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30/01/2014 | FRANCE | N°12/01892

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 30 janvier 2014, 12/01892


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 63B



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 30 JANVIER 2014



R.G. N° 12/01892



AFFAIRE :



SARL SODILAP

...



C/





[S] [L]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Septembre 2008 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS

N° Chambre : 1

N° Section : 1

N° RG : 06/2844







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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Alain CLAVIER, avocat au barreau de VERSAILLES,

REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE TRENTE JANVIER DEUX ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 63B

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 30 JANVIER 2014

R.G. N° 12/01892

AFFAIRE :

SARL SODILAP

...

C/

[S] [L]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Septembre 2008 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS

N° Chambre : 1

N° Section : 1

N° RG : 06/2844

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Alain CLAVIER, avocat au barreau de VERSAILLES,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TRENTE JANVIER DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSES devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (Première chambre civile) du 09 février 2012 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS Pôle 2 - Chambre 1, le 09 novembre 2010 sur appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, 1ère chambre 1ère section le 24 septembre 2008

SARL SODILAP

immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le numéro 343 173 332

ayant son siège social [Adresse 2]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Représentant : SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD, LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES , avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1250132

assistée de Me Laurent LALOUM de la SCP REFERENS-LALOUM & ARNOULT, Plaidant, avocat au barreau de TOURS,

SARL SANISER

immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le numéro 331 037 861

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 1]

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Représentant : SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD, LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES , avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1250132

assistée de Me Laurent LALOUM de la SCP REFERENS-LALOUM & ARNOULT, Plaidant, avocat au barreau de TOURS,

****************

DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI

Madame [S] [L]

Prise en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure [D] [J], née le [Date naissance 1] 2004 de son union avec monsieur [O] [J], décédé le [Date décès 1] 2004,

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentant Me Alain CLAVIER, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 240 - N° du dossier 123093

Plaidant par Maitre Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, P 462

Société COVEA RISKS

inscrite au RCS de [Localité 4] sous le numéro 378 716 419

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 3]

agissant par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentant Me Alain CLAVIER, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 240 - N° du dossier 123093

Plaidant par Maitre Bruno CHAIN, avocat au barreau de PARIS, P 462

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Décembre 2013, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, président, ayant été entendu en son rapport, et Madame Dominique LONNE, conseiller,

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Vu le jugement rendu le 24 septembre 2008 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

- rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par [S] [L] en qualité de représentante légale de [D] [J] et la société COVEA RISKS,

- débouté les sociétés SODILAP et SANISER de l'ensemble de leurs demandes,

- déclaré irrecevable la demande formulée par [Z] [F] en application de l'article 700 du code de procédure civile, - condamné les sociétés SODILAP et SANISER à payer à [D] [J] représentée par [S] [L], la somme de 2.000 €, à la société COVEA RISKS, la somme de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'arrêt rendu le 9 novembre 2010 par lequel la cour d'appel de Paris a confirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris et condamné les sociétés SODILAP et SANISER à payer à [D] [J] représentée par sa mère, [S] [L], et à la société COVEA RISKS, la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'arrêt rendu le 9 février 2012 par la Cour de cassation qui a cassé et annulé, sauf en ce qu'il rejette la fin de non recevoir soulevée par Mme [L] en qualité de représentante légale de [D] [J], et par la société COVEA RISKS, l'arrêt rendu le 9 novembre 2010 par la cour d'appel de Paris et remis sur les autres points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées pour être fait droit devant la cour d'appel de Versailles ;

Vu la déclaration de saisine de la société SODILAP et de la société SANISER du 14 mars 2012 ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 15 octobre 2013 par lesquelles la société SANISER et la société SODILAP, poursuivant l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes et prononcé une condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, demandent à la cour de :

-dire que Maître [J] a manqué à son devoir de conseil à leur égard et a engagé de ce fait sa responsabilité civile professionnelle, -condamner [D] [J], seul ayant droit de Maître [J], représentée par sa mère, Mme [L] et la société COVEA RISKS à verser à :

* la société SODILAP la somme de 9.271.636,20 € à titre de dommages-intérêts,

* la société SANISER la somme de 3.178.123,20 € à titre de dommages-intérêts,

outre la somme de 5.000 € au titre des frais engagés en première instance et celle de 15.000 € au titre des frais engagés en cause d'appel ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières écritures signifiées le 8 octobre 2013 aux termes desquelles [S] [L] prise en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J], et la société COVEA RISKS, concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il n'a pas retenu de faute à l'encontre de Maître [J] et partant aucun préjudice qui lui soit imputable, prient la cour de donner acte à la société COVEA RISKS de ce qu'elle ne peut être tenue que dans la limite de son plafond de garantie fixé à 3.850.000 € et de condamner les sociétés SODILAP et SANISER à payer à [D] [J] représentée par sa mère la somme de 5.000 €, à la société COVEA RISKS la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que les sociétés SODILAP et SANISER, toutes deux dirigées par [Z] [F], agents commerciaux des sociétés LAPEYRE et GME, géraient chacune un dépôt à l'enseigne de la marque respective de leurs mandants pour la commercialisation de matériaux de menuiserie et de sanitaires ; qu'à la suite de l'installation, à proximité de leurs dépôts, d'une société concurrente à l'enseigne «La plate-forme du bâtiment», appartenant également au groupe Saint GOBAIN, les sociétés SODILAP et SANISER ont, par lettre du 27 janvier 1999, chargé Maître Jean-Christophe MAYMAT, avocat au barreau de Paris, décédé depuis, de poursuivre la résiliation des mandats aux torts et griefs des sociétés LAPEYRE et GME pour violation contractuelle ; que la procédure d'arbitrage prévue aux mandats a été mise en 'uvre ;

Que la juridiction arbitrale a rendu une sentence sur le fond, le 12 novembre 1999, par laquelle elle a déclaré résolu à l'initiative de M. [F] et des sociétés SODILAP et SANISER et sans qu'aucune faute puisse être imputée aux sociétés LAPEYRE et GME le contrat de mandat du 21 décembre 1992, rejeté les demandes de condamnation solidaire des sociétés LAPEYRE et GME pour violation de leurs obligations contractuelles présentées par les sociétés SODILAP et SANISER, rejeté la demande des sociétés LAPEYRE et GME à l'encontre de M. [F] pour manquement à ses obligations contractuelles , condamné solidairement les sociétés LAPEYRE et GME à verser à M. [F] la somme de 13.000.000 francs, en raison des liens anciens et confiants unissant celui-ci et les sociétés mandantes pour compenser la perte de rémunération qu'il aurait perçue si le contrat s'était poursuivi ;

Que sur le recours en annulation formé tant par les sociétés SODILAP et SANISER que par les sociétés LAPEYRE et GME, la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 14 décembre 2000, annulé le chef de la sentence relatif à l'indemnisation de [Z] [F] et renvoyé les parties à conclure au fond sur le principe et le montant de l'indemnisation due à [Z] [F] personnellement ; que le pourvoi en cassation formé à l'encontre de cet arrêt a été rejeté ;

Que par arrêt du 13 septembre 2001 la cour d'appel de Paris a condamné les sociétés LAPEYRE et GME à payer à [Z] [F] une somme de 7.250.000 F ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile  ;

Qu'estimant que Maître [J] avait manqué à son obligation de conseil en ne les informant pas des risques de la procédure arbitrale, les sociétés SODILAP et SANISER ont, par acte du 16 février 2006, engagé une action en responsabilité civile à l'encontre d'[S] [L] en sa qualité de représentante légale de [D] [L], enfant née de son union avec [O] [J], décédé le [Date décès 1] 2004, devant le tribunal de grande instance de Paris, et ont assigné devant la même juridiction la société COVEA RISKS, assureur de Maître [J] ;

Que par jugement du 24 septembre 2008, le tribunal a rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par [S] [L] en qualité de représentante légale de [D] [J] et la société COVEA RISKS et débouté les sociétés SODILAP et SANISER de l'ensemble de leurs demandes;

Que cette décision a été confirmée par arrêt du 9 novembre 2010 de la cour d'appel de Paris;

Que sur le pourvoi formé par les société SODILAP et SANISER, la Cour de Cassation, après avoir relevé que pour débouter celles-ci, l'arrêt constate que la décision de M. [F] de poursuivre la résiliation des mandats était antérieure à l'intervention de [O] [J] et qu'elle était intangible, énonce qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que la procédure arbitrale n'avait été engagée qu'une fois l'avocat mandaté à cette fin, alors qu'il ne ressort pas de ses constatations que le professionnel du droit ne serait pas parvenu à convaincre son client que la voie de droit projetée était vouée à l'échec et que les conseils faisant défaut eussent ainsi été vains, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Qu'elle retient aussi que pour écarter la responsabilité de [O] [J], l'arrêt relève que M. [F] s'est décidé après pris conseil auprès d'un premier avocat et avec l'assistance de sa propre fille, elle-même membre du barreau et administrateur des sociétés SODILAP et SANISER et qu'en statuant ainsi, alors que la présence, aux côtés du client, d'autres professionnels du droit n'exonère pas l'avocat de son devoir de conseil, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Considérant que les dispositions de l'arrêt du 9 novembre 2010 rejetant les fins de non recevoir soulevées par [S] [L], en qualité de représentante légale de sa fille mineure, et par la société COVEA RISKS sont devenues définitives ;

Sur la responsabilité civile professionnelle de Maître [J]

Considérant que les sociétés SODILAP et SANISER reprochent à Maître [J] un manquement à son obligation de conseil pour ne pas les avoir alertées des risques d'une demande de résiliation du contrat d'agent commercial devant le tribunal arbitral en cas d'absence de faute reconnue des sociétés LAPEYRE et GME ou des chances de succès d'une telle action et de ne pas leur avoir exposé l'autre voie de droit qui s'offrait à elle ; qu'elles exposent que Maître [J] n'ignorait ni que le contrat liant les sociétés SODILAP et SANISER aux sociétés LAPEYRE et GME était un contrat d'agent commercial, ni l'absence d'indemnisation du mandataire si l'initiative de la résiliation vient de celui-ci, sauf à établir une faute du mandant, ni davantage que si aucune faute n'était retenue par le tribunal arbitral, le contrat serait résilié sans versement d'une indemnisation ; qu'elles font valoir qu'elles étaient en droit d'attendre de leur conseil qu'il leur expose toutes les voies de droit qui leur étaient offertes pour obtenir réparation, que le choix de l'action aurait pu se porter sur une simple action en responsabilité contractuelle pour manquement des mandantes à leurs obligations d'information et de loyauté sans pour autant solliciter la résiliation du contrat sur le fondement de la loi du 25 juin 1991 et que le choix de Maître [J] de saisir le tribunal arbitral et de faire une demande de résiliation du contrat ne pouvait que conduire à prononcer la résiliation sans pour autant leur assurer la perception d'une indemnité pour les fautes des mandantes alors que si la résiliation avait été demandée à la seule initiative de celles-ci, elle aurait été prononcée mais elles auraient perçu une indemnité en réparation de leur préjudice conformément au statut des agents commerciaux ; qu'elles ajoutent, se fondant sur l'échange de correspondance entre les parties, qu'[Z] [F] n'avait aucunement l'intention ferme et définitive de résilier le contrat d'agent commercial et que si la procédure arbitrale a été suivie par sa fille, avocat, cet élément ne dispensait pas Maître [J] de son obligation de conseil ;

Qu' [S] [L] représentante légale de sa fille mineure et la société COVEA RISKS répliquent que des négociations ont eu lieu entre [Z] [F], Maître [Y], conseil des sociétés SODILAP et SANISER et les sociétés LAPEYRE et GME en décembre 1998 afin de trouver une solution à leur désaccord et qu'une offre avait été faite par ces dernières de règlement d'une indemnité compensatrice de perte de bénéfice de 8.000.000 F et qu'estimant ce montant inacceptable, notamment parce que son acceptation supposait la poursuite des relations contractuelles, [Z] [F] a demandé à Maître [J] de prendre en charge ses intérêts et ceux des deux sociétés ; qu'elles exposent que la décision de mettre en place l'arbitrage, en faisant valoir des fautes des mandantes pour que la résiliation soit prononcée à leurs torts, n'était ni intangible, ni antérieure à l'intervention de Maître [J] mais a été prise d'un commun accord au vu des données de fait soumises à Maître [J] par [Z] [F] et que le choix fait par Maître [J] était prévu dans la convention d'honoraires qui excluait un honoraire de résultat si l'indemnité allouée était inférieure à celle proposée en compensation du manque de bénéfice en restant mandataire ;

Considérant qu'il ressort de l'acte de mission établi le 14 juin 1999 qu'[Z] [F], les sociétés SODILAP et SANISER, demandeurs dans la procédure arbitrale, ont poursuivi la résiliation aux torts et griefs des sociétés LAPEYRE et GME du contrat de mandat du 21 décembre 1992 les liant pour manquement à leurs obligations contractuelles ; que la sentence arbitrale du 12 novembre 1999 non remise en cause sur ce point par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2000, a déclaré le contrat de mandat résolu à l'initiative d'[Z] [F] et des sociétés SODILAP et SANISER, sans qu'aucune faute puisse être imputée aux sociétés LAPEYRE et GME ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le contrat du 21 décembre 1992 liant les parties était un contrat d'agent commercial soumis aux dispositions de la loi du 25 juin 1991, ce qui était indiqué dans la convention d'honoraires conclue le 5 février 1999 entre Maître [J] et les sociétés SODILAP et SANISER et repris dans le mémoire déposé par Maître [J] le 28 mai 1999  ; que l'article VIII du contrat, reprenant l'article X de la loi du 25 juin 1991, mentionne qu'en cas de résiliation du contrat de mandats et notamment dans les hypothèses visées à l'article VI ci-dessus, et en toute hypothèse, en cas d'échec des négociations prévues à l'article VII, les mandataires auront droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, sauf si la résiliation résulte de l'initiative ou de la faute des mandataires à l'égard des Menuiseries LAPEYRE ou de GME ;

Qu'il résulte de cette disposition que les mandataires ayant pris l'initiative de la résiliation, le contrat d'agent commercial ne pouvait qu'être résilié sans versement de l'indemnité compensatrice si aucune faute n'était retenue à l'encontre des mandants ;

Qu'il appartenait donc à Maître [J] débiteur d'une obligation de conseil à l'égard de ses clients de les informer des risques d'une telle procédure en cas de rejet par le tribunal arbitral de l'argumentaire sous-tendant la violation par les mandants de leur obligations contractuelles et de leur exposer les autres alternatives envisageables ;

Que pour justifier de l'accomplissement de cette obligation, [S] [L] représentante légale de sa fille mineure et la société COVEA RISKS tout en reconnaissant que la décision d'[Z] [F] de rompre le contrat d'agent commercial n'était pas intangible, ni même prise, lorsqu'il a consulté Maître [J], font valoir qu'il a choisi cette voie de droit, parfaitement informé de ses droits, en fonction des projections commerciales qu'il avait faites et qu'il excluait de rester de poursuivre le mandat via les deux sociétés jusqu'à l'âge limite de 65 ans et de prétendre à des indemnités de départ à ce moment ;

Que toutefois, si les lettres adressées courant novembre et décembre 1998 par [Z] [F] au nom des sociétés SODILAP et SANISER au président du Groupe [G] concernant le budget 1999 mettent en évidence l'impact de l'ouverture d'un établissement concurrent sur le chiffre d'affaires des sociétés, il n'avait pas, à cette date, arrêté la décision de poursuivre la résiliation du contrat de mandat, la recherche d'un accord étant envisagée ; qu'il ne ressort ni de la lettre adressée par Maître [J] à son client datée du 27 janvier 1999, qui prévoit qu'aucun honoraire de résultat complémentaire ne sera facturé en dessous de la somme de 8 millions de francs d'indemnités obtenues par SODILAP et SANISER puisqu'il s'agit de la somme offerte, qu'il a refusée, modalités de facturation reprise dans la convention d'honoraires du 5 février 1999, ni du contenu de cette convention, documents antérieurs à la mise en place de la procédure, qu'il avait alerté son client sur les risques et conséquences de la voie de droit projetée ; qu'il n'est pas davantage démontré par les pièces produites qu'alerté par Maître [J] sur les conséquences du choix de cette procédure, [Z] [F] a délibérément souhaité la poursuivre ; que cet avertissement ne résulte pas davantage du fax adressé par [Z] [F] à son conseil, le 26 juin 1999, alors que l'acte de mission était signé et la procédure arbitrale mise en 'uvre ; que les projets de mémoire déposés par Maître [J] devant le tribunal arbitral au nom d'[Z] [F] et des sociétés appelantes, même s'ils leur ont été soumis, sont inopérants pour démontrer le respect de l'obligation d'information qui doit être préalable ;

Qu'il s'ensuit que Maître [J] a manqué à son devoir de conseil et ainsi engagé sa responsabilité civile professionnelle ;

Sur le préjudice

Considérant que les sociétés SODILAP et SANISER soutiennent que du fait de la résiliation du contrat d'agent commercial, elles ont perdu le bénéfice d'exploiter leur fonds de commerce à compter de 2001 et ont perdu le bénéfice de l'indemnité versée aux mandataires en cas de résiliation de ce contrat ; qu'elles exposent qu'[Z] [F] a enregistré des résultats remarquables de 1978 à 1992 qui ont conduit les sociétés LAPEYRE et GME à conclure les contrats en cause, qu'il n'y avait aucune raison qu'il modifie sa gestion par l'écran des sociétés SODILAP et SANISER, qu'aucun manquement contractuel n'a été invoqué par les sociétés LAPEYRE et GME ou relevé par le tribunal arbitral de sorte que la résiliation a fait perdre à celles-ci les résultats qu'elles pouvaient espérer sur les années 2001 à 2005 ; qu'elles avancent qu'au regard de l'ancienneté des relations contractuelles, elles pouvaient prétendre à une indemnité égale à deux années de commissions calculées sur la moyenne des trois dernières années d'exécution du mandat et que le mandat aurait pris fin lorsqu'[Z] [F] aurait atteint l'âge de 65 ans ; qu'elles estiment la perte de chance à 90% ; que les sociétés SODILAP et SANISER demandent en outre le remboursement des frais d'arbitrage et de procédure ;

Que les intimées répondent que le préjudice allégué ne relève que de l'erreur d'analyse de la situation économique, financière et commerciale d'[Z] [F], qu'à supposer que l'option retenue aurait été de formuler une simple demande de dommages-intérêts sans invoquer la résiliation du mandat, à la lecture de la sentence, les manquements non retenus à titre principal ne l'auraient pas été davantage à titre accessoire et que le préjudice lié à l'option prise par rapport à celle qu'elles auraient pu prendre est inexistant car en prévoyant dès 2000 une baisse d'activité liée à la concurrence de la société La Plateforme, les sociétés SODILAB et SANISER n'auraient pas enregistré de manque à gagner ; que sur la demande d'indemnités de rupture du contrat, elles font valoir qu'en l'absence de faute retenue à l'encontre des sociétés SODILAP et SANISER, les sociétés LAPEYRE et GME n'avaient pas d'intérêt à poursuivre la résiliation du mandat en sorte que l'indemnité de fin de contrat est incertaine et utopique ;

Considérant qu'au regard de la détermination d'[Z] [F] à poursuivre la résiliation du contrat et du soutien que lui apportait sa fille, avocat et administrateur des sociétés appelantes, la perte de chance de celles-ci de renoncer à la procédure arbitrale telle qu'engagée, doit être fixée à 75 % ;

Considérant, sur le manque à gagner des sociétés SODILAP et SANISER en relation avec la perte des fonds de commerce, que le contrat de mandat du 21 décembre 1992 prévoyait en son article VI-1.3 et VI-1.4, la résiliation des mandats en cas de cessation des fonctions de président du conseil d'administration de la société SODILAP et de la société SANISER pour quelque cause que ce soit, et en tout état de cause, dès l'atteinte, par celui-ci, de l'âge de 60 ans ; que suivant avenant N°1 daté du même jour, les parties sont convenues de fixer la limite d'âge à 65 ans ; qu'il n'est pas contesté qu'[Z] [F] a atteint l'âge de 65 ans en octobre 2005, ce qui aurait mis fin au mandat ;

Que le mandat d'agent commercial a été déclaré résolu par la sentence arbitrale du 12 novembre 1999 ; que l'échange de correspondance entre les sociétés SODILAP, SANISER et le Groupe [G] sur le budget 1999 établit une baisse importante du chiffre d'affaires des appelantes en relation avec l'installation d'un concurrent à proximité, qui est à l'origine de la procédure ; que cependant le rapport établi, à la demande des appelantes, par la société d'expertise comptable SCACCHI, ne prend pas en considération cet élément de fait pour chiffrer le préjudice mais retient un chiffre d'affaires en hausse ; qu'il convient donc, au vu des comptes annuels annexés à ce rapport et du budget 1999 d'évaluer à 450.000 € le manque à gagner de la société SODILAP et à 90.000 € le manque à gagner de la société SANISER ;

Considérant, sur la perte d'indemnité pour fin de contrat, les sociétés SODILAP et SANISER ne peuvent se prévaloir d'un préjudice certain ; qu'en effet, d'une part, les mandants, les sociétés LAPEYRE et GME, qui ne reprochent aucune faute aux sociétés SODILAP et SANISER, n'avaient pas d'intérêt à rompre le contrat et à s'exposer au versement d'indemnités ; que, d'autre part,le tribunal arbitral ayant rejeté la demande des sociétés SODILAP et SANISER de condamnation des sociétés LAPEYRE et GME pour manquement à leurs obligations contractuelles, l'action en responsabilité pour faute envisagée par les premières était vouée à l'échec ;

Que cette demande sera donc rejetée ;

Considérant qu'à la page 52 de leurs dernières écritures, les sociétés SODILAP et SANISER reprochent à Maître [J] de ne pas leur avoir exposé l'autre voie de droit qui s'offraient à elle à savoir une simple demande de dommages-intérêts, ce qui démontre leur intention de mettre en 'uvre la procédure arbitrale sur cet autre fondement ;

Qu'elles sont donc mal fondées à poursuivre le remboursement des frais qu'elles ont engagés dans le cadre de cette procédure ;

Qu'il s'ensuit qu'[S] [L] en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J], et la société COVEA RISKS seront condamnées in solidum au paiement de la somme de 450.000 € à la société SODILAP et de 90.000 € à la société SANISER à titre de dommages-intérêts ;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile bénéficieront aux appelantes ; qu'il leur sera alloué à ce titre la somme globale de 10.000 € ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement, dans les limites de sa saisine,

Infirme le jugement du 24 septembre 2008,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum [S] [L] en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J], et la société COVEA RISKS à payer la somme de 450.000 € à la société SODILAP et la somme de 90.000 € à la société SANISER à titre de dommages-intérêts,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne in solidum [S] [L] en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J], et la société COVEA RISKS à payer la somme globale de 10.000 € à la société SODILAP et à la société SANISER en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum [S] [L] en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [D] [J], et la société COVEA RISKS aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile .

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 12/01892
Date de la décision : 30/01/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°12/01892 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-30;12.01892 ?
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