COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4AF
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 NOVEMBRE 2015
R.G. N° 15/02169
AFFAIRE :
[E] [W]
C/
[G] [I]
...
Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 20 Mars 2014 par le Cour d'Appel de VERSAILLES
N° chambre : 13
N° Section :
N° RG : 13/8642
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 12.11.15
à :
Me Christophe DEBRAY,
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU,
Me Fabienne FOURNIER-LATOURAILLE,
Me Martine DUPUIS,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DOUZE NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDEUR A LA REQUÊTE
d'un(e) Arrêt rendu(e) le 20 Mars 2014 par le Cour d'Appel de VERSAILLES (chambre 13)
et INTIME en cause d'appel
Monsieur [E] [W]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté(e) par Maître Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 14000024
****************
DEFENDEURS A LA REQUÊTE
Maître [G] [I]
[Adresse 2]
[Localité 2]
APPELANT en cause d'appel
Représenté(e) par Maître Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 001439
Maître [T] [Z] ES qualité de Mandataire judiciaire de Maître [G] [I]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté(e) par Maître Fabienne FOURNIER-LATOURAILLE de la SELARL CABINET FOURNIER LA TOURAILLE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 506 - N° du dossier 12.666
INTIME en cause d'appel
Organisme ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
INTIME en cause d'appel
Représenté(e) par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Septembre 2015, Madame Hélène GUILLOU, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER
Par acte d'huissier du 8 octobre 2012, M. [E] [W], avocat, a fait assigner M. [G] [I], avocat, en ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire devant le tribunal de grande instance de Paris.
M. [I] ayant sollicité l'application de l'article 47 du code de procédure civile, le tribunal de grande instance de Paris a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Versailles.
Par jugement rendu le 8 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Versailles a notamment ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. [G] [I], exerçant la profession libérale d'avocat, fixé au 8 octobre 2012 la date de cessation des paiements, ouvert une période d'observation de six mois, désigné Maître [Z] en qualité de mandataire judiciaire.
M. [I] a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 20 mars 2014 la cour d'appel a :
- rejeté la demande de M. [E] [W] tendant à voir déclarer M. [G] [I] irrecevable en son appel,
- annulé le jugement du tribunal de grande instance de Versailles en date du 8 novembre 2013 qui a ouvert la procédure de redressement judiciaire de M. [G] [I],
- condamné le Trésor public aux dépens et dit qu'ils pourront être recouvrés par les avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de Maître [Z] ès qualités de voir fixer le montant de ses frais et émoluments,
- rejeté toutes les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 18 décembre 2014, la cour d'appel de Versailles, saisie d'une requête en interprétation de son arrêt du 20 mars 2014 lui demandant de se prononcer sur la signification exacte de son arrêt, a rejeté la demande.
Le tribunal de grande instance de Versailles s'étant considéré toujours saisi de l'instance introduite par l'assignation du 8 octobre 2002, il a, par jugement du 3 octobre 2014, ouvert la liquidation judiciaire de M. [I], fixé au 3 avril 2013 la date de cessation des paiements et désigné Maître [Z] en qualité de liquidateur.
Ce jugement a été annulé par arrêt du 2 avril 2015, lequel a été frappé d'un pourvoi en cassation le 1er juin 2015.
Entre temps, par requête du 20 mars 2015, M. [W] a saisi la cour d'appel d'une requête en omission de statuer sur le fondement de l'article 463 du code de procédure civile visant l'arrêt du 20 mars 2014.
Il fait grief à la cour de n'avoir pas vidé sa saisine en ouvrant une procédure de liquidation judiciaire ou, subsidiairement, de redressement judiciaire à l'encontre de M. [I] par application de l'article R.631-6 du code de commerce.
Par conclusions du 8 juillet 2015 M. [I] a demandé à la cour de :
- déclarer irrecevable M. [W] en sa requête sur le fondement de l'article 463 du code de procédure civile,
subsidiairement :
- débouter purement et simplement M. [W] des fins de sa requête du 20 mars 2015,
dans tous les cas :
- le condamner à 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le caractère abusif de cette nouvelle procédure,
- le condamner à la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens.
Par conclusions du 10 juillet 2015, M. [W] a déclaré se désister de sa requête en omission de statuer.
M. [I] n'a pas accepté le désistement d'appel et a maintenu ses demandes
incidentes.
Dans ses dernières conclusions du 28 septembre 2015, M. [W] demande à la cour de :
- lui donner acte du désistement de sa requête en omission de statuer en l'état du pourvoi dont il a frappé l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 2 avril 2015,
- débouter M. [I] de toutes ses demandes,
- condamner M. [I] à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 25 septembre 2015, M. [I] demande à la cour:
- constater que M. [I] s'oppose au désistement de M. [W] sur sa requête article 463 du code de procédure civile,
- dire que sa requête ne saurait faire partie de conclusions signifiées le 28 janvier 2014 et est bien accrochée à l'arrêt du 20 mars 2014,
- constater que M. [I] a intérêt à ce qu'il soit statué sur cette requête aux regards des motifs invoqués devant la Cour de cassation sur le pourvoi contre l'arrêt du 2 avril 2015,
- dire M. [W] irrecevable en ses critiques et ses demandes en rapport avec l'arrêt du 2 avril 2015,
au fond :
- déclarer M. [W] irrecevable et subsidiairement mal fondée en sa requête sur le fondement de l'article 463 du code de procédure civile pour critiquer l'arrêt du 20 mars 2014,
subsidiairement :
- débouter purement et simplement M.[W] des fins de sa requête du 20 mars 2015 et de sa supplique concernant l'arrêt du 2 avril 2015,
dans tous les cas :
- le condamner à 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le caractère abusif de cette nouvelle procédure,
- le condamner à la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens.
Par conclusions du 24 septembre 2015, l'ordre des avocats du Barreau de Paris a
déclaré s'en rapporter à justice sur les mérites de la requête.
Le ministère public a visé la procédure le 4 septembre 2015 sans conclure.
SUR CE,
Considérant que le désistement de M. [W] n' est pas parfait au sens des
dispositions de l'article 395 du code de procédure civile puisqu'il est intervenu après que le défendeur ait présenté une fin de non recevoir ainsi que sa défense au fond ;
Considérant que M. [I] soutient que le désistement n'étant pas parfait, il a intérêt à ce qu'il soit statué sur la requête notamment au regard du pourvoi en cassation formé contre l'arrêt du 2 avril 2015 par M. [W], et que ce dernier, par ses conclusions du 23 septembre 2015, renonce à son désistement, plaide au fond et excipe de son indigence pour obtenir clémence ; que cette requête est irrecevable puisqu'il demande par cette voie le prononcé d'une liquidation judiciaire ou subsidiairement d'un redressement judiciaire, ce qui s'analyse en une demande de rétractation d'arrêt et en outre nie l'arrêt du 2 avril 2015; que, sur le fond, la requête est mal fondée, l'article R 631-6 du code de commerce n'ouvrant à la cour d'appel qu'une faculté et l'acte introductif d'instance ayant été annulé par la cour, de sorte que celle-ci n'était pas saisie par l'effet dévolutif ;
Considérant que M. [W] réplique que l'arrêt du 20 mars 2014 n'ayant pas, dans son dispositif, annulé l'acte introductif d'instance, le tribunal de grande instance a réinscrit l'affaire au rôle et prononcé la liquidation judiciaire de M. [I] par jugement du 3 octobre 2014 ; que c'est à bon droit qu'il a saisi la cour d'une requête en omission de statuer dans le délai d'un an de son prononcé, M. [W] estimant que la cour, même si elle annulait le jugement du 8 novembre 2013 pouvait, par application de l'article R631-6 du code de commerce se prononcer sur l'état de cessation des paiements de M. [I] ; que l'arrêt du 2 avril 2015 ayant annulé le jugement du 3 octobre 2014, il a formé un pourvoi contre cette décision et a considéré que dès lors, quels qu'en soient les mérites, la requête en omission de statuer n'avait plus lieu d'être maintenue ;
Considérant que le désistement de M. [W] n'étant pas parfait, faute
d'acceptation de M. [I], il convient de se prononcer sur la recevabilité de la requête en omission de statuer et sur son bien fondé ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que la requête en omission de statuer a été présentée dans le délai prévu à l'article 463 du code de procédure civile ; qu'elle est donc recevable ; que le fait qu'elle puisse produire les effets d'une demande de rétractation d'un arrêt ou 'nier' l'existence d'un autre arrêt, ne la rend pas irrecevable, cette question relevant de son bien fondé ;
Sur le bien fondé de la requête:
Considérant que M. [W] reproche à l'arrêt de n'avoir pas statué sur la demande de confirmation de la demande de redressement judiciaire de M. [I], alors que l'article R 631-6 du code de commerce lui en donnait le pouvoir ;
Considérant que l'arrêt du 20 mars 2014, objet de la requête, indique en ses motifs: ' La nullité du jugement est donc encourue de ces deux motifs et la nullité affectant la saisine du tribunal, la cour n'est pas saisie par l'effet dévolutif et ne peut faire application de l'article R. 631-6 du code de commerce' ; qu'elle a ainsi répondu à la demande tendant à voir faire application de l'article R 631-6 du code de commerce par le prononcé d'une mesure de redressement judiciaire et rappelé qu'elle n'était pas saisie par l'effet dévolutif de l'appel ; qu'en annulant le jugement du 8 novembre 2013 elle a statué sur ces demandes ; que la requête en omission de statuer est donc mal fondée ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive:
Considérant que M. [I] fait valoir qu'il a été expliqué à plusieurs reprises à M. [W] que l'annulation de la saisine du tribunal de Versailles ne permettait pas à la cour de se prononcer sur une demande de redressement judiciaire, l'effet dévolutif de l'appel n'ayant pu jouer en cette hypothèse ; que la réitération à trois reprises de la même demande dépasse largement l'attachement d'un plaideur à plaider sa cause et justifie que celui-ci soit condamné à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Considérant que M. [W] réplique que dès qu'il a frappé de pourvoi l'arrêt du 2 avril 2015 ayant annulé le jugement du 3 octobre 2014, il a renoncé à sa requête en omission de statuer et s'est désisté de sa requête ; qu'il est étranger aux erreurs procédurales commises par le ministère public et le tribunal de grande instance de Versailles ; qu'il serait donc inéquitable de prononcer contre lui une condamnation à des dommages-intérêts qui réduiraient certes la dette de M. [I] à son égard mais ne sont pas en proportion de la pension de retraite qu'il perçoit désormais, à 83 ans ;
Considérant que M. [W] s'est désisté de sa demande dès qu'il lui est apparu qu'elle n'avait plus lieu d'être en raison du pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel en date du 2 avril 2015 qui a rappelé que c'était à tort que le tribunal s'était estimé toujours saisi d'une demande de redressement judiciaire contre M. [I] ; que cette erreur, partagée, ne peut suffire à caractériser un abus du droit d'agir ; que M. [I] sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts ;
Considérant que ce désistement n'étant intervenu que trois mois après l'arrêt rendu par la cour et plus d'un mois après qu'un pourvoi ait été interjeté contre cette décision, M. [W] a contraint M. [I] à engager des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge ; que M. [W] sera condamné à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il sera débouté de la demande qu'il forme contre M. [I] à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,
Constate que le désistement de M. [E] [W] n'est pas parfait faute d'avoir été accepté par M. [I],
Déclare la requête en omission de statuer formée par M. [W] recevable,
La déclare mal fondée,
Déboute M. [I] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
Condamne M. [E] [W] à payer à M. [G] [I] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande formée par M. [W] sur ce fondement,
Condamne M. [E] [W] aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Madame Karine MOONEESAWMY, adjoint administratif, assermenté, faisant fonction degreffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,