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18/12/2014 | FRANCE | N°12/05692

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 18 décembre 2014, 12/05692


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 96Z



1re chambre 1re section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 DECEMBRE 2014



R.G. N° 12/05692



AFFAIRE :



AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT



C/





[X] [L]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Juin 2012 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 11/02059



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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :





Me Cécile FLECHEUX de la SCP BILLON & BUSSY-RENAULD & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES





- Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU N...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 96Z

1re chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 DECEMBRE 2014

R.G. N° 12/05692

AFFAIRE :

AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

C/

[X] [L]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Juin 2012 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 11/02059

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Cécile FLECHEUX de la SCP BILLON & BUSSY-RENAULD & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES

- Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ÉTAT

nouvelle dénomination de l'Agent Judiciaire du Trésor

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Cécile FLECHEUX de la SCP BILLON & BUSSY-RENAULD & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 241 - N° du dossier 120230

APPELANT

****************

Monsieur [X] [L]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 3] (95)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20120480

Représentant : Me Hervé CASSEL, substitué par Maitre BERNARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0049 -

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 novembre 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Dominique PONSOT, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Odile BLUM, Président

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

Madame Agnès TAPIN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de PONTOISE du 19 juin 2012 ayant, notamment, condamné l'Agent Judiciaire du Trésor à payer à M. [L] les sommes de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts et de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu la déclaration du 31 juillet 2012 par laquelle l'Agent Judicaire de l'Etat a formé à l'encontre de cette décision un appel de portée générale ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 29 octobre 2012, aux termes desquelles l'Agent judiciaire de l'Etat demande à la cour de :

- infirmer le jugement,

- dire que les services de l'état civil de la ville d'[Localité 3] n'ont pas commis de faute engageant la responsabilité de l'État,

- dire subsidiairement qu'en tout état de cause, l'existence d'une faute lourde n'est pas établie,

Plus subsidiairement, constater l'absence de préjudice,

Par conséquent, débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes,

-le condamner au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 17 décembre 2012, aux termes desquelles [X] [L] demande à la cour de :

- confirmer le jugement,

- condamner l'Agent judiciaire de l'État à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant qu'il sera rappelé qu'au mois de septembre 2007, [X] [L] a sollicité de la mairie d'[Localité 3] (95), par l'intermédiaire de son site Internet, la délivrance de quatre copies intégrales de son acte de naissance ;

Qu'il lui a été délivré des copies intégrales d'acte de naissance mentionnant qu'il avait fait l'objet d'une mesure de légitimation adoptive, ce qu'il ignorait jusqu'à cette date ;

Qu'estimant que cette révélation lui causait un préjudice, il a, par acte d'huissier du 8 mars 2011, fait assigner l'Agent judiciaire du Trésor devant le tribunal de grande instance de PONTOISE en réparation du préjudice subi ; que sa demande a été accueillie par le jugement entrepris ;

Sur la faute

Considérant que l'Agent judiciaire de l'État soutient à titre principal qu'aucune faute n'a été commise par l'officier de l'état civil de la commune d'[Localité 3] ; qu'il fait tout d'abord valoir que M. [L] a sollicité des copies intégrales d'acte de naissance et non des extraits d'acte de naissance, de sorte que l'article 12 du décret du 3 août 1962, dans sa rédaction issue de l'article 7 du décret du 15 février 1968, ne peut s'appliquer et que l'administration était donc tenue de lui communiquer des copies intégrales d'acte de naissance mentionnant sa véritable filiation ; qu'il soutient que le décret du 3 août 1962 ne comportant aucune disposition interdisant la communication , à une personne adoptée qui n'a pas fait état de son adoption et de son origine, de la copie intégrale de son acte de naissance sur lequel figurent ses parents d'origine, c'est sans commettre de faute qu'une telle copie a été délivrée à M. [L] ;

Que l'Agent judiciaire de l'État soutient ensuite que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les dispositions de l'article 197-8 de l'instruction générale relative à l'état civil (IGREC), dans sa version du 10 mai 1999, ne peuvent être invoquées, dès lors que le secret de l'identité des parents biologiques de M. [L] n'a pas été demandé et qu'aucune loi ne protège, selon lui, le secret de l'adoption ;

Qu'il estime que c'est ainsi qu'il convient de lire les dispositions de la circulaire CIV/04/03 du 20 mars 2003 prescrivant aux officiers d'état civil de délivrer une copie intégrale de leur acte de naissance aux personnes adoptées qui en font la demande, laquelle a, selon lui, entendu mettre un terme aux pratiques préconisées par l'IGREC de 1999, hors de tout fondement juridique ; que, désormais, selon la circulaire du 20 mars 2003, la filiation d'origine de l'enfant ne doit demeurer secrète que dans le cas où la mère a demandé le secret de son identité, l'adoption n'étant, quant à elle, pas couverte par le secret ;

Que l'Agent judiciaire de l'État soutient, à titre subsidiaire, que même à supposer que les services de la mairie aient commis une erreur, il ne s'agit pas d'une faute lourde dans le fonctionnement des services judiciaires au sens de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire ; qu'il soutient que les officiers d'état civil, dont les fautes commises dans l'exercice de leur fonction engagent la responsabilité de l'État, sont placés sous le contrôle de l'autorité judiciaire, et que les dispositions de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire trouvent donc à s'appliquer ; qu'il constate qu'en l'espèce, M. [L] ne démontre par une déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, comme l'exige la jurisprudence ;

Qu'en réponse, [X] [L] fait valoir que l'article 197-8 de l'IGREC du 11 mai 1999 précise, s'agissant des mesures d'adoption plénière prononcées avant l'entrée en vigueur de la loi du 12 juillet 1966 portant réforme de l'adoption, qu'en cas de demande d'acte de naissance par l'adopté ne faisant pas mention de son adoption, l'acte ne peut être délivré que s'il ne contient aucune précision quant à la filiation d'origine ; qu'il rappelle que les règles relatives à la tenue des registres et la publicité des actes de l'état civil doivent être observées par les officiers de l'état civil et leurs délégataires sous peine de sanctions pénales ; qu'il rappelle également les restrictions contenues à l'article 39 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui interdit, moins de trente ans avant la mort de l'adopté, de publier (...) une information relative à la filiation d'origine d'une personne ayant fait l'objet d'une adoption plénière ;

Qu'il en tire la conséquence qu'il existe un principe de secret de l'adoption, qui s'impose aux tiers ;

Que, selon lui, la loi n° 2002-93 du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et des pupilles de l'État, en organisant une procédure tendant à faciliter les recherches des personne recherchant leurs parents de naissance, permet de s'assurer que la seule communication de l'acte intégral de naissance n'a pas vocation à lever le secret de l'adoption lorsque que la version de l'acte intégral de naissance est demandée pour un motif autre que la recherche de filiation ;

Qu'ainsi, la circulaire du 20 mars 2003 relative à la délivrance de copies intégrales d'acte de naissance aux personnes adoptée précise que les demandeurs qui font état de leur adoption mais ignorent l'identité de leurs parents, doivent obtenir la copie intégrale de leur acte de naissance ; que, selon lui, cette circulaire ne remet nullement en cause le secret de l'adoption, mais confirme que l'adoption n'est portée à la connaissance de l'adopté qu'à l'occasion d'une démarche volontaire de sa part ;

Mais considérant que si c'est à juste titre que [X] [L] fait observer que la circulaire du 20 mars 2003, en ce qu'elle vise à remédier à des pratiques divergentes constatées auprès des services d'état civil auxquels des adoptés, désireux de connaître l'identité de leurs parents d'origine, sollicitent une copie intégrale de leur acte de naissance faisant mention de leur filiation d'origine, n'a pas expressément abrogé les dispositions du paragraphe 197-8 de l'IGREC du 11 mai 1999 s'agissant de la délivrance d'une copie intégrale d'acte de naissance mentionnant la filiation adoptive à un adopté qui ne fait pas état de sa filiation adoptive, il n'en demeure pas moins qu'en l'état du droit positif, les restrictions contenues au paragraphe 197-8 de l'instruction susvisée ne reposent sur aucun fondement légal ou réglementaire ;

Que c'est en vain que [X] [L] invoque l'article 39 de la loi du 29 juillet 1881, disposition qui n'a pas vocation à fixer les conditions dans lesquelles sont délivrés les copies d'actes d'état civil aux personnes qu'elles concernent ;

Qu'il convient de rappeler que, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2002-93 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'État, le seul secret auquel sont légalement tenus les officiers d'état civil en matière d'adoption est celui organisé au profit de la mère de l'enfant, lorsque celle-ci a, au moment de l'accouchement, demandé la préservation du secret de son admission et de son identité ;

Que par suite, il ne peut être reproché à l'officier de l'état civil de la commune d'Argenteuil d'avoir méconnu l'IGREC et d'avoir délivré à [X] [L] une copie intégrale de son acte de naissance mentionnant sa filiation d'origine, quand bien même celui-ci, qui ignorait qu'il avait fait l'objet d'une adoption, n'en avait pas fait état ;

Qu'en conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a constaté une faute à l'encontre de l'officier d'état civil de la commune d'[Localité 3] et retenu la responsabilité de l'État ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que [X] [L] succombant dans ses prétentions doit supporter les dépens de la procédure de première instance et d'appel ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

INFIRME le jugement rendu le 19 juin 2012 par le tribunal de grande instance de PONTOISE ;

STATUANT à nouveau,

-DÉBOUTE [X] [L] de l'ensemble de ses demandes ;

REJETTE toute autre demande des parties, et notamment celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

LAISSE à [X] [L] la charge des dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 12/05692
Date de la décision : 18/12/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°12/05692 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-18;12.05692 ?
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