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07/03/2012 | FRANCE | N°10/00092

France | France, Cour d'appel de Versailles, 07 mars 2012, 10/00092


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 07 MARS 2012

R. G. No 11/ 00943

AFFAIRE :

Amadou X...




C/
SA FONDASOL



Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 02 Mars 2011 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Activités diverses
No RG : 10/ 00092



Copies exécutoires délivrées à :

Me Béatrice BONACORSI
Me Olivier BAGLIO



Copies certifiées conformes

délivrées à :

Amadou X...


SA FONDASOL

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT MARS DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt ...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 07 MARS 2012

R. G. No 11/ 00943

AFFAIRE :

Amadou X...

C/
SA FONDASOL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 02 Mars 2011 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Activités diverses
No RG : 10/ 00092

Copies exécutoires délivrées à :

Me Béatrice BONACORSI
Me Olivier BAGLIO

Copies certifiées conformes délivrées à :

Amadou X...

SA FONDASOL

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT MARS DEUX MILLE DOUZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Amadou X...

...

78190 TRAPPES

comparant en personne,
assisté de Me Béatrice BONACORSI, avocat au barreau de VAL D'OISE

APPELANT
****************

SA FONDASOL
21 Rue Jean Poulmarch
95100 ARGENTEUIL

représentée par Me Julie BELMA avocat au barreau de PARIS substituant Me Olivier BAGLIO, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMEE
****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Janvier 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Patricia RICHET, Présidente chargé (e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :

Madame Patricia RICHET, Présidente,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Monsieur Hubert DE BECDELIÈVRE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Mr Amadou X... a été engagé par la société FONDASOL Technique selon contrat à durée déterminée à compter du 19 mai 2003 pour une durée de 6 mois en qualité de Second niveau 2, statut ouvrier, coefficient 110 de la convention collective des travaux publics puis la relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée. Suite à plusieurs promotions il était, en dernier lieu, chef d'équipe niveau 2, depuis le 1er juin 2007 moyennant une rémunération mensuelle brute en dernier lieu de 1 907 €.

Après avoir fait l'objet de deux avertissements écrits les 23 janvier 2007 relatif à un problème de sécurité dans le transport d'une sondeuse et 17 juillet 2009 concernant un échange de propos assez vifs avec le conducteur de travaux d'une autre entreprise sur le chantier de Garges-les-Gonesse, Mr X... a été convoqué le 15 septembre 2009 à un entretien préalable fixé au 28 septembre 2009 avec mise à pied à titre conservatoire à compter de cette date puis licencié le 6 octobre 2009 pour productivité insuffisante des rendements de son équipe et manquements aux obligations contractuelles ainsi que dans l'exécution des directives données, avec toutefois dispense d'exécution de son préavis intégralement payé, paiement de la période de mise à pied conservatoire et versement d'une indemnité de licenciement, le licenciement d'abord envisagé comme fondé sur une faute grave ayant été transformé en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Contestant cette mesure, Mr X... a saisi le conseil de prud'hommes le 5 mars 2010 aux fins de faire juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui payer, de ce chef, les sommes de 24 919, 08 € de dommages-intérêts, 450 € au titre de primes qualité et de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens, et ce avec exécution provisoire.

Par jugement du 2 mars 2011, estimant que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, le conseil de prud'hommes d'Argenteuil, section Industrie, a débouté Mr X... de ses demandes, donné acte à l'employeur qu'il reconnaissait devoir la somme de 150 € bruts à Mr X... à titre de rappel de prime qualité de janvier à mars 2007, l'en a condamné au paiement en tant que de besoin et mis les éventuels dépens pour moitié à la charge des parties.

Mr X... a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Il demande à la cour, par voie de réformation, de dire que la rupture de la relation de travail, imputable à l'employeur, ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse, et en conséquence, de condamner la société FONDASOL à lui payer les sommes déjà réclamées en première instance outre celle de 15 000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

De son côté, la société FONDASOL sollicite la confirmation de la décision attaquée en toutes ses dispositions ainsi que la condamnation de Mr X... à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux conclusions des parties visées à l'audience du 18 janvier 2012 et développées oralement.

Sur le licenciement :

Pour estimer le licenciement de Mr X... fondé sur une cause réelle et sérieuse, le conseil de prud'hommes relève que le salarié ne rapporte pas la preuve du caractère mensonger ou erroné des griefs qui lui sont reprochés et que dans toute entreprise, et surtout dans le secteur des travaux publics, le chef d'agence n'a pas à palabrer tous les jours avec ses chefs d'équipe pour résoudre les problèmes courants de chantier, le chef de chantier ou le chef d'équipe devant se débrouiller pour résoudre les soucis imprévus rencontrés et faire avancer le chantier, et les éventuelles discussions avec la hiérarchie se faisant dans l'entreprise.

Il convient toutefois de rappeler qu'en matière de licenciement pour causé réelle et sérieuse, la charge de la preuve n'incombe pas spécifiquement à l'une ou l'autre des parties, le juge devant se déterminer au vu des éléments qui lui sont produits de part et d'autre.

S'agissant du premier grief reproché à Mr X..., en l'espèce une productivité insuffisante des rendements de son équipe dans l'utilisation d'une sondeuse, ayant entraîné une perte cumulée de 15 jours de production en 2008 et 17 jours depuis le 1er avril 2009 et ayant généré des pertes financières régulières inacceptables, il convient de relever que ces faits ont été portés à la connaissance de l'employeur plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement et sont donc prescrits en application des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail. L'argument soulevé par la société FONDASOL pour s'y opposer, fondé sur la continuation de l'insuffisance depuis le 1er avril 2009, est inopérant dès lors que l'employeur n'indique pas précisément dans la lettre de licenciement à quelles dates et dans le cadre de quels chantiers ont été relevées ces continuations d'insuffisances ni n'en rapporte la preuve.

S'agissant du second grief reproché à Mr X..., en l'espèce des manquements certains à ses obligations contractuelles et dans l'exécution des directives qui lui sont données, générant des tensions de plus en plus croissantes avec ses responsables, incompatibles avec les responsabilités du poste qu'il occupe et en perturbent sérieusement le fonctionnement, l'employeur fait référence dans la lettre de licenciement au comportement de son salarié, préjudiciable à sa productivité et à l'équilibre financier de l'agence entière, dans le cadre des chantiers :

- d'ORGERUS (référencé IP. 09. 0132) : refus de prendre avec lui des barrières destinées à sécuriser la zone de chantier au motif que ce n'était pas à lui d'assurer cette tâche, mais à l'équipe légère de l'agence alors qu'il lui appartient de préparer lui-même les chantiers qui lui sont attribués et de se doter du matériel nécessaire à la bonne exécution de son activité en toute sécurité,

- de la ligne RTE VILLEJUST (référencé : IP. 09. 0157) : refus catégorique de réaliser un avant-trou aux fins de vérifier l'éventuelle présence de réseaux enterrés au droit du site, au prétexte que ce n'était pas à lui d'assurer cette tâche mais à l'équipe légère de l'agence et qu'en tout état de cause, il n'avait en sa possession ni pelle, ni pioche ni tarière,

- de GIF SUR YVETTE (référencé IP. 09. 0176) : Mr B..., conducteur de travaux a dû insister lourdement auprès de lui pour qu'il assure ce chantier situé en zone contrôlée nucléaire alors qu'il a pourtant reçu, à sa demande, une formation spécifique pour intervenir sur ce type de chantier.

En outre, et alors que Mr C... lui demandait de prendre un autre véhicule de l'agence le temps de procéder aux réparations nécessaires sur son véhicule de liaison, il a catégoriquement refusé de conduire le véhicule de remplacement, sans donner la moindre explications, ayant finalement accepté de le faire à l'issue de vifs échanges et sur l'insistance de son supérieur.

L'employeur ne mentionne pas dans la lettre de licenciement à quelle date les faits reprochés à Mr X... ont eu lieu et les attestations produites, rédigées par les salariés de l'entreprise confirmant ces faits, ne mentionnent pas davantage la date de leur survenue.

Il résulte toutefois des rapports journaliers de chantiers rédigés par Mr X... que les trois chantiers en cause ont été réalisés du 27 mai au 3 juin 2009 (chantier d'ORGERUS), du 20 au 23 juillet 2009 (chantier ligne RTE VILLEJUST) et du 22 juin au 15 juillet 2009 (chantier de GIF SUR YVETTE).

Tous ces chantiers ayant eu lieu plus de deux mois avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement et les faits reprochés au salarié ayant donné lieu à l'intervention de ses supérieurs hiérarchiques, en l'espèce Mr Nicolas D..., assistant conducteur de travaux sur le chantier d'ORGERUS, Mr Régis E..., technicien supérieur sur le chantier ligne RTE VILLEJUST et Christophe B..., conducteur de travaux sur le chantier de GIF SUR YVETTE, il s'ensuit que l'employeur avait nécessairement eu connaissance desdits faits dès leur réalisation soit plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement. Ces faits étant prescrits au regard des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, ne pouvaient donc servir de fondement à une procédure de licenciement.

S'agissant de l'incident relatif à l'utilisation d'un véhicule de remplacement, l'attestation de Mr C..., écrite le 6 décembre 2010, ne mentionnent aucune date des faits ni aucune référence de chantier alors que selon Mr X... il s'agissait du chantier d'ORGERUS évoqué précédemment, de telle sorte qu'il y a également lieu de le considérer comme prescrit.

Le jugement attaqué sera donc infirmé.

Agé de 50 ans et ayant six ans d'ancienneté au sein de l'entreprise au moment du licenciement, Mr X... justifie avoir bénéficié de l'ARE de décembre 2009 à septembre 2010 et être atteint d'une maladie déclarée professionnelle en septembre 2010 par le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles avec un tauxd'incapacité permanente de 20 %. Toutefois, il ne justifie pas de sa situation actuelle au regard d'une recherche d'emploi ou d'un éventuel nouvel emploi. Il lui sera en conséquence alloué une somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les autres demandes :

Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :

Il n'est pas établi que le licenciement de Mr X... a été prononcé pour des motifs inexistants afin d'éviter de procéder à un aménagement de son poste ou de procéder à son reclassement suite à l'avis d'aptitude avec réserve au port de charges lourdes comme il le prétend. En effet, comme indiqué ci-dessus, les griefs reprochés à Mr X... ne sont pas considérés comme inexistants mais comme prescrits. En outre, si la fiche d'aptitude médicale datée du 26 juin 2009 mentionne qu'il ne doit pas porter de charge supérieure à 25 kilos, aucun élément de la procédure ne permet de relier cette restriction à une volonté de l'employeur d'en éviter les conséquences quant à un aménagement de poste ou d'emploi. Le détournement de procédure allégué n'étant pas avéré, Mr X... sera débouté de sa demande en indemnisation de ce chef.

Sur le reliquat de prime qualité :

La société FONDASOL ayant reconnu devoir la somme de 150 € au titre de la prime qualité afférente aux mois de janvier et mars 2007, le jugement sera confirmé en ce qu'il lui en avait donné acte et l'en avait condamnée au paiement en tant que de besoin.

Il résulte de l'avenant au contrat de travail en date du 18 mai 2007 que la prime qualité de 75 € par mois est due lorsque le salarié respecte ses obligations professionnelles. Or Mr X... n'a pas pu respecter ses obligations professionnelles de décembre 2008 à mars 2009 dès lors que l'attestation des indemnités journalières de la CPAM des Yvelines qu'il produit aux débats démontre, qu'il était en arrêt de travail d'une manière continue du 9 octobre 2008 au 19 avril 2009.

Mr X... sera en conséquence débouté de sa demande, en paiement de complément de prime.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

La société FONDASOL succombant pour l'essentiel dans la présente instance devra supporter les dépens et sera condamnée à payer à Mr X... la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement et statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Mr X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société FONDASOL à payer à Mr X... la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirme le jugement sur le reliquat de prime qualité,

Condamne la société FONDASOL à payer à Mr X... la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel,

Rejette les autres demandes.

Arrêt-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Patricia RICHET, Présidente et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, La PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 10/00092
Date de la décision : 07/03/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-07;10.00092 ?
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