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02/06/2015 | FRANCE | N°13/07292

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 02 juin 2015, 13/07292


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





AP





Code nac : 30B



12e chambre section 2



ARRET N°



contradictoire



DU 02 JUIN 2015



R.G. N° 13/07292



AFFAIRE :



SARL LA BRAZERADE





C/

SNC LES FALAISES RCS NANTERRE 421 790 940









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 12 Septembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 03

N° Section

:

N° RG : 11/01152



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Yves BEDDOUK

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DEUX JUIN DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appe...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

AP

Code nac : 30B

12e chambre section 2

ARRET N°

contradictoire

DU 02 JUIN 2015

R.G. N° 13/07292

AFFAIRE :

SARL LA BRAZERADE

C/

SNC LES FALAISES RCS NANTERRE 421 790 940

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 12 Septembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 03

N° Section :

N° RG : 11/01152

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Yves BEDDOUK

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX JUIN DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SARL LA BRAZERADE

N° SIRET : 325 81 6 6 688

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentant : Me Yves BEDDOUK de la SELARL FIDU-JURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 13 - N° du dossier 26418

APPELANTE

****************

SNC LES FALAISES RCS NANTERRE 421 790 940

N° SIRET : 421 79 0 9 400

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 001372 -

Représentant : Me Jérôme NORMAND substitué par Me Samia BENDAIF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1452

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Avril 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie SAUVADET,

La SNC Les Falaises est propriétaire du centre commercial « [Établissement 1] » à [Localité 2] (78).

Par actes des 1 er mars et 17 avril 1978, la société Cel Sa, aux droits de laquelle vient la société Les Falaises, a donné à bail à la société Hippolyte un local de 307 m² à usage de restaurant, spectacle, discothèque et bar pour une durée de 9 ans à compter du 1er mars 1978.

Le bail prévoit que le preneur devra régler au bailleur « en totalité, les quote-parts des charges ou honoraires de gestion lui incombant... pour les dépenses de gestion propres au centre commercial et le cas échéant pour la participation dudit centre aux charges générales de l'ensemble immobilier ». Il prévoit également que le preneur devra rembourser au bailleur « la quote-part de tous frais et charges afférents à l'entretien et à l'utilisation des parkings ».

Il définit les parties communes et les charges des parties communes dont il dresse une liste en précisant que celle-ci est purement énonciative.

Le bail stipule que « la part des charges sera calculée provisionnellement sur la base de 30% du loyer, payable en même temps que le loyer. De même, un réajustement viendra lors du dernier terme de l'année de location ou du terme suivant ».

Par acte des 30 septembre et 21 octobre 1982, la société Hippolyte a cédé son droit au bail à la SARL La Brazerade.

Par acte du 15 décembre 1995, les parties ont renouvelé le bail pour une durée de 9 ans.

Les clauses précitées n'ont pas été modifiées.

Par acte du 13 mars 2006, la SNC Les Falaises a fait délivrer à la SARL La Brazerade un congé à effet au 30 septembre 2006 avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction.

Par ordonnance du 11 janvier 2007, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles, saisi par la société Les Falaises, a ordonné une expertise confiée à Monsieur [U] afin de recueillir les éléments permettant de fixer les indemnités d'éviction et d'occupation.

Par acte du 2 février 2007, visant l'article L 145-17 du code de commerce, la société Les Falaises a sommé la société La Brazerade de lui payer la somme principale de 83.930,30 euros correspondant à un arriéré de loyers.

La société a signifié une protestation à sommation.

Par acte du 8 mars 2007, la société Les Falaises a notifié un refus de renouvellement sans indemnité d'éviction pour motif grave et légitime.

Par acte du 24 mai 2007, la société Les Falaises a fait assigner la société La Brazerade devant le tribunal de grande instance de Versailles afin, en principal, que celui-ci déclare valable le refus de renouvellement sans indemnité et prononce son expulsion.

Par ordonnance du 21 décembre 2007, le juge chargé du contrôle des expertises a suspendu les opérations d'expertise dans l'attente du jugement à intervenir sur l'assignation délivrée le 24 mai 2007.

La société La Brazerade a libéré les locaux le 29 juin 2007 et remis les clefs.

Par jugement du 22 octobre 2009, le tribunal de grande instance de Versailles a jugé que la société La Brazerade avait droit au paiement d'une indemnité d'éviction et ordonné une expertise confiée à Monsieur [U] pour lui permettre de l'évaluer.

Il a également demandé à l'expert de se faire communiquer tous documents afin d'établir l'assiette de calcul des charges et leur montant exact de 2002 à 2007 inclus.

Par arrêt du 13 janvier 2011, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement et ordonné le renvoi de la cause devant le tribunal aux fins de poursuite des opérations d'expertise.

Par arrêt du 31 mai 2012, la cour de cassation a rejeté le pourvoi de la société Les Falaises.

L'expert a déposé son rapport le 22 mars 2012.

Il a décrit la discothèque.

Il a considéré que l'éviction entraînait la perte du fonds, précisant qu'il n'avait pas trouvé de site et de locaux équivalents.

Il a évalué à la somme de 290.000 euros l'indemnité d'éviction principale et à celle de 37.351 euros les indemnités accessoires soit une indemnité d'éviction de 327.351 euros.

Il a estimé à 56.379 euros, hors taxes et hors charges, l'indemnité d'occupation annuelle due du 30 septembre 2006 au 29 juin 2007 soit 204,50 euros par m² pour une surface de 307 m² avec un abattement de 10% pour précarité.

Il a retenu les créances du bailleur pour les sommes de 34.200 euros ttc au 31 décembre 2003 et de 131.547,80 euros au 30 juin 2007.

Monsieur [U] a, en ce qui concerne « la méthode des barèmes », déclaré qu'un fonds de commerce de discothèque s'évaluait entre 80 et 150% du chiffre d'affaires moyen hors taxes. Il a relevé qu'à l'exception de l'exercice du 1er juillet 2004 au 30 juin 2005, le chiffre d'affaires était en diminution passant, en ce qui concerne les marchandises vendues, de 369.662 euros durant l'exercice précité à 283.417 euros puis à 211.953 euros du 1 er juillet 2006 au 30 juin 2007. Il a estimé à 100% du chiffre d'affaires hors taxes la valeur du fonds soit, sur la moyenne des trois derniers exercices, 289.650 euros. il a noté que les productions vendues, recettes cigarettes et locations diverses, s'étaient élevées aux sommes de 15.010 euros du 1er juillet 2003 au 30 juin 2004 et de 2.247 euros, 1.672 euros et 0 euro pour les exercices suivants.

Il a, en ce qui concerne « la méthode EBE », retenu un Excédent Brut d'Exploitation constitué des résultats d'exploitation et des dotations aux amortissements de 79.403 euros du 1 er juillet 2014 au 30 juin 2015, de 31.611 euros pour l'exercice suivant et négatif de 64.609 euros pour le dernier exercice. Il en a conclu à un EBE moyen de 46.405 euros. Il a refusé de déduire des charges les sommes reversées aux organisateurs de soirées, celles-ci correspondant au fonctionnement normal d'une discothèque car permettant d'élargir ou de cibler une clientèle. Il a appliqué un coefficient de situation de 7 compte tenu de l'accessibilité en voiture depuis deux autoroutes, du parking et de l'absence d'habitation à proximité. Il a, ainsi, obtenu une somme de 324.835 euros.

En réponse à un dire, il a déclaré retenir, « à l'instar des conseils des parties », l'EBE apparaissant dans les bilans, supérieur à l'EBE précité, soit 44.973 euros du 1 er juillet 2003 au 30 juin 2004, 89.407 euros et 47.105 euros au titre des exercices suivants, celui du dernier exercice étant déficitaire de 35.676 euros.

Il a, toutefois, souligné que le résultat d'exploitation du dernier exercice était largement déficitaire. Il a précisé que le calcul par l'EBE amènerait à une indemnité de 352.065 euros sur la période du 1 er juillet 2003 au 30 juin 2006 et de 140.483 euros sur la période du 1er juillet 2003 au 30 juin 2007. Il a conclu à une trop grande hétérogénéité des résultats et retenu l'estimation par le chiffre d'affaires soit 290.000 euros.

Il a retenu des frais de remploi, 10%, un trouble commercial de 5.851 euros égal à trois mois de résultat d'exploitation calculé sur les trois derniers exercices précédents le dernier, celui-ci étant déficitaire, et un forfait de 2.500 euros au titre des frais administratifs.

Il a écarté les autres postes.

Il a, en ce qui concerne l'indemnité d'occupation, pris en compte quatre baux dans le centre commercial, soit les dernières commercialisations, constaté une absence d'augmentation de loyer dans le cadre de deux renouvellements et d'une cession de droit au bail et observé qu'un nouveau bail avait entraîné une augmentation de loyer de 9%. Il a conclu à une valeur locative de référence de 204,05 euros par m². Il a pris en compte cette valeur qu'il a appliquée à la surface contractuelle, 307 m², aucune notification du mesurage de l'expert géomètre, 439 m², n'ayant été faite. Il a pratiqué un abattement de 10% pour précarité et retenu une somme de 56.379 euros.

En ce qui concerne les charges, il a constaté une absence de document pour celles antérieures au 31 décembre 2004 mais affirmé que le montant de l'arriéré au 31 décembre 2003 n'était pas contesté. Il a déclaré que les charges à compter du 1er janvier 2005 étaient justifiées et qu'il n'existait pas d'incohérence sur la méthode de répartition et les montants imputés. Il a souligné que, le 10 mars 2004, le locataire a reconnu devoir la somme de 107.934, 06 euros et proposé un échéancier.

Par jugement du 12 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Versailles a débouté la société La Brazerade de sa demande d'annulation du rapport d'expertise.

Il a condamné la SNC Les Falaises à lui payer les sommes de :

292.000 euros au titre de l'indemnité d'éviction principale

29.200 euros de l'indemnité de remploi

15.000 euros du trouble commercial.

Il a fixé à la somme de 57.150,58 euros hors taxes et hors charges le montant de l'indemnité d'occupation due par la société La Brazerade du 1er octobre 2006 au 29 juin 2007.

Il a condamné la société La Brazerade à payer à la société Les Falaises la somme de 131.547,80 euros au titre des arriérés de loyers, indemnités d'occupation et charges arrêtés au 14 octobre 2009 outre intérêts légaux à compter du 2 février 2007 sur 83.930,30 euros et du 3 septembre 2012

pour le surplus.

Il a ordonné la capitalisation des intérêts sur les arriérés de loyers, indemnités d'occupation et charges à compter du 3 septembre 2012.

Il a ordonné la compensation entre ces sommes à concurrence de la plus faible.

Il a condamné la SNC Les Falaises à payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens incluant les frais d'expertise.

Il a rejeté les autres demandes.

Le tribunal a évalué l'indemnité principale par la méthode du chiffre d'affaires en retenant un coefficient de 120% de celui-ci et par celle de l'EBE en relevant l'erreur de calcul de l'expert et en prenant en compte un EBE bilanciel évoqué par l'expert soit la somme de 33.612 euros à laquelle il a appliqué un coefficient multiplicateur de 7.

Il a retenu une indemnité de remploi (10%) et un trouble commercial (15.000 euros) et écarté les autres postes.

Il a retenu, pour l'indemnité d'éviction, une valeur locative de 275,79 euros par m² et une surface de 307 m² mentionnée dans les baux et appliqué un abattement de 10% pour précarité.

Par déclaration du 1 er octobre 2013, la société La Brazerade a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions en date du 23 décembre 2013, la SARL La Brazerade sollicite l'infirmation du jugement.

Elle demande l'annulation du rapport de l'expert.

Elle sollicite la fixation de l'indemnité d'éviction à la somme de 1.476.273,46 euros et la condamnation de l'intimée au paiement de cette somme.

Elle demande que l'indemnité d'occupation restant due soit fixée à 4.635,66 euros.

Elle réclame le paiement des sommes de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conclut au rejet des autres demandes de la société Les Falaises.

La société demande l'annulation du rapport d'expertise.

Elle reproche à l'expert de ne pas avoir respecté ses obligations d'objectivité et d'impartialité. Elle indique qu'il exploite une société commerciale, In Situ Expertises et Conseil, ayant pour activité le conseil, la gestion et la commercialisation de l'immobilier commercial. Elle ajoute que cette société est membre de l'association ADC qui accompagne les bailleurs et opérateurs dans le développement et la commercialisation de centres commerciaux et dont fait partie la société Strateo Consulting, conseil et prestataire du groupe Corio. Elle en conclut que Monsieur [U] participe à une entité servant les intérêts du groupe Corio qui détient la société Les Falaises. Elle en conclut également qu'il a une activité commerciale en lien avec les opérateurs et investisseurs des centres commerciaux alors que le groupe Corio représente une part importante de ce marché.

Elle affirme n'avoir eu connaissance des activités de Monsieur [U] qu'après le dépôt de son rapport.

Elle fait également valoir qu'il fait référence dans son rapport à un courrier du président de la SNDLL qui regroupe les discothèques et lieux de loisirs et que ce courrier n'a pas été annexé au rapport ce qu'a constaté le tribunal. Elle invoque donc une violation de l'article 276 du code de procédure civile.

Elle ajoute qu'il a manqué à sa mission en ne fixant pas de délais aux parties pour communiquer des documents ce qui a permis à la SNC de produire tardivement des documents au surplus incomplets en ce qui concerne les charges.

Elle souligne que la SNC a reconnu ne pouvoir justifier des charges antérieures à 2005 mais qu'il a entériné ses chiffres alors qu'il avait pour mission de se faire communiquer tout document utile à cet effet. Elle excipe d'une violation de l'article 238 du code précité.

Sur l'indemnité d'éviction, elle invoque la perte du fonds de commerce et rappelle qu'il appartient au bailleur de prouver la possibilité d'un transfert.

Elle souligne la spécificité du fonds qu'elle exploitait depuis 1982, à sa création, soit son ouverture jusqu'à l'aube alors que le reste du centre était fermé, sa capacité, 700 personnes, sa clientèle venant de l'ouest parisien et la présence de 12 salariés et d'un gérant. Elle invoque un matériel usuel et informatisé nécessitant des investissements récurrents d'un montant de 55.950 euros ht de 2002 à 2005 outre la climatisation installée en 1999 pour 32.000 euros.

Sur l'indemnité principale, elle considère que l'exercice 2006/2007 ne doit pas être pris en compte en raison des conditions anormales d'exploitation entraînées par les procédures initiées par le bailleur.

Elle prend donc en compte l'EBE des trois exercices précédents et y ajoute la charge exceptionnelle que constituent les sommes versées aux organisateurs de soirées qui diminue le chiffre d'affaires soit un EBE annuel de 136.922 euros ht. Elle retient un coefficient de 10 compte tenu des caractéristiques de l'exploitation, 2 jours par semaine, de son emplacement et de la relative fragilité d'un tel fonds et estime donc l'indemnité principale sur la base de l'EBE à 1.369.220 euros.

Elle prend en considération le chiffre d'affaires des mêmes exercices soit 329.870 euros ht en moyenne et l'affecte d'un coefficient de 140 justifié par son emplacement en sortie d'autoroute et dans une zone commerciale avec parking. Elle fait valoir que ce chiffre d'affaires a été diminué la dernière année au motif que des dépenses nécessaires de communication, décoration et accessoires n'ont pu être faites compte tenu de la disparition programmée du fonds et, donc, de l'impossibilité, de recourir à un emprunt. Elle ajoute qu'elle a passé des écritures dans le dernier bilan (perte de stock, frais d'acte et de contentieux, procédure, frais exceptionnels, immobilisations non amorties) pour 100.568 euros qui ont affecté ce résultat.

Elle évalue donc, compte tenu de ces deux approches, à 915.519 euros le montant de l'indemnité principale.

Elle souligne que l'expert n'a pas joint à son rapport la lettre qui émanerait du président du SNDLL retenant un barème de 70 à 100% du chiffre d'affaires.

En ce qui concerne les indemnités accessoires, l'appelante retient 11% au titre des frais de remploi destinés à trouver un fonds de remplacement et non seulement « équivalent » comme l'a jugé le tribunal. Elle soutient que cette indemnité est due, le bailleur ne démontrant pas que le fonds ne sera jamais remplacé.

Elle invoque la perte des investissements non amortis, 60.640 euros et 40.116 euros au 30 juin 2006, et sollicite une somme de 40.000 euros à ce titre. Elle fait valoir que les frais de réinstallation sont toujours fixés en prenant en compte l'amortissement des investissements que le locataire doit abandonner notamment lorsqu'une norme est requise pour l'activité comme en l'espèce. Elle rappelle qu'elle a produit ses bilans dans le cadre de l'expertise.

Elle réclame l'indemnisation d'un trouble commercial destiné à réparer le préjudice causé par la perturbation dans l'exploitation du fonds due au non renouvellement. Elle l'estime d'autant plus important que le bailleur a, par ses procédures, retardé l'indemnisation durant plus de 6 ans. Elle affirme qu'il est habituellement retenu 6 à 12 mois. Elle retient 6 ans de manque à gagner soit 317.348 euros. Elle souligne qu'elle a quitté les lieux car elle ne pouvait, compte tenu de son éviction, exposer des frais importants nécessaires au succès de la discothèque.

Elle réclame l'actualisation de cette indemnité, 1.383.574 euros, pour tenir compte de l'érosion monétaire, un euro de 2006 valant 1,067 euro, et retient donc une somme de 1.476.273,46 euros.

En ce qui concerne l'indemnité d'occupation, elle rappelle que celle-ci a duré 9 mois et affirme que l'indemnité retenue par l'expert correspond à une année. Elle sollicite un abattement pour précarité de 30% compte tenu de l'entrave à son exploitation et de la disparition de son activité. Elle ajoute qu'elle a déjà payé la somme de 28.252,09 euros et, sur la base d'une valeur de 204,50 euros par m² et de 307 m², estime devoir la somme de 4.635,66 euros.

En ce qui concerne les charges, elle conteste devoir la somme de 132.974,28 euros retenue par l'expert. Elle se fonde sur sa reconnaissance de dette de 2004 d'un montant de 107.934,06 euros et déduit ses règlements, 39.600 euros. Elle en conclut qu'elle devrait la somme de 68.334 euros.

Elle conteste le décompte de créance au titre des loyers qui ne prend pas en compte 3 échéances réglées en juin, juillet et août 2007.

Elle affirme que la bailleresse ne justifie ni des charges ni du réajustement stipulé au bail. Elle fait état de litiges entre le bailleur et un ensemble de locataires. Elle indique qu'un expert a été nommé afin de vérifier les charges demandées à un des locataires.

Elle estime que, compte tenu de son activité et de ses heures d'ouverture, elle ne devrait participer qu'aux charges d'entretien du parking et d'éclairage.

Elle relève que le bailleur mentionne une superficie de 439 m² et applique cette superficie inexacte au calcul des charges, celles-ci étant réparties au prorata des superficies occupées.

Elle fait état de l'attitude dilatoire de la bailleresse justifiant l'octroi de dommages et intérêts.

Dans ses dernières écritures en date du 20 février 2014, la SNC Les Falaises conclut à l'irrecevabilité et au rejet de l'appel.

Elle sollicite l'infirmation du jugement en ses dispositions relatives à la fixation des indemnités d'occupation et d'éviction et sa confirmation pour le surplus.

Elle demande que l'indemnité d'éviction soit fixée aux sommes de 136.672 euros et, subsidiairement, de 188.270 euros.

Elle réclame la fixation de l'indemnité annuelle d'occupation, due du 1er octobre 2006 au 29 juin 2007, à la somme de 120.632, 81 euros hors taxes et hors charges avec intérêts légaux.

Elle demande le paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'appelante aux dépens.

La société s'oppose à la demande d'annulation du rapport d'expertise.

Elle s'étonne que la société appelante n'ait pas demandé la récusation ou le remplacement de l'expert.

Elle souligne que la société In Situ Expertises et Conseil intervient tant pour les bailleurs que pour les locataires et pas exclusivement pour le compte de sociétés foncières et d'investisseurs en immobilier commercial. Elle ajoute qu'il en est de même de l'association ADC dont la société In Situ serait membre. Elle précise que ni elle ni le groupe Corio auquel elle appartient n'ont mandaté Monsieur [U].

Elle estime qu'aucune trace de subjectivité ou de partialité ne peut être constatée dans le rapport.

Sur l'indemnité d'éviction, elle rappelle l'article L 145-14 du code de commerce.

Elle relève que la société n'a pas justifié du licenciement des 11 salariés prétendus et déclare qu'elle ne justifie pas de leur démission. Elle s'étonne également de son départ soudain et affirme que, pour établir l'absence de réinstallation, elle aurait dû justifier du licenciement ou de la démission de ses salariés. Elle estime qu'à défaut, il y a eu réinstallation et donc un préjudice inférieur à la perte totale du fonds. Elle demande également que son gérant et associé, Monsieur [R], justifie de sa situation actuelle ce qu'il n'a pas fait malgré ses demandes.

Elle fait valoir que les usages de la profession préconisent, pour une discothèque, de retenir un pourcentage de 35 à 75% du chiffre d'affaires, relève que la discothèque n'est pas située au centre d'une grande ville et souligne que son chiffre d'affaires est en baisse constante depuis 2004, subissant une chute de plus de 40% en trois ans. Elle estime que cette baisse du chiffre d'affaires ne peut justifier, comme l'a retenu le tribunal, un pourcentage plus élevé. Elle prend en compte 65% du chiffre d'affaires moyen soit 188.270 euros.

Elle indique que le tribunal a, nonobstant le rejet de cette méthode par l'expert, recouru à l'EBE et affirme que les calculs de l'expert sont erronés. Elle déclare que la somme de 46.405 euros mentionnée par l'expert ne correspond pas à un EBE moyen mais à la somme des EBE des trois dernières années, la moyenne étant donc de 15.468 euros. Elle fait grief au tribunal d'avoir retenu un EBE de 33.612 euros se référant à un « EBE bilanciel » sans donc tenir compte de la réalité économique. Elle ajoute que la société La Brazerade ajoute à l'EBE des charges qualifiées d'exceptionnelles car réservées aux organisateurs de soirées, estime curieux ce caractère exceptionnel, l'organisation de soirées par des sous-traitants relevant de son activité, et sans rapport avec la réalité économique l'EBE ainsi calculé. Elle estime exorbitant le coefficient de 7 préconisé, une étude produite par l'appelante indiquant même que ce coefficient est relativement élevé. Elle rappelle la baisse du chiffre d'affaires, antérieur au congé. Elle estime à 5, 5 le coefficient maximum soit à 85.000 euros l'indemnité calculée sur la base de L'ebe.

Elle fait la moyenne des deux estimations et retient une indemnité principale de 136.672 euros.

Elle s'oppose à l'indemnité de remploi, le locataire ne justifiant pas se réinstaller. En cas de déplacement, elle retient une somme de 13.667 euros.

Elle réfute tout trouble commercial, la société ayant fait le choix de libérer les lieux alors qu'elle aurait pu rester en attendant le paiement de l'indemnité d'éviction.

Elle conteste les frais administratifs, non justifiés.

Elle critique l'octroi de sommes au titre d'immobilisations non amorties, celles-ci étant intégrées dans la valeur du fonds et donc dans l'indemnité principale, de nouveaux investissements n'étant pas apparus nécessaires lors de la visite sur place du 2 avril 2007- trois mois avant le départ de la société- et aucun justificatif comptable n'étant produit.

Elle conteste toute actualisation au titre de l'érosion monétaire, l'indemnité devant être évaluée au moment où le tribunal statue et la société lui étant redevable de loyers et charges.

En ce qui concerne l'indemnité d'occupation, l'intimée rappelle l'article L 145-28 du code de commerce. Elle indique qu'elle est due du 30 septembre 2006 au 30 juin 2007 soit pendant 9 mois.

Elle affirme que la valeur locative est constituée par les montants des loyers négociés, dans le cadre d'un nouveau bail ou d'un renouvellement, majorés des droits d'entrée dans le centre commercial qui constitue une unité autonome de marché. Elle indique que la valeur moyenne des loyers négociés en 2006 dans le centre s'est élevée à 274,49 euros par m² soit, pour le bien litigieux, une somme de 120.632, 81 euros ht et hc. Elle reproche à l'expert de se fonder sur un seul bail. Elle se prévaut donc de la valeur retenue par le tribunal mais demande qu'elle soit appliquée à la surface réelle des locaux exploités.

Elle estime à 10% la réduction maximale pour précarité, taux usuel et elle-même ne devant pas être pénalisée deux fois alors même que la société n'a pas payé ses loyers et charges.

Elle rappelle avoir consenti en mars 2004 un échéancier de loyers à la société, avoir accepté de le prolonger et s'être aperçue, après son rachat par le groupe Corio et un audit de ses comptes, que la locataire était redevable de la somme de 83.930,30 euros. Elle indique justifier de sa créance.

Elle soutient, en ce qui concerne les charges, que la société n'était pas tenue au paiement des seules charges d'entretien du parking et de l'éclairage. Elle estime que la société ne peut invoquer la procédure l'opposant à un autre locataire, celle-ci concernant des charges appelées aux locataires à compter de 2007 soit après la réalisation de travaux.

Par ordonnance du 17 juin 2014, le conseiller de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des conclusions de la société Les Falaises faute pour elle de justifier du paiement de la contribution prévue par les articles 1635 bis Q et 964 du code de procédure civile.

Par arrêt du 13 novembre 2014, la cour a déclaré ces conclusions recevables compte tenu de la régularisation intervenue.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 février 2015.

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Sur la demande d'annulation du rapport

Considérant qu'aux termes de l'article 237 du code de procédure civile, l'expert doit accomplir sa mission avec « conscience, objectivité et impartialité » ;

Considérant que Monsieur [U] est le gérant de la SARL In Situ Expertises et Conseil ; que, selon son site Internet, cette société est spécialisée dans l'expertise, le conseil et la gestion d'immobilier commercial ;

Considérant que l'importance du « groupe Corio », dont fait partie la société Les Falaises, dans le domaine de l'immobilier commercial ne permet pas à elle seule de mettre en doute l'impartialité et l'objectivité de l'expert ;

Considérant que la société In Situ Expertises et Conseil est membre de l'association ADC ; que celle-ci, selon son site Internet, « accompagne les opérateurs, les bailleurs, les enseignes, les villes'dans la commercialisation, la gestion et la communication de leurs équipements commerciaux » ; que cette association a également pour membre la société Strateo Consulting ; que le site de celle-ci mentionne qu'elle est au service des professionnels soit des promoteurs, investisseurs et gestionnaires dont « Corio France » mais aussi des enseignes et des collectivités locales ;

Considérant que l'association ADC n'assiste pas les seuls bailleurs mais l'ensemble des professionnels du secteur ; que le site de la société Strateo Consulting, membre de l'association, témoigne de la diversité des clients de celle-ci qui sont également des communes, des preneurs et des établissements de formations ;

Considérant que la nature et l'objet de l'association, dont le groupe Corio n'est pas membre, ne permettent donc pas de caractériser l'existence de liens entre l'expert et la société Les Falaises de nature à établir un manquement de celui-ci aux obligations précitées ;

Considérant que la société La Brazerade ne verse aux débats aucun élément démontrant une violation par l'expert de ses obligations d'impartialité et d'objectivité, ses critiques sur ses appréciations et ses conclusions relevant de la libre discussion d'un rapport d'expertise ;

Considérant que l'absence d'annexion à son rapport du courriel de la SNDLL, contrairement aux énonciations du rapport (page 41), ne justifie pas, compte tenu du caractère limité de cette pièce, l'annulation de celui-ci ;

Considérant qu'il en est de même de l'absence invoquée de fixation par l'expert de délais pour lui adresser des pièces ;

Considérant que la demande d'annulation du rapport sera donc rejetée ;

Sur l'indemnité principale d'éviction

Considérant que l'indemnité d'éviction doit, aux termes de l'article L 145-14 du Code de commerce, être égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement ; que son montant comprend, notamment, la valeur marchande du fonds de commerce et diverses indemnités ; que le montant de l'indemnité principale ne peut, en tout état de cause, être inférieur à la valeur du droit au bail ;

Considérant que la société Les Falaises ne peut utilement faire grief à a société La Brazerade d'avoir quitté les lieux après la date d'expiration du congé et avant que soit fixé le montant de l'indemnité d'éviction ;

Considérant que la société Les Falaises- qui doit en rapporter la preuve- ne verse aux débats aucune pièce démontrant l'existence de locaux proches ayant correspondu aux besoins de la société La Brazerade et ayant permis sa réinstallation ;

Considérant que l'éviction a donc entraîné la perte du fonds ;

Considérant qu'il est constant que l'indemnité principale due pour la perte du fonds excède la valeur du droit au bail ;

Considérant que l'indemnité d'éviction doit être calculée en se plaçant à la date effective de l'éviction survenue le 29 juin 2007 ; qu'à ce titre, doivent, en principe, être pris en compte les résultats des exercices 2004 à 2007 soit, en l'espèce, ceux du 1 er juillet 2004 au 30 juin 2007 ;

Considérant qu'il appartient au preneur de démontrer que des circonstances exceptionnelles justifient que soient pris en compte les seuls chiffres d'affaires moyens des exercices 2003 à 2006 ; qu'il doit démontrer que les procédures initiées par son bailleur ont entraîné la baisse des résultats observée lors du dernier exercice ;

Considérant que la société Les Falaises a donné congé le 13 mars 2006 pour le 30 septembre 2006 ;

Considérant, d'une part, que la société La Brazerade ne produit aucun document démontrant qu'elle a renoncé, compte tenu du congé donné, à des investissements qui auraient rendu plus attractive son exploitation ;

Considérant, d'autre part, que le chiffre d'affaires s'est élevé à 371.909 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2005 et a baissé à 285.089 euros lors de l'exercice suivant, les résultats étant donc également en diminution ; que cette baisse est, pour l'essentiel, antérieure au congé donné ; que la diminution, du même ordre, survenue la dernière année s'inscrit donc dans cette tendance ;

Considérant que l'appelante ne rapporte donc pas la preuve, qui lui incombe, de l'existence de circonstances exceptionnelles justifiant de ne pas prendre en compte les résultats du dernier exercice ;

Considérant que seront donc pris en compte les résultats de l'exploitation du 1er juillet 2004 au 30 juin 2007 ;

Considérant que le chiffre d'affaires moyen s'est élevé à la somme de 289.650 euros hors taxes ;

Considérant qu'un fonds de discothèque s'évalue, selon les usages, de 80 à 150% du chiffre d'affaires;

Considérant que compte tenu de l'adaptation des lieux à l'activité, de l'absence de trouble pour le voisinage, de la taille de l'établissement dépourvu de concurrence directe, un taux de 120% sera retenu ; que l'évaluation du fonds par le chiffre d'affaires amène donc à un montant de 347.580 euros ;

Considérant que les parties ont, dans leurs dires, retenu l'EBE moyen apparaissant dans les bilans sous réserve, pour le preneur, de son retraitement ; que l'expert a pris en considération cet EBE « bilanciel » ; que cette prise en compte de l'EBE ressortant des bilans est justifiée ; que cet EBE moyen s'est élevé à la somme de 33.612 euros ;

Considérant que les sommes reversées aux organisateurs de soirées résultent d'une pratique courante et permettent de développer l'activité ; qu'elles contribuent ainsi aux résultats ; qu'elles ne seront donc pas retirées des charges ;

Considérant que la société a passé, dans le dernier bilan, des écritures portant sur des frais de procédure, des pertes de stock, des frais exceptionnels et des immobilisations non amorties ; que ces opérations correspondent à des charges réelles ; qu'elles ne justifient pas un retraitement de l'EBE ;

Considérant que l'EBE ainsi calculé ne sera donc pas modifié ;

Considérant qu'au vu de la qualité de l'emplacement indiquée ci-dessus particulièrement adapté à l'activité exercée, un coefficient de 8 est justifié ; que le fonds sera évalué, par la méthode de l'EBE, à la somme de 268.896 euros ;

Considérant que l'indemnité principale sera, comme le demandent les deux parties, fixée en fonction de la moyenne des deux évaluations ; que celle-ci est de 308.238 euros ;

Sur les indemnités accessoires

Considérant que le fait que l=indemnité d=éviction prenne le caractère d=une indemnité de remplacement ne fait pas obstacle à l=appréciation des indemnités dites accessoires destinées à compenser le préjudice que subit la société locataire évincée du fait de l=éviction ;

Considérant que la perte du fonds entraîne l'obligation pour la société Les Falaises de payer les frais de remploi qui sont destinés à permettre au locataire évincé de faire face aux frais déboursés à l=occasion de l=achat d=un fonds de « même valeur » que celui dont il est évincé ; qu'ils comprennent notamment les droits de mutation, les frais d=agence pour l=achat d=un fonds équivalent et les frais d=acte évalués forfaitairement ;

Considérant que ceux-ci sont dus sauf s'il est établi que le locataire ne se réinstalle pas ; que ce défaut de réinstallation n'est pas démontré ;

Considérant que le taux de 10% retenu par l'expert est justifié par la nature des frais ; qu'une somme de 30.838 euros sera prise en compte ;

Considérant que la qualité et l'état des agencements constituent un critère de la valorisation du fonds ; que les travaux réalisés par le preneur ont donc été pris en compte dans la fixation de l'indemnité principale; qu'il n'y a dès lors pas lieu de l'indemniser au titre des immobilisations non amorties comme il le réclame ;

Considérant que le « trouble commercial » correspond à l'indemnisation de la perte de temps subie par la société évincée pour rechercher de nouveaux locaux ou faire valoir ses droits au détriment de son activité commerciale et, plus généralement, de la perturbation subie du fait de la future perte du fonds ;

Considérant que la société n'était pas tenue de quitter les lieux dès le 29 juin 2007 ;

Mais considérant que, compte tenu de la nature de son activité et des investissements nécessaires à son exploitation, ce départ ne peut lui être reproché ;

Considérant que la durée de la procédure a majoré la perturbation et justifie qu'il soit alloué à la société, au regard de ses résultats, la somme de 25.000 euros de ce chef ;

Considérant qu'une somme totale de 364.076 euros sera donc fixée ;

Considérant que l'indemnité doit être calculée, lorsque le preneur a quitté les lieux, au jour de l'éviction ; qu'elle ne peut donc être réévaluée à la date de la décision qui l'octroie ;

Considérant que la société Les Falaises est dès lors tenue à payer la somme de 364.076 euros ;

Sur l'indemnité d'occupation

Considérant que la moyenne des baux recensés par l'expert dans le centre commercial amène à un prix de 275,79 euros par m² ; que ce montant correspond à la valeur locative à retenir pour fixer l'indemnité d'éviction ; qu'il sera pris en considération ;

Considérant que le bail fait état d'une surface de 307 m² ; qu'aucun acte opposable à la société La Brazerade ne permet de retenir une surface supérieure ;

Considérant qu'un coefficient, usuel, de précarité de 10% est justifié par les circonstances de l'espèce développées ci-dessus ;

Considérant que l'occupation a duré du 30 septembre 2006 au 29 juin 2007 soit pendant 9 mois ;

Considérant que l'indemnité d'occupation due pour cette période sera donc fixée à la somme de 57.150,58 euros hors taxes et hors charges ;

Considérant que la société La Brazerade sera condamnée au paiement de cette somme en deniers ou quittances compte tenu des règlements effectués par elle durant cette période ;

Sur les sommes dues par la société La Brazerade

Considérant que, par courrier du 10 mars 2004, la société La Brazerade a reconnu devoir la somme de 107.934,06 euros et s'est engagée à rembourser cette dette par mensualités de 1.800 euros ; qu'elle était donc, selon ses propres affirmations, non contestées, redevable de la somme de 107.934,06 euros à cette date ; qu'elle déclare, et justifie par des extraits de compte, avoir payé la somme de 39.600 euros à ce titre ; qu'elle demeure donc redevable de la somme de 68.334 euros du chef de cet arriéré ; qu'elle sera condamnée au paiement de cette somme ;

Considérant que la société Les Falaises fait état d'une créance de 8.000 euros au titre des factures émises et règlements reçus pour l'exercice 2005 et de 8.228, 30 euros au même titre en ce qui concerne l'exercice 2006 ;

Considérant que ces sommes correspondent à des taxes et charges ;

Considérant que le bail met à la charge de la société La Brazerade l'ensemble des charges réclamées à son bailleur ; qu'elle ne peut donc prétendre utilement, en application de l'article 1134 du code civil, n'être débitrice que des charges d'entretien du parking et d'éclairage ;

Considérant qu'il appartient au bailleur de justifier des charges réclamées ;

Considérant que la somme de 8.000 euros réclamée comprend une reddition de charges 2004 ; qu'aucune pièce relative aux charges de l'exercice 2004 n'a été communiquée à l'expert ou n'est versée aux débats ; que l'absence de contestation de la société locataire ne peut valoir acquiescement ;

Considérant que la société bailleresse a réclamé le paiement de la somme de 11.665,81 euros au titre de cette reddition ; que la locataire s'est acquittée, selon ce décompte, des sommes de 1.665,81 euros et de 2.000 euros les 18 octobre et 28 novembre 2005 ; que le reliquat de 8.000 euros correspond donc au surplus de la reddition des charges de l'exercice 2004 ; que celle-ci n'est étayée par aucune pièce ou facture ; que la demande de paiement de la somme de 8.000 euros sera donc rejetée ;

Considérant, en ce qui concerne les sommes réclamées au titre de l'exercice 2006, qu'elles correspondent à des charges que l'expert a vérifiées ; que la réclamation est donc fondée en son principe ; que, toutefois, la somme réclamée à la société locataire a été calculée sur la base de 439/20103 soit 439 m² alors que le bail a fait état d'une surface de 307 m² ; qu'aucune pièce opposable à la locataire ne justifie la prise en compte de 439 m² ; que la somme due sera ramenée à 8.228, 30 euros x 307 : 439 soit 5.754 euros ;

Considérant que la société sollicite le paiement d'une somme de 43.011, 92 euros au titre des factures émises et règlements perçus en 2007 ;

Considérant que cette somme inclut des loyers non payés et, pour 34.478,81 euros, des taxes et charges ; que ces dernières sommes ont été justifiées dans le cadre de l'expertise ; qu'elles ont toutefois été imputées sur une base de 439 m² et non de 307 m² ; que le montant dû au titre de ces charges est donc de 24.111 euros ; que la société est dès lors redevable, du chef de cet exercice, de la somme totale de 32.644,11 euros en intégrant les loyers dus ;

Considérant que la société La Brazerade est, ainsi, débitrice de la somme de 106.732,11 euros ; qu'elle sera condamnée au paiement de cette somme qui portera intérêts légaux sur 83.930,30 euros à compter du 2 février 2007 et sur le surplus à compter du 3 septembre 2012 ; que les intérêts seront capitalisés à compter du 3 septembre 2012;

Sur les autres demandes

Considérant que ni la procédure diligentée par la société intimée ni ses demandes ne sont abusives ; que la demande de dommages et intérêts formée par l'appelante sera rejetée ;

Considérant que la procédure est due au congé donné par la société Les Falaises ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a mis à sa charge les dépens et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a ordonné la compensation entre les créances des parties ;

Considérant que la société Les Falaises devra payer la somme de 2.000 euros à la société La Brazerade au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel ;

PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la SARL La Brazerade de sa demande d'annulation du rapport d'expertise, fixé l'indemnité d'occupation à la somme principale de 57.150,58 euros sauf à préciser qu'elle est due en deniers ou quittances, ordonné la compensation des dettes respectives des parties à concurrence de la plus faible et condamné la SNC Les Falaises aux dépens comprenant les frais d'expertise et au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirme pour le surplus

Statuant à nouveau,

Fixe à 364.076 euros l'indemnité d'éviction due par la société Les Falaises à la société La Brazerade,

La condamne au paiement de cette somme,

Condamne la société La Brazerade à payer à la société Les Falaises la somme de 106.732,11 euros au titre des loyers et charges impayés,

Dit que cette somme portera intérêts légaux sur 83.930,30 euros à compter du 2 février 2007 et sur le surplus à compter du 3 septembre 2012,

Dit que les intérêts seront capitalisés à compter du 3 septembre 2012,

Y ajoutant

Condamne la société Les Falaises à payer à la société La Brazerade la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société Les Falaises aux dépens,

Autorise la SELARL Fidu Juris à recouvrer directement à son encontre les dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 13/07292
Date de la décision : 02/06/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°13/07292 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-06-02;13.07292 ?
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