COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 63B
1re chambre 1re section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 NOVEMBRE 2014
R.G. N° 13/04805
AFFAIRE :
SAS GC FINANCIERE
C/
SELAS [Q]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Janvier 2011 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 10/5055
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES -
- Me Philippe CHATEAUNEUF, avocat au barreau de VERSAILLES,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE TREIZE NOVEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (Première chambre civile) du 30 mai 2013 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 15 mai 2012 (Pôle 2 - Chambre 1) sur appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 19 janvier 2011,
GC FINANCIERE
SAS immatriculée au RCS de [Localité 3], sous le numéro B 423 234 160
dont le siège social est
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par sa gérante en exercice domiciliée audit siège.
assistée de SELARL LEXAVOUE PARIS VERSAILLE, agissant par Maitre Martine DUPUIS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625,
assistée et plaidant par Me Dominique-Lucie BOQUET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0263
****************
DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI
SELAS [Q]
immatriculée au RCS der [Localité 4] sous le numéro 788 105 559
dont le siège est [Adresse 4]
[Localité 4]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 2013050
assistée de Me Sabine DU GRANRUT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2000
Maître [X] [A]
[Adresse 4]
[Localité 4]
Représentant Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 2013050
assisté de Me Sabine DU GRANRUT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2000
Maître [O] [M]
[Adresse 4]
[Localité 4]
Représentant Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 2013050
assistée de Me Sabine DU GRANRUT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2000
SA COVEA RISKS
immatriculée au RCS N° 378 716 419
dont le siège est situé
[Adresse 2]
[Localité 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 2013050
assistée de Me Sabine DU GRANRUT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2000
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 Octobre 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile BLUM, Président chargé du rapport et Madame Dominique LONNE, conseiller,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Odile BLUM, Président,
Madame Dominique LONNE, Conseiller,
Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,
Vu le jugement rendu le 19 janvier 2011 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
- prononcé la nullité de l'assignation et déclaré l'action introduite par la société Gc Financière irrecevable,
- condamné la société Gc Financière à payer aux défendeurs la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu l'arrêt rendu le 15 mai 2002 par la cour d'appel de Paris qui a infirmé le jugement et qui évoquant, a débouté la société Gc Financière de toutes ses demandes et condamné celle-ci à payer à la Selarl [R] [F], à M. [X] [A], à M. [O] [M] et à la société Covea Risks, chacun, la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Vu l'arrêt rendu le 30 mai 2013 par la Cour de cassation qui renvoyant les parties devant la cour d'appel de Versailles, a cassé et annulé cet arrêt en toutes ses dispositions ;
Vu la déclaration de saisine en date du 21 juin 2013 de la société Gc Financière qui, par ses dernières écritures du 31 juillet 2014, auxquelles il est expressément renvoyé, demande à la cour d'infirmer le jugement, d'évoquer et de :
1/
- dire irrecevable, pour non-conformité avec les dispositions de l'article 74 du code de procédure civile, la demande des intimés tendant à faire prononcer la nullité de l'assignation introductive d'instance et l'irrecevabilité de l'action ; la rejeter comme telle,
- dire qu'en l'espèce, les avocats rédacteurs d'actes intimés ont bénéficié de sa part d'une investiture et d'un mandat qui lui ont été imposés dans le cadre d'une convention '... d'assistance dans la négociation et la rédaction de la documentation juridique'' passée le 16 janvier 2009 entre [T] [Y] consultant et elle-même et que de ce fait, eu égard aux circonstances de la cause, elle pouvait appuyer sa demande introductive d'instance, avec toute vraisemblance, sur les dispositions de l'article 1382 du code civil, relatives à la responsabilité quasi-délictuelle,
- dire en conséquence, que l'assignation n'a pu faire grief aux défendeurs intimés et n'a aucunement violé les dispositions de l'article 56 2° du code de procédure civile, la dire régulière et recevable ; dire également recevable l'action introduite aux termes de ladite assignation,
2/ sur le fond
- dire que l'ensemble des manquements constatés constituent des fautes professionnelles, causes de préjudices en relation directe et immédiate de cause à effet,
- condamner solidairement les intimés à lui payer la somme de 699.168,28 € à titre de dommages et intérêts et la somme de 40.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction,
- subsidiairement, désigner un expert avec mission de réunir et de fournir tous éléments utiles à la détermination du montant du préjudice qu'elle a subi ; en ce cas, condamner les intimés à lui payer solidairement entre eux une indemnité provisionnelle de 300.000 €,
- plus subsidiairement, usant de la faculté prévue par l'article 12 du code de procédure civile, requalifier la demande, objet de l'assignation introductive d'instance, en disant celle-ci relever des dispositions de l'article 1147 du code civil relatives à la responsabilité contractuelle ; débouter les intimés de leur demande tendant à faire prononcer la nullité de l'assignation et l'irrecevabilité de l'action ; statuer sur le fond comme ci-dessus demandé y compris la demande subsidiaire d'expertise,
- plus subsidiairement encore, lui donner acte de ce qu'elle forme une demande de requalification de sa demande pour voir dire que celle-ci se fonde sur les dispositions de l'article 1147 du code civil ; dire cette demande recevable et fondée et statuer comme ci-dessus demandé ;
Vu les dernières conclusions du 13 janvier 2014 de la Selas [R] [F], Me [X] [A], Me [O] [M] et la SA Covea Risks, qui demandent à la cour, au visa des articles 56 2° du code de procédure civile, 1147, 1151 et 1382 du code civil, de :
- confirmer le jugement ayant prononcé la nullité de l'assignation et déclaré irrecevable l'action introduite par la société Gc Financière,
- dire les demandes subsidiaires de la société Gc Financière irrecevables au regard du caractère général des manquements allégués en demande ; dire que les préjudices allégués par la société GC Financière ne sont pas caractérisés, au regard de la procédure pendante à l'encontre de la société First Luxe Hôtel, et déclarer en conséquence la demande de GC Financière irrecevable,
- débouter la société GC Financière de l'ensemble de ses demandes,
- la condamner à leur verser à chacun la somme de 12.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction ;
SUR QUOI, LA COUR
Considérant que par acte du 16 janvier 2009, dit contrat de prestations de services, M. et Mme [D] ont donné mission à M. [Y] de les 'assister et de les accompagner activement' pour l'acquisition du fonds de commerce d'hôtel exploité sous l'enseigne Hôtel [1] au [Adresse 1] par la Société hôtelière [Adresse 1] ; que cette mission a été contractuellement définie comme ayant pour objet :
'- une présentation complète (juridique, comptable, financière, technique, administrative de l'hôtel, - définir et arrêter le montage d'acquisition de l'hôtel (structure juridique, financement, fiscalité ...) et les modalités de sa réalisation (acquisition du fonds de commerce et/ou rachat de titres sociaux, garantie d'actif et de passif ...), - participer et assister le client dans le cadre de la négociation de l'acquisition de l'hôtel, - rechercher les concours bancaires à l'effet de financer l'opération d'acquisition, - solliciter et organiser les rendez-vous dans le cadre de cette opération avec les intervenants à l'opération' ;
Que l'acte fait mention de ce que :
'dans le cadre de l'exécution de ses obligations, ce qui est expressément accepté par le client, le conseil fera appel aux intervenants ci-après qui représenteront le client :
- le cabinet d'expertise comptable Segec représenté par Monsieur [G] [B] ... à l'effet d'assister le client dans les aspects comptables et financiers,
- le cabinet d'avocats [R] [F] représenté par Monsieur [O] [M] ... à l'effet d'assister le client dans la négociation et la rédaction de la documentation juridique relative à l'acquisition' ;
Que par acte du même jour, M. et Mme [D] ont fait une offre d'achat de la totalité des actions formant le capital social de la SAS Société hôtelière [Adresse 1] au prix de 3.000.000 € à ajuster sur la base d'une situation comptable arrêtée et auditée à la date de réalisation de la cession ;
Que le 28 janvier 2009, une promesse synallagmatique de cession a été signée, au prix provisoire de 1.433,20 € l'action, soit au total 3.153.040 €, entre la société Hôtel [1], propriétaire de l'intégralité du capital social de la SAS Société hôtelière [Adresse 1] et la SARL Gc Financière représentée par Mme [D], sa gérante, sous diverses conditions suspensives dont la conformité des installations électriques, de sécurité et de gaz combustible dans l'immeuble et la confirmation de l'acceptation par la préfecture de police ayant délivré l'injonction du 19 septembre 2008, du programme de travaux de mise en conformité présenté par la cédante ; que cet acte, dit protocole d'accord - promesse de vente, prévoit que 'l'ensemble des engagements fera l'objet d'actes réitératifs (convention de garantie, engagement de non concurrence) dans les termes exacts convenus aux présentes à l'exclusion de toute modification ou extension des engagements et déclarations' de la société Hôtel [1], que ces actes seront rédigés par le cabinet [R] [F] en collaboration avec le Cabinet [N] SA société d'avocats à [Localité 4], que les honoraires de rédaction seront partagés par moitié entre les deux cabinets rédacteurs et que ces honoraires et les frais et droits d'enregistrement afférents à ces actes seront payés par la société Gc Financière qui s'y engage ;
Que le 5 mai 2009, ces mêmes parties ont signées entre elles, d'une part l'acte de cession des 2200 actions de la Société hôtelière [Adresse 1], au prix provisoire de 1.433,20 € l'action, soit au total 3.153.040 €, le prix définitif devant être établi au vu du bilan arrêté au jour de la réalisation de la cession, cet acte comportant une clause de non concurrence, d'autre part une garantie d'actif et de passif ;
Considérant que faisant état de dysfonctionnement et désordres, la société Gc Financière a, le 5 août 2009, assigné la société Hôtel [1], actuellement dénommée First Luxe Hôtel, devant le juge des référés ; que par arrêt du 19 mai 2010, une mesure d'expertise a été ordonnée qui a été étendue notamment au maître d'oeuvre et aux entreprises en charge des travaux et des vérifications réalisés notamment avant la cession ; que M. [S], l'expert judiciaire, a déposé son rapport en février 2013 ;
Qu'une procédure judiciaire a par ailleurs opposé la société Gc Financière à M. [Y] à propos du paiement de la rémunération de celui-ci et l'exécution de sa mission ce qui a donné lieu à un arrêt, non versé aux débats, rendu le 1er mars 2012 par la cour d'appel de Rouen qui a débouté la société Gc Financière de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de M. [Y] ;
Considérant qu'entre temps, le 23 mars 2010, la société Gc Financière a assigné le cabinet d'avocat [R] [F] ainsi que Me [A] et Me [M], avocats associés au sein de ce cabinet, en leurs qualités de rédacteurs de la promesse et de l'acte de cession pour voir engager leur responsabilité civile professionnelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil et les voir condamner à lui payer la somme de 658.081 € à titre de dommages et intérêts ; qu'elle a assigné par la suite la société Covea Risks, leur assureur, en intervention forcée et paiement ; que le jugement déféré est intervenu le 19 janvier 2011 dans les termes sus-relatés ; que l'arrêt rendu le 15 mai 2012, sur l'appel de ce jugement relevé le 10 février 2011 par la société Gc Financière, a été cassé et annulé par la Cour de cassation au visa de l'article 455 du code civil et au motif :
'que pour rejeter la demande, l'arrêt relève que le cessionnaire n'avait pas mis en oeuvre la garantie de passif instrumentée par l'avocat rédacteur de la cession auquel il n'incombait pas de procéder à la vérification de l'estimation des travaux de rénovation litigieux initialement convenue entre les parties, ce d'autant qu'une expertise judiciaire, à laquelle l'avocat n'était pas partie était en cours sur cette question ;
qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Gc Financière qui faisait valoir que cette garantie ne couvrait que les risques d'un passif révélé postérieurement à la conclusion de la cession et n'avait donc pas vocation à s'appliquer à un engagement dont l'inexécution était apparente au jour de l'instrumentation de l'acte, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé' ;
Considérant que la société Gc Financière n'est pas fondée à soutenir que par son arrêt du 30 mai 2013, la Cour de cassation a consacré la validité de l'assignation et la recevabilité de son action ; que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 15 mai 2012 sur l'appel du jugement du 19 janvier 2011 a été annulé et cassé en toutes ses dispositions et les parties sont replacées dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé ;
Considérant, cela étant posé, que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la nullité de l'assignation introductive d'instance par application de l'article 56 2°du code de procédure civile motifs pris du caractère général des manquements allégués, du fondement de l'action sur l'article 1382 du code civil alors que la société Gc Financière évoque elle-même sa qualité de mandant des défendeurs, de l'absence de modification par la société Gc Financière de son fondement juridique en dépit de son interpellation sur ce point, de l'absence d'obligation pour le juge de requalifier les faits, de la nature différente des fautes en matière contractuelle et des fautes en matière délictuelle et de la confusion introduite par la société Gc Financière qui a fait grief à la partie adverse dans l'organisation de sa défense ;
Que, si contrairement à ce que soutient la société Gc Financière, l'exception de nullité de l'assignation a bien été introduite simultanément et avant toute défense au fond conformément à l'article 74 du code civil et qu'elle est recevable, l'exception n'apparaît pas fondée :
Qu'il ressort en effet clairement de l'assignation, en dépit de développements pour le surplus confus, que la société Gc Financière agit en 'responsabilité civile professionnelle' à l'encontre de la Selas [R] [F], de Me [A] et de Me [M], 'en leur qualité de rédacteurs' de la promesse de cession et de l'acte de cession des actions de la Société hôtelière [Adresse 1], sur le fondement, notamment de l'article 1382 du code civil, en raison d'un 'manquement à leur devoir de conseil ... et de leur obligation de résultat', ce manquement ayant entraîné le fait que, notamment, elle 'n'a pu avoir, avant signature, la maîtrise des réels manquements de la cédante sur les travaux exigés par l'administration, les autres travaux indispensables à la conformité de la chose vendue, les éléments comptables et financiers indispensables à la détermination de la valeur exacte de la chose vendue' et qu'elle en a subi un préjudice qu'elle détaille poste par poste ;
Que l'assignation satisfait ainsi suffisamment aux dispositions de l'article 56 2° du code de procédure civile ; que les intimés, alors défendeurs, ne pouvaient se méprendre sur l'objet de la demande ni son fondement juridique quand bien même le fondement avancé était erroné ; qu'ils étaient en mesure d'organiser leur défense au vu de l'argumentation développée par la société Gc Financière ; que l'exception de nullité étant rejetée comme mal fondée, l'assignation est valable ; que le jugement sera en conséquence infirmé sur la nullité de l'assignation et l'irrecevabilité subséquente de l'action introduite par la société Gc Financière ;
Considérant qu'en application de l'article 568 du code de procédure civile, il convient d'évoquer pour donner une solution définitive à cette affaire ;
Considérant que la société Gc Financière agit, à titre principal, sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'elle expose qu'elle entreprenait pour la première fois l'acquisition d'un hôtel ce qui méritait la vigilance attentive d'un rédacteur d'actes veillant au nécessaire équilibre des intérêts opposés ou susceptibles de l'être ; qu'elle indique avoir été néanmoins placée, pour cet achat, 'dans un circuit condamnable, allant de M. [Y], consultant, intermédiaire dans la vente, au Cabinet d'avocats [N], conseil habituel M. et Mme [U], responsables de la société Hôtel [1], venderesse, pour se terminer au cabinet des défendeurs présentement intimés, qui lui avait été attribué', cette 'coalition (n'ayant) eu pour seul dessein que celui d'avantager au mieux' les intérêts de la cédante ; qu'elle fait valoir qu'elle ne connaissait absolument pas le cabinet d'avocats [R] [F] qui lui a été imposé comme une condition de l'accord, qu'elle n'a pas choisi cet avocat et n'a pu l'agréer par la convention du 16 janvier 2009 dès lors que le choix de ses conseils habituels aurait entraîné l'échec du projet de cession, que n'ayant pas véritablement choisi la Selas [R] [F], elle est fondée à agir à l'encontre de celle-ci et de ses avocats associés sur le terrain de la responsabilité quasi-délictuelle ;
Mais considérant que si la société Gc Financière prétend s'être vu imposer la Selas [R] [F] par M. [Y], il demeure qu'elle a expressément accepté ce choix et s'est trouvé contractuellement liée avec ce cabinet d'avocats qui a procédé pour son compte à la rédaction des actes avec le Cabinet [N], conseil des animateurs de la société cédante ; qu'au regard du lien contractuel qui est établi et des fautes qu'elle allègue, son action ne peut trouver son fondement que sur l'article 1147 du code civil qu'elle invoque à juste titre à titre subsidiaire ;
Considérant que l'argumentation développée par les intimés pour conclure à l'irrecevabilité de la société Gc Financière à agir en responsabilité civile professionnelle à leur encontre sur le fondement de l'article 1147 du code civil relève du fond droit ; que la société Gc Financière, non fondée à agir à l'encontre des intimés sur le fondement de l'article 1382 du code civil, est en conséquence recevable en son action sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; qu'il convient d'examiner le bien fondé de sa demande à ce titre ;
Considérant que la société Gc Financière reproche aux avocats intimés d'avoir manqué à leur devoir de conseil et à leur obligation en tant que rédacteur d'actes ;
Qu'elle leur impute à faute le fait que l'acte définitif ne soit pas l'exact reflet de la promesse de vente, qu'il contient une clause nouvelle relative aux travaux non précédemment exigés par l'administration injustement libellée aux seuls intérêts de la cédante, qu'il lui donne acte à tort de ce qu'elle a examiné les pièces justificatives, qu'il est défaillant dans l'énonciation et le contrôle des travaux exigés par l'administration, qu'il ne contient aucune information ni mention des réserves utiles à la préservation de ses intérêts ; qu'elle leur impute également à faute le fait qu'il n'y a pas eu de contrôle des éléments comptables notamment bilans ni de vérification préalable de la conformité de l'installation du gaz combustible, le fait de ne pas avoir attiré son attention sur le non respect des dates des conditions suspensives, de n'avoir pas vérifié sur documents l'exécution des travaux exigés dans la promesse de vente concernant tant ceux demandés par l'administration que ceux contractuellement prévus ; qu'elle leur fait également grief de s'être abstenu d'exiger la production du bail renouvelé le 27 octobre 1994, de ne pas avoir requis le descriptif des travaux de mise aux normes résultant de la demande d'autorisation faite par la Société hôtelière [Adresse 1] le 7 décembre 2001, le budget y affecté, les immobilisation réalisées à cette fin et le procès-verbal de réception sans réserves des travaux et de n'avoir pas demandé aux bailleurs une prise en charge des travaux exigés par la Préfecture le 19 septembre 2008, compromettant la possibilité de demander une réduction de loyer ; qu'elle leur fait grief aussi de n'avoir pas obtenu la production d'un état des risques naturels et technologiques, d'un diagnostic amiante actualisé, d'un diagnostic d'exposition au plomb récent et d'un diagnostic termites conforme et de ne pas avoir procédé à la modification du Kbis de la société qui mentionnait toujours l'existence d'une location gérance ;
Mais considérant qu'il sera relevé à titre liminaire que M. et Mme [D], animateurs de la société Gc Financière, avaient confié d'une part à M. [Y] la mission de les assister et 'accompagner activement pour l'acquisition projetée', d'autre part au cabinet d'expertise comptable Segec la mission de les assister dans les aspects comptables et financiers de l'opération ; que la mission donnée aux avocats intimés ne portaient que sur la négociation et la rédaction de la documentation 'juridique' relative à l'acquisition ; qu'ils n'étaient donc tenus ni de s'assurer de l'opportunité purement économique de l'opération ni de vérifier sa viabilité financière ;
Considérant que la société Gc Financière ne formule aucun grief précis relativement à la promesse de cession du 28 janvier 2009 ; que son argumentation porte sur l'acte définitif et les diligences pour sa réalisation ;
Considérant que la société Gc Financière ne démontre pas que, dans le cadre de la sphère juridique qui était la leur, ses avocats aient manqué envers elle à leur obligation de conseil et n'aient pas veillé, en leurs qualités de rédacteurs d'actes, à réunir les justificatifs propres à assurer l'efficacité de l'acte de cession au mieux de ses intérêts, sachant que l'offre d'achat avait été signée par M. et Mme [D] le 16 janvier 2009 sans leur intermédiaire, que la société Gc Financière était assistée du cabinet Segec pour les aspects comptables et financiers et que l'opération voulue par les animateurs de la société Gc Financière impliquait des négociations et de nécessaires concessions réciproques sur les délais convenus sous peine de ne pas aboutir ;
Considérant que le fait que l'acte de cession d'actions du 5 mai 2009 ne soit pas le reflet exact de la promesse de cession résulte de la nature même de ce dernier acte qui est un avant-contrat stipulant des conditions suspensives ; que les documents versés aux débats par la société Gc Financière elle-même permettent d'établir que les intimés disposaient au jour de l'acte définitif de tous les justificatifs propres à considérer que ces conditions suspensives étaient levées et que la cession pouvait valablement intervenir ; qu'il ne peut leur être imputé à faute les éventuels manquements, alors cachés, de la cédante, des entreprises en charge des travaux incombant contractuellement à celle-ci, de son maître d'oeuvre ou des sociétés Qualiconsult et Acts en charge des vérifications réglementaires qui ont tous alors attesté de l'achèvement et de la conformité des travaux ; qu'il ne peut non plus leur être fait grief de n'être pas rentré dans le détail des factures produites alors que la société Gc Financière avait missionné un expert comptable ni de ne s'être pas assuré par eux-mêmes que l'hôtel répondait effectivement à toutes les normes applicables et aménagements prétendus ; qu'en outre la mise à la charge du cessionnaire, à compter du jour de la cession, des conséquences de travaux n'ayant fait l'objet, à cette date, d'aucune injonction de l'administration n'apparaît pas résulter d'un défaut fautif de conseil ou d'information des rédacteurs d'actes ;
Qu'il sera relevé par ailleurs, que pour parfaire les engagements souscrits, les avocats intimés ont rédigé au profit de la société Gc Financière une garantie d'actif et de passif s'appliquant, pour la totalité des actions cédées, sur la société Hôtel [1] constituée garant ;
Considérant enfin que parmi les nombreux documents annexés à la promesse de cession figurent le bail commercial du 12 février 2002 en cours et les avenants de révision du loyer ; qu'en outre tant la promesse de cession que l'acte définitif rappellent celles des dispositions du bail en cours qui sont reprises du bail antérieur expiré (destination, charges de l'impôt foncier) ; qu'en cet état, la société Gc Financière ne justifie nullement de la perte de la possibilité d'obtenir la réduction du loyer de son bail commercial qui résulterait de l'absence de production tant du bail expiré que des éléments visés et détaillés à la clause particulière du bail en cours ; qu'elle ne justifie pas plus d'un préjudice tenant d'une part, à l'absence d'un état des risques naturels et technologiques et de diagnostics amiante, plomb et termites actualisés, d'autre part à la persistance de la mention de la société Hôtel [1] comme locataire gérante sur l'extrait Kbis de la Société hôtelière [Adresse 1] en date du 28 janvier 2010 ;
Considérant que la société Gc Financière sera en conséquence déboutée de l'intégralité de sa demande ;
Que succombant, elle supportera la charge des dépens et vu l'article 700 du code de procédure civile, sera condamnée à payer la somme de 2.000 € à chacun des quatre intimés pour leur frais irrépétibles, sa demande à ce titre étant rejetée ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement ;
Statuant à nouveau et évoquant,
Dit recevable mais mal fondée l'exception de nullité de l'assignation ; la rejette ;
Déclare la société Gc Financière recevable mais mal fondée en sa demande sur le fondement de l'article 1147 du code civil ;
Déboute la société Gc Financière de l'intégralité de ses demandes ;
Condamne la société Gc Financière à payer à chacun des quatre intimés la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes ;
Condamne la société Gc Financière aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les dépens de l'arrêt cassé et qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,