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07/02/2013 | FRANCE | N°10/09306

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 07 février 2013, 10/09306


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 29Z



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 FEVRIER 2013



R.G. N° 10/09306



AFFAIRE :



[A] [D]





C/

[O] [D]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Décembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 5

N° Section :

N° RG : 08/7559



Expéditions exécutoire

s

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Monique TARDY



Me Emmanuel JULLIEN













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT FEVRIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 29Z

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 FEVRIER 2013

R.G. N° 10/09306

AFFAIRE :

[A] [D]

C/

[O] [D]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Décembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 5

N° Section :

N° RG : 08/7559

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Monique TARDY

Me Emmanuel JULLIEN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT FEVRIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [A] [D]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 19]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

Représentant : Me Monique TARDY de la ASS AARPI AVOCALYS, Postulant (avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 300762)

Représentant : Me Jean-Noël SANCHEZ, Plaidant (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0409)

APPELANT

****************

Monsieur [O] [D]

né le [Date naissance 5] 1955 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de la AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant (avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 20101458)

Représentant : Me Thierry DOUEB, Plaidant (avocat au barreau de PARIS, vestiaire C1272)

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Décembre 2012 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Présidente chargée du rapport et Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Présidente,

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

M. Dominique PONSOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

FAITS ET PROCEDURE,

Vu l'appel interjeté le 13 décembre 2010 par Monsieur [A] [D] du jugement contradictoire rendu le 3 décembre 2010 par lequel le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a

- rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,

- déclaré irrecevables les conclusions signifiées par [O] [D] le 8 juillet 2010,

- écarté des débats les documents communiqués en cours de délibéré par [O] [D], ainsi que l'attestation attribuée à [Y] [B],

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de [U] [Z] épouse [D], décédée le [Date décès 6] 2004 au [Localité 15], et de [W] [D], décédé le [Date décès 2] 2007 à [Localité 12],

- commis pour y procéder Monsieur le Président de la chambre des notaires des [Localité 13], avec faculté de délégation,

- commis [N] [K], vice-président, pour surveiller les opérations de comptes, liquidation et partage,

- dis que le notaire et le juge commis pourront être remplacés sur simple requête présentée au président de la 5ème chambre de ce tribunal,

- annulé le testament rédigé par [W] [D] le 3 mars 2006,

- déclaré régulier le testament rédigé par [W] [D] le 25 juin 2006,

- annulé l'acte de notoriété établi le 24 septembre 2007 par Maître [L], notaire à [Localité 17], à la suite du décès de [W] [D],

- condamné [A] [D] à verser à l'actif de la succession de [W] [D] la somme de 43.050,63 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0001, celle de 46.288,15 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0002 et celle de 17.765,50 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0003,

- dit que [A] [D] a bénéficié de donations indirectes consenties par [U] [Z] et [W] [D] et consistant en l'occupation gratuite d'immeubles dépendant de leurs patrimoines,

- renvoyé les parties devant le notaire liquidateur chargé de l'évaluation de ces donations indirectes rapportables aux successions de [U] [Z] et [W] [D],

- dit que [A] [D] est redevable d'indemnités pour l'occupation exclusive d'immeubles dépendant de la succession de [U] [Z], depuis le 24 janvier 2004, et de la succession de [W] [D], depuis le [Date décès 2] 2007,

- renvoyé les parties devant le notaire liquidateur chargé de l'évaluation de ces indemnités d'occupation,

- débouté [O] [D] de ses autres demandes,

- débouté [A] [D] de toutes ses demandes,

- rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande d'exécution provisoire,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, dont distraction au profit de Maître [I] [C] et de la société CRTD et associés, avocats.

Vu les dernières conclusions signifiées le 30 mars 2011 par lesquelles Monsieur [A] [D], appelant, poursuivant l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, prie la cour de valider l'acte de notoriété de Maître [L] du 24 septembre 2007 et d'annuler l'acte de notoriété de Maître [G] du 24 octobre 2007, rejeter toutes les prétentions de Monsieur [O] [D], condamner celui-ci, au paiement d'une somme de 432.250 euros au titre du devoir de secours non accompli à l'époque où Monsieur [W] [D] vivait chez Monsieur [A] [D], ordonner que les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Madame [U] [Z] épouse [D], et Monsieur [W] [D] se feront conformément aux déclarations de successions et actes de notoriété établis par Maître [L], commettre si nécessaire, tel Notaire que le Tribunal entendra désigner, pour procéder aux opérations de partage, conformément à l'acte de notoriété et au testament olographe du 3 mars 2006, condamner Monsieur [O] [D] à payer la somme de 50 000 euros au titre d'une procédure abusive à une somme, celle de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ordonné l'exécution provisoire ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 7 mars 2012 par lesquelles Monsieur [O] [D], intimé, conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a écarté des débats l'attestation de [Y] [B], en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de [U] [Z] épouse [D], décédée le [Date décès 6] 2004 au [Localité 15], et de [W] [D], décédé le [Date décès 2] 2007 à [Localité 12], en ce qu'il a commis pour procéder Monsieur le Président de la chambre des notaires des [Localité 13], avec faculté de délégation, en ce qu'il a commis Madame [N] [K], vice-président, pour surveiller les opérations de comptes, liquidation et partage, en ce qu'il a annulé le testament rédigé par [W] [D] le 3 mars 2006, en ce qu'il a déclaré régulier testament rédigé par [W] [D] le 25 juin 2006, en ce qu'il a annulé l'acte de notoriété établi le 24 septembre 2007 par Maître [L], notaire à [Localité 17], à la suite du décès de [W] [D], en ce qu'il a condamné [A] [D] à verser à l'actif successoral de [W] [D] la somme de 43.050,63 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0001, celle de 46.288,15 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0002 et celle de 17.765,50 euros versée par la société BNP Paribas Assurance au titre du contrat d'assurance-vie numéro 00201677.0003, en ce qu'il a dit que Monsieur [A] [D] a bénéficié de donations indirectes consenties par [U] [Z] et [W] [D] consistant en l'occupation gratuite d'immeubles dépendant de leurs patrimoines, en ce qu'il a dit que [A] [D] est redevable d'indemnités pour l'occupation exclusive d'immeubles dépendant de la succession de [U] [Z], depuis le 24 janvier 2004, et de la succession de [W] [D] depuis le [Date décès 2] 2007, en ce qu'il a débouté [A] [D] de toutes ses demandes,

et demande à la cour d'infirmer le jugement ce qu'il l'a débouté de sa demande de condamnation de [A] [D] pour recel de succession, en ce qu'il l'a débouté de sa demande de réintégration à la succession de [U] [Z] épouse [D] de la somme de 269.207,01 euros au titre du contrat d'assurance vie souscrit par [U] [Z] épouse [D] auprès de BNP PARIBAS et subsidiairement restituer la somme de 123.306,01 euros correspondant au solde du contrat d'assurance vie souscrit par [U] [Z] épouse [D] auprès de BNP PARIBAS, en ce qu'il a renvoyé les partie devant le notaire liquidateur chargé de l'évaluation de ces donations indirectes rapportables aux successions de [U] [Z] et [W] [D], en ce qu'il a renvoyé les parties devant le notaire liquidateur chargé de l'évaluation de ces indemnités d'occupation, écarter des débats la pièce adverse n° 36, ordonner le versement de la somme de 269.207,01 euros aux héritiers, Messieurs [A] et [O] [D], dans le cadre de la succession de [U] [D], au titre du contrat d'assurance vie souscrit par [U] [Z] épouse [D] auprès de BNP PARIBAS et subsidiairement condamner Monsieur [A] [D] à restituer la somme de 123.306,01 euros, de rapporter à la succession la somme de 313.650 euros correspondant à la donation indirecte dont a bénéficié Monsieur [A] [D], condamner Monsieur [A] [D] au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à titre prévisionnelle de 6.650 euros à compter du [Date décès 2] 2007, en tout état de cause, si la cour devait infirmer le Jugement déféré et déclarer régulier le testament du 3 mars 2006, déclarer que le testament du 3 mars 2006 prévoyait une stricte égalité entre Messieurs [A] [O] [D] par « compensation », constater que la pleine propriété de l'appartement et l'atelier sis [Adresse 8], ne peut être attribuée exclusivement à Monsieur [A] [D], faute pour [W] [D] d'en avoir eu la pleine propriété, condamner Monsieur [A] [D] à la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 3 mai 2012 ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que [U] [Z] épouse [D], née le [Date naissance 4] 1934, est décédée le [Date décès 6] 2004 au [Localité 15] ; qu'elle a laissé pour lui succéder son époux, [W] [D] et ses deux fils, [O] et [A] [D] ;

Que [W] [D], né le [Date naissance 7] 1924, est décédé le [Date décès 2] 2007 à [Localité 12], laissant pour lui succéder ses deux fils, [O] et [A] [D] ;

Qu'avant son décès, Monsieur [W] [D] avait rédigé deux testaments olographes les 3 mars et 25 juin 2006 ;

Que c'est dans ces circonstances que, par acte du 13 juin 2008, [O] [D] a assigné Monsieur [A] [D] devant le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE, qui a rendu le jugement entrepris, afin d'obtenir :

- la reconnaissance de la validité du testament olographe du 25 juin 2006 rédigé par [W] [D],

- l'annulation de l'acte de notoriété établi le 24 septembre 2007 à la suite du décès de [W] [D],

- le versement de la somme de 269.207,01 euros à la succession de [U] [Z] épouse [D] au titre du contrat d'assurance vie souscrit par la défunte auprès de la BNP PARIBAS,

- la condamnation de [A] [D] à lui rembourser la somme de 107.104,28 euros en raison de l'usage frauduleux d'un acte de notoriété nul,

- le retrait des débats des témoignages de Monsieur [S] et de Monsieur [B],

- subsidiairement, la condamnation de [A] [D] à lui restituer la somme de 53.552,14 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2008, et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, applicable huit jours après la signification du jugement,

- subsidiairement, la condamnation de [A] [D] à restituer la somme de 123.306,01 euros,

- le rapport par [A] [D] à la succession de sa mère de la somme 'à parfaire' de 516.600 euros au titre d'une donation indirecte,

- la condamnation de [A] [D] à verser une indemnité d'occupation "prévisionnelle" de 6.650 euros par mois à compter du 1er janvier 2010,

- l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [U] [Z] épouse [D],

- désigner un expert chargé de donner un avis sur la valeur des biens immobiliers composant cette succession,

- désigner un commissaire priseur chargé d'établir la prisée des biens meubles,

- dire que ces experts donneront un avis sur la possibilité d'un partage en nature, sur la composition des lots et sur la valeur des biens en cas de vente,

- condamner [A] [D] à lui verser la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Que [A] [D] a conclu en défense pour demander au tribunal ;

- de déclarer valable le testament olographe rédigé par [W] [D] le 3 mars 2006 et l'acte de notoriété dressé le 24 septembre 2007,

- de condamner [O] [D] "au paiement d'une somme de 432.250 euros au titre du devoir de secours non accompli à l'époque où [W] [D] vivait chez [A] [D],

- d'ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de [U] [Z] épouse [D] et de [W] [D] selon les actes de notoriété établis par Maître [L], notaire,

- de condamner [O] [D] à lui verser la somme de 50.000 euros en raison de la procédure abusivement engagée,

- de condamner [O] [D] à lui verser la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement ;

Sur la médiation

Considérant qu'à l'audience de plaidoiries du 20 décembre 2012, la cour a proposé aux parties une mesure de médiation afin de leur permettre de donner au litige d'ordre familial qui les oppose une solution apaisée ;

Que par lettre de son conseil du 3 janvier 2013, [A] [D] a accepté d'y recourir ; qu'[O] [D] a informé la cour, par lettre de son conseil du 8 janvier 2013, qu'il estimait qu'aucune possibilité de médiation ne pouvait être envisagée avec son frère ;

Qu'il convient donc, à défaut d'accord des deux parties, de statuer sur le différend soumis à la cour ;

Considérant que les parties ne remettent pas en cause les dispositions du jugement entrepris qui a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions de [U] [Z] épouse [D] et de [W] [D], commis pour y procéder Monsieur le Président de la chambre des notaires des [Localité 13], avec faculté de délégation et un magistrat pour surveiller les opérations de comptes ;

- Sur la validité du testament olographe du 3 mars 2006

Considérant que [W] [D] a rédigé, le 3 mars 2006, un testament olographe ainsi rédigé :

«Je soussigné [W] [D] désigne mon fils [A] comme bénéficiaire des (3) contrats assurance vie à la BNP Paris Bas n° 00201677.0001 et 00201677.0003 et mon fils [O] comme bénéficiaire du contrat n° 00201677.0004 .

Je lègue ma part sur les deux maisons et les locaux industriels au [Localité 19] à mon fils [A]. [O] prendra sa compensation sur les autres biens» ;

Que ce testament a été déposé entre les mains de Maître [L], notaire à [Localité 17], qui a dressé un procès-verbal, le 24 septembre 2007 ;

Que le 25 juin 2006, [W] [D] a rédigé un second testament comportant les dispositions suivantes :

«Je soussigné Mr G.[D] [W] né le [Date naissance 7] 1924 demeurant au [Adresse 8] déclare révoquer purement et simplement tout testament ou tout autre document fait par moi antérieurement à ce jour .

Toutes les dispositions que j'avais prises devront être considérées comme nulles et non avenues.

Cette révocation est entièrement écrite datée et signée de ma main et en liberté sain de corps et d'esprit» ;

Que ce testament a été déposé entre les mains de Maître [G], notaire à [Localité 10], par [O] [D], le 22 octobre 2007 ;

Considérant que [A] [D] demande à la cour de constater la validité du testament du 3 mars 2006 faisant valoir que l'acte de notoriété établi le 24 septembre 2007 prend acte de ce testament, que les circonstances dans lesquelles le second testament olographe du 25 juin 2006 a été établi traduisent un abus de faiblesse et relève, à cet effet, qu'il est imprécis quant à l'état du patrimoine de son auteur, qu'il ne se réfère pas au testament antérieur qu'il entend révoquer, qu'à cette époque, le testateur connaissait de graves difficultés physiques, qu'il a été rédigé à l'occasion d'une des visites de [W] [D] chez son fils, [O], alors qu'il vivait chez son autre fils ;

Qu'[O] [D] conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a annulé le testament rédigé par [W] [D] le 3 mars 2006 et déclaré régulier le testament rédigé par lui le 25 juin 2006 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 901 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit ;

Considérant qu'[H] [F], graphologue, expert en écritures près la cour d'appel de Paris, mandatée par [A] [D], relève que l'écriture de [W] [D] est déstructurée, traduisant un manque de spontanéité et un malaise certain, comme si le texte lui avait été dictée (qui avait été écrit sous la contrainte), qu'il existe des anomalies, l'apposition des initiales AF, soit [O] [D], au dessus de la signature et de nombreuses fautes d'orthographe ce qui n'est pas le cas sur le testament non contesté ; qu'elle conclut que le 2ème testament révoquant toutes dispositions antérieures, en date du 25 juin 2006, paraît suspect, il semble avoir été rédigé sous la contrainte ;

Qu'[T] [X], graphologue, expert en écritures près la cour d'appel de Paris, mandatée par [O] [D], conclut que le testament émane en son entier de la seule main de monsieur [W] [D] et que la désorganisation accélérée du graphisme en 3 mois témoigne essentiellement de l'aggravation de son état général à cette date ; qu'elle énonce que le graphisme, tel qu'il apparaît à la photocopie, ne présente pas les signes habituels d'une écriture produite sous contrainte physique ou main forcée, que les caractéristiques graphiques correspondent aux difficultés d'une main perdant le contrôle de la motricité fine, que la fatigue est plus marquée en fin de texte, que la signature en revanche, qui comporte une part réflexe, reste préservée plus longtemps d'une détérioration du geste, ce qui est confirmé ici et ajoute que l'expert en écritures ne peut se prononcer à l'analyse d'un document sur une éventuelle contrainte morale pendant la rédaction ;

Considérant qu'il ressort de ces deux expertises amiables en écriture que le testament du 25 juin 2006 est de la main de [W] [D] ;

Que comme le relève l'un des experts, il ne peut être tiré aucune déduction du fait que le testament du 25 juin 2006 comporte deux signatures, l'une au pied du document, l'autre en marge en dessous des initiales AF ;

Qu'il importe peu que le second testament ne mentionne pas le premier dès lors qu'il révoque purement et simplement tout autre document fait antérieurement ; qu'il est donc univoque ; qu'il a été rédigé au [Localité 19], ville où résidait habituellement [W] [D] et non au domicile d'[O] [D] ;

Que pour établir l'état de dépendance de son père à la date à laquelle il a établi le second testament, [A] [D] verse aux débats un document dactylographié comportant les nom des médecins traitants de son père, un médecin urologue, un généraliste et un neurologue, des ordonnances et feuilles de soins ;

Que sur le premier document, en face au nom du médecin urologue, il est mentionné qu'il le suivait pour un cancer de la prostate, que le nom du médecin urologue est suivi du commentaire suivant :C'était sur mon initiative que GF a consulté et qu'il a été décelé une sénilité précoce suite aux différents tests auxquels il a été soumis ;

Que toutefois, ce document non signé et non daté, est dépourvue de toute force probante ;

Qu'il est également versé aux débats une ordonnance établie par ce médecin neurologue, le 21 mars 2006, qui prescrit 30 séances de rééducation motrice des membres inférieurs ainsi que deux ordonnances datées des 2 février et 21 mars 2006 prescrivant un médicament dont il n'est pas contesté qu'il est préconisé dans le traitement symptomatique de la maladie d'Alzheimer dans ses formes légères ;

Que cependant, aucun certificat médical décrivant les affections dont étaient atteints [W] [D] et leurs éventuelles répercutions sur ses facultés intellectuelles n'est produit ;

Qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que [W] [D] souffrait d'une affection mentale qui altérait ses facultés de discernement et qu'il n'était pas en mesure d'exprimer librement sa volonté à la date où il a testé, étant relevé au surplus que les deux testaments sont distants de trois mois et que l'appelant ne remet pas en cause l'état de santé mentale du testateur le 3 mars 2006 ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le testament olographe du 25 juin 2006 doit être mis à exécution et emporte la révocation du précédent testament du 3 mars 2006 ;

Que par voie de conséquence, l'acte de notoriété dressé le 24 septembre 2007 sur le fondement de dispositions testamentaires révoquées doit être annulé et le jugement confirmé sur ce point ;

Sur les contrats d'assurance-vie souscrits par [W] [D] auprès de la société BNP Paribas Assurance

Considérant que [A] [D] soutient que les contrats d'assurance-vie souscrits par [W] [D] contiennent une clause bénéficiaire en sorte que l'article L.132-11 du code des assurances ne peut recevoir application ;

Considérant qu'aux termes de l'article 132-11 du code des assurances, lorsque l'assurance en cas de décès a été conclue sans désignation du bénéficiaire, le capital ou la rente garantis font partie du patrimoine ou de la succession du contractant ;

Considérant, en l'espèce, qu'il ressort de la lettre adressée le 20 novembre 2007, à [O] [D], par la société BNP PARIBAS Assurance que les contrats n°002001677.0001, 002001677.0002, 002001677.0003 et 002001677.0004 comportent la clause bénéficiaire suivante : «selon dispositions testamentaires déposées en l'étude de Maître [L]» et qu'à la réception de l'attestation dévolutive établie par ce notaire, accompagnée de la copie du testament olographe daté du 3 mars 2006, l'assureur a réglé auprès du bénéficiaire désigné, [A] [D], les trois premiers contrats et a proposé à [O] [D] le règlement du quatrième contrat ;

Que, par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont exactement retenu que les dispositions testamentaires mentionnées dans la clause bénéficiaire des contrats ayant été révoquées par le testament du 25 juin 2006 qui ne désigne aucun bénéficiaire, l'article L. 132-11 doit recevoir application et ont donc condamné [A] [D] à restituer à l'actif de la succession les sommes placées sur ces trois contrats ;

Sur le recel successoral

Considérant que pour voir appliquer la sanction du recel successoral, [O] [D] soutient que [A] [D] a obtenu le versement par la société BNP PARIBAS des capitaux placés par son père sur les trois contrats d'assurance-vie alors qu'il avait connaissance du second testament lorsque a été dressé l'acte de notoriété du 24 septembre 2007 et qu'en faisant usage de cet acte, il a contrevenu aux dispositions de l'article 730-5 du code civil ; qu'il ajoute que [A] [D] s'est prévalu du testament du 3 mars 2006 avant son enregistrement en violation de l'article 1007 du même code ;

Que [A] [D] conclut à la confirmation du jugement sur ce point ; qu'il fait valoir que le notaire instrumentaire de l'acte de notoriété querellé n'est pas mis en cause et reproche à [O] [D] de ne pas l'avoir informé de l'existence du second testament ;

Considérant qu'il appartient à celui qui invoque un recel successoral d'établir l'intention frauduleuse de l'héritier dans le but de rompre à son profit l'égalité du partage ; que l'intention frauduleuse ne peut être présumée ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats que Maître [L], notaire, a dressé le 24 septembre 2007 un procès-verbal de dépôt du testament établi le 3 mars 2006 par [W] [D] et, en présence de [A] [D], un acte de notoriété faisant état de ce testament ; que la société BNP PARIBAS précise, dans une lettre datée du 23 novembre 2007, qu'elle a reçu par télécopie du 26 octobre 2007 de Maître [L], notaire, le procès-verbal de dépôt du testament du 3 mars 2006 ; que le 22 octobre 2007, Maître [G], notaire, a dressé un procès-verbal de dépôt du second testament de [W] [D] ; que dans une lettre adressée à [O] [D], le 3 juin 2009, Maître [G] lui indique qu'une copie de la disposition testamentaire du 25 juin 2006 a été adressée le 22 octobre 2007 à Maître [L] par courrier ;

Mais considérant qu'il n'est pas démontré que Maître [L] avait reçu la copie du testament olographe du 25 juin 2006 lorsqu'il a adressé à la BNP PARIBAS copie du dépôt du premier testament ; que dans une lettre datée du 14 avril 2009, adressée au conseil de [A] [D], Maître [L] déclare que ce testament ne lui a été révélé que plus d'une semaine après son dépôt au rang des minutes de Maître [G] ; qu'en tout état de cause, la preuve n'est pas rapportée que lors de la demande de versement des fonds provenant des contrats d'assurance-vie, [A] [D] avait connaissance de la révocation du testament du 3 mars 2006 ;

Qu'[O] [D] soutient sans en rapporter la preuve que [A] [D] a fait usage du testament du 3 mars 2006 avant qu'il ait été enregistré dans l'étude du notaire ; qu'en effet, si comme l'indique la société BNP PARIBAS dans une lettre datée du 10 juin 2009 adressée à [O] [D], la clause bénéficiaire des contrats d'assurance-vie a été modifiée le 24 mars 2005, elle ne précise pas le nom de celui qui a procédé à la modification ;

Que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il n'a pas fait application de la sanction du recel successoral ;

Sur le contrat d'assurance-vie souscrit par [U] [Z] épouse [D]

Considérant qu'[O] [D] demande que soit réintégré dans la succession de sa mère le montant de l'assurance-vie soustrait pour régler les droits de succession sans qu'il en ait été informé ;

Que [A] [D] réplique, en versant aux débats une lettre du notaire du 14 avril 2009 qui indique que les fonds provenant du contrat d'assurance-vie souscrit par [U] [D] ont, sur requête écrite de son époux, servi à payer les droits de succession ;

Considérant qu'il n'est ni établi, ni même allégué que le contrat d'assurance-vie souscrit par [U] [D] contenait une clause bénéficiaire ; que la fiche du compte succession de [U] [D], pour la période du 6 au 31 décembre 2007, ouvert dans l'étude de Maître [L], notaire, produite aux débats par [A] [D], fait apparaître à la date du 20 juillet 2004, un reçu de NATIO VIE d'un montant de 269.207,01 € et le même jour, le règlement aux services fiscaux d'un acompte sur les droits de succession de 145.942,42 € ; qu'il ressort de l'avis de dégrèvement adressé le 17 juillet 2007 par la Direction générale des impôts au notaire que le montant des impôts de la succession de [U] [Z] épouse [D] s'est élevé à 145.942,42 €, dont il convient de déduire un dégrèvement de 41,42 € ;

Que ce compte démontre que les fonds provenant de l'assurance-vie ont été intégrés dans la succession de [U] [D] et affectés au règlement des droits y afférents ;

Que dès lors, [O] [D] est mal fondé à soutenir que le montant de l'assurance a été soustrait de la succession de [U] [D] et doit être débouté de sa demande sur ce point ;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé ;

Sur l'occupation des biens indivis par [A] [D]

Considérant qu'[O] [D] soutient que son frère continue de bénéficier de l'usage exclusif des immeubles dépendant de la succession de leur mère et de leur père situés à [Localité 16] et au [Localité 19] et demande qu'il soit condamné à lui verser une indemnité d'occupation ;

Considérant que dans une lettre datée du 16 avril 2007, [A] [D] écrivait à son frère en ces termes :

«Concernant le [Localité 16] : je te donnerai les clés dès que j'aurais fait enlever mes affaires personnelles...

Concernant le [Localité 19], j'habite dans cette maison avec mon épouse depuis 2003 avec l'autorisation de maman et papa et après avoir effectué les travaux de rénovation . Je ne peux donc te donner les clés de mon lieu d'habitation ;

En revanche, je te demande de prendre contact avec le notaire, Maître [L] afin que nous puissions trouver un arrangement raisonnable et acceptable pour palier à cette situation » ;

Que l'occupation des biens est donc reconnue par [A] [D] ;

Que les premiers juges, se fondant sur les dispositions de l'article 815-9 dernier alinéa du code civil, ont à juste titre estimé que [A] [D] est redevable envers les successions de ses parents d'indemnités pour son occupation exclusive des biens immobiliers dépendant de ces successions et ont fixé exactement le point de départ de ces indemnités au [Date décès 6] 2004 en ce qui concerne les immeubles dépendant de la succession de [U] [D] et au [Date décès 2] 2007 en ce qui concerne les immeubles dépendant de la succession de [W] [D] ;

Que toutefois, la somme de 313.650 € réclamée par [O] [D] ne repose sur aucun élément ou décompte précis ; que par des motifs pertinents, en l'absence d'éléments sur la durée de l'occupation et la valeur locative des biens, les premiers juges ont dit qu'[O] [D] devra justifier devant le notaire en charge des opérations de comptes, liquidation et partage des périodes d'occupation et du montant des indemnités en produisant l'avis de plusieurs agents immobiliers ;

Considérant que les créances déclarées par [O] [D] pour le compte de l'indivision dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la société MECACEM, qui ont fait l'objet d'une admission au passif par le juge commissaire pour un montant de 45.000 € et de 30.357,77 € doivent être affectées à l'actif de la succession de [W] [D] ;

Sur les demandes formées par [A] [D] au titre du devoir de secours

Considérant que [A] [D] sollicite la condamnation de son frère, [O] [D], au paiement d'une somme de 432.250 € au titre du devoir de secours non accompli à l'époque où [W] [D] vivait chez Monsieur [A] [D] ; qu'au soutien de cette prétention, il fait valoir qu'il s'occupait de son père en dehors des heures de travail de l'auxiliaire de vie ainsi que les samedis et dimanches ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que [A] [D] s'est installé au domicile de ses parents en 2003 ;

Mais considérant qu'il résulte des pièces produites que [W] [D] disposait en 2006 d'un revenu mensuel de l'ordre de 5.600 € de sorte qu'il ne dépendait pas financièrement de ses fils ; que les dispositions de l'article 205 du code civil ne peuvent recevoir application ;

Que [W] [D] rétribuait en 2007 deux assistantes de vie ainsi que l'établit l'attestation fiscale de l'URSSAF pour des salaires nets annuels de 6.865 € ; que dans une attestation établie le 22 mai 2009 en réponse à une sommation interpellative délivrée à la requête d'[O] [D], [J] [P], employée par [W] [D] en qualité d'auxiliaire de vie, relate avec précision sa mission d'assistance dans la vie quotidienne de celui-ci, cinq jours sur sept dans sa résidence du [Localité 19] et sept jours sur sept, jour et nuit lorsqu'il se séjournait une semaine au [Localité 16] ;

Qu'au regard de ces éléments, l'aide et le réconfort que [A] [D] a pu apporter à son père par sa présence à ses côtés participent du devoir filial et ne peuvent donner lieu à indemnisation ;

Que le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point ;

Sur la demande de dommages-intérêts formée par [A] [D]

Considérant que la solution du litige commande de débouter [A] [D] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile doivent bénéficier à l'appelant ; qu'il lui sera alloué à ce titre la somme de 3.500 € ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Dit que les créances déclarées par [O] [D] pour le compte de l'indivision dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la société MECACEM figureront à l'actif de la succession de [W] [D] pour un montant de 45.000 € et de 30.357,77 €,

Condamne [A] [D] à payer à [O] [D] la somme de 3.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens à l'exception de ceux d'appel qui resteront à la charge de [A] [D] seront employés en frais privilégiés de partage et pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Présidente et par Madame Josette NEVEU, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,La PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 10/09306
Date de la décision : 07/02/2013

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°10/09306 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-07;10.09306 ?
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