COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 22G
2ème chambre 3ème section
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 27 NOVEMBRE 2012
R.G. No 11/03243
AFFAIRE :
Ali X...
C/
Rachida Y... épouse X...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Mars 2011 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES
No chambre : 1
No Section :
No RG : 07/1268
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Raymond DEHORS, Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT
Me Angela CSEPAI, Me Anne laure DUMEAU
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Ali X...
né le 18 Avril 1967 à DREUX (28)
de nationalité Française
...
28100 DREUX
Comparant en personne
Plaidant par : Me Raymond DEHORS de la SCP RAYMOND DEHORS AVOCAT (avocat au barreau de PARIS)
Représenté par : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT (avocat au barreau de VERSAILLES - No du dossier 0013256 )
APPELANT
****************
Madame Rachida Y... épouse X...
née le 19 Mars 1975 à DREUX (28)
de nationalité Française
...
28100 DREUX
Plaidant : Me Angela CSEPAI (avocat au barreau de CHARTRES)
Représentée par : Me Anne laure DUMEAU (avocat au barreau de VERSAILLES - No du dossier 20112 )
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue en chambre du conseil le 23 Octobre 2012,, Madame Florence CASSIGNARD, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Président,
Madame Florence CASSIGNARD, Conseiller,
Mme Danielle-Aimée PIQUION, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
EXPOSE DE L'AFFAIRE
Un jugement du tribunal de grande instance de Chartres en date du 15 décembre 2005, a prononcé le divorce de Madame Rachida Y... et de Monsieur Ali X..., mariés le 10 juin 2000, sans contrat préalable.
Maître Olivier Z..., notaire à Dreux, commis pour procéder aux opérations de liquidation et partage du régime matrimonial ayant existé entre les époux a établi le 2 février 2007 un procès-verbal de difficultés.
Le juge commissaire désigné pour surveiller les opérations de partage a dressé le 28 janvier 2008 un procès-verbal de non conciliation.
Saisi à l'initiative de Madame Rachida Y..., le tribunal de grande instance de Chartres, par jugement en date du 30 mars 2011, a :
- déclaré Monsieur Ali X... coupable de recel de communauté pour une somme de 30 000 euros, commis au moyen de deux retraits effectués le 27 août 2002 auprès du Crédit Mutuel et l'a condamné en conséquence à restituer une somme d'un même montant à Madame Rachida Y..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 223 septembre 2003,
- fixé à la somme de 11 823,60 euros la récompense due à la communauté par Monsieur Ali X... au titre des loyers, charges et taxes d'habitation acquittés par elle entre le 10 juin 2000 et le 22 septembre 2003, afférant au bien de Boulogne Billancourt,
- fixé à la somme de 852,26 euros la récompense due à la communauté par Monsieur Ali X... au titre de prestations sociales à lui versées les 3 décembre 2002, 17 mars 2003 et 22 août 2003,
- ordonné le partage par le notaire désigné des meubles ayant garni le domicile conjugal des époux.
Monsieur Ali X... a interjeté appel de cette décision suivant déclaration en date du 22 avril 2011.
Par ses conclusions récapitulatives en date du 10 septembre 2012, Monsieur Ali X... demande à la cour, à titre principal, d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et en conséquence :
- de débouter Madame Rachida Y... de sa demande au titre du partage des comptes bancaires par moitié,
- d'ordonner le partage des meubles garnissant l'ancien domicile conjugal en lui attribuant la somme de 2 500 correspondant à la valeur vénale des biens garnissant le domicile conjugal ou à défaut de lui attribuer le salon, le meuble de télévision, le combiné réfrigérateur, le living, le magnétoscope et la chaîne HI-FI,
- de condamner Madame Rachida Y... à lui rembourser la somme de 1928,50 euros au titre de la moitié de l'impôt réglé par lui courant 2002,
- de débouter Madame Rachida Y... de sa demande au titre du remboursement des loyers de l'appartement de Boulogne Billancourt,
- de la débouter également de sa demande en restitution de la prime de maternité d'un montant de 729,60 euros.
A titre subsidiaire, si la cour venait à caractériser un recel en raison des retraits effectués par les époux sur le compte joint le 22 août 2002, constater que Madame Rachida Y... a prélevé la somme de 13 553 euros le 22 novembre 2002 et la condamner du chef de recel à ce titre.
Par ses écritures déposées le 8 octobre 2012, Madame Rachida Y... conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et par la voie d'un appel incident, demande que Monsieur Ali X... soit condamné à :
- lui reverser la totalité de la prime de naissance de leur fille Sarah,
- lui rembourser des frais médicaux à hauteur de 122,66 euros,
- rembourser à la communauté les trois années de taxes d'habitation pour l'appartement de Boulogne Billancourt, soit la somme de 1 318 euros, ainsi que le loyer réglé pendant ces mêmes années, soit la somme de 10 505,60 euros, qui viendra en compensation avec celle de
2 500 euros au titre de la valeur des meubles,
-toutes ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2003.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 octobre 2012.
MOTIFS
Sur le recel de communauté reproché à Monsieur Ali X... à hauteur de la somme de 30 000 euros
Durant le mariage, les époux étaient titulaires de 4 comptes bancaires :
un compte Capital ouvert au nom de Monsieur Ali X...,
un compte livret Fidélité ouvert au nom des deux époux,
un compte Livret Bleu ouvert au nom des deux époux,
un compte chèque également ouvert au nom des deux époux.
Il est constant que le 27 août 2002, Monsieur Ali X... a procédé à deux retraits, à hauteur de 15 000 euros chacun, à partir des comptes joints Livret Bleu et Livret Fidélité, sans fournir d'indications quant à l'utilisation des sommes ainsi prélevées.
Celui-ci nie l'existence d'un quelconque recel de ce fait et soutient même que l'intégralité des soldes bancaires n'ont pas à entrer dans l'actif de la communauté dans la mesure où il y a eu clôture de ceux-ci, d'un commun accord entre les époux, le 17 décembre 2002, antérieurement à l'assignation en divorce. A l'appui de cette version des faits, il expose que Madame Rachida Y... a elle-même procédé à deux retraits, d'un montant de 1 571,669 euros et de 11 980,84 euros, 27 novembre 2002, sur le compte chèque ouvert à leur deux noms.
Cette explication est totalement contestée par Madame Rachida Y... qui objecte que Monsieur Ali X... a quitté le domicile conjugal courant novembre 2002, l'abandonnant alors qu'elle était enceinte de leur deuxième enfant, grief qui a d'ailleurs conduit le juge aux affaires familiales à prononcer leur divorce aux torts exclusifs de ce dernier. Elle indique que c'est Monsieur Ali X... seul qui a provoqué la clôture de leur compte joint en le dénonçant unilatéralement. Elle reconnaît avoir procédé aux deux virements dont se prévaut l'appelant, faisant valoir que le premier correspondait à son salaire et que le second a été réalisé pour éviter que ce dernier ne vide le compte.
Force est de constater que Monsieur Ali X... ne verse pas aux débats le moindre élément de preuve permettant d'établir l'existence d'un quelconque accord des époux quant aux retraits effectués, à hauteur de sommes importantes, constituant la plus grande partie des économies du couple, et n'explique pas comment Madame Rachida Y... aurait pu accepter un partage aussi désavantageux à son égard. Par ailleurs, le document versé au débats par Madame Rachida Y... (cf. pièce no 115 intitulée dénonciation de compte joint) permet effectivement d'établir qu'il n'y a pas une clôture conjointe par les époux du compte chèque, Monsieur Ali X... ayant pris seul l'initiative de dénoncer celui-ci.
Ainsi, il apparaît que c'est à bon droit que les premiers juges ont pu qualifier les deux retraits effectués par l'appelant le 27 août 2002, soit peu de temps avant de quitter le domicile conjugal, pour un montant global de 30 000 euros, sans pouvoir justifier de l'accord de son épouse pour la mise en œuvre d'un partage anticipé et avec l'intention de fausser l'égalité du partage, de recel de communauté.
Il apparaît par contre que les deux retraits effectués postérieurement par Madame Rachida Y..., dont l'un correspondant d'ailleurs à son salaire, alors même qu'elle se retrouvait seule à la suite de l'abandon par son mari du domicile conjugal, n'ont été réalisés pour pour se prémunir et assurer son avenir et celui de ses enfants, sans volonté de fausser l'égalité du partage mais uniquement d'éviter que celui-ci ne lui soit trop défavorable. En conséquence, ils ne sont nullement constitutifs d'un recel.
Le jugement sera donc intégralement confirmé de ce chef.
Sur la récompense au profit de la communauté au titre des loyers, charges et taxes d'habitation versés pour l'appartement de Boulogne Billancourt
Des documents versés aux débats, il ressort qu'avant même le mariage, Monsieur Ali X... était locataire d'un appartement sis à Boulogne sur Seine selon bail en date du 1er janvier 1997, conclu avec la S.A HLM TERRE ET FAMILLE. Après le mariage, il a conservé ce logement pour lequel il réglait un loyer relativement modeste (264,64 euros en août 2002).
Madame Rachida Y... ne conteste pas avoir eu connaissance de cette location mais demande que la communauté reçoive récompense pour les loyers, charges et autres taxes qu'elle a réglés du fait de celle-ci.
Il sera objecté que l'intimée reconnaît elle-même dans ses écritures (cf. p14) que Monsieur Ali X..., travaillant dans la région parisienne, en qualité d'ingénieur projet pour le compte de la Société CAP GEMINI l, occupait cet appartement pour plusieurs motifs : fatigue, grève des trains, départ tard du travail ou au contraire nécessité de commencer tôt...alors même que le couple était domicilié à Dreux, ville beaucoup plus éloignée.
Elle admet ainsi que ce logement était nécessaire à l'activité professionnelle de Monsieur Ali X... et a profité au couple en lui permettant de poursuivre celle-ci, son salaire étant de loin, leur source de revenus la plus importante.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que Monsieur Ali X... était redevable d'une récompense à ce titre.
Sur la demande de Madame Rachida Y... en remboursement de la prime de maternité et de frais médicaux
Il est justifié que le 17 septembre 2003, Monsieur Ali X... a perçu sur son compte bancaire, de la SOGAREP, qui était sa mutuelle santé, un remboursement de 729,60 euros pour « soins maternité du 17 août 2003 ». De la même façon, il a perçu des remboursements à hauteur de la somme globale de 122,66 euros pour de soins reçus par son épouse et leur fille Maryam.
C'est donc à bon droit que le premier juge a dit que ces sommes devaient être inscrites à l'actif de la communauté.
Sur les demandes au titre des meubles meublants
Contrairement à ce que soutient l'appelant, Madame Rachida Y... ne demande pas dans le dispositif de ses écritures à conserver le mobilier qui garnissait le domicile conjugal. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il en a ordonné le partage, les parties convenant que sa valeur globale peut être fixée à la somme de 5 000 euros.
Sur les demandes au titre des impôts
Madame Rachida Y... sollicite que soit fixée à l'actif de la communauté une somme de 1 158,56 euros réglée pour le compte de Monsieur Ali X... au titre des impôts sur le revenu dus par celui-ci antérieurement à la date du mariage. Il sera constaté qu'elle ne justifie d'aucun versement à ce titre qui aurait été effectué à partir d'un compte commun. En conséquence, elle sera déboutée de ce chef de demande.
Monsieur Ali X... établit qu'il a réglé à l'aide de trois chèques en date des 19 février, 12 mai et 15 septembre 2003, l'impôt sur le revenu pour l'année 2002, d'un montant global de 3 857 euros, somme dont la communauté lui doit récompense.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande.
L'ensemble des récompenses fixées au profit de l'une ou l'autre des parties seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jour de la dissolution du mariage.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et en matière civile,
En la forme,
RECOIT Monsieur Ali X... en son appel principal et Madame Rachida Y... en son appel incident,
Au fond,
CONFIRME le jugement en date du 30 mars 2011 sauf en ce qu'il a :
- fixé une récompense à la charge de Monsieur Ali X... au titre des loyers, charges et taxes d'habitation acquittés du fait de la location par Monsieur Ali X... d'un appartement sis à Boulogne sur Seine,
- débouté Monsieur Ali X... de sa demande au titre de l'impôt sur sur le revenus 2002,
STATUANT à nouveau,
DEBOUTE Madame Rachida Y... de sa demande au titre des frais engagés par la communauté du fait de la location par Monsieur Ali X... d'un appartement sis à Boulogne sur Seine,
DIT que la communauté est redevable à l'égard de Monsieur Ali X... d'une récompense de 3 857 euros au titre des impôts sur le revenu 2002,
Y AJOUTANT ,
DIT que les récompenses fixées au profit de l'une ou l'autre des parties seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jour de la dissolution du mariage,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés du partage et recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Président et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,