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29/09/2015 | FRANCE | N°14/04547

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 29 septembre 2015, 14/04547


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



AP

Code nac : 30F



12e chambre section 2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 SEPTEMBRE 2015



R.G. N° 14/04547



AFFAIRE :



SAS CARREFOUR PROPERTY FRANCE





C/

SARL HAIR FLORE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Mai 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 08

N° Section :

N° RG : 14/02329


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Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA,

Me Franck LAFON







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

AP

Code nac : 30F

12e chambre section 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 SEPTEMBRE 2015

R.G. N° 14/04547

AFFAIRE :

SAS CARREFOUR PROPERTY FRANCE

C/

SARL HAIR FLORE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Mai 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 08

N° Section :

N° RG : 14/02329

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA,

Me Franck LAFON

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS CARREFOUR PROPERTY FRANCE

N° SIRET : 775 632 169

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE-FLICHY-MAIGNE-DASTE & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 017236

Représentant : Me François MEUNIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R022

APPELANTE

****************

SARL HAIR FLORE

N° SIRET : 332 910 504

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20140465

Représentant : Me Leslie FONTAINE-LOUZOUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A443

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Juin 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Greffier FF, lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,

Par acte du 26 avril 1995, la société Primistères, aux droits de laquelle vient la société Carrefour Property France, a donné à bail à la société Image In, désormais Hair Flore, des locaux destinés à l'exploitation d'un salon de coiffure situés [Adresse 1] (92), dépendant d'un centre commercial désormais dénommé Carrefour Market.

Le bail est tacitement reconduit depuis le 25 juillet 2004.

Par lettre du 30 mai 2012, la gérante de la société s'est plainte auprès de son bailleur de l'insécurité régnant dans le centre et le parking attenant et a déclaré avoir été agressée le 21 avril 2012.

Par courrier du 25 mars 2013, elle a signalé au syndic du syndicat des copropriétaires l'existence d'infiltrations d'eaux dans son commerce.

Par courrier du 21 novembre 2013, elle a déclaré à son assureur que les fuites se poursuivaient.

Par lettre du 11 avril 2013, la société Hair Flore s'est plainte auprès de son bailleur du mauvais entretien du centre commercial et de l'insécurité.

Par courrier du 14 mai 2013, elle lui a rappelé la lettre du 11 avril et a déclaré ne pas avoir pu ouvrir, le 30 avril, son commerce en raison de ces détériorations, la porte d'entrée de la partie commune lui permettant d'accéder à son salon de coiffure.

Par acte du 19 juillet 2013, la SAS Carrefour Property France a fait signifier à la SARL Hair Flore un commandement, visant la clause résolutoire, de lui payer la somme de 17.996,78 euros au titre de loyers et charges impayés.

Par lettre du 6 décembre 2013, la société Hair Flore a demandé que soit prononcée la résiliation du bail aux torts exclusifs du bailleur et que lui soit allouée une indemnité de 101.727 euros correspondant à la moyenne de son chiffre d'affaires des trois dernières années.

Par acte du 7 février 2014, la société Hair Flore, autorisée à cet effet, a fait assigner à jour fixe la société Carrefour Property France devant le tribunal de grande instance de Nanterre.

Par jugement du 2 mai 2014, le tribunal a écarté des débats la pièce numéro 7 communiquée par la société Hair Flore soit un procès-verbal de constat d'huissier établi à la demande la société Just'Optic à la suite d'une ordonnance sur requête qui a été rétractée.

Il a prononcé la résiliation du bail aux torts de la société Carrefour Property France.

Il a condamné celle-ci à verser à la société Hair Flore les sommes de :

15.000 euros en indemnisation de son trouble de jouissance

4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a ordonné une expertise afin d'apprécier les autres préjudices invoqués par la société Hair Flore soit la perte du fonds de commerce ou à tout le moins du droit au bail et la perte de clientèle.

Il a ordonné l'exécution provisoire de tous ces chefs.

Par déclaration du 14 juin 2014, la société Carrefour Property France a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 3 en date du 8 juin 2015, la SAS Carrefour Property France sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a écarté des débats la pièce adverse numéro 7 et son infirmation pour le surplus.

Elle conclut au rejet des demandes de la société Hair Flore et au prononcé de la résiliation du bail aux torts exclusifs de celle-ci.

Elle réclame le paiement d'une somme de 58.903,22 euros au titre des loyers impayés.

Elle demande le versement d'une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société demande que soit écarté des débats le constat d'huissier établi à la demande de la société Just' Optic à la suite d'une ordonnance sur requête qui a été rétractée. Elle estime qu'en conséquence de cette rétractation, le procès-verbal de constat est nul et non avenu et ne peut être produit.

Elle s'oppose à la résiliation du bail demandée par la locataire.

En ce qui concerne les problèmes d'insécurité, elle invoque l'article 1725 du code civil qui interdit toute action en garantie pour des voies de fait commises par des tiers. Elle ajoute que cette action est d'autant moins justifiée que le preneur a renoncé, aux termes du bail, à « toute action en responsabilité contre le bailleur en cas de vol ou tout acte délictueux commis dans les lieux loués ou les parties communes, le bailleur n'assurant lui-même aucune obligation de surveillance ». Elle se prévaut d'arrêts jugeant une telle clause opposable au preneur.

Elle soutient, en outre, que la société ne démontre pas en quoi ces problèmes d'insécurité entraînent une impossibilité absolue d'exploiter les locaux et considère, citant des arrêts, qu'à défaut de rapporter cette preuve, la société ne peut solliciter la résiliation du bail.

Elle ajoute qu'elle a elle-même fait appel à une société de surveillance ce qui exclut toute faute de sa part et que l'intimée s'est plainte auprès de la mairie en lui demandant de mettre en place un dispositif de sécurité efficace.

En ce qui concerne l'entretien des lieux loués, elle soutient que le constat d'huissier dressé le 9 janvier 2014 à la demande de la société Hair Flore ne recense pas de désordres significatifs et suffisants pour entraîner la résiliation du bail.

Elle fait valoir qu'il ne précise pas l'origine des infiltrations d'eau et qu'un dégât des eaux n'est pas suffisant pour justifier une résiliation du bail.

Elle affirme que les photographies produites ne permettent ni d'évaluer l'importance des désordres ni de mesurer leur impact sur le commerce.

Elle déclare que, s'agissant des parties communes, il indique seulement que certaines cellules sont fermées et ne démontre pas que les lieux sont insalubres ou abandonnés. Elle estime non transposable l'arrêt invoqué, la galerie ayant alors été transférée sur un autre site et les lieux laissés à l'abandon.

Elle affirme démontrer, par des photographies, que la galerie est bien achalandée et les parties communes entretenues. Elle déclare avoir, durant la période écoulée, dépensé plus de 440.000 euros pour la rénovation du centre et précise que la société Just' Optic a renoncé à demander la résiliation du bail.

En ce qui concerne la commercialisation, elle soutient, citant un arrêt, qu'elle n'est tenue à une obligation de commercialisation que si celle-ci est prévue au bail. Elle déclare que tel n'est pas le cas. Elle ajoute que, de 2007 à 2014, le taux d'occupation des cellules n'a jamais été inférieur à 84,62%.

Elle en conclut que les griefs invoqués ne sont pas suffisants pour justifier la résiliation du bail à ses torts.

Elle fait valoir qu'aucune indemnité d'éviction ne peut être due en l'absence de congé et qu'une indemnité de résiliation équivalente à la valeur du fonds ne peut être justifiée compte tenu du caractère non fondé de la demande de résiliation.

Elle conteste tout préjudice et tout lien de causalité avec les faits qui lui sont reprochés. Elle rappelle que le fonds n'a pas disparu et affirme qu'il n'est pas justifié que la baisse du chiffre d'affaires est due à sa carence.

Elle relève que sa gérante voulait céder son fonds en 2007 et faire valoir ses droits à la retraite et lui reproche de n'avoir pas fait les travaux nécessaires pour rendre son salon attractif.

Elle affirme que, durant cette période, les autres locataires n'ont pas enregistré de baisse significative de leur chiffre d'affaires, celui de la société Just'Optic évoluant ainsi de 459.025 euros en 2010 à 514.216 euros en 2011 et 489 .881 euros en 2012 et la valeur de son fonds étant multipliée par 10 de 2007 à 2014. Elle précise que le chiffre d'affaires du magasin Carrefour Market, « locomotive » du centre, est demeuré stable, étant de 8.380.322 en 2011 et de 8.376.683 euros en 2013 soit proche de son chiffre de 2008, 8.795.180 euros.

Elle réfute tout trouble de jouissance et estime que cette demande fait double emploi avec celle d'une indemnité de résiliation.

A titre reconventionnel, elle sollicite la résiliation du bail aux torts de la société, celle-ci ne payant plus les loyers et n'exploitant plus les lieux. Elle précise que, par lettre du 10 octobre 2014, l'intimée a indiqué qu'elle entendait restituer les clefs du local, déclarant qu'elles sont à sa disposition depuis le 2 mai 2014.

Elle affirme qu'elle a changé la serrure de la porte de secours mais pas les clefs du local et qu'elle n'a pas repris, alors, possession des lieux.

Elle déclare que les clefs ne lui ont été restituées que par lettre du 4 mai 2015 et réclame les loyers impayés à cette date.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 2 en date du 4 mai 2015, la SARL Hair Flore demande que le jugement soit infirmé en ce qu'il a écarté la pièce numéro 7 et condamné la société Carrefour Property France à lui payer la somme de 15.000 euros en réparation de son trouble de jouissance.

Elle demande que cette pièce soit déclarée recevable et que la société soit condamnée à lui payer la somme de 70.000 euros au titre du trouble de jouissance.

Elle sollicite la confirmation des autres dispositions du jugement et le paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société expose qu'elle n'a pu, compte tenu de l'état du centre, céder son fonds de commerce alors que sa gérante avait acquis ses droits à la retraite. Elle déclare s'en être plainte au syndic compte tenu de l'inertie du bailleur, précise que 5 magasins sur 8 sont demeurés ouverts et que, fin 2011, le bailleur a même muré la devanture des locaux. Elle ajoute qu'elle a été agressée et injuriée à plusieurs reprises puis subi des dégâts des eaux et fait état d'un constat dressé par un huissier de justice à la demande la société Just'Optic.

Elle observe que l'ordonnance rétractant l'ordonnance ayant autorisé la société Just'Optic à faire établir un constat d'huissier ne concerne que l'instance opposant la société Carrefour Property à cette société et affirme pouvoir se prévaloir dudit constat à titre indicatif.

Elle rappelle que le bailleur doit garantir au preneur une jouissance paisible des locaux et, notamment, procéder aux réparations nécessaires.

Elle déclare que, dans son local, coulent des eaux usées de manière continue notamment sur les installations électriques ce qui entraîne des pannes de courant et expose ses salariés et clients à des risques. Elle excipe d'un rapport du service « sortie de secours ».

Elle indique avoir déclaré ces sinistres à son assureur.

Elle se prévaut d'un constat d'huissier et souligne qu'elle a dénoncé à plusieurs reprises les faits au bailleur.

Elle ajoute que d'autres commerçants ont assigné, pour les mêmes faits, la société appelante.

Elle affirme que quelques travaux ont été entrepris notamment après le jugement querellé mais déclare qu'ils n'ont pas pallié les désordres.

Elle reconnait que le bail, conclu en 1985, prévoit que le bailleur n'assurera pas d'obligation de surveillance mais observe que les choses ont évolué et que la société assurait la surveillance de la galerie. Elle souligne que cette surveillance a entraîné une hausse de près de 70% de ses charges de 2011 à 2013 et estime que la société appelante ne peut encaisser les charges sans assurer l'obligation correspondante.

Elle soutient que l'inertie du bailleur l'a empêchée d'exploiter son commerce étant précisé qu'elle n'a qu'une salariée. Elle invoque donc un manquement du bailleur à ses obligations prescrites à l'article 1719 du code civil. Elle réclame en conséquence la résiliation du bail.

Elle affirme que le bailleur y a acquiescé en demandant la restitution des clefs et en changeant les serrures.

Elle fait valoir que la résiliation entraîne la perte du fonds ce qui justifie le versement d'une indemnité de résiliation.

Elle déclare que sa gérante ne peut reprendre son travail pour des raisons médicales et que son unique salariée est également arrêtée à la suite de l'agression de sa patronne ce dont il résulte que le salon est fermé depuis novembre. Elle indique qu'elle n'a, ainsi, plus de recette ce qui l'empêche de payer son loyer et ses charges alors qu'elle s'en était toujours acquittée auparavant.

Elle fait valoir qu'elle a été privée, en raison du défaut d'entretien du bailleur des parties communes, des avantages qu'elle retirait du bail soit du flux de chalands et de sa propre clientèle. Elle fait état d'une baisse de son chiffre d'affaires passé de 93.362 euros en 2010 à 78.140 euros en 2012, baisse supérieure à celle des salons de coiffure ainsi que le précise l'expert dans son pré rapport. Elle déclare que l'appelante n'a pas, contrairement aux demandes de l'expert, communiqué le chiffre d'affaires des locataires autres que Just'Optic et observe que le chiffre d'affaires de la société Carrefour Market a lui-même baissé. Elle rappelle qu'elle a ouvert ses droits à la retraite et déclare ne pas avoir pu vendre le fonds compte tenu de son état. Elle demande la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné une expertise.

Elle affirme subir un trouble de jouissance évident compte tenu de l'état du centre commercial, des infiltrations dans son salon et des coupures d'électricité consécutives. Elle déclare avoir dû fermer son salon en décembre, le meilleur mois, ce qui l'a empêchée de payer ses salariés. Elle reproche à son bailleur de n'avoir pas pris les mesures nécessaires. Elle excipe d'un constat d'huissier du 29 janvier 2014 démontrant la persistance de fuites d'eau, de problèmes d'éclairage et de signalétiques et l'impossibilité d'utiliser les WC du centre. Elle ajoute que ses charges ont augmenté de manière exponentielle. Elle sollicite le paiement d'une somme de 70.000 euros de ce chef.

Elle déclare qu'elle a cessé toute exploitation depuis décembre 2013 et qu'elle a demandé, depuis le jugement, les modalités de restitution des clefs. Elle ajoute que l'appelante a repris possession des locaux, changé les serrures et effectué des travaux. Elle s'oppose donc au paiement d'une indemnité d'occupation et des arriérés de charges.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 mai 2015.

******************

Sur la pièce numéro 7

Considérant que cette pièce est constituée d'un constat dressé le 3 mai 2012 par Maître [Z], huissier de justice, à la demande la société Just'Optic agissant sur le fondement d'une ordonnance sur requête rendue le 20 juillet 2012 par le président du tribunal de grande instance de Nanterre ;

Considérant que, par ordonnance du 26 février 2013, cette ordonnance a été rétractée ; que le juge des référés a, en conséquence de cette rétractation, ordonné à la société Just'Optic de remettre à la société Carrefour Property France notamment les originaux et les copies du procès-verbal dressé par l'huissier;

Considérant que l'ordonnance du 20 juillet 2012 est ainsi nulle et non avenue ; que ce caractère non avenu s'impose à tous, peu important que la société Hair Flore n'ait pas été partie à la procédure de rétractation ;

Considérant que le procès-verbal de Maître [Z] est donc privé de son fondement ;

Considérant que son constat ne peut dès lors être invoqué ; que la pièce numéro 7 produite par l'intimée sera écartée des débats ; que le jugement sera confirmé de ce chef;

Sur la résiliation

Considérant que le bailleur a, aux termes de l'article 1719 du code civil, l'obligation d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur ;

Considérant que la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques ; que le manquement d'une des parties à ses obligations peut entraîner la résiliation du contrat ;

Considérant que le manquement du bailleur à ses obligations peut donc justifier la résiliation du bail à ses torts ;

Considérant que la société Carrefour Property France est propriétaire des autres magasins du centre commercial ;

Considérant que la gérante de l'intimée a été victime de vols avec violences les 21 avril 2012 et 27 novembre 2013 et d'injures et menaces le 2 février 2011 commis dans le parking du centre commercial;

Considérant que Monsieur [D] et Madame [E] témoignent, dans des attestations des 21 et 16 janvier 2014, de l'insécurité régnant dans le centre commercial ;

Considérant qu'en application de l'article 1725 du code civil, le bailleur ne doit pas garantie en cas de voies de fait commises par des tiers ; que le bail stipule que le bailleur n'assure aucune obligation de surveillance ; que la sécurité ne relève donc pas de ses obligations ;

Mais considérant que la société bailleresse a facturé des charges de « surveillance sécurité » ;

Considérant qu'elle doit donc justifier de prestations correspondant à ces charges ;

Considérant qu'elle ne verse aux débats aucune pièce précisant les diligences accomplies par elle à ce titre ;

Considérant qu'elle ne rapporte donc pas la preuve qu'elle a rempli son obligation, de moyen, de ce chef ;

Considérant que la société Hair Flore verse aux débats des courriers en date des 30 mai 2012, 11 avril 2013 et 6 décembre 2013 aux termes desquels elle se plaint du mauvais entretien des locaux, communs et privés et une pétition dans laquelle les commerçants de la galerie se plaignent du mauvais état de la sortie de secours donnant accès à leurs magasins ; que le contenu de ces courriers n'a pas été contesté;

Considérant qu'elle verse également aux débats un constat dressé, à sa demande, par la SCP Fouillade-Duguet, huissier de justice, le 9 janvier 2014 ;

Considérant que l'huissier a constaté, dans le salon de coiffure, qu'une avancée abritant une conduite d'eau présentait une grande excavation partiellement obturée, que la peinture du mur concerné était boursouflée et cloquée et que du salpêtre apparaissait ; qu'il a relevé, sur cette paroi, des coulures d'eau rouillée, des cloques et une fissure verticale ; qu'il a noté qu'un autre mur était dans un état similaire ; qu'il a ajouté que des spots ne fonctionnaient pas en raison des risques de court-circuit et que les spots extérieurs permettant l'éclairage de la boutique ne fonctionnaient pas davantage ;

Considérant que les photographies produites attestent de l'importance des désordres alors que l'huissier a précisé que la galerie marchande avait fait l'objet d'une récente réfection ;

Considérant que la gérante de la société a procédé le 30 avril 2013 à une déclaration de main-courante, non contestée, dans laquelle elle a indiqué n'avoir pu travailler car n'ayant pu ouvrir la porte d'entrée, détériorée, de la partie commune menant au salon ;

Considérant que ces pièces démontrent l'existence de manquements de la société bailleresse à ses obligations ; que les travaux engagés en vue de réhabiliter la galerie commerciale ont été tardifs et n'ont pas été complets ainsi qu'il résulte du constat du 9 janvier 2014;

Considérant que l'incidence de ces manquements doit être appréciée au regard de l'activité exercée ; que la société Hair Flore exploite un salon de coiffure ; que celui-ci doit présenter un certain attrait ; que les clients y demeurent davantage que dans d'autres boutiques du centre ;

Considérant que l'état du salon tel que décrit par l'huissier et les courriers et déclarations de main courante démontrent que les manquements de la société bailleresse à ses obligations empêchent l'exploitation des locaux loués ;

Considérant que la résiliation du bail aux torts du bailleur sera dès lors prononcée ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les préjudices

Considérant que ces manquements, qui ont duré plusieurs années, ont causé à la société un trouble de jouissance incontestable ; que, compte tenu de leur durée et de leur importance, une somme de 15.000 euros sera allouée en réparation ; que le jugement sera confirmé ;

Considérant que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a ordonné une mesure d'instruction afin de lui permettre d'apprécier les autres préjudices invoqués et en ce qu'il a sursis à statuer de ces chefs ;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera confirmé en son intégralité ;

Considérant que la résiliation du bail a été prononcée avec exécution provisoire ; que les loyers postérieurs ne sont pas dus ; que la société appelante ne peut donc réclamer le paiement de ces « loyers » ; que sa demande reconventionnelle sera rejetée ;

Considérant qu'il sera alloué à la société Hair Flore la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que, compte tenu du sens du présent arrêt, la demande de l'appelante aux mêmes fins sera rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 2 mai 2014 par le tribunal de grande instance de Nanterre

Y ajoutant,

Condamne la SAS Carrefour Property France à payer à la SARL Hair Flore la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société Carrefour Property France aux dépens,

Autorise Maître [P] à recouvrer directement à son encontre les dépens qu'il exposés sans avoir reçu provision,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f.f. Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 14/04547
Date de la décision : 29/09/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°14/04547 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-29;14.04547 ?
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