COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
2ème chambre 1ère section
ARRET No
CONTRADICTOIRE
CODE NAC : 22D
DU 08 NOVEMBRE 2012
R. G. No 11/ 08727
AFFAIRE :
Philippe X... C/
Emmanuelle Y...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Décembre 2011 par le Juge aux affaires familiales de NANTERRE Pôle famille 1ère section
No Cabinet : 2
No RG : 11/ 04385
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
Me Emmanuel JULLIEN
Me Jean-pierre BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Philippe X... né le 09 Mai 1966 à BOULOGNE BILLANCOURT (92109)
...
représenté par Me Emmanuel JULLIEN (avocat postulant-barreau de VERSAILLES-No du dossier 20111378) assisté de Me Elodie MULON (avocat plaidant-barreau de PARIS)
APPELANT
****************
Madame Emmanuelle Y... née le 22 Septembre 1968 à MONTREUIL (93100)
...
représentée par Me Jean-pierre BINOCHE (avocat postulant-barreau de VERSAILLES-No du dossier 71711) assistée de Me Sonia MAJOR (avocat plaidant-barreau de PARIS)
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 02 Octobre 2012, en chambre du conseil, Monsieur Xavier RAGUIN, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
M. Xavier RAGUIN, Président,
Mme Florence LAGEMI, Conseiller, Mme Danielle-Aimée PIQUION, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Denise VAILLANTFAITS ET PROCÉDURE
Emmanuelle Y... et Philippe X... ont contracté mariage le 10 avril 1991, devant l'officier d'état civil de NEUILLY SUR SEINE (92), sous le régime de la séparation de biens.
Deux enfants sont issues de cette union :
- Johanna, née le 19 mai 1992, âgée actuellement de 20 ans,
- Alexandra, née le 22 août 1993, âgée actuellement de 19 ans.
Par ordonnance de non conciliation en date 5 juillet 2007, Philippe X... a été notamment condamné à verser à Emmanuelle Y..., une pension alimentaire au titre du devoir de secours d'un montant de 2. 850 euros par mois.
Par arrêt en date du 17 mars 2008, entérinant l'accord des époux, le montant de la pension alimentaire due par Philippe X... a été porté à la somme de 4. 150 euros par mois.
Par jugement en date du 30 avril 2009, le divorce aux torts partagés des époux a été prononcé, fixant une prestation compensatoire à la charge de Philippe X... d'un montant de 576. 000 euros.
Par arrêt en date du 31 mai 2010, la cour de céans a infirmé la décision entreprise s'agissant de la prestation compensatoire qui a été réduite à 400. 000 euros.
Par arrêt en date du 1er juin 2011, la Cour de cassation a déclaré non admis le pourvoi formé par Emmanuelle Y... contre cette décision.
Par requête du 04 avril 2011, Philippe X... a saisi le juge aux affaires familiales d'une demande tendant à la suppression de la pension alimentaire versée au titre du devoir de secours à Emmanuelle Y... à compter du 06 juillet 2008, date de la naissance de l'enfant qu'a engendré Emmanuelle Y... avec son compagnon, Neige Z....
Par jugement en date du 5 décembre 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE, a :
- déclaré irrecevable l'exception d'incompétence formée par Emmanuelle Y... ;
- débouté Emmanuelle Y... de son exception de nullité ;
- débouté Philippe X... de sa demande de suppression rétractive de la pension alimentaire due à Emmanuelle Y... au titre du devoir de secours ;
- débouté Emmanuelle Y... de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- fait masse des dépens et condamné chacune des parties à les régler pour moitié.
Par déclaration du 6 décembre 2011, Philippe X... a formé un appel de portée générale contre cette décision et dans ses dernières conclusions signifiées le 7 septembre 2012, il demande à la cour de :
- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de suppression rétroactive de la pension alimentaire due à Emmanuelle Y... au titre du devoir de secours, et condamné chaque partie au paiement des dépens de la présente instance par moitié ;
- ordonner la suppression du devoir de secours versé en faveur d'Emmanuelle Y... ;
- ordonner la rétroactivité de cette suppression à compter de la naissance de Neige Z..., née le 6 juillet 2008 ;
*
Dans ses dernières conclusions signifiées le 10 septembre 2012, Emmanuelle Y... demande à la cour de :
- dire que les dispositions de l'article 1118 du code de procédure civile ne donnent pouvoir au juge aux affaires familiales pour supprimer, modifier ou compléter les mesures provisoires qu'il a prescrites, après l'ordonnance de non-conciliation, que jusqu'au dessaisissement de la juridiction ;
- constater que le juge aux affaires familiales, n'était plus saisi de la procédure de divorce au moment où Philippe X... a déposé sa requête aux fins de modification des mesures provisoires devant le juge aux affaires familiales le 04 avril 2011 ;
- dire que le 31 mai 2010, le prononcé du divorce est devenu définitif ;
- dire que l'action de Philippe X... fondé sue 1118 du code de procédure civile est irrecevable ;
- dire que les dispositions de l'article 1084 du code de procédure civile ne sont applicable qu'à la réformation des mesures accessoires ;
- dire que Philippe X... demande la réformation des mesures provisoires ;
- dire que l'action de Philippe X... fondée sur 1084 du code de procédure civile est irrecevable ;
- dire qu'il n'y a pas de fait nouveau ;
- dire que sa situation économique ne s'est nullement améliorée lorsqu'elle a rencontré M. Z..., qui a continué d'assumer ses propres charges et ne l'a pas aidée financièrement à assumer ses charges courantes personnelles ;
- dire que Philippe X... a diligenté une procédure abusive ;
- constater que Philippe X... multiplie les procédures à son encontre de manière malveillante ;
- condamner Philippe X... à lui verser 4. 000 euros au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamner Philippe X... à lui verser 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 septembre 2012.
Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.
SUR CE, LA COUR
Considérant qu'il résulte des articles 260 du code civil, 500 et 1086 du code de procédure civile que le divorce des époux est passé en force de chose jugée à la date de l'arrêt de la Cour de cassation déclarant non admis le pourvoi de portée générale formé par l'épouse, soit le 1er juin 2011 ;
Considérant que les mesures provisoires n'ont cessé de produire leurs effets qu'à cette date en application de l'article 254 du code civil ;
Considérant que le 04 avril 2011, soit antérieurement à la date à laquelle le divorce est passé en force de chose jugée, et alors que les mesures provisoires s'appliquaient encore, Philippe X... a saisi le juge aux affaires familiales d'une requête tendant à la suppression, à compter du 1er juillet 2008, de la pension alimentaire versée à son épouse au titre du devoir de secours ;
Considérant selon l'article 1084 du code de procédure civile que quand il y a lieu de statuer, après le prononcé du divorce, sur l'exercice de l'autorité parentale, la pension alimentaire ou la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant, la demande est présentée, même si un pourvoi en cassation a été formé, au juge aux affaires familiales, selon les modalités prévues à la section III du présent chapitre ;
Considérant que cette disposition, incluse dans un paragraphe du code consacré à la modification des mesures accessoires du divorce n'est pas applicable à la modification d'une mesure provisoire, celle-ci étant régi par un paragraphe différent du précédent, consacré expressément aux mesures provisoires et comprenant l'article 1118 ;
Considérant selon l'article 1118 du code de procédure civile qu'en cas de survenance d'un fait nouveau, le juge peut, jusqu'au dessaisissement de la juridiction, supprimer, modifier ou compléter les mesures provisoires qu'il a prescrites ;
Considérant que, sauf à priver une partie de tout droit à obtenir la révision d'une mesure provisoire en cas de survenance d'un fait nouveau pendant le délai s'écoulant entre le prononcé du divorce et la date à laquelle il passe en force de chose jugée, le dessaisissement de la juridiction doit s'entendre comme étant le résultat de l'événement qui confère au divorce la force de chose jugée le rendant irrévocable, excluant dès lors toute nouvelle saisine d'un juge ;
Qu'en l'espèce, la requête de Philippe X... ayant été présentée avant que la décision de non-admission de la Cour de cassation ne confère au divorce son caractère irrévocable, son action était recevable ;
Considérant qu'au soutien de sa prétention, Philippe X... fait valoir que la situation de concubinage notoire d'Emmanuelle Y..., la naissance de ses deux enfants et la modification de son revenu disponible sont constitutifs d'éléments nouveaux postérieurs à l'ordonnance de non conciliation du 05 juillet 2007 qui a fixé les mesures provisoires et l'arrêt de la cour d'appel du 17 mars 2008 statuant sur ces mesures ;
Considérant que l'élément nouveau au sens de l'article 1118 du code de procédure civile doit s'entendre d'un élément qui s'est révélé postérieurement à une décision judiciaire à l'occasion de laquelle il aurait pu être utilement invoqué pour provoquer un examen des droits sur lesquels il était susceptible d'influer ;
Considérant qu'il résulte de très nombreuses pièces produites et notamment du jugement de divorce du 30 avril 2009 et des courriers officiels adressés les 20 octobre 2009 et 22 janvier 2010 à son adversaire par maître KORCHIA, alors avocat de Philippe X..., que ce dernier connaissait parfaitement la situation d'Emmanuelle Y... et savait qu'elle vivait en concubinage et avait eu successivement deux enfants avec son compagnon, pilote de ligne d'Air France, dont la situation patrimoniale, comme celle de son épouse, lui était connue ;
Considérant qu'en possession de ces informations complètes, Philippe X... s'est cependant abstenu de solliciter la moindre modification des mesures provisoires au juge du premier degré comme au juge du second degré qui a statué sur le divorce le 31 mai 2010 ;
Qu'ainsi, Philippe X... est mal fondé à soutenir qu'il pouvait lors du dépôt de sa requête du 04 avril 2011 se prévaloir d'un élément nouveau répondant aux exigences de l'article 1118 ;
Qu'il convient de confirmer le jugement qui a rejeté sa prétention ;
Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive
Considérant que l'action en justice, comme l'exercice du droit d'appel, ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol ou encore de légèreté blâmable ; que ces exigences ne sont pas satisfaites en l'espèce ; que la demande reconventionnelle sera rejetée ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Considérant que chaque partie a succombé partiellement dans ses prétentions, tant en première instance que devant la cour d'appel ; qu'il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a fait masse des dépens et les a partagés par moitié entre les parties et de dire que chacune conservera la charge de ses propres dépens exposés devant la cour ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison de la nature familiale du litige ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil
CONFIRME le jugement rendu le 5 décembre 2011 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE.
REJETTE toute autre demande des parties ;
DIT que chacune des parties conservera les dépens par elle engagés dans le cadre de la procédure d'appel.
arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
signé par Xavier RAGUIN, président, et par Denise VAILLANT, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT