COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4GF
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 31 JUILLET 2014
R.G. N° 12/08959
AFFAIRE :
C/
[I] [S]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 21 Décembre 2012 par le Président du TGI de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 11/00042
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 31.07.14
à :
- Me Emmanuel GUEILHERS,
- Me Marc BRESDIN de la SELARL ALEXANDRE & BRESDIN,
- TGI VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE ET UN JUILLET DEUX MILLE QUATORZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SA COMPAGNIE DE FINANCEMENT FONCIER
N° SIRET : 421 263 047
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Emmanuel GUEILHERS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 96 - N° du dossier 147/12
APPELANTE
****************
- Madame [I] [S]
née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 4]
de nationalité Portugaise
[Adresse 4]
[Adresse 4]
- Maître [K] [D], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de Mme [I] [S]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentés par Me Marc BRESDIN de la SELARL ALEXANDRE & BRESDIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 3 - N° du dossier 120170
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mai 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annie VAISSETTE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente,
Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,
Madame Annie VAISSETTE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,
Selon acte authentique du 22 septembre 2005, le Crédit foncier de France a
consenti à Mme [I] [S] deux prêts destinés à financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison d'habitation à [Localité 2], immeuble sur lequel une hypothèque a été consentie à la banque par l'emprunteuse ;
Mme [I] [S] a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Versailles du 23 septembre 2011. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 octobre 2011, Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire, a invité le Crédit foncier de France à déclarer sa créance.
Par requête du 23 avril 2012, la Compagnie de financement foncier, cessionnaire de la créance détenue par le Crédit foncier de France en vertu des prêts précités, a saisi le juge-commissaire d'un demande de relevé de la forclusion.
Par ordonnance du 21 septembre 2012, le juge-commissaire a rejeté la requête.
Par jugement du 21 décembre 2012, le tribunal de grande instance de Versailles a déclaré la SA Compagnie de financement foncier recevable mais mal fondée en son recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire et a confirmé cette ordonnance en toutes ses dispositions et laissé les dépens à la charge de la Compagnie de financement foncier.
Cette dernière a relevé appel du jugement par déclaration reçue au greffe de la cour le 28 décembre 2012 et, par dernières conclusions du 7 mars 2013, demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- déclarer nulle la notification du 25 septembre 2012,
- réformer le jugement en sa totalité,
- dire que Mme [S] -en ne faisant pas état de son véritable état civil- a trompé la Compagnie de financement foncier dans l'avis d'avoir à déclarer,
- juger que le défaut de déclaration de créance dans les délais ne provient pas du fait du créancier,
- relever la Compagnie de financement foncier de la forclusion,
- condamner Mme [S] à lui payer la somme de 2 000 €uros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
La Compagnie de financement foncier fait essentiellement valoir :
- que lors de l'instruction du dossier de prêt, le Crédit foncier de France s'est fait remettre des bulletins de paie mentionnant 'Madame [S] [I] [Adresse 1]',
-que l'intitulé de la débitrice porté sur l'acte notarié de prêt est 'Madame [I] [S]', la précision qu'elle est divorcée de M. [Q] ne constituant ni son nom patronymique, ni son état civil,
- que les bordereaux d'inscription d'hypothèque mentionnent au titre du propriétaire grevé '[S]',
- qu'en conséquence, la débitrice est connue dans les fichiers de la Compagnie de financement foncier uniquement sous son nom de jeune fille c'est-à-dire [I] [S],
- qu'en outre, la banque créancière ne connaissait Mme [S] que comme infirmière salariée et non comme infirmière libérale et seulement son adresse parisienne et non celle de [Localité 1], ce qui a constitué un double handicap pour la consultation du Bodacc,
- que les références de l'avis d'avoir à déclarer la créance envoyé par Me [D] ès qualités indiquent pour le nom '[S] [Q]', ce qui ne correspond pas au bordereau d'inscription d'hypothèque, seul pris en compte par le conservateur,
- que Mme [S] a volontairement entretenu la confusion sur son nom patronymique pour paralyser la déclaration de créance de la Compagnie de financement foncier.
Mme [I] [S] et Me [D], en qualité de mandataire judiciaire, ont conclu en dernier lieu le 15 mai 2013 pour voir :
-déclarer l'appel recevable mais mal fondé,
-débouter de toutes ses demandes,
-la condamner aux dépens et à leur payer la somme de 1 500 €uros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils observent :
- que la fiche européenne standardisée éditée par le Crédit foncier pour le prêt litigieux dénomme l'emprunteur comme 'Mme [S] [I]',
- que le titre notarié indique en 'couverture' Mme [S] et en page 1 qu'elle est divorcée de M. [Q],
- que le Crédit foncier lui-même mentionne sur le bordereau requérant l'inscription d'hypothèque 'Madame [I] [S]-[Q]',
- que l'avis d'avoir à déclarer la créance envoyé par Me [D] mentionne les deux prénoms de la débitrice et le nom de [S] [Q], de sorte qu'aucune confusion n'était possible.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION
La confirmation du jugement est sollicitée par la Compagnie de financement foncier en sa disposition ayant déclaré recevable son recours contre l'ordonnance du juge-commissaire, après avoir retenu que la notification de cette décision n'était pas régulière et n'avait donc pas fait courir le délai de recours de 10 jours. Le jugement n'est pas critiqué de ce chef par les intimés et il y a donc lieu de le confirmer en ce qu'il a déclaré recevable le recours formé par la Compagnie de financement foncier.
Il résulte de l'article L.622-26, alinéa 1, du code de commerce que les créanciers, qui n'ont pas déclaré leur créance dans les délais prévus à l'article L.622-24, peuvent être relevés de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6.
En l'espèce, il est constant que la Compagnie de financement foncier , venant aux droits du Crédit foncier de France, n'a pas déclaré sa créance dans les délais précités ce qui l'a conduite à présenter au juge-commissaire une requête en relevé de forclusion le 23 avril 2012.
Pourtant, conformément aux dispositions de l'article R.622-21 du code de commerce, son auteur le Crédit foncier de France, en sa qualité de créancier inscrit, avait reçu de Me [D] une lettre recommandée envoyée le 24 octobre 2011 et dont l'accusé de réception avait été signé le 27 octobre 2011, l'avertissant personnellement d'avoir à déclarer sa créance avec mention de la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire et de la débitrice désignée comme étant 'Mme [S] [Q] [I]' et une adresse professionnelle à [Localité 1].
Cette lettre émane du mandataire judiciaire et non de la débitrice, de sorte qu'il ne peut être reproché à cette dernière d'avoir volontairement entretenu une quelconque confusion sur son nom patronymique pour paralyser la déclaration de créance.
S'agissant des difficultés alléguées par le créancier pour justifier son retard de déclaration, elles ne sont pas sérieuses et la Compagnie de financement foncier ne peut être suivie lorsqu'elle explique qu'elle ne pouvait identifier la débitrice concernée avec l'avis reçu de Me [D] ès qualités.
En effet, l'acte authentique constatant les prêts souscrits porte, sur sa page de présentation, l'identité de 'Mme [S]' comme l'emprunteuse. La première page de l'acte notarié proprement dit mentionne comme l'emprunteur 'Madame [I] [S], infirmière', suivie de son adresse à [Localité 3], puis après ses date et lieu de naissance au Portugal, l'indication qu'elle est divorcée de M. [R] [Q] avec la précision de la date du jugement de divorce.
Dès lors, contrairement aux prétentions de la Compagnie de financement foncier, l'identification de la débitrice concernée ne requérait pas d'importantes investigations lors de la réception de la lettre recommandée adressée par Me [D] puisque les prénoms figuraient, seulement francisés, et les deux noms de la débitrice, son nom de naissance [S], avec en plus son ancien nom d'épouse [Q].
La Compagnie de financement foncier allègue également vainement le caractère strict des mentions d'identité figurant sur l'inscription d'hypothèque puisque, d'une part, l'objectif de l'avis de Me [D] était de permettre au créancier de déclarer sa créance et non d'accomplir une formalité liée à l'inscription d'hypothèque, et, d'autre part, la débitrice était mentionnée sur les bordereaux d'inscription d'hypothèques, au titre du propriétaire grevé, comme Madame [I] [S], infirmière, mention suivie de ses date et lieu de naissance puis du fait qu'elle est divorcée de M. [Q], comme dans l'acte authentique de prêt. Il était donc aisé de faire le rapprochement avec l'avis reçu du mandataire judiciaire.
Quant au changement de profession et d'adresse de la débitrice, ils sont sans emport ; le fait que Mme [S], infirmière salariée lors de la conclusion des prêts en 2005, soit devenue infirmière libérale et se trouve domiciliée pour cette activité à [Localité 1], non loin de la commune de [Localité 2] où se trouve la maison d'habitation dont le Crédit foncier de France a financé la construction, ne saurait surprendre un créancier institutionnel comme la Compagnie de financement foncier.
En conséquence, pour les motifs qui précèdent et ceux adoptés des premiers juges, la Compagnie de financement foncier n'établit aucunement que sa défaillance n'est pas due à son fait et il convient de confirmer le rejet de sa demande de relevé de la forclusion.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare l'appel et la demande de relevé de la forclusion recevables mais mal fondés,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 décembre 2012 par le tribunal de grande instance de Versailles,
Déboute la société Compagnie de financement foncier de toutes ses demandes,
La condamne à payer à Mme [I] [S] et à Me [D], ès qualités, la somme globale de 1 500 €uros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Compagnie de financement foncier aux dépens,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,