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21/05/2015 | FRANCE | N°14/02910

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 1re section, 21 mai 2015, 14/02910


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





2ème chambre 1ère section







ARRÊT N°







CONTRADICTOIRE

Code nac : 20J





DU 21 MAI 2015





R.G. N° 14/02910





AFFAIRE :

[K], [N], [U], [J] [T]

C/

[G], [R], [W] [Y] épouse [T]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Avril 2014 par le Juge aux affaires familiales de PONTOISE

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 1

1/01291



Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :





à :



-la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT,



-Me Julie GOURION- LEVY













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN MAI DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

2ème chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 20J

DU 21 MAI 2015

R.G. N° 14/02910

AFFAIRE :

[K], [N], [U], [J] [T]

C/

[G], [R], [W] [Y] épouse [T]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Avril 2014 par le Juge aux affaires familiales de PONTOISE

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 11/01291

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

-la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT,

-Me Julie GOURION- LEVY

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN MAI DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K], [N], [U], [J] [T]

né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Pascal KOERFER de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 31

APPELANT

****************

Madame [G], [R], [W] [Y] épouse [T]

née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Julie GOURION-LEVY, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 214089

assistée de Me Sylvie NOACHOVITCH, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : C1833

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2015 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Xavier RAGUIN, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Xavier RAGUIN, Président,

Mme Florence LAGEMI, Conseiller,

Mme Florence VIGIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

[G] [Y] et [K] [T] se sont mariés le [Date mariage 1] 1969 devant l'officier d'état civil de la commune d' [Localité 5] sans contrat préalable.

Trois enfants devenus majeurs sont issus de cette union.

Une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 05 octobre 2011 à la demande d'[G] [Y] par le juge aux affaires familiales de PONTOISE qui lui a notamment alloué une pension alimentaire mensuelle de 8.000 euros au titre du devoir de secours, montant réduit à 4.000 euros par arrêt de la cour du 07 juin 2012.

Par acte du 07 mai 2012, [G] [Y] a saisi le juge du fond de son action en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil.

Par jugement du 10 avril 2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de PONTOISE a notamment :

-écarté des débats les attestation produites par [G] [Y] pièces n° 68,83,146,155 et 156 ;

-prononcé le divorce des époux aux torts de [K] [T] ;

-constaté qu'[G] [Y] a formulé des propositions de règlements des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux ;

-ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux ;

-dit n'y avoir lieu à désignation d'un notaire pour procéder à la liquidation du régime matrimonial à ce stade de la procédure ;

-autorisé [G] [Y] à conserver l'usage du nom du mari ;

-condamné [K] [T] à verser à [G] [Y] un capital de 600.000 euros à titre de prestation compensatoire, outre une rente mensuelle de 4.000 euros pendant 5 années avec indexation ;

-condamné [K] [T] à verser à [G] [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en vertu de l'article 266 du code civil ;

-mis les dépens à la charge de [K] [T].

Par déclaration du 14 avril 2014, [K] [T] a interjeté un appel de portée générale contre cette décision, sans ses dernières conclusions du 18 février 2015,il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :

-écarter des débats la pièce adverse n° 27 ;

en conséquence,

-débouter [G] [Y] de sa demande visant à prononcer le divorce des époux [T] à ses torts exclusifs ;

-prononcer le divorce des époux [T] aux torts partagés sur le fondement de l'article 242 du code civil ;

-constater qu'[G] [Y] ne justifie d'aucun intérêt particulier à conserver l'usage du nom marital ;

en conséquence,

-dire et juger qu'[G] [Y] reprendra l'usage de son nom de jeune fille ;

- dire et juger [G] [Y] mal fondée en ses demandes et prétentions, l'en débouter ;

à titre principal,

-reporter la date des effets du divorce au 30 septembre 2008 ;

à titre subsidiaire,

si par impossible et extraordinaire, la cour de céans venait à considérer que les époux [T] ont cessé de cohabiter et collaborer après septembre 2008,

-reporter la date des effets du divorce au 12 décembre 2010 ;

-dire et juger que l'ancien domicile conjugal lui sera attribué de manière préférentielle ;

-constater qu'[G] [Y] n'a subi aucun préjudice,

-rejeter sa demande de dommages et intérêts sur les fondements des articles 266 et 1382 du code civil,

-dire et juger en tout état de cause qu'aucun dommage et intérêt ne pourra être alloué sur le fondement de l'article 266 du code civil, sollicitant le prononcé du divorce aux torts partagés ;

sur la demande de prestation compensatoire :

à titre principal,

-débouter [G] [Y] de sa demande reconventionnelle visant à le condamner au paiement d'une prestation compensatoire selon les modalités suivantes :

un capital d'un montant de 600.000 euros, qui sera versé à [G] [Y] lorsque le divorce sera définitif,

ainsi qu'une rente d'un montant de 8.000 euros par mois, avec indexation, pendant une durée de 5 ans,

-fixer à 60.000 euros le montant de la prestation compensatoire qu'il versera à son épouse,

-dire et juger cette somme satisfactoire,

à titre subsidiaire,

si par impossible et extraordinaire, la cour de céans venait à confirmer le jugement rendu le 10 avril 2014 ou à fixer pour un montant supérieur à 60.000 euros le montant de la prestation compensatoire due à son épouse,

-dire et juger que le versement du capital de la prestation compensatoire se fera dans le cadre des opérations de compte liquidation partage, sans application d'intérêts de retard,

à titre infiniment subsidiaire,

si par impossible et extraordinaire, la cour de céans venait à confirmer le jugement rendu le 10 avril 2014 ou à fixer pour un montant supérieur à 60.000 euros le montant de la prestation compensatoire due à son épouse, et devant l'opposition de [G] [Y] de voir verser la prestation compensatoire lors des apparitions de compte liquidation partage,

-appliquer les dispositions de l'article 275 du code civil qui prévoit la possibilité de régler la prestation compensatoire sous forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires dans la limite de huit années,

-confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

en tout état de cause,

-dire et juger, au regard du caractère particulier de la présente procédure, que chacun des parties conservera la charge de ses dépens.

Dans ses dernières conclusions du 18 février 2015, [G] [Y] demande à la cour de :

-lui attribuer à titre préférentiel le domicile conjugal,

-condamner [K] [T] au paiement d'une prestation compensatoire, selon les modalités suivantes :

un capital d'un montant de 600.000 euros, qui lui sera versé lorsque le divorce sera définitif ;

ainsi qu'une rente d'un montant de 8.000 euros par mois, avec indexation, pendant une durée de cinq ans,

-désigner tel Notaire qu'il vous plaira avec pour mission de :

dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux,

élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et former les lots à partager ;

-dire et juger que la provision à valoir sur la rémunération du notaire sera prise en charge par [K] [T],

-condamner [K] [T] à lui verser la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

-condamner [K] [T] à lui verser la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts à sur le fondement de l'article 266 du code civil,

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions non contraires aux présentes ;

-condamner [K] [T] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner [K] [T] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 février 2015.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Sur la pièce n° 27

Considérant qu'[G] [Y] verse aux débats sous le n° 27 de son bordereau une attestation de [V] [T] sa belle-fille, déjà écartée des débats par le premier juge au visa de l'article 205 du code de procédure civile ; que cette pièce ne peut figurer aux débats devant la cour pour le même motif ;

Sur le divorce

Considérant selon les articles 212 et 215 du code civil que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance ; qu'ils s'obligent mutuellement à une communauté de vie ;

Considérant selon l'article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;

Considérant qu'en sollicitant la réformation de jugement en ce qu'il a prononcé le divorce à ses torts exclusifs et en demandant à la cour de le prononcer aux torts partagés des deux époux, [K] [T] reconnaît sa part de responsabilité dans la rupture du mariage ; qu'il soutient cependant que son épouse a concouru de manière fautive à la dégradation de leurs relations ; qu'il lui reproche un manque de considération à son égard et des violences, un train de vie dispendieux, le détournement de fonds communs ;

Considérant qu'il résulte des déclarations de [O] [S] consignées dans un procès-verbal d'audition par les services de police du 13 novembre 2012 qu'[G] [Y] se livrait à des violences verbales et physiques sur son mari, qu'elle l'insultait et jetait de la vaisselle ;

Que ce comportement constitue une faute au sens de l'article 242 justifiant que le divorce soit prononcé aux torts partagés des époux ;

Sur l'usage du nom du conjoint

Considérant selon l'article 264 du code civil qu'à la suite du divorce, chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint ; qu'il n'en est autrement qu'avec l'accord de celui-ci ou sur autorisation du juge, s'il est justifié d'un intérêt particulier pour l'époux ou pour les enfants ;

Considérant que le premier juge a fait droit à la demande formée par [G] [Y] sur ce point en retenant que la longue durée du mariage l'y autorisait malgré l'opposition de l'époux ;

Que cependant, le seul usage prolongé du nom du conjoint ne constitue pas un intérêt particulier au sens du texte susvisé ;

Qu'il convient donc de réformer le jugement sur ce point ;

Sur les dommages et intérêts

Considérant que des dommages et intérêts peuvent être alloués à un époux sur le fondement de l'article 266 du code civil lorsque la dissolution du mariage entraîne des conséquences d'une particulière gravité, soit lorsqu'il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu'il n'avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ;

Considérant que les conditions posées par ce texte ne sont pas réunies pour présenter une demande sur ce fondement, le divorce étant prononcé aux torts partagés des époux ;

Considérant qu'indépendamment du divorce et de ses sanctions propres, l'époux qui invoque un préjudice étranger à celui résultant de la rupture du lien conjugal peut demander réparation à son conjoint dans les conditions du droit commun sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

Considérant qu'[G] [Y] invoque le préjudice qu'elle éprouve du fait de son licenciement dont elle a fait l'objet de la part son époux et du fait de l'adultère qu'il a commis ;

Considérant que le préjudice subi suite au licenciement a été indemnisé par jugement du conseil de prud'hommes du 29 avril 2014 et ne peut être réparé à nouveau ;

Considérant que l'adultère commis et reconnu par l'époux est particulièrement douloureux pour [G] [Y] puisqu'il s'accompagne de la naissance en 2011 d'un enfant qui traduit la composition d'une nouvelle famille par [K] [T] alors qu'il est âgé de près de 67 ans ;

Que le préjudice qui en découle sera indemnisé par la somme de 3.000 euros ;

Sur la date des effets du divorce entre les époux

Considérant selon l'article 262-1 du code civil qu'à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement de divorce à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer ;

Considérant que tout en sollicitant que cette date soit fixée au 30 septembre 2008, date à laquelle il a pris un appartement en location, [K] [T] admet avoir continué à fréquenter le domicile conjugal à la demande de son épouse postérieurement à cette date et avoir effectué avec elle quelques voyages notamment aux USA pour y voir leur fils, ce qui démontre la permanence d'une communauté affective entre les deux époux ;

Considérant toutefois qu'il est admis par [G] [Y] que les époux ont cessé de cohabiter le 12 décembre 2010 ; qu'elle soutient cependant que leur collaboration a persisté au delà de cette date puisqu'elle était salariée de son époux et ce jusqu'à son licenciement en 2012, postérieurement à l'ordonnance de non conciliation ;

Qu'il n'est cependant pas démontré qu'entre le 12 décembre 2010 et l'ordonnance de non conciliation [G] [Y] a continué d'accomplir de façon effective une activité au profit de son employeur ; qu'il résulte du jugement du conseil de prud'hommes versé aux débats qu'[G] [Y], qui occupait des fonctions indéterminées au sein de la société de son époux en tirait des avantages matériels (voiture de fonction, portable, ordinateur, accès au compte bancaire) et que sa seule revendication exprimée par mise en demeure du 17 juillet 2012 tendant à se voir restituer ces avantages ;

Qu'il convient donc de fixer au 12 décembre 2010 la date d'effet du divorce entre les époux quant à leurs biens ;

Sur la désignation d'un notaire

Considérant que le patrimoine commun des deux époux est consistant et constitué notamment d'une société d'exercice de sa profession de gynécologue-obstétricien par [K] [T] sur la valeur de laquelle règne une certaine opacité ; que la demande désignation d'un notaire en vue d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial apparaît justifiée et de nature à permettre à chacun des époux de mettre fin à leurs relations patrimoniales avec l'aide d'un professionnel ;

Qu'[G] [Y] ne justifie pas que la provision due dans ce cadre au profit de notaire désigné soit mise à la charge exclusive de [K] [T], étant rappelé que le patrimoine est commun aux deux époux ;

Sur la prestation compensatoire

Considérant selon les dispositions de l'article 270 du code civil que le divorce met fin au devoir de secours ; que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; cette prestation a un caractère forfaitaire, elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ;

Que l'article 271 du même code dispose notamment que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend en considération notamment : la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pension de retraite ;

Considérant que la durée du mariage est de 46 ans au jour du prononcé du divorce par la cour, la durée de la vie commune durant le mariage jusqu'à leur séparation de 41 ans ;

Que la situation des époux, mariés sous le régime de la communauté et qui ont chacun produit une déclaration sur l'honneur, est la suivante :

- [G] [Y] est âgée de 66 ans ; elle indique qu'elle souffre de diverses pathologies : sciatique, occlusion intestinale, vertiges, dépression réactionnelle et qu'enfin elle s'est cassé le col du fémur le 31 octobre 2014 ce qui lui occasionne des difficultés pour accomplir certains actes de la vie courante ; cependant, la réduction de ses capacités est relative, le compte rendu opératoire mentionnant qu'elle présente un excellent état général ; [G] [Y] n'envisage d'ailleurs pas de modifier ses conditions de vie, affirmant qu'elle n'occupera son appartement de Montmorency (63 m²) que lorsque son état de santé la contraindra à abandonner le domicile conjugal (maison de 200 m² avec jardin) ;

Selon [K] [T], qui s'appuie sur des attestations provenant de membres de sa famille, l'abandon par son épouse de ses études de médecine après leur mariage et son entrée dans l'éducation nationale en qualité d'institutrice correspond à un choix personnel qui n'était dicté que par l'envie de s'investir dans une vie familiale que cette activité rendait possible ; il soutient avoir reçu une aide financière de sa famille et avoir rapidement travaillé de telle sorte que si elle l'avait voulu, son épouse aurait pu mener à bien ses études ;

Pour sa part, [G] [Y] soutient avoir arrêter ses études et être devenue institutrice pour subvenir aux besoins du ménage et permettre à son époux de poursuivre ses études, faisant observer que dès 1971, elle a dû s'occuper d'un premier enfant ;

[K] [T] ne justifie pas par des éléments objectifs l'aide familiale dont il prétend avoir bénéficié pour faire face aux besoins matériels d'un jeune couple s'installant de façon indépendante en 1970 ; outre l'attestation de Mme [L] qui confirme qu'[G] [Y] a abandonné ses études pour apporter un revenu au foyer, l'intimée justifie que son époux a bénéficié d'une bourse de l'enseignement supérieur dont le montant ne permettait pas à un couple de subvenir à ses besoins et qu'il percevait mensuellement 403 francs en 1974 en tant qu'interne, ce qui était également insuffisant ;

Il doit donc être considéré qu'[G] [Y] a renoncé à des études de médecine pour favoriser la carrière de son époux et qu'elle a ainsi perdu une chance de devenir elle même médecin ; elle a interrompu sa carrière d'institutrice pendant cinq ans à la naissance du deuxième enfant avant de reprendre une activité à mi-temps ; la disponibilité de l'épouse qui a pris en charge les enfants et l'entretien du foyer a profité à la carrière de l'époux qui a pu développer sa clientèle libérale ;

[G] [Y] est en position de retraite ; selon son avis d 'imposition 2014, elle perçoit mensuellement 1.660 euros au titre de ses retraites ; elle a fait un investissement locatif par l'intermédiaire de la SCI des Ceriselles dont elle porte 442 parts sur 443, le bien étant loué 1.300 euros bruts par mois perçus par la SCI dont il est indiqué qu'elle ne distribue pas de dividendes avant le remboursement des prêts conclus en vue de cette acquisition ;

Selon sa déclaration sur l'honneur du 02 janvier 2015, [G] [Y] dispose d'un patrimoine mobilier propre de 162.531 euros ; elle a apporté à la SCI des Ceriselles constituée en juin 2012 la somme de 44.200 euros dont elle indique qu'elle provenait de la succession de ses parents ; le bien acquis a, selon [K] [T] qui n'est pas démenti, une valeur de 420.000 euros mais est grevé d'un passif de l'ordre de 370.000 euros ;

[G] [Y] fait état de charges mensuelles de l'ordre de 5.225 euros en y incluant des postes qui représentent des dépenses d'agrément (ex : 416 euros d'avion pour voir ses petits-enfants, 200 euros de frais pour ses petits -enfants), des dépenses excessives et non justifiées (ex : frais de voiture 500 euros , loisirs 700 euros, habillement 500 euros) ; enfin son imposition sur le revenu (1.019 euros) diminuera dès qu'elle ne percevra plus la pension alimentaire de 4.000 euros due au titre du devoir de secours ;

- [K] [T] est âgé de près de 67 ans ; il indique devoir subir dans un proche avenir une opération de la hanche et être suivi pour un nodule sur la prostate ; il exerce l'activité de gynécologue-obstétricien mais indique qu'il entend cesser son exercice en 2016 ; son revenu mensuel net imposable qui était de 20.784 euros en 2012 a régressé pour se fixer à 16.600 euros en 2013 selon son avis d'imposition 2014 ; il indique ne pas percevoir de dividende de sa société et ne plus percevoir de revenu foncier, l'appartement d'[Localité 4] qui en procurait à chaque époux étant en vente ;

La capture d'écran du répertoire Améli.direct fait apparaître [K] [T] comme exerçant son activité également [Adresse 4] sans qu'il s'explique sur ce point ;

Il propose plusieurs évaluations de ses charges, passant de 8.500 euros à 12.000 euros selon qu'il reprend ou non la grille de charges de son épouse dont il a déjà été vu qu'elles étaient excessives ; au vu des pièces produites, les charges incompressibles mensuelles de [K] [T] sont de l'ordre de 6.800 euros , étant observé que son imposition sur le revenu va baisser du fait de la réduction de ses ressources, que le passif de communauté qu'il prend en charge est en réalité à la charge de l'indivision post communautaire et donnera lieu à une indemnisation ; il partage ses charges avec sa compagne qui est sa secrétaire et qui perçoit un salaire mensuel de 1.900 euros ; il a un petit garçon né en 2011 à élever ;

Selon sa déclaration sur l'honneur, il n'a pas de patrimoine propre ;

Une simulation du 06 février 2015 de la CARMF fait apparaître que [K] [T] percevra en 2016 une retraite mensuelle de 3.900 euros au titre de la CNAV et du régime complémentaire ; il pourra bénéficier en outre des rentes provenant des fonds placés à cet effet qu'il évalue à 800 euros sans préciser le détail de son évaluation ;

- la communauté possède un patrimoine composé :

* d'une maison situé à [Localité 6] ayant constitué le domicile conjugal évaluée 630.000 euros par [K] [T] selon une estimation d'agence remontant à 2011, ce bien étant évalué 550.000 euros par [G] [Y] sur la base d'une estimation par agence en 2013 et en janvier 2015 ;

* un bien immobilier situé à [Localité 4] estimé par les deux époux 260.000 euros et proposé actuellement à la vente ;

* un bien immobilier situé à [Localité 3] la louvet vendu en juin 2014 procurant un prix net vendeur de 569.295 euros actuellement consigné entre les mains du notaire ;

* des assurances vie Sequoia dont le montant était au jour de l'ordonnance de non conciliation selon les relevés de la Sogecap de 27.605 euros pour [K] [T] et de 25.005 euros pour [G] [Y];

* deux plans d'épargne entreprise pour un montant cumulé de 91.206 euros pour les deux époux,

* un fonds de pension d'un montant de 189.795 euros selon la déclaration sur l'honneur de [K] [T] du 09 février 2015 , étant observé que le relevé bancaire afférent à ce fonds mentionne une somme de 209.675 euros au 06 novembre 2014 ;

* la société d'exercice libérale correspondant à l'activité professionnelle de [K] [T] sur la valeur de laquelle les époux divergent ; cette société possède des fonds propres de 484.988 euros selon le bilan clos en décembre 2013 ;

* la communauté supporte un passif de 14.301 euros à ce jour concernant un prêt BFM et de 1.204 euros concernant un prêt Société Générale selon les tableaux d'amortissement produits ;

Considérant que le principe de la prestation compensatoire accordée par le premier juge à [G] [Y] n'est pas contesté par [K] [T] qui en discute seulement le montant ; qu'au regard des éléments soumis à la cour et notamment de l'importance du patrimoine commun et du fait que l'époux va cesser son activité dans un futur rapproché, il convient de ramener à de plus justes proportions le montant de la prestation compensatoire qui sera fixé à 120.000 euros ;

Considérant que la composition du patrimoine des époux permet un règlement du capital alloué sans recourir à un paiement fractionné ; que la demande tendant à voir reporter le paiement de cette somme dans le cadre des opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux des époux, sans production d'intérêts de retard, est infondée ;

Sur l'attribution préférentielle de la maison de [Localité 6]

Considérant selon les articles 1476 et 831-2 du code civil que l'attribution préférentielle ne peut porter que sur le local servant effectivement d'habitation ou le local servant effectivement à l'usage de la profession ;

Considérant que ce bien assure le logement d'[G] [Y] depuis l'ordonnance de non conciliation ; qu'elle est en capacité de régler la soulte due à son époux ;

Que [K] [T] ne réside pas dans ce local et ne peut alléguer qu'il est plus à même que l'intimée de gérer et se maintenir dans le bien indivis compte tenu de son âge et de sa prochaine retraite ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, chacune conservera la charge de ses propres dépens ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison de la nature familiale du litige ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil,

ECARTE des débats la pièce communiquée par [G] [Y] sous le n°27,

RÉFORME partiellement le jugement,

STATUANT à nouveau,

PRONONCE le divorce aux torts partagés des époux,

DÉCLARE mal fondée et rejette la demande de [G] [Y] tendant à conserver l'usage du nom de [T],

CONDAMNE [K] [T] à verser à [G] [Y] une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

REPORTE au 12 décembre 2010 les effets du divorce entre les époux quant à leurs biens,

FIXE à 120.000 euros le montant du capital dû à titre de prestation compensatoire par [K] [T] à [G] [Y] et le condamne au besoin au paiement de cette somme,

ATTRIBUE à titre préférentiel à [G] [Y] l'immeuble situé [Adresse 2],

DÉSIGNE maître [D] [Q], notaire à Montmorency en vue de dresser un état liquidatif qui établira les comptes entre co-partageants, la masse partageable, les droits des parties, la composition des lots à répartir et dressera l'acte constatant le partage,

FIXE à 6.000 euros le montant de la provision qui sera versée directement entre les mains du notaire par moitié par chaque partie,

CONFIRME le jugement dans ses dispositions non contraires au présent arrêt,

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel,

REJETTE toute autre demande des parties,

arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Xavier RAGUIN, président, et par Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 14/02910
Date de la décision : 21/05/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 02, arrêt n°14/02910 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-21;14.02910 ?
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