte sous seing privé signé par les parties le 30 décembre 2011 :

Pour s'opposer à la demande indemnitaire de Mme [P], fondée sur le défaut d'exécution de l'engagement conclu le 30 décembre 2011, M. [X] conclut à la nullité de cet acte sur le fondement des articles 1109, 1110 et 1117 du code civil en faisant valoir qu'il a donné son consentement par erreur après avoir cru à une donation préalable de son ex-épouse à leur fille, ce qui n'est pas le cas dès lors que la donation que Mme [P] entendait consentir à leur fille majeure- qui n'est pas partie à l'acte- doit être requalifiée, comme l'ont fait les premiers juges, en un acte à titre onéreux et ce, sur le fondement de l'article 894 du code civil ; il expose qu'en effet les charges de remboursement d'emprunt que Mme [P] entendait mettre à la charge de sa fille atteignaient la valeur du bien transmis et que celle-ci ne s'engageait ainsi qu'à donner des dettes, l'intimé soutenant que le studio ne vaut pas plus que 140 000 euros alors que le capital restant dû sur le prêt au moment de la signature de l'acte litigieux était de 143 000 euros.

Il ajoute que cet acte sous seing privé a été signé dans la précipitation le jour même de la signature de l'état liquidatif sans que les parties n'aient reçu aucun conseil du notaire ou de leurs avocats qui n'étaient pas présents pour la signature de l'acte contesté.

Mme [P] soutient que contrairement aux allégations de M. [X], l'acte litigieux a été signé après qu'ils aient eu, assistés de leurs conseil, une longue entrevue en présence de Maître [M]. Elle précise que ce dernier, préalablement à cet acte complémentaire sous seing privé, avait, sur un document de travail remis aux parties le 30 juin 2011, établi diverses hypothèses pour parvenir à l'accord des parties qui était de donner à leur fille unique ce studio dégagé de tout passif, document dans lequel il avait estimé le studio à 200 000 euros.

Elle fait valoir que pour elle, les deux conventions - de partage et sous seing privé- étaient liées, celle-ci précisant n'avoir accepté de signer l'acte liquidatif de partage- dans lequel elle dit avoir fait de nombreuses concessions- qu'en considération de l'engagement de son ex mari à l'occasion de l'acte sous seing privé. Elle conteste la nullité alléguée par M. [X] dès lors qu'il ne rapporte nullement la preuve d'une erreur qu'il aurait commise et qu'il ne peut sérieusement prétendre s'être trompé sur la portée de ses engagements, compte tenu des très nombreux actes translatifs de propriété qu'il a signés dans sa carrière dans l'immobilier, en sa qualité de professionnel du bâtiment.

M. [X] invoque une erreur sur la cause de son engagement en concluant à l'absence de toute intention libérale de son ex-épouse

L'article 1109 du code civil dispose effectivement qu'il n'y a pas de consentement valable si le consentement n'a notamment été donné que par erreur, étant précisé par l'article 1110 du même code que l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet.

La preuve du vice du consentement incombe à celui qui l'invoque.

Il est constant, à la lecture des termes de l'engagement signé par les parties que celui-ci prévoit:

- d'une part, l'engagement de Mme [P] de donner à leur fille un studio dont elle était propriétaire à charge pour cette dernière de supporter le coût du capital restant dû , à la date de l'engagement, au titre de l'emprunt contracté pour financer l'achat de ce bien et les travaux qui y avaient été entrepris,

- d'autre part l'engagement de M. [X] de prendre en charge le remboursement incombant à sa fille.

Certes l'intention libérale de Mme [P] à l'égard de la fille du couple était une condition de l'engagement de M. [X].

L'intention de Mme [P] de faire supporter à la bénéficiaire de la donation le remboursement du capital restant dû sur l'emprunt attaché au studio objet de cette donation ne peut entraîner la requalification de cet engagement de Mme [P] à l'égard de sa fille en contrat à titre onéreux que s'il est établi que la charge stipulée par la donatrice a une valeur équivalente à la valeur du bien transmis, étant souligné qu'une donation constitue une libéralité pour le tout lorsque la charge stipulée par le donateur a une valeur inférieure à la valeur du bien transmis.

Or, si M. [X] affirme que le bien objet de la donation n'avait qu'une valeur de 140 000 euros, il n'en justifie pas alors même que Mme [P] produit un document daté du 30 juin 2011 -dont M. [X] ne conteste pas qu'il a été établi par Maître [M] qui était le notaire des époux- dans lequel ce dernier a détaillé selon quelles modalités ce logement pouvait être donné à la fille des parties en établissant ses calculs sur la base d'une valeur du studio de 200 000 euros ; elle verse également aux débats une attestation d'une agence immobilière, datée du 11 avril 2014, qui évalue la valeur de ce bien, après l'avoir visité, à une somme comprise entre 170 000 et 176 000 euros.

L'acte litigieux mentionne que le capital restant dû au titre du prêt était de 143 000 euros au 31 décembre 2011 et c'est cette somme en capital que Mme [P] a entendu faire supporter à sa fille. Son intention libérale à l'égard de cette dernière- à laquelle elle a laissé en outre la libre disposition de ce logement à compter de l'année 2009 - est donc suffisamment caractérisée sans que M. [X] ne puisse valablement soutenir que Mme [P], au terme de son engagement, n'aurait donné que des dettes à leur fille.

Il ne peut être tiré de conséquence de l'absence de la fille des parties à l'acte sous seing privé dès lors que l'acceptation d'une donation dans les formes prescrites par les articles 932 et suivants du code civil n'est exigée que pour la donation passée en la forme authentique.

En outre, si effectivement l'acte litigieux contraint M. [X] à supporter le remboursement d'un emprunt auquel il était tiers, cet élément ne saurait avoir d'incidence sur la réalité de l'intention libérale de Mme [P] à l'égard de sa fille.

Par conséquent, contrairement à la décision du premier juge, l'engagement de Mme [P] à l'égard de sa fille n'a pas à être requalifié en contrat à titre onéreux.

Si M. [X] conteste avoir participé aux discussions chez Maître [M], notaire, qui auraient eu lieu selon Mme [P] le 30 juin 2011, il n'en demeure pas moins qu'il a bien signé cet acte en l'étude de Maître [M].

L'acte litigieux, rédigé par le notaire, précise expressément et sans ambiguïté que M. [X] assurera la charge du remboursement de l'emprunt souscrit par son ex-épouse et auquel il était étranger .

Les termes clairs de cet engagement, les circonstances de sa signature, la qualité de M. [X] qui est un professionnel de l'immobilier dont le jugement de divorce a précisé qu'il était maître d'oeuvre et marchand de biens et l'absence de démonstration que son épouse n'aurait eu aucune intention libérale à l'égard de leur fille ne permettent pas de considérer qu'il aurait commis une erreur - excusable- sur la portée de son engagement ni, comme le premier juge l'a indiqué dans son jugement, qu'il aurait été 'piégé' par son ex-épouse, les courriers pris en compte à cet égard par le tribunal et qui correspondent à des échanges écrits, intervenus en 2012 entre Mme [P] et Maître [M], démontrant simplement le souci de cette dernière d'obtenir l'exécution par M. [X] de ses engagements.

Par conséquent, le vice du consentement allégué par M. [X] n'est pas établi et l'acte ligieux du 30 décembre 2011 ne saurait être annulé.

Le jugement déféré doit être infirmé de ce chef.

Sur les demandes principales de Mme [P] :

Il convient de constater que Mme [P] s'engage à régulariser l'acte de donation en avancement de part successorale au bénéfice de sa fille [S] et ayant pour objet le bien situé [Adresse 1].

Il est constant que M. [X] ne s'est pas exécuté de son engagement souscrit dans la convention du 30 décembre 2011.

Celui-ci invoque l'impossibilité d'obtenir un prêt pour lui permettre d'exécuter les termes de cette convention.

Il convient cependant de relever, comme le souligne l'appelante, que M. [X] n'a pas assorti son engagement d'assumer la charge du coût du remboursement de l'emprunt, souscrit auprès du CIC et visé à l'acte litigieux, d'une condition suspensive liée à l'obtention d'un prêt.

Il se devait donc d'assurer le remboursement contractuellement prévu sans qu'il ne puisse se prévaloir de cette difficulté de financement, d'autant que les mentions de l'acte sous seing privé faisant état du montant du capital restant dû pour le remboursement du prêt lui permettaient d'apprécier la portée de son engagement et la nécessité pour lui de disposer des fonds correspondants.

L'inexécution de son engagement est donc suffisamment caractérisée et doit donner lieu à dommages-intérêts, en application de l'article 1142 du code civil, peu important qu'elle ait été ou non fautive.

Le préjudice subi en conséquence de cette inexécution par Mme [P] est financier et correspond notamment :

* au montant des mensualités du crédit qu'elle a dû continuer de prendre en charge, dès lors que le remboursement du capital restant dû sur le prêt n'est pas intervenu dans les trois mois de la signature de cet acte.

A ce titre, étant rappelé que Mme [P] s'est engagée à régulariser la donation dès que M. [X] exécutera ses propres engagements, celui-ci - qui a été mis en demeure d'exécuter ses engagements par plusieurs lettres recommandées dont la première est en date du 21 mai 2012- doit être tenu à rembourser à Mme [P] les mensualités dues d'avril 2012, et non avril 2011 comme indiqué manifestement par erreur dans les conclusions de l'appelante, à octobre 2015, soit la somme de 54 691,27 euros correspondant à 43 mensualités de 1 271,89 euros ;

* au solde du capital restant dû au 31 octobre 2015, soit la somme de 111 642,29 euros ou, à défaut de paiement de cette somme, le montant des échéances du crédit de 1 271,89 euros dues à compter du 1er novembre 2015 jusqu'au terme du crédit fixé au 5 avril 2025.

Mme [P] invoque enfin un préjudice moral en sollicitant une somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts. Elle fait valoir que M. [X] qui n'ignorait pas la maladie dont elle est affectée a tenté, à dessein, d'en profiter pour ne pas honorer ses engagements.

S'il ressort des éléments communiqués par Mme [P] que celle-ci a souffert d'importants problèmes de santé à compter du dernier trimestre de l'année 2013, il n'est pas établi que M. [X] ait entendu 'profiter' de la maladie de son ex-épouse dès lors que le non respect de ses engagements est bien antérieur à la survenue de l'affection de l'appelante.

Celle -ci, qui ne justifie pas dès lors d'un préjudice indépendant du retard de paiement qui sera réparé par les intérêts au taux légal dont elle demande la mise en oeuvre et la capitalisation, sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Sur les autres demandes :

Conformément à la demande de Mme [P], et en application de l'article 1153 du code civil, les condamnations prononcées doivent porter intérêts au taux légal à compter de l'assignation de M. [X] devant le premier juge, soit à compter du 6 mars 2014.

Il convient, comme le demande également Mme [P], de prévoir que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

M. [X], condamné en paiement, sera par conséquent débouté de sa demande en dommages-intérêts à l'encontre de son épouse dont la demande est fondée sur l'inexécution d'un engagement contractuellement convenu.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile sont remplies à l'égard de Mme [P] à laquelle il sera alloué la somme de 2 000 euros sur ce fondement.

M. [X], condamné en paiement, sera débouté de toute demande à ce titre et le jugement doit être infirmé de ce chef.

M. [X] sera condamné au paiement des dépens

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en denier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Chartres du 3 septembre 2014 sauf en ce qu'il a débouté Mme [G] [P] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau ,

Dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité de l'acte sous seing privé conclu entre Mme [G] [P] et M. [H] [X] le 30 décembre 2011,

Constate que Mme [G] [P] s'engage à régulariser à l'égard de sa fille Melle [S] [X] l'acte de donation en avancement de part successorale ayant pour objet le bien situé [Adresse 1],

Condamne M. [H] [X] qui ne s'est pas exécuté de ses engagements à payer à Mme [G] [P] en réparation des préjudices subis :

* la somme de 54 691,27 euros au titre des mensualités de crédit impayées jusqu'au 31 octobre 2015,

* le solde du capital restant dû au 31 octobre 2015, soit la somme de 111 642,29 euros, ou, à défaut de règlement de ce capital, le montant des échéances de ce crédit dues à hauteur de la somme mensuelle de 1 271, 89 euros du 1er novembre 2015 jusqu'au terme du crédit,

Dit que ces condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2014 et ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

Condamne M. [H] [X] à verser à Mme [G] [P] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [H] [X] aux dépens, dont distraction au profit de la Selarl Guérin avocats et associés.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne CARON-DEGLISE, président et par Madame Sabine NOLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 3e section
Numéro d'arrêt : 14/07369
Date de la décision : 14/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 2C, arrêt n°14/07369 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-14;14.07369 ?
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