COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 09 MAI 2012
R.G. No 10/05148
AFFAIRE :
SAS SUPPLY CHAIN PERFORMANCE
C/
Alain X...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 21 Octobre 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CERGY PONTOISE
Section : Activités diverses
No RG : 09/00459
Copies exécutoires délivrées à :
Me Sylvie DERACHE-DESCAMPS
Me Blandine SIBENALER
Copies certifiées conformes délivrées à :
SAS SUPPLY CHAIN PERFORMANCE
Alain X...
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF MAI DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
SAS SUPPLY CHAIN PERFORMANCE
Avenue du Fond de Vaux
ZAC de Béthunes
95310 ST OUEN L AUMONE
représentée par Me Sylvie DERACHE-DESCAMPS, avocat au barreau de VAL DOISE
APPELANTE
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Monsieur Alain X...
...
95180 MENUCOURT
comparant en personne, assisté de Me Blandine SIBENALER, avocat au barreau de PARIS
INTIME
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hubert DE BECDELIÈVRE, Conseiller chargé(e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :
Madame Patricia RICHET, Présidente,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Monsieur Hubert DE BECDELIÈVRE, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,
M Alain X... a été embauché par la SAS SUPPLY CHAIN en qualité d'analyste réalisateur par contrat de travail à durée indéterminée en date du 28 juillet 2008. Il était chargé de réaliser des programmes informatiques de gestion commerciale. Par courrier du 04 juin 2009, il a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement au motif qu'il aurait eu une " altercation inadmissible avec son supérieur hiérarchique".
Il a été licencié par lettre du 19 juin 2009 aux motifs suivants :
" le 04 juin dernier, vous avez eu une violente altercation avec votre responsable M A... en ma présence et celle de M B... au cours de laquelle vous vous êtes emporté avec fureur en frappant sur votre bureau et votre clavier. Vous vous êtes montré très agressif et vous avez proféré des insultes contre M A....
Nonobstant votre embauche récente, nous avons déjà dû attirer votre attention sur vos manquements :
Ainsi, nous vous avions reçu en entretien le 03 décembre 2008 suite à diverses absences du 17, 25 et 26 novembre 2008 afin de clarifier votre situation et vous rappeler la nécessité de prévenir votre hiérarchie en cas d'absence. Vous aviez admis vos carences et vous vous étiez engagé à y remédier si le cas se représentait.
Le 25 mai 2009, nous vous avons notifié un avertissement consécutif à de nouvelles absences."
Estimant son licenciement abusif, M X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de le 06 juillet 2009 de demandes tendant à la condamnation de la SAS SUPPLY CHAIN au paiement des sommes de :
- 1 783,94 euros euros à titre de rappel de salaires de la mise à pied ;
- 178,39 euros au titre des congés payés y afférents ;
- 10 541,79 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis;
- 1 054,17 euros au titre des congés payés y afférents ;
- 878,48 prorata de 13ème mois sur préavis;
- 22 850,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 1 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
Il a formé le 06 mai 2010 une demande additionnelle tendant au paiement des intérêts légaux de ces sommes et à l'exécution provisoire de la décision sur sa totalité.
Par jugement du 21 octobre 2010, le Conseil de Prud'hommes a fait droit à ces demandes sauf à ramener à 900,00 euros le montant de l'indemnité accordée au salarié sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ,
Les juges prud'hommaux ont considéré qu'au regard des motifs énoncés dans la lettre de licenciement, aucun fait ou ensemble de faits pouvant constituer une violation des obligations du contrat de travail n'est reproché au salarié; que l'employeur n'avait pas apporté de preuves suffisamment conséquentes sur les dommages engendrés par le comportement de M X...; que celui-ci et M A... n'ont pas de lien hiérarchique entre eux et que les faits n'étaient pas de nature à perturber le fonctionnement de l'entreprise; qu'il n'est nullement démontré au surplus que ces attitudes étaient constantes et répétitives ; que les absences de novembre étaient prescrites .
DEVANT LA COUR :
Par conclusions déposées le 13 mars 2012 et développées oralement auxquelles il est expressément fait référence, la société SUPPLY CHAIN PERFORMANCE a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de dire que le licenciement est fondé sur une faute grave et de débouter le salarié de toutes ses demandes. À titre infiniment subsidiaire, de ramener à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts et condamner M X... au paiement de la somme de 2 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 13 mars 2012 et développées oralement auxquelles il est expressément fait référence, M X... a demandé à la Cour de confirmer le jugement et de condamner l'employeur au paiement de la somme de 3 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
Les absences injustifiées mentionnées dans la lettre de licenciement ne sont plus susceptibles d'être sanctionnées en raison de leur ancienneté et du fait que la dernière d'entre elle à été sanctionnée par un avertissement et ne peut l'être de nouveau .
Par ailleurs ces faits apparaissent dépourvus de lien avec le fait principal relaté dans la lettre à savoir l'altercation de M X... avec M A... du 04 juin 2009 .
Si ce dernier, gérant de la société CILAD mais bénéficiant néanmoins d'un bureau dans les locaux de la société SUPPLY CHAIN PERFORMANCE avec laquelle il était en relation d'affaires, n'était pas salarié de la société SUPPLY CHAIN PERFORMANCE, il n'en avait pas moins avec M X... une relation de travail dans laquelle il exerçait un pouvoir de direction sur celui-ci conféré expressément par l'employeur de M X....
Ce dernier ne saurait sérieusement contester qu'il devait exécuter ses instructions dans le cadre des tâches qu'ils effectuaient de concert.
Ce rapport d' autorité voulu par la Direction de la société SUPPLY CHAIN PERFORMANCE en vue de la bonne réalisation de leur tâche commune supposait de la part de M X... une attitude comparable à celle qu'il devait observer à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques.
Il n'en demeure pas moins que M A... devait avoir à l'égard de celui-ci une attitude respectueuse .
En l'espèce les déclarations des parties sont divergentes en ce qui concerne les causes et le déroulement de l'incident du 04 juin 2009.
M A... soutient que la seule cause de l'altercation tient dans les remontrances qu'il avait adressées à juste titre à M X..., d'abord pour avoir négligé de remédier à une anomalie constatée en début de matinée, puis de nouveau vers 11 h30 suite à un autre incident du système d'information que le salarié avait également décidé d'ignorer suite à la remontrance faite auparavant.
Il affirme que M X... a frappé violemment sur son bureau puis l'a insulté et menacé.
M X... affirme quand à lui que M A... lui en voulait de s'être rendu la veille dans le bureau du Directeur administratif pour se plaindre de ses agissements et qu'il a dû hausser la voix parce qui celui-ci s'était lui même emporté et avait déchiré devant lui sa feuille de congés payés; que c'est alors qu'il a dû hausser la voix sans toutefois proférer d'insulte ni de menace ni taper sur le bureau.
L' attestation de M B... ne permet pas d'accréditer l'une des versions plutôt que l'autre, celui-ci s'étant borné a déclarer qu'en se rendant au service informatique pour obtenir des explications sur le fait que certains clients n'avaient pas reçu leurs factures, il a vu M X... qui paraissait alors très énervé et a entendu des propos très violents proférés par le salarié à l'encontre de M A....
Il a été également produit un courriel d'un autre salarié M C... dans lequel celui-ci fait état d'un accrochage avec M X... le 08 avril 2009 parce qu'il n'avait pas pris le temps d'écouter celui-ci étant attendu pour une conférence téléphonique. Il fait également état de sautes d'humeur du salarié qui devenait selon lui de plus en plus difficile à gérer au quotidien. Il attribue cette attitude au sentiment d'isolement de M X... qui s'était plaint de ne pas se voir confier par M A... de responsabilités à sa mesure.
La teneur des propos attribués à M X... et présentés comme menaçants et insultants à l'égard de M A... n'a pas été précisée par les parties de sorte que la Cour n'est pas à même d' en apprécier la gravité .
M X... nie avoir frappé sur son bureau . Ce fait n'est pas corroboré par les éléments du dossier et notamment par le témoignage de M B... qui n'a assisté qu'à une partie de l'altercation .
Le doute sur ce point doit bénéficier au salarié .
M X... soutient avoir réagi à une provocation de M A... qui aurait déchiré devant lui l'imprimé de demandes de congés payés . Ce fait est nié par l' intéressé et n'a pas davantage eu de témoins.
Compte tenu de l'imprécision et de la contrariété des éléments du dossier en ce qui concerne l'origine et le déroulement de cette altercation dans laquelle l'employeur peut avoir sa part de responsabilité, il convient d' accorder le bénéfice du doute au salarié et en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
M X... avait une ancienneté inférieure à 2 ans et ne peut donc prétendre à l'indemnité minimale de 6 mois de salaire prévue par l'article L 1335- 3 du Code du travail mais seulement à une indemnité égale au préjudice subi et justifié.
Il résulte de l'ordonnance de référé du 04 mars 2009 que M X... a, à partir du 16 août 2010, repris une activité indépendante de prestations dans le domaine de l'informatique lui permettant d'obtenir des revenus s'élevant jusqu'à 7 700,00 euros par mois.
Le salarié justifie par ailleurs de la perception d' indemnités de chômage d'un montant de 1944,01 euros par mois de septembre 2009 à avril 2010 .
En revanche, M X... n'a pas produit aux débats ses avis d'imposition pour les années 2008, 2009 et 2010 qui auraient permis une appréciation plus exacte de son préjudice .
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer le montant des dommages et intérêts accordés par le Conseil de Prud'hommes compatible avec les éléments ci-dessus.
Il convient également de confirmer les dispositions du jugement concernant le principe et le montant des indemnités de préavis, congés payés afférents, ainsi que le rappel de salaire concernant la période de mise à pied .
La demande tendant au paiement d'une somme de 878,48 euros correspondant au prorata du 13ème mois sur l'indemnité compensatrice de préavis n'a pas été remise en cause par l'employeur. Elle a été justement accueillie par les premiers juges.
Il apparaît équitable de dédommager M X... de ses frais irrépétibles à hauteur de sa demande.
Les dépens seront mis à la charge de la société SAS SUPPLY CHAIN PERFORMANCE.
PAR CES MOTIFS la Cour statuant publiquement et contradictoirement
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
AJOUTANT :
Condamne la société SAS SUPPLY CHAIN PERFORMANCE aux dépens de l'appel.
Arrêt- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Patricia RICHET, Présidente et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,