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04/07/2013 | FRANCE | N°11/09379

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 04 juillet 2013, 11/09379


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 10A



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JUILLET 2013



R.G. N° 11/09379



AFFAIRE :



[O] [J]





C/

le Procureur Général









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de Pontoise

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 08/07296



Expéditions ex

écutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me FERCHAUX-

LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS



MP





REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 10A

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2013

R.G. N° 11/09379

AFFAIRE :

[O] [J]

C/

le Procureur Général

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de Pontoise

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 08/07296

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me FERCHAUX-

LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS

MP

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [O] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/011609 du 12/12/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANT

****************

Monsieur le PROCUREUR GENERAL près la cour d'appel de VERSAILLES, représenté par Monsieur CHOLET, avocat général, en ses observations

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Juin 2013, Monsieur Dominique PONSOT, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,

Madame Dominique LONNE, conseiller,

M. Dominique PONSOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Vu le jugement réputé contradictoire du tribunal de grande instance de PONTOISE du 22 mai 2009 ayant, notamment :

- constaté l'accomplissement des diligences prévues par l'article 1043 du code de procédure civile,

- déclaré recevable et bien fondée l'action engagée par le ministère public,

- annulé l'enregistrement du 24 septembre 2003 par le ministère chargé des naturalisations de la déclaration de nationalité française de [O] [J], souscrite le 8 novembre 2002 sur le fondement de l'article 21-2 du code civil sous le numéro 20503/03 (dossier 2002DX26777),

- dit que [O] [J], né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 4] (Tunisie), n'a pas la nationalité française,

- ordonné qu'il soit procédé aux mentions prévues par l'article 28 du code civil ;

Vu la déclaration du 30 décembre 2011, aux termes de laquelle [O] [J] a formé à l'encontre de cette décision un appel de portée générale,

Vu les dernières conclusions signifiées le 5 février 2013, aux termes desquelles [O] [J] demande à la cour de :

- à titre principal :

- prononcer la nullité de l'assignation,

- déclarer la demande du ministère public irrecevable pour prescription de l'action,

- prononcer purement et simplement la nullité du premier jugement,

- à titre subsidiaire,

- déclarer la demande du ministère public mal fondée et le débouter de toutes ses conclusions et demandes

- en tout état de cause,

- ordonner la suppression de la mention d'annulation de l'enregistrement de son acte d'état civil (sic) sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

- rappeler qu'il est français ;

Vu les conclusions signifiées le 29 avril 2003, aux termes desquelles le ministère public demande à la cour de :

- déclarer irrecevable l'appel interjeté par déclaration du 31 décembre 2011,

- à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris,

- annuler l'enregistrement de la déclaration souscrite par [O] [J],

- constater son extranéité,

- ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant qu'il résulte des pièces de la procédure et des éléments contradictoirement débattus que [O] [J], né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 4] (Tunisie), de nationalité tunisienne, a épousé le [Date mariage 1] 2001 à [Localité 2] (69) [S] [B], de nationalité française ; que le 8 novembre 2002, il a souscrit auprès du tribunal d'instance de LYON (69) une déclaration de nationalité française par mariage, sur le fondement de l'article 21-2 du code civil ; que cette déclaration a été enregistrée le 24 septembre 2003 par le ministère chargé des naturalisations ;

Que par acte d'huissier du 18 août 2008 le procureur de la République près le tribunal de grande instance de PONTOISE l'a fait assigner aux fins d'annulation de la déclaration d'acquisition de la nationalité française, sur le fondement de l'article 26-4 du code civil, en faisant valoir que l'intéressé avait cessé toute communauté de vie avec son épouse dans l'année de l'enregistrement de la déclaration, et qu'il ne vivait pas avec son épouse à la date de souscription de sa déclaration ;

Que par le jugement réputé contradictoire entrepris, le tribunal a accueilli la demande d'annulation présentée ;

Sur la recevabilité de l'appel

Considérant que le ministère public fait valoir, à titre principal, que l'appel est irrecevable comme tardif, le jugement ayant été signifié le 2 juillet 2009, un certificat de non appel étant délivré le 24 août 2009, et la déclaration d'appel n'ayant été régularisée que le 30 novembre 2011 ;

Qu'en réponse, [O] [J] fait valoir que la signification est irrégulière en ce sens qu'il a été à tort procédé à l'établissement d'un procès-verbal de recherches infructueuses, alors que l'intéressé avait déclaré son adresse auprès de la Mairie par l'intermédiaire de laquelle il s'est fait attribuer un logement HLM, auprès de services de police, par le changement de sa carte nationale d'identité, auprès de la Poste et de la caisse d'allocations familiales ;

Considérant que le ministère public, qui ne joint au soutien de son exception d'irrecevabilité de l'appel interjeté par [O] [J] qu'un certificat de non-appel, ne met pas la cour en mesure de vérifier les diligences accomplies par l'huissier de justice mandaté pour signifier le jugement entrepris ;

Qu'il convient de rejeter l'exception soulevée et de déclarer l'appel recevable ;

Sur la nullité de l'assignation

Considérant que [O] [J] soutient que l'assignation délivrée à son ancienne adresse est nulle en tant qu'elle a été délivrée à une adresse erronée, dans la mesure où , depuis novembre 2007, il a informé officiellement l'administration française de son changement d'adresse ; qu'il indique ainsi avoir déclaré son changement d'adresse auprès de la mairie, par l'intermédiaire de laquelle il s'est fait attribuer un logement HLM, auprès de la police, par le changement de carte nationale d'identité, une nouvelle carte lui ayant été délivrée le 19 novembre 2007, auprès de la Poste (suivi du courrier) et auprès de la Caisse d'allocations familiales ;

Que l'assignation délivrée le 18 août 2008 et transformée en procès-verbal de recherches infructueuses est nulle eu égard à l'insuffisance des diligences effectuées par l'huissier instrumentaire ;

Que le ministère public considère quant à lui que ces diligences, décrites avec précision dans le procès-verbal de recherches infructueuses, sont suffisantes et que l'acte est régulier ;

Considérant qu'il résulte des mentions du procès-verbal de recherches infructueuses établi le 20 août 2008 ensuite de l'assignation délivrée le 18 août précédent que l'huissier a procédé en vain à une enquête auprès des voisins, des services municipaux et de police à l'effet de retrouver l'intéressé ; que l'huissier précise en outre avoir interrogé un employé du foyer [1] qui a indiqué que l'intéressé était parti depuis plus d'un an sans laisser d'adresse ;

Que s'il apparaît que certains services municipaux avaient connaissance de la nouvelle adresse de l'intéressé, les investigations auxquelles l'huissier déclare avoir procédé dans un procès-verbal valant jusqu'à inscription de faux apparaissent suffisantes ;  

Qu'il convient de rejeter l'exception de nullité de l'assignation ;

Sur l'exception de prescription

Considérant que [O] [J] fait valoir que, selon l'article 26-4 du code civil, l'enregistrement de la déclaration de nationalité française peut être contesté par le ministère public dans un délai de deux ans suivant la date à laquelle il est effectué, si les conditions légales ne sont pas réunies ; qu'il soutient que le ministère public aurait été mis au courant des doutes exprimés par son épouse sur la sincérité de la déclaration de nationalité française dès le 13 octobre 2003, ce que le jugement entrepris relève ; qu'il signale qu'une audition à ce sujet aurait eu lieu le 16 avril 2004 par la Gendarmerie, c'est à dire nécessairement sous le contrôle du ministère public ; que ce n'est donc pas à compter du 20 août 2007, date d'envoi au parquet de PONTOISE, d'un bordereau de transmission de la sous-direction des naturalisations du ministère de l'immigration, que le ministère public a été informé des présomptions de fraudes, mais le 13 octobre 2003 ou au plus tard, le 16 avril 2004, ce dont il résulte que l'assignation délivrée le 8 août 2008 est tardive ;

Qu'en réponse, le ministère public fait valoir que les poursuites ne peuvent être diligentées en matière d'annulation d'un certificat d'enregistrement de déclaration de la nationalité française qu'à compter du jour où les faits ont été portés à la connaissance du ministère de la Justice, chargé de donner instruction au ministère public territorialement compétent, c'est à dire, en l'espèce, à compter du 20 août 2007, date figurant sur le bordereau transmis par le ministère de l'intégration ;

Considérant que seul le ministère public territorialement compétent pouvant agir en annulation pour fraude de l'enregistrement de la déclaration de nationalité française, c'est à compter de la date à laquelle il a découvert cette fraude que court le délai biennal de l'action prévue à l'article 21-2 du code civil ;

Considérant qu'il résulte des énonciations du jugement entrepris et des pièces régulièrement produites aux débats que la lettre adressée par [S] [B] épouse [J] le 13 octobre 2003 l'a été au juge d'instance de LYON et non au ministère public ;  que s'agissant du procès-verbal d'audition établi par la gendarmerie de [Localité 2] (69), il apparaît que cette audition a été établie à la demande de la Préfecture du Rhône, à laquelle le procès-verbal a été transmis le 29 avril 2004, sans qu'il soit fait mention d'une transmission au procureur de la République territorialement compétent ;

Que [O] [J] n'établit pas que le ministère public ait été informé de sa situation avant la réception du bordereau du 20 août 2007 par lequel le ministère de l'intégration a transmis au ministère de la Justice les éléments susceptibles de motiver l'engagement d'une action judiciaire en vue de l'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité française ;

Qu'il convient, en conséquence, de rejeter l'exception de prescription ;

Sur l'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité française

Considérant qu'au soutien de son appel, [O] [J] rappelle que, selon les termes mêmes de l'article 26-4, in fine, du code civil, la cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois de l'enregistrement de la déclaration de nationalité française ne constitue qu'une présomption de fraude ;

Qu'il fait valoir que son union avec [S] [B] a été une union sincère et qu'il a eu deux enfants avec elle ; qu'en 2001, celle-ci a décidé de quitter [Localité 3] où vivait le couple, pour s'installer en région lyonnaise, où vivaient ses parents ; que cette situation lui a imposé, alors qu'il était étudiant, de faire de nombreux allers-retours entre les deux villes ; que la situation s'est dégradée à partir de 2003, à l'approche de la soutenance de son mémoire de DEA qu'il a obtenu en novembre 2003 ; que, selon lui, la location d'une chambre de foyer n'avait aucun rapport avec le sort du couple, et n'avait pour objectif que de lui offrir un milieu favorable à la concentration en le mettant à l'abri du bruit généré par ses enfants alors en bas âge, des visites quotidiennes des voisins et, connaissances et membres des familles, et de soucis quotidiens de la vie conjugale ; que malheureusement, cette initiative a été mal prise par son épouse qui l'a soupçonné de vouloir abandonner le domicile conjugal ; qu'il relève que le jugement de divorce a été motivé uniquement par le fait qu'il avait quitté le domicile conjugal ; qu'il est de jurisprudence constante que les seules déclarations de l'ex-conjoint sur l'absence d'intention matrimoniale ne suffisent pas à caractériser la fraude ;

Qu'il considère que le signalement effectué par son épouse en vue de l'annulation de l'enregistrement de sa déclaration de nationalité française est une pure vengeance, liée au conflit conjugal et au divorce ;

Que le ministère public fait valoir que l'article 26-4 du code civil instituant une présomption de fraude en cas de cessation de communauté de vie entre les époux dans les 12 mois suivant l'enregistrement de la déclaration, c'est au déclarant qu'il appartient de démontrer que la déclaration qu'il a souscrite l'a été sans fraude ni mensonge ;

Qu'au cas particulier, il apparaît que la déclaration souscrite par [O] [J] l'a été le 24 septembre 2003, tandis que les époux ont été autorisés à résider séparément par ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de LYON rendue le 22 avril 2004, étant précisé que [O] [J] résidait chez un certain [M] [L] et a déposé une demande en vue d'obtenir l'aide juridictionnelle dès le 4 novembre 2003, ce qui lui a été accordé le 19 novembre ; que le divorce a été prononcé aux torts exclusifs du mari par jugement du 8 septembre 2006, qui a retenu à l'encontre de celui-ci un abandon du domicile conjugal le 1er octobre 2003, soit 7 jours après l'enregistrement de la déclaration de nationalité française ;

Considérant, au vu de la chronologie des événements telle qu'exposée par le ministère public et non contestée, en tant que telle, par [O] [J], qu'il convient de considérer que la communauté de vie n'était pas effective à la date où la déclaration de nationalité a été souscrite ; que [O] [J] ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que la cessation de la vie commune aurait été inspirée par des motifs légitimes excluant la fraude au sens des dispositions susvisées ;

Que la cour relève en outre, à la lecture du jugement de divorce, que le juge aux affaires familiales a retenu le grief d'abandon du domicile conjugal après avoir constaté que [O] [J] ne rapportait pas la preuve que son épouse l'ait mis hors du domicile conjugal, ce dont il résulte que, loin de fournir à ce magistrat les justifications qu'il avance à présent, [O] [J] avait alors cherché à imputer à son épouse la cause de son départ du domicile conjugal ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par [O] [J] ;  

Que [O] [J], qui succombe en son appel, supportera les dépens de la procédure d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

DÉCLARE l'appel recevable ;

REJETTE les exceptions de nullité de l'assignation et de prescription de l'action ;  

CONFIRME, en toutes ses dispositions le jugement rendu le 22 mai 2009 par le tribunal de grande instance de PONTOISE ;

ORDONNE la mention prévue à l'article 28 du code civil ;

REJETTE toute autre demande des parties ;

CONDAMNE [O] [J] au dépens de la procédure d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 11/09379
Date de la décision : 04/07/2013

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°11/09379 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-07-04;11.09379 ?
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