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12/01/2016 | FRANCE | N°14/09222

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 12 janvier 2016, 14/09222


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



AP

Code nac : 56A



12e chambre section 2



ARRET N°



contradictoire



DU 12 JANVIER 2016



R.G. N° 14/09222



AFFAIRE :



SARL INVESTISSEMENT & CONSEIL





C/

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Septembre 2011 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 02

N° Section :

N° RG : 2010F03476r>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES



















REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAI...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

AP

Code nac : 56A

12e chambre section 2

ARRET N°

contradictoire

DU 12 JANVIER 2016

R.G. N° 14/09222

AFFAIRE :

SARL INVESTISSEMENT & CONSEIL

C/

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Septembre 2011 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 02

N° Section :

N° RG : 2010F03476

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DOUZE JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 02 Décembre 2014 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles, 13ème chambre, le 21 Février 2013.

SARL INVESTISSEMENT & CONSEIL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 002083

Représentant : Me Philippe HERBECQ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, P0318.

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1554360

Représentant : Me Anne-Sophie BABIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS- C0353

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Novembre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Catherine CHARPENTIER,

La société Investissement et Conseil est une société de conseil aux entreprises dont l'activité est la recherche d'économies et d'optimisation des coûts.

La société Distribution Casino France a pour activité principale l'exploitation de commerces de détail et de réseaux de magasins. Elle a, notamment, en charge l'approvisionnement quotidien des magasins et points de vente en produits alimentaires et de consommation courante et doit, à ce titre, contribuer au paiement de la contribution Eco-Emballages.

Par acte du 24 avril 2006, les sociétés Distribution Casino France et Investissement et Conseil ont signé une convention de recherche d'économies de charges portant sur la contribution Eco-Emballages au titre des années 2005, 2006 et 2007 du groupe Casino et de sa centrale d'achats la société EMC Distribution.

Aux termes de la convention, la société Investissement et Conseils devait rédiger un rapport présentant les résultats de son étude, chaque recommandation devant comporter une date de mise en application et une évaluation de l'économie à réaliser.

La société Distribution Casino France s'est engagée à accepter les recommandations et dates de mise en 'uvre dans un délai de 15 jours à compter du rapport, le rapport et ces recommandations étant à l'expiration de ce délai considérés comme acceptés.

L'article 4-1 énonce que seule l'obtention d'une économie génèrera une facturation.

L'article 4-2 stipule que la rémunération de la société Investissement et Conseil est fixée à hauteur de 50% des remboursements et des économies de contributions acceptés par les organismes agréés au profit du client.

L'article 4-3 énonce que « l'assiette de la facturation est constituée des imputations, régularisations et indemnités accordées par le ou les organismes agréés, des réductions, remboursements ou compensations relatifs aux années visées' ».

L'article 4-4 précise que « dès lors qu'une recommandation est acceptée et qu'Investissement et Conseil a précisé les modalités de mise en 'uvre, en cas de carence du client dans la mise en 'uvre de cette recommandation, dans un délai de 3 mois après acceptation des recommandations et/ou dans le cas où le client ne communiquerait pas à Investissement et Conseil les documents et informations qu'il détient et nécessaires à la facturation de ses honoraires, rendant celle-ci impossible, il sera dû à Investissement et Conseil une indemnité à titre de dommages et intérêts égale à la moitié des économies prévisionnelles sur la durée des conditions de référence définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport.»

Par lettre du 9 janvier 2007, la société Investissement et Conseil a fait part à la société Distribution Casino France de difficultés pour collecter les informations nécessaires.

Le 30 mars 2007, elle a présenté un rapport de mission préliminaire conseillant divers postes d'économies.

Le 30 mai 2009, la société Investissement et Conseil a adressé, sur la base de ce rapport, à la société Distribution Casino France deux factures d'un montant de 126.788,75 euros ht correspondant à la moitié des économies prévues pour les années 2005 et 2006 pour la société et de 17.320,62 euros ht correspondant à la moitié des économies prévues au titre de ces deux années pour la société EMC.

Ces factures sont demeurées impayées.

Les parties ont conclu un protocole d'accord les 5 et 11 mars 2010.

L'article 1 stipule que la société Investissement et Conseil accepte de recevoir un règlement forfaitaire de 30.000 euros en paiement des prestations déjà réalisées et de se considérer comme entièrement remplie de ses droits au titre de ladite convention pour les années passées.

L'article 2 énonce qu'à titre de concession réciproque, la société Casino demande à la société Investissement et Conseil de « poursuivre la convention d'économies Eco-Emballages telle qu'amendée ci-après pour une nouvelle durée applicable aux déclarations des années 2007, 2008, 2009 et 2010. »

Aux termes de l'article 3, la société Casino s'est engagée, pour la réussite de la mission, à s'assurer du soutien du directeur des achats et de ses équipes, à désigner un chef de projet interne afin de fournir à la société Investissement et Conseil tous les documents et informations permettant la réalisation de sa mission dans les conditions énoncées au paragraphe 3 de la convention du 24 avril 2006.

L'article 4 stipule que la société Casino s'oblige à mettre à la disposition de la société Investissement et Conseil toutes les informations demandées et nécessaires et dans des délais compatibles à la conduite de la mission et que la convention d'économies Eco-Emballage continue de s'appliquer notamment quant aux conditions de durée et d'assiette.

Par courrier du 29 juin 2010, la société Investissement et Conseil a déclaré le protocole caduc, la société Distribution Casino France n'ayant pas respecté ses engagements.

Par courrier du 15 juillet 2010, elle a adressé deux factures d'un montant de 63.394,38 euros ht correspondant à 50% des économies réalisées en 2007 par la société Distribution Casino France et de 9.360,42 euros ht correspondant à 50% de celles réalisées en 2007 par la société EMC.

Par acte du 27 juillet 2010, elle a assigné la société Distribution Casino France devant le tribunal de commerce de Nanterre pour avoir paiement, en principal, de la somme de 259.369,54 euros ttc.

Par jugement du 7 septembre 2011, le tribunal a prononcé la résiliation du protocole transactionnel du 11 mars 2010.

Ila condamné la société Distribution Casino France à payer à la société Investissement et Conseil à titre d'indemnité contractuelle la somme de 50.714,99 euros, après déduction du versement de 30.000 euros effectué dan le cadre du protocole, outre intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010.

Il a condamné la société Distribution Casino France à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a rejeté les autres demandes.

Il a pris en compte les économies chiffrées dans le rapport du 30 mars 2007 au titre de l'année 2005 en ce qui concerne la société Casino France Sas et les années 2005 et 2006 en ce qui concerne la société EMC Distribution et appliqué sur ces montants le taux de 50% convenu.

La SARL Investissement et Conseil interjeté appel.

Par arrêt du 21 février 2013, la cour d'appel a confirmé le jugement sauf en ce qu'il a omis de soumettre l'indemnisation à la TVA.

Elle a condamné la société Distribution Casino France à payer à la société Investissement et Conseil à titre d'indemnité contractuelle la somme de 60.605,14 euros ttc outre intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010.

Elle a ordonné la capitalisation des intérêts à compter de la demande formée le 18 janvier 2012.

Elle a rejeté les autres demandes.

Par arrêt du 2 décembre 2014, la cour de cassation a cassé cet arrêt « seulement en ce qu'il condamne la société Distribution Casino France à payer à la société Investissement et Conseil la somme de 60.655,14 euros ttc avec les intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010 capitalisés à compter du 18 janvier 2012 ».

Elle a rejeté le moyen contestant le caractère de clause pénale à l'indemnité prévue à l'article 4-4 mais reproché à la cour de l'avoir réduite sans établir son caractère manifestement excessif.

Par acte du 19 décembre 2014, la société Investissement et Conseil a saisi la cour d'appel.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 3 en date du 4 novembre 2015, la société Investissement et Conseil demande que la société Distribution Casino France soit condamnée à lui payer la somme de 216.864,16 euros ht soit 259.369,54 euros ttc outre intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010.

Elle reconnait avoir perçu les sommes de 50.714,99 euros ht le 15 novembre 2011 et de 15.596,81 euros le 17 février 2014 correspondant à la TVA, 9.940,15 euros et aux intérêts de retard, 5.656,66 euros, soit au total 60.055,14 euros ttc hors intérêts de retard.

Elle réclame le paiement des sommes de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour attitude manifestement abusive et de mauvaise foi et de 25.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société soutient que le litige porte sur l'application dans son quantum d'une clause pénale régulièrement souscrite par l'intimée dont la mise en oeuvre est consécutive à un manquement de celle-ci.

Elle souligne que la société intimée n'a jamais remis en cause la clause pénale et estime vain d'en discuter les contours et de débattre des éléments pris en compte pour en fixer le montant.

Elle déclare que l'élément déclencheur de son application est la carence de la mise en 'uvre par son cocontractant de ses préconisations dans le délai prévu et/ou de l'absence de communication par lui des documents et informations nécessaires à la facturation par elle de ses honoraires conformément aux articles 4-2 et 4-3 de la convention.

Elle fait valoir que la clause vise à prévenir la situation préjudiciable dans laquelle elle se trouve d'avoir réalisé des travaux conformément à sa mission sans pouvoir établir le montant des économies réalisées et, donc, sa facturation. Elle déclare que c'est l'absence de documentation et d'informations contractuellement prévues qui contraint à l'application de la facturation forfaitisée convenue entre les parties à hauteur de 50% des économies prévisionnelles. Elle considère qu'il appartenait à la société Distribution Casino France de faire en sorte que ces économies deviennent effectives par une application de bonne foi de la convention. Elle ajoute que celle-ci a reconnu avoir mis partiellement en 'uvre ces recommandations.

Elle souligne que la société n'a pas exécuté les obligations souscrites à deux reprises, dans la convention initiale et dans le protocole, ainsi que l'ont jugé le tribunal et la cour. Elle ajoute que si toutes les économies n'ont pas été réalisées, la faute en incombe à l'intimée qui n'a pas contesté les termes du rapport du 30 mars 2007.

Elle soutient que les sommes réclamées ne sont pas excessives. Elle souligne qu'elles représentent 50% des économies prévisionnelles sur 3 ans et non la totalité de celles-ci comme l'a jugé à tort la cour d'appel.

Elle relève que la cour a confirmé le jugement « en ce qu'il a fait application des dispositions de l'article 4-4 de la convention fixant l'indemnisation de la société Investissement et Conseil en cas de carence de la société Distribution Casino France à une indemnité égale à la moitié des économies prévisionnelles sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport ».

Elle ajoute que les économies prévisionnelles présentées dans le rapport de mission du 30 mars 2007 n'ont jamais été contestées.

Elle en conclut que la clause pénale doit être appréciée sur la base d'un montant de 259.369,54 euros qui doit être examiné au vu du coût des prestations accomplies et du gain attendu et manqué.

Elle demande que soient pris en compte les manquements délibérés de la société Distribution Casino France l'empêchant d'établir ses factures sur les économies réellement réalisées à partir de ses recommandations acceptées, la reconnaissance par la société qu'elle a appliqué ces recommandations, son refus de dire le montant des économies réalisées, le caractère non discutable de l'applicabilité de l'article, le fait que la clause pénale doit permettre une rémunération « normale » et le fait que, par rapport aux économies prévisionnelles de 433.728,32 euros ht, la somme retenue par le tribunal et la cour ne correspond qu'à 11, 69% du montant des économies alors qu'une rémunération de 50% de celles-ci avait été convenue.

Elle souligne que son préjudice soit son gain manqué doit être pris en compte et rappelle que l'intimée a refusé de communiquer les éléments pouvant lui permettre de calculer sa rémunération. Elle fait valoir qu'elle ne réclame que les sommes qui lui sont dues dans le cadre de l'application de la convention.

En réponse à la société, elle lui fait grief d'user d'un vocabulaire propre aux actions pénales et de vouloir remettre en cause ses engagements contractuels et les questions tranchées par le jugement et l'arrêt.

Elle rappelle que ceux-ci ont retenu que la société avait manqué à es engagements, que la résolution du contrat devait être prononcée à ses torts et que si les économies escomptées n'ont pas été réalisées, la faute en revient à la société Distribution Casino France qui n'a pas contesté le rapport du 30 mars 2007.

Elle fait valoir que le délai de 15 jours a été contractuellement prévu, que la société dispose de moyens solides pour analyser les rapports et qu'elle-même a attendu plus de deux ans, après de nombreuses relances, pour lui adresser ses notes d'honoraires.

Elle ajoute que la cour a tranché de manière définitive la question de l'acceptation des recommandations.

Elle fait également valoir que la société a refusé de lui communiquer les informations nécessaires au calcul de sa rémunération et n'a jamais soutenu que les informations et documents réclamés par elle n'étaient pas pertinents. Elle excipe du jugement et de l'arrêt qui ont reconnu que ce défaut d'informations suffisantes était entièrement imputable à la société intimée.

Elle fait enfin valoir que les conclusions du rapport ont été considérées par le tribunal et la cour comme irrévocablement acceptées et qu'elles ne peuvent plus être critiquées.

Elle rappelle que le montant de l'indemnité a été fixé d'un commun accord et donc ni contesté ni discuté par la société Distribution Casino France.

Elle déclare qu'elle a librement consenti au protocole d'accord et souligne que le tribunal de commerce a jugé que la société n'a pas respecté ce protocole en ne répondant pas à deux courriers de sa part lui réclamant des documents conformes à l'article 3 du protocole. Elle soutient que c'est en raison de cette carence de la société qu'elle a mis fin à sa mission portant sur les années 2007 à 2010.

Elle rappelle que la responsabilité de l'intimée a été définitivement arrêtée par le jugement et l'arrêt et invoque sa mauvaise foi.

Elle déclare justifier de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile par des factures.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 4 en date du 6 novembre 2015, la SAS Distribution Casino France demande qu'il soit jugé que le préjudice de la société appelante ne saurait excéder la somme de 30.000 euros hors taxes versée au titre du protocole d'accord et que ses demandes soient rejetées.

Subsidiairement, elle demande que l'indemnité soit limitée à la somme de 50.714,99 euros, « déduction faite des 30.000 euros déjà versés ».

Elle réclame le paiement des sommes de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société expose que la société Investissement et Conseil n'a pas su appliquer une méthode de travail adaptée, que le pré rapport était inabouti et qu'elle a elle-même trouvé une solution à ses difficultés. Elle fait état d'informations démesurées et irréalisables demandées par la société appelante y compris après le protocole d'accord.

Elle reproche à l'appelante de développer des arguments rejetés définitivement par la cour de cassation qui a jugé que le débat n'était pas celui de sa rémunération mais de l'indemnité à titre de dommages et intérêts résultant de la clause pénale.

Elle rappelle l'article 1152 du code civil et soutient que l'abus est manifeste dans la définition même de la clause pénale et dans les sommes réclamées.

Elle affirme que la clause pénale est abusivement avantageuse. Elle déclare que la société Investissement et Conseil lui a fait souscrire cette clause en faisant part de sa certitude de lui faire bénéficier d'économies majeures en présentant avantageusement ses compétences.

Elle soutient qu'il est pertinent de revenir sur les éléments contractuels et l'économie générale du contrat pris en compte lors de la souscription de cette clause. Elle considère que retenir isolément la clause pénale revient à annihiler le pouvoir du juge pour apprécier les éléments de fait soumis à son contrôle. Elle prétend que l'appréciation du caractère manifestement disproportionné et abusif de la clause pénale nécessite d'apprécier le dispositif contractuel pris dans son ensemble.

Elle souligne la question des délais qui lui sont imposés alors que l'appelante ' qui était le sachant- n'avait aucun délai précis. Elle affirme que la société Investissement et Conseil connaissait le caractère irréaliste du délai qui lui était imparti. Elle déclare avoir souscrit à cet engagement compte tenu de la certitude avancée par la société de résoudre ses difficultés.

Elle invoque également une disproportion existant dans les obligations des parties en cas de refus par la société Distribution Casino France de suivre ses recommandations.

Elle ajoute que la société Investissement et Conseil avait la maîtrise totale de la teneur et de la qualité des informations à collecter et du montant des économies prévisionnelles et qu'en imposant un délai de 15 jours, elle avait l'assurance de voir ses prestations entérinées sans qu'elle-même puisse les analyser.

Elle lui reproche d'avoir fixé des recommandations techniquement irréalisables pour pouvoir actionner la clause pénale. Elle cite les domaines des emballages et des exportations pour lesquels la société Investissement et Conseil a reconnu que les données seraient difficiles, pour elle, à collecter.

Elle ajoute enfin que la clause pénale repose sur des appréciations arbitraires car fondées non sur des économies réalisées mais sur des économies prévisionnelles et donc virtuelles dont elle a reconnu qu'elles étaient sujettes à variation. Elle affirme qu'elle n'a pu expliquer à l'audience du tribunal de commerce la manière dont elle a chiffré ses factures et prétentions.

Elle lui fait grief d'avoir mis un terme au protocole quatre mois après sa signature afin de réclamer des sommes excessives.

L'intimée soutient que les indemnités réclamées sont disproportionnées et contraires aux méthodes de calcul prévues par la clause.

Elle affirme que la société ne prouve pas que ses diligences justifient des indemnités à hauteur de 259.369,54 euros. Elle fait état d'un travail d'analyse restreint par les difficultés d'extraction des données et observe que la société Investissement et Conseil a qualifié ce travail d'approximatif. Elle lui fait grief d'avoir, pour parvenir à ce résultat, reproduit sur 2006 et 2007 les chiffres retenus en 2005. Elle excipe de factures d'un montant identique. Elle observe qu'en ce qui concerne la société EMC, elle a facturé l'exercice 2007 sur la base des économies réalisées en 2006, plus importantes que celles de 2005.

Elle ajoute que la date du rapport démontre que la société ne pouvait annoncer un chiffre quelconque sur cette année.

Elle lui fait grief de ne pas justifier du montant de l'assiette servant de base de calcul à l'indemnité réclamée. Elle souligne que l'objet même de la mission empêche de projeter les analyses d'une année sur l'autre compte tenu de la variation des ventes. Elle fait valoir que, pour ce motif, l'article 4-4 prévoyait expressément que l'assiette servant de base au calcul de l'indemnité devait se faire exclusivement en fonction de l'évaluation faite dans le rapport sur la base des années de référence.

Elle fait valoir que la société ne justifie pas des chiffres avancés, ne disposant d'aucun document de travail pour 2006 en ce qui concerne Distribution Casino France et pour 2007 en ce qui concerne les deux sociétés. Elle souligne que la société a reconnu ne pas avoir eu d'éléments suffisants. Elle ajoute que le protocole lui confiait une mission au titre de l'année 2007 et en infère qu'aucun travail n'avait été réalisé précédemment ce qui lui interdit de réclamer une indemnisation à ce titre.

Elle estime que la seule indemnité au-delà de la somme de 30.000 euros perçue serait de 50% des sommes de 142.709,16 euros en 2005 et de 18.720,83 euros pour 2006 soit 50.714,99 euros, après déduction de la somme de 30.000 euros.

Elle soutient qu'il résulte des termes employés que la recommandation doit avoir été acceptée par elle et que les modalités de mise en oeuvre des recommandations aient été précisées par la société appelante.

Elle affirme qu'en l'absence de documentation et d'audit réel en 2006 et 2007 pour la société Distribution Casino France et en 2007 pour la société EMC Distribution, il n'y a eu ni recommandation ayant pour origine ces exercices ni acceptation par elle ni modalités de mise en 'uvre. Elle en conclut que la clause pénale ne peut s'appliquer dans ces proportions. Elle reproche à l'appelante d'oublier ses fautes et, notamment, l'absence de recommandation faite par elle.

Elle fait valoir que l'importance des factures ne peut être un élément d'appréciation pour fixer les sommes dues au titre de la clause pénale, la somme de 259.369,54 euros ne correspondant à aucune analyse chiffrée. Elle ajoute que le protocole d'accord avait pour objet d'apurer la situation et de repartir sur de nouvelles bases mais que la société n'a pas effectué, compte tenu des difficultés d'extraction, un travail supplémentaire.

Elle réfute tout manquement délibéré de sa part et observe que la cour a relevé l'égale implication des parties dans le projet et constaté qu'il n'était nullement établi qu'elle n'avait pas exécuté ses obligations de bonne foi.

Elle conteste avoir appliqué les économies et refusé d'en indiquer le montant. Elle invoque le protocole d'accord et déclare qu'elle n'a pas réalisé d'économies et que, pour mettre en 'uvre les recommandations, elle aurait dû déployer de tels moyens qu'elle aurait abouti à un résultat inverse. Elle fait valoir que l'appelante a reconnu ces difficultés. Elle conclut que les recommandations de la société étaient inexploitables et inadaptées car nécessitant des investissements excédant le gain annoncé. Elle ajoute que la société a elle-même reconnu que ses recommandations ne pourraient pas se concrétiser avant juillet 2008 ou 2009.

Elle soutient que la somme de 260.000 euros réclamée est disproportionnée au regard de son travail qui n'a duré que 10 mois.

Elle réfute tout préjudice moral.

Elle invoque un préjudice, la société ayant sollicité la contribution quotidienne de ses services sans trouver de solution viable pour elle.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2015.

*******************

Considérant qu'il résulte des arrêts intervenus que les manquements de la société Distribution Casino France ont été établis, que le droit de la société Investissement et Conseil à être indemnisé a été reconnu, que cette indemnisation doit être calculée en application de l'article 4-4 du contrat et que celui-ci constitue une clause pénale ;

Considérant que la société Distribution Casino France n'est donc pas fondée à contester la clause contractuellement convenue ou à mettre en cause la responsabilité de la société Investissement et Conseil ;

Considérant que, conformément à la convention conclue, l'indemnité est égale à « la moitié des économies prévisionnelles sur la durée des conditions de référence définie sur la base de l'évaluation précisée dans le rapport » ;

Considérant que la société intimée n'a pas critiqué les recommandations contenues dans le rapport déposé le 30 mars 2007 ; qu'elle est donc réputée les avoir acceptées ;

Considérant que doivent dès lors être prises en considération les économies évaluées dans ce rapport ;

Considérant que le rapport a évalué les économies potentielles aux sommes de 126.788,75 euros pour l'année 2005 en ce qui concerne la société Casino et de 15.920,41 euros et de 18.720,83 euros pour les années 2005 et 2006 en ce qui concerne la société EMC Distribution ;

Considérant, d'une part, que les économies envisagées se prolongent ;

Considérant, d'autre part, que la société Investissement et Conseil n'a pu poursuivre sa mission en raison de la carence de la société Distribution Casino France qui ne lui a pas remis les documents nécessaires ;

Considérant, enfin, que l'article 4-4 stipule que l'ensemble des années de référence doit être pris en compte ;

Considérant, par conséquent, que le montant de la clause pénale s'élève à la moitié des économies évaluées sur la base des trois années de référence soit à la somme de 259.369,54 euros ;

Considérant qu'il appartient à la société Distribution Casino France de justifier, en application de l'article 1152 du code civil, que cette clause est manifestement excessive ;

Considérant que ce caractère résulte de la comparaison entre le préjudice effectivement subi et le montant de l'indemnité prévue ; que doivent être appréciés le coût des prestations accomplies et le gain attendu et manqué ;

Considérant que cette somme correspond à la rémunération de la société Investissement et Conseil telle que prévue par le contrat ;

Considérant toutefois que la société Investissement et Conseil n'a pas pu poursuivre sa mission ; qu'elle n'a donc pas dû effectuer de diligences postérieures ; qu'elle a ainsi réalisé des économies ;

Considérant qu'au regard de celles-ci, la clause pénale apparaît manifestement excessive ;

Considérant qu'elle sera réduite à la somme de 200.000 euros ; que la somme de 30.000 euros payée dans le cadre du protocole sera déduite de ce montant ;

Considérant que cette somme sera majorée, conformément à l'article 4-5 de la convention, des intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010 ;

Considérant qu'il sera donné acte à la société Investissement et Conseil des sommes qu'elle déclare avoir perçues à la suite du jugement et de l'arrêt précité ;

Considérant qu'elle ne justifie pas d'un préjudice causé par la résistance de la société Distribution Casino France ; que sa demande de dommages et intérêts sera rejetée ;

Considérant que la société intimée ne rapporte pas la preuve d'une faute de l'appelante ; que sa demande indemnitaire sera rejetée ;

Considérant que la société Distribution Casino France devra payer la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile étant rappelé que cette somme constitue une indemnité dont le montant est fixé en fonction notamment « de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée » ce dont il résulte que celui-ci ne correspond pas nécessairement aux sommes réellement exposées ; que, compte tenu du sens du présent arrêt, la demande aux mêmes fins de l'intimée sera rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la SAS Distribution Casino France à payer à la SARL Investissement et Conseil la somme de 50.714,99 euros et le confirme pour le surplus

Statuant à nouveau de ce chef

Condamne la SAS Distribution Casino France à payer à la SARL Investissement et Conseil la somme de 200.000 euros outre intérêts au taux de 0,50% par mois à compter du 27 juillet 2010,

Précise que la somme de 30.000 euros payée avant l'introduction de la procédure sera déduite,

Y ajoutant

Donne acte à la société Investissement et Conseil qu'elle reconnaît avoir perçu au titre du jugement et de l'arrêt les sommes de 50. 714,99 euros le 15 novembre 2011 et de 15.596,81 euros le 17 février 2014,

Condamne la SAS Distribution Casino France à payer à la SARL Investissement et Conseil la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société Distribution Casino France aux dépens,

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER F.F.,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 14/09222
Date de la décision : 12/01/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°14/09222 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-12;14.09222 ?
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