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30/10/2014 | FRANCE | N°13/00220

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 30 octobre 2014, 13/00220


COUR D'APPELDE VERSAILLES

Code nac : 53F
13e chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 30 OCTOBRE 2014
R.G. No 13/00220
AFFAIRE :
SAS INTELEASE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

C/
SA CARNET DE VOL Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 14 Novembre 2011 par le Tribunal de Commerce de NANTERRENo Chambre : 9No Section : No RG :
Expéditions exéc

utoiresExpéditionsCopiesdélivrées le : 30-10-2014
à :
- Me Claire RICARD,
- Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI ...

COUR D'APPELDE VERSAILLES

Code nac : 53F
13e chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 30 OCTOBRE 2014
R.G. No 13/00220
AFFAIRE :
SAS INTELEASE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

C/
SA CARNET DE VOL Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 14 Novembre 2011 par le Tribunal de Commerce de NANTERRENo Chambre : 9No Section : No RG :
Expéditions exécutoiresExpéditionsCopiesdélivrées le : 30-10-2014
à :
- Me Claire RICARD,
- Me Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS,
- TC Nanterre

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE,La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SAS INTELEASE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.No SIRET : B44 095 235 630 rue du Fort92500 RUEIL MALMAISON
Représentée par Maître Claire RICARD, avocat postulant au barreau de VERSAILLES - No du dossier 2013017 et par Maître CHARLERY Eric, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANTE
SA CARNET DE VOL Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siègeNo SIRET : 348 040 6191ère avenue 6001 Mètres - Zone Industrielle06510 CARROS
Représentée par Maître Emmanuel JULLIEN de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - No du dossier 20130072 et par Maître DE LA GRANGE Patrick, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMEE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Juillet 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente,Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,Madame Annie VAISSETTE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,

Entre le 5 novembre 2003 et le 25 avril 2005, la société Carnet de Vol qui est une société de prêt-à-porter a loué par une succession de huit contrats, référencés CDV 1à 8 à la société Allianthis divers matériels informatiques intégrant des terminaux de paiements à destination de ses magasins.Par courrier recommandé daté du 17 août mais expédié le 7 septembre 2007, la société Carnet de vol a résilié l'ensemble des contrats, sollicitant un geste commercial en raison de la date de résiliation légèrement dépassée pour certains contrats et sollicité une proposition de rachat du matériel compte tenu de ce qu'il était difficile de retrouver sa matérialisation exacte.Les parties n'ont pas trouvé de solution amiable à leur différend, la société Allianthis réclamant les loyers pour les périodes de reconduction tacite des contrats pour lesquels le préavis n'avait pas été respecté et la restitution des matériels et la société Carnet de vol soutenant qu'elle bénéficiait d'une option d'achat et laissant impayés les loyers afférents aux périodes de reconduction tacite.Par assignation du 11 janvier 2011, la société Allianthis a alors assigné la société Carnet de vol devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins d'obtenir le paiement des loyers de prolongation et des indemnités de jouissance jusqu'à la restitution effectives des biens loués.Par jugement rendu le 14 novembre 2012, le tribunal de commerce a dit que la société Allianthis ne s'était pas engagée à une option d'achat lors de la conclusion des contrats, que la fixation d'indemnités de jouissance en cas de non restitution du matériel à l'échéance du contrat est légitime, a condamné la société Carnet de vol à payer à la société Intelease (anciennement Allianthis) :¿ 14.890,22 ¿ au titre de la prolongation des contrats outre les intérêts au taux de 1 % par mois à compter de l'échéance de chacune des mensualités,¿ 26.48 ¿ au titre des indemnités de jouissance, déboutant pour le surplus et les intérêts,¿ 3.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,et a ordonné l'exécution provisoire pour les sommes dues au titre de la prolongation des contrats, déboutant pour le surplus, condamné la société Carnet de vol aux dépens.La société Allianthis devenue Intelease a fait appel de ce jugement.Par dernières conclusions signifiées le 20 mai 2014, la société Intelease demande à la cour de :- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Carnet de vol à lui payer,¿ 14.890,22 ¿ au titre de la prolongation des contrats CDV 1 et 2, outre les intérêts au taux de 1 % par mois à compter de l'échéance de chacune des mensualités,¿ 26.418 ¿ au titre des indemnités de jouissance sur une durée réduite de 6 mois, pour défaut de restitution des biens afférents à l¿ensemble des contrats de location convenus entre les parties,¿ 3.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée du surplus de ses demandes et statuant à nouveau et y ajoutant, condamner la société Carnet de vol à lui payer les sommes de :¿ 680 ¿ HT par mois à compter de juin 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 1,¿ 633 ¿ HT par mois à compter de septembre 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 2,¿ 633 ¿ HT par mois à compter de décembre 2008 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 3,¿ 633 ¿ HT par mois à compter de février 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 4,ces sommes augmentées de l'intérêt moratoire conventionnel au taux de 1 % par mois conformément à l'article 3.6 des conventions ci-dessus,¿ 350 ¿ HT par mois à compter de juin 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 5,¿ 639 ¿ HT par mois à compter de décembre 2008 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 6,¿ 305 ¿ HT par mois à compter de septembre 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 7,¿ 530 ¿ HT par mois à compter de novembre 2009 jusqu'à restitution effective des biens loués en vertu du contrat de location référencé CDV 8,ces sommes augmentées de l'intérêt moratoire conventionnel au taux légal majoré de 5 %, conformément à l'article 2 des conventions ci-dessus ;- enjoindre à la société Carnet de vol de lui restituer les matériels conformément aux conditions contractuelles la totalité des équipements loués et ce dans les huit jours de la signification de l'arrêt à intervenir et passé ce délai, d'une astreinte de 100 ¿ par jour de retard ;- se réserver la liquidation de l'astreinte ;- débouter la société Carnet de vol de toutes ses demandes ;- la condamner à lui payer 5.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.Par dernières conclusions signifiées le 6 mai 2014, la société Carnet de vol demande à la cour de réformer le jugement entrepris, statuant à nouveau de :- constater que la société Carnet de vol a souhaité exercer l'option d'achat dont elle bénéficiait et dire que la mise en oeuvre de cette option emporte transfert de propriété de l'équipement loué, que l'obsolescence du matériel et son amortissement dans les livres de la société Intelease privent de cause le renouvellement des contrats de location, en conséquence débouter, de plano, la société Intelease de toutes ses demandes ;Subsidiairement, - dire concernant le contrat CDV 02 qu'eu égard au caractère disproportionné de la solution contractuelle, la clause de renouvellement doit être qualifié de clause pénale et la cour usant de son pouvoir de modération, ramener la pénalité contractuelle à 1 ¿ ;- dire que la créance de loyer due au titre du seul contrat renouvelé CDV 1 ne saurait être supérieure à la somme de 5.749,17 ¿ après compensation avec le loyer indûment prélevé sur le contrat CDV 2 ;- dire que l'article 9 des conditions générales du contrat comporte une condition potestative,- prononcer la nullité de cette clause et écarter en conséquence les demandes au titre des indemnités de jouissance,A titre encore plus subsidiaire, sur cette indemnité,- si la cour en admettait le principe, la qualifier de clause pénale et la réduire au regard de la bonne foi de l'appelante à 1 ¿ symbolique en toute hypothèse la limiter à un mois de loyer par contrat,- condamner la société Intelease à lui payer la somme de 5.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
DISCUSSION : Il est établi que la société Carnet de vol a pris en location divers matériels suivant 8 contrats successifs qui sont référencés CDV 1 à CDV 8 lesquels contiennent à la charge du locataire, l'obligation de notifier au bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception la dénonciation du contrat en respectant un préavis de six mois avant l'échéance, la location étant à défaut reconduite tacitement pour un an, et celle de restituer les biens loués en fin de contrat et à défaut, de payer une indemnité de jouissance équivalente au loyer jusqu'à la restitution effective du matériel.Il est constant que la société Carnet de vol a résilié les huit contrats par un seul courrier expédié le 7 septembre 2007 et a conservé l'ensemble des matériels loués.
Sur l'option d'achat revendiquée par la société Carnet de volLa société Carnet de vol soutient que la société Intelease a manqué à ses obligations en refusant de céder le matériel loué, faisant valoir qu'aux termes de son offre, la société Intelease lui a proposé une option d'achat des matériels, que cette offre définissait la chose et le prix et la date d'option, qu'elle a accepté cette offre sans réserve et qu'elle en apporte la preuve par le document qu'elle verse aux débats qui constitue a minima un commencement de preuve par écrit renversant la charge de la preuve, que la sincérité de cette pièce est attestée par le bon de commande du 27 octobre 2003, qu'il résulte du constat d'huissier auquel elle a fait procéder que ce document émane de l'appelante et a été imprimée le 15 septembre 2003 ce qui lui donne une date certaine, qu'il est ainsi apporté la preuve de la commune intention des parties.Elle considère donc qu'ayant levé l'option, elle est devenue propriétaire des matériels et qu'elle n'est pas tenue au paiement des loyers et des indemnités de jouissance.La société Intelease conteste l'existence d'une option d'achat laquelle ne figure dans aucun contrat ainsi que le caractère probant du document produit par la société Carnet de vol dont elle affirme qu'il n'émane pas d'elle, ne constitue pas un commencement de preuve par écrit et que provenant d'un fichier informatique modifiable en toutes ses indications, il ne remplit pas les conditions d'admissibilité de la preuve électronique conformément à l'article 1316-1 du code civil. La société Intelease rappelle que la société locataire n'a jamais exercé cette option d'achat ce qu'elle n'aurait pas manqué de faire si elle avait été convaincue d'en être titulaire.Sur ce :Le bon de commande des matériels à la société ECS en date du 27 octobre 2003 ne comporte aucune référence à une option d'achat.Aucun des huit contrats signés par la société Carnet de vol ne contient d'option d'achat du matériel à l'issue de la durée de la location fixée à 48 mois. Les conditions particulières de ces contrats se présentent de façon claire comme portant sur une location financière, sans aucune option d'achat en fin de location, contenant la description des biens loués, puis les loyers, avec le montant HT de chaque loyer, le nombre de loyers et la périodicité, la durée du contrat. Les conditions générales disposent de façon tout aussi claire que le loueur conserve la propriété du matériel, sauf cession du contrat, que ce matériel doit être restitué à la fin de la période de location, que si le locataire conserve le matériel après le terme du contrat échu, le loueur perçoit des indemnités de jouissance de même montant que les loyers conventionnels.Il ressort donc sans ambiguïté des contrats produits que ceux-ci ne comportent pas de faculté de rachat en fin de location pour la société Carnet de vol.Celle-ci prétend néanmoins apporter la preuve qu'il aurait été de l'intention commune des parties de convenir d'une telle option d'achat. Cependant, et même si la preuve est libre en matière commerciale, le document versé aux débats par la société Carnet de vol qui apporterait selon elle la preuve de l'offre de la société Intelease mais dont il n'est justifié de façon indiscutable ni qu'il émane de la société Intelease ni à quelle date il aurait été prétendument adressé par celle-ci, ne saurait suffire à établir que la société Intelease et la société Carnet de vol auraient eu l'intention commune malgré les termes sans ambiguïté des contrats dont la signature s'est échelonnée sur près de 18 mois, entre le 5 novembre 2003 et le 25 avril 2005, d'assortir lesdits contrats d'une option d'achat, étant relevé que la société Carnet de vol n'allègue pas de vice de son consentement.La société Intelease n'a donc pas manqué à ses obligations contractuelles en refusant de céder les matériels loués en fin de location.Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la société Intelease ne s'est pas engagée à une option d'achat lors de la conclusion des contrats.
Sur les indemnités de jouissanceLa société Carnet de vol soutient que l'obsolescence du matériel et son absence de valeur économique au terme du contrat entraînent la disparition de la cause du bail, qu'aucune demande ne peut être sollicitée au titre des loyers au-delà de la période initiale, et/ou a fortiori au titre d'indemnités de perte de jouissance, eu égard à la disparition de valeur des matériels, en raison de leur obsolescence, qu'en effet, il est désormais acquis que le caractère obsolète de matériels peut enlever tout intérêt à sa restitution. Elle fait valoir que le raisonnement du premier juge est erroné, qu'en effet, pour le bailleur financier, la cause "contrepartie" du contrat n'est évidemment pas la propriété du bien qui lui est totalement indifférente, mais sa valeur financière, qui justifie le montant des loyers à percevoir, que ces loyers ne sont jamais fixés en fonction d'une quelconque « valeur d'usage » mais sont exclusivement calculés en fonction de la valeur d'achat et d'un taux d'intérêt, de manière à ce qu'au dernier loyer, capital et intérêts soient entièrement remboursés, qu'une fois, le bien entièrement remboursé et les intérêts dûment versés grâce au paiement des loyers, la cause « contrepartie » disparaît, que les contrats reconduits tacitement permettent aux sociétés de location financière de réaliser des marges à 100 %, que c'est pour cette raison que les sociétés qui « portent » l'opération en refinançant la société de location financière restituent matériel et contrat pour 1 ¿ symbolique au terme de la période initiale de location.La société Intelease réplique que l'obligation de payer les indemnités de jouissance a pour cause les contrats de location, que la loi n'interdit pas de louer des biens amortis, qu'il n'existe aucun principe de gratuité de l'usage du matériel loué à l'issue du terme du contrat, que la société Carnet de vol s'est engagée à payer un loyer ou une indemnité de jouissance, en contrepartie de l'usage du bien loué, indépendamment du point de savoir s'il est amorti ou non.Sur ce :L'existence de la cause d'un contrat s'apprécie au jour où il est souscrit.Les contrats de location étaient causés au jour où ils ont été conclus. Leur cause réside dans la mise à la disposition de la société Carnet de vol des matériels désignés dans chaque contrat par la société Intelease. La cause des contrats de location n'a pas disparu par la survenance de leur terme.Par ailleurs, il est expressément stipulé dans chacun des contrats que le locataire paiera une indemnité de jouissance égale au montant du loyer conventionnel s'il conserve le matériel loué après le terme du contrat de location.La cause de l'indemnité de jouissance due après le terme du contrat de location réside dans l'obligation du locataire de restituer le matériel au loueur à la fin de la location. Elle indemnise le loueur du refus du locataire de restituer le matériel dont celui-ci conserve l'usage, peu important que l'équipement en cause soit obsolète, amorti ou même n'ait pas de valeur, ces considérations n'étant pas de nature à faire disparaître la cause de l'obligation après le terme du bail pas plus comme le prétend la société Carnet de vol que l'obsolescence du matériel et son amortissement dans les livres de la société Intelease priveraient de cause le renouvellement des contrats de location.
Sur les loyers dûs au titre des contrats CDV1 et CDV2Le tribunal a considéré que ces deux contrats s'étaient reconduits tacitement pour une durée d'une année à leur échéance, la dénonciation de ces contrats suivant la lettre de résiliation du 7 septembre 2007 n'étant pas intervenue avec un préavis de six mois.La seule lettre de résiliation produite certes datée du 17 août par la société Carnet de vol a été expédiée le 7 septembre 2007.Par des motifs pertinents que la cour adopte le tribunal a considéré que le contrat CDV 2 ayant pris effet le 1er mars 2004 pour une durée de 48 mois jusqu'au 28 février 2008, devait être résilié au plus tard avant le 28 août 2007 et que le contrat CDV1 ayant pris effet le 1er décembre 2003 pour une durée de 48 mois jusqu'au 30 novembre 2007, le préavis devait être donné au plus tard le 30 mai 2007, que dans ces conditions, les deux contrats avaient été reconduits pour une année à leur échéance, faute de dénonciation dans les délais, que la société Carnet de vol était donc débitrice de 10 loyers pour le contrat CDV 2 et de neuf loyers pour le contrat CDV 1.La société Carnet de vol invoque en vain la grande rigueur dont aurait fait preuve le tribunal en appliquant le préavis contractuel en dépit d'un retard de 7 jours lié selon elle à une prétendue erreur matérielle qui n'aurait causé aucun grief à la société Intelease.La clause de tacite reconduction, contrairement à ce que prétend la société Carnet de vol, ne peut pas s'analyser en une clause pénale qui a pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation dès lors qu'en l'espèce, le locataire reste libre de procéder ou non à la dénonciation du contrat en fin de location et que ladite clause ne fait que prévoir les conséquences de l'absence de manifestation, dans le délai contractuellement convenu, de la volonté du locataire de ne pas poursuivre la location.Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Carnet de vol à payer la somme de 14.890,22 ¿ outre les intérêts conventionnels.
Sur les demandes au titre des indemnités de jouissanceSur la nullité de la clause potestative contenue à l'article 9A titre principal, la société Carnet de vol soutient que l'article 9 des conditions générales qui stipule les indemnités de jouissance est potestative et qu'elle est donc nulle.La société Intelease réplique que l'obligation de payer n'est pas potestative, qu'il ne s'agit pas d'une condition qui déterminerait la naissance ou la disparition d'une obligation, que le contrat de location n'a prévu aucune condition déterminant la naissance de l'obligation de restituer, laquelle naît dès l'instant où les biens loués sont mis à la disposition du locataire, l'obligation de restituer étant de l'essence du contrat de location, que la mention par le contrat de location, d'une conservation par le locataire du bien loué "pendant un certain temps" après l'échéance, n'a rien à voir avec une condition potestative, et se borne à viser la durée de jouissance poursuivie par le locataire, qui est nécessairement indéterminée.Sur ce :Il est stipulé dans tous les contrats qu'à la fin de la période de location, le locataire doit restituer l'équipement et à l'article 11-4 des contrats CDV 1 à 4 que :« Si le locataire conserve, pendant un certain temps, la jouissance de l'équipement informatique initialement loué, une fois le terme du contrat échu, le loueur est autorisé à mettre en recouvrement des indemnités de jouissance de même montant que les loyers conventionnels sans que le paiement de ces indemnités de jouissance puissent pour autant entraîner remise pour le locataire. »La société Carnet de vol prétend que l'article 9 - en réalité l'article 11-4, l'article 9 étant applicable à la résiliation du contrat par le loueur - en ce qu'il indique « pendant un certain temps » constituerait une condition potestative qui ne permettrait pas au locataire de savoir à partir de quel délai ces indemnités deviendront exigibles.Cependant, l'indemnité de jouissance est due du fait du non respect par le locataire de son obligation de restitution de l'équipement à la fin du contrat. La dite clause ne soumet donc pas l'obligation du locataire à une condition qui dépendrait de la volonté de la seule société Intelease. Il n'y a pas lieu de l'annuler.Pour les contrats CDV 5 à 8, l'article 11 est autrement rédigé : « Si le Locataire ne restitue pas immédiatement de son propre chef le Matériel au Bailleur à l'expiration de ce Contrat, il est redevable d'une indemnité égale aux loyers jusqu'à la restitution effective du Matériel ». Il ne contient aucune clause potestative.Sur le montant des indemnités de jouissanceLa société Carnet de vol demande à cour de considérer que la clause prévoyant le paiement d'indemnité de jouissance est une clause pénale manifestement excessive au regard de l'économie de chaque contrat et de la réduire, en toute hypothèse de la limiter à un mois de loyer par contrat. La société Intelease fait valoir que l'indemnité de jouissance n'est pas une clause pénale puisqu'elle ne vise pas à une sanction financière du locataire, mais porte sur la rémunération du service fourni par le bailleur dont le locataire continue de bénéficier après le terme, qu'en effet, l'indemnité de jouissance court pro rata temporis, tant que dure la poursuite de jouissance de la chose louée.A l'appui de son appel incident, elle soutient que le tribunal a considéré à tort que la société Carnet de vol était dans l'impossibilité de restituer le matériel et que la solution critiquable des premiers juges n'a plus lieu d'être puisque la locataire ne soutient plus être dans l'impossibilité de restituer certains matériels comme elle l'avait auparavant affirmé, que la locataire a conservé la jouissance gratuite desdits matériels parce qu'ils sont indispensables à son exploitation et qu'il est dans son intérêt exclusif de les exploiter gratuitement plutôt que de devoir investir dans le renouvellement de ceux-ci par achat ou par la souscription d'une nouvelle location, que l'application des indemnités contractuelles de jouissance en cas de défaut de restitution par la locataire s'impose, d'autant que la société Carnet de vol a consenti aux clauses stipulées par les conventions.

Sur ce :La société Carnet de vol ne justifie pas et ne prétend pas même devant la cour qu'elle n'aurait pas rempli son obligation de restituer les équipements désignés aux 8 contrats déjà cités en raison de l'impossibilité de pouvoir l'effectuer.Elle est donc débitrice d'une indemnité de jouissance pour chacun des contrats litigieux à compter de la date à laquelle ils ont pris fin.La société Intelease qui conteste que l'indemnité de jouissance soit une clause pénale au motif qu'elle rémunérerait le service fourni par le bailleur dont le locataire continue de bénéficier après le terme du contrat reconnaît pourtant en page 11 de ses conclusions que l'indemnité de jouissance due par le locataire constitue « la sanction de l'inexécution de son obligation de restitution ».Même si pour partie, l'indemnité de jouissance prévue par le contrat représente pour le bailleur une contrepartie du service dont le locataire continue de bénéficier après le terme de la location en conservant les matériels loués, cette indemnité vise également, comme la société Intelease l'écrit elle-même, à contraindre le locataire à restituer le matériel loué et constitue une évaluation forfaitaire et anticipée du montant du préjudice résultant de l'inexécution de l'obligation de restitution et qui s'applique du seul fait de celle-ci. Elle remplit donc une fonction tant comminatoire que réparatrice et doit dès lors être qualifiée de clause pénale.Il en est de même des stipulations selon lesquelles les indemnités de jouissance sont elles-mêmes majorées d'intérêts conventionnels de 1 % par mois ou d'intérêt au taux légal majoré de 5 points suivant les contrats.Ces indemnités peuvent donc donner lieu à modération dans les conditions de l'article 1152 du code civil.Les contrats de location financière qui sont proposés comme en l'espèce pour des biens d'équipement professionnels à forte obsolescence et qui ont vocation à être renouvelés régulièrement, sont établis en fonction d'une valeur d'achat et d'un taux d'intérêt, de manière à ce qu'au dernier loyer contractuel, capital et intérêts soient entièrement remboursés, permettant au loueur d'amortir ainsi le coût du financement du matériel acquis et de percevoir son gain sur la durée initiale de la location.
La société Carnet de vol a exécuté les contrats de location en payant les loyers convenus pendant les 48 mois de la durée de chacun des contrats et la société Intelease a donc perçu la totalité des loyers qu'elle était en droit d'attendre. Elle a même perçu une année de loyers supplémentaires sur les deux contrats qui ont été reconduits tacitement.Dès lors, au vu de l'équilibre économique général de ces contrats, des modalités financières qui les gouvernent, des conditions dans lesquels les contrats ont été exécutés jusqu'à leur terme normal, de la nature des équipements financés à forte obsolescence dont la valeur décroît très rapidement, l'indemnité forfaitaire stipulée aux contrats, égale au montant du loyer auquel s'ajoutent les intérêts moratoires conventionnels, est manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par la société Intelease du fait de la non restitution de ces matériels et de la privation de jouissance qui en résulte pour elle.Contrairement à ce que prétend la société Carnet de vol, il n'est pas établi que les matériels loués n'avaient plus aucune valeur au jour où les contrats de location en cause ont pris fin. En revanche, il est certain qu'à la date à laquelle la cour statue et où elle apprécie le caractère manifestement excessif de la peine prévue par les contrats qui ont pris fin entre le 1er juin 2008 et le 1er mai 2009, donc depuis plus de cinq années, ces matériels n'ont plus aucune valeur.Ainsi, usant de son pouvoir de modération, la cour fixera les indemnités de jouissance dues par la société Carnet de vol à la société Intelease en considération du préjudice effectivement subi par la société Intelease jusqu'à la date de restitution de ces équipements au montant global de 52.836 ¿, équivalent à une année de loyers pour chacun des contrats.En conséquence, la cour infirmera la condamnation prononcée par les premiers juges et statuant à nouveau, condamnera la société Carnet de vol à payer cette somme, la société Intelease étant déboutée du surplus de ses demandes.Il y a lieu par ailleurs d'ordonner la restitution de la totalité des équipements, sans qu'il y ait lieu d'y ajouter une astreinte.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile Les dépens seront à la charge de la société Carnet de vol qui succombe.L'équité commande de la condamner à payer à la société Intelease une indemnité de 3.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,Confirme le jugement du 14 novembre 2012 en ce qu'il a condamné la société Carnet de vol à payer à la société Intelease anciennement Allianthis ¿ la somme de 14.890,22 ¿ au titre de la prolongation des contrats CDV 1 et 2, outre les intérêts au taux de 1 % par mois à compter de l'échéance de chacune des mensualités,¿ la somme de 3.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de première instance.Infirme le jugement pour le surplus.Statuant à nouveau,Dit que l'indemnité de jouissance prévue dans chacun des contrats référencés CDV 1 à 8 d'un montant égal au loyer en cas d'inexécution par le locataire de son obligation de restitution des équipements loués à la fin de la location, assortie des intérêts moratoires conventionnels, constitue une clause pénale manifestement excessive.Condamne la société Carnet de vol à payer à la société Intelease la somme de 52.836 ¿ à titre d'indemnités de jouissance pour les contrats CDV 1 à 8.Ordonne à la société Carnet de vol de restituer à la société Intelease la totalité des équipements loués.Déboute la société Intelease et la société Carnet de vol du surplus de leurs demandes. Y ajoutant,Condamne la société Carnet de vol aux dépens d'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.La condamne à payer à la société Intelease une indemnité de 3.000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.La déboute de sa demande au même titre.Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 13/00220
Date de la décision : 30/10/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

Dans un contrat de location financière la clause selon laquelle le locataire paiera une indemnité de jouissance égale au montant du loyer conventionnel s’il conserve le matériel loué après le terme du contrat constitue une clause pénale susceptible de modération. En effet, même si pour partie, cette indemnité de jouissance représente pour le bailleur une contrepartie du service dont le locataire continue de bénéficier après le terme de la location en conservant les matériels loués, elle vise également, à contraindre le locataire à restituer le matériel loué et constitue une évaluation forfaitaire et anticipée du montant du préjudice résultant de l’inexécution de l’obligation de restitution, remplissant ainsi une fonction tant comminatoire que réparatrice. La cour, constatant le caractère manifestement excessif de la clause au regard du préjudice de la société B..., a réduit à une année de loyer le montant de l’indemnité de jouissance au vu de l’équilibre économique général du contrat, de son exécution jusqu’à son terme normal et de la nature des équipements financés à forte obsolescence dont la valeur décroît très rapidement.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2014-10-30;13.00220 ?
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