COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 28A
1ère chambre 1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 DECEMBRE 2011
R.G. N° 08/08226
AFFAIRE :
[M] [G]
...
C/
[B] [G]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Juillet 2008 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES
N° Chambre : 1
N° Section :
N° RG : 07/03254
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SCP JULLIEN ROL FERTIER
SCP LEFEVRE TARDY HONGRE BOYELDIEU,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT DECEMBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [M] [G]
né le [Date naissance 8] 1954 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 10]
représenté par la SCP JULLIEN ROL FERTIER - N° du dossier 20081177 Avoué à la cour
Rep/assistant : Me Christian MERCIER (avocat au barreau de CHARTRES)
Madame [Z] [G]
née le [Date naissance 4] 1947 à [Localité 20]
[Adresse 3]
[Localité 13]
représentée par la SCP JULLIEN ROL FERTIER - N° du dossier 20081177 Avoué à la cour
Rep/assistant : Me Christian MERCIER (avocat au barreau de CHARTRES)
APPELANTS
****************
Mademoiselle [B] [G]
née le [Date naissance 11] 1951 à [Localité 20]
[Adresse 18]
[Adresse 18]
[Localité 9]
représentée par la SCP LEFEVRE TARDY HONGRE BOYELDIEU - N° du dossier 280790 Avoué à la cour
Rep/assistant : la SCP LAINE-DEPIED (avocats au barreau de CHARTRES)
Mademoiselle [C] [G]
née le [Date naissance 5] 1946 à [Localité 20]
[Adresse 2]
[Localité 12]
représentée par la SCP LEFEVRE TARDY HONGRE BOYELDIEU - N° du dossier 280790 Avoué à la cour
Rep/assistant : la SCP LAINE-DEPIED (avocats au barreau de CHARTRES)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/010794 du 26/08/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Novembre 2011 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Evelyne LOUYS conseiller faisant fonction de président, chargé du rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Evelyne LOUYS, conseiller, faisant fonction de président,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
Madame Claire DESPLAN, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,
Vu le jugement rendu le 9 juillet 2008 par le tribunal de grande instance de Chartres qui a :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation partage des successions de [N] [G] et [P] [G] et de la communauté ayant existé entre eux ainsi que le partage de l'indivision,
- désigné le président de la chambre des notaires d'Eure et Loir, avec faculté de délégation, pour procéder aux dites opérations,
- désigné le président de la première chambre du tribunal ou le juge de la mise en état pour suivre les opérations de partage et faire apport sur son homologation en cas de difficultés,
- dit qu'il appartiendra au notaire instrumentaire de fixer l'actif successoral de [N] [G], et d'établir un compte d'administration de la communauté ayant existé entre les époux [G],
- commis M. [K] [J], expert près la cour d'appel de Versailles, demeurant [Adresse 7], lequel aura pour mission d'évaluer l'immeuble sis à [Adresse 19], commune de [Localité 20],
- ordonné la licitation, à la barre du tribunal de grande instance de Chartres, de la parcelle de terre sise lieudit à [Localité 16] sur le territoire de la commune de [Localité 20], cadastrés ZA n° [Cadastre 1] pour 17a 28 ca, et ce sur une mise à prix de 500€, sur le cahier des charges qui sera dressé par la SCP Mercier,
- rejeté la demande d'annulation du testament établi par [P] [G] le 1er juillet 1996 ainsi que la demande de communication du dossier médical de celle-ci,
- enjoint les centres CNP d'[Localité 15] et d'[Localité 14] de communiquer au greffe les deux contrats d'assurance vie souscrits par [P] [G],
- rejeté la demande à fin de production, par le Crédit agricole, du compte Prédiane ouvert par [P] [G],
- débouté M. [M] et Mme [Z] [G] de leur demande à fin de reddition des comptes,
- dit que seront rapportées à la succession les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à dater de leur versement :
pour Mme [C] [G] 3 811,23€
pour Mme [B] [G] 8 780,21€
pour la succession de [T] [G] 762,25€, outre une indemnité d'occupation mensuelle de 244€ de l'année 1992 au mois de juillet 2001 et du mois de mars 2004 au 21 décembre 2006,
- débouté M. [M] et Mme [Z] [G] de leur demande tendant à voir prononcer les sanctions du recel,
- rejeté la demande à fin de rapport des fermages,
- débouté M. [M] et Mme [Z] [G] de leur demande de dommages et intérêts,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'emploi des dépens en frais de partage, qui seront recouvrés par la SCP Mercier conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Vu l'arrêt en date du 10 juin 2010 de la cour d'appel de Versailles qui a :
- déclaré recevables les demandes présentées à l'encontre de la succession de [T] [G],
- confirmé le jugement déféré en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage des successions de [N] [G] et [P] [V]-[G], dit qu'il appartiendra au notaire de fixer l'actif successoral de [N] [G] et d'établir un compte d'administration de la communauté ayant existé entre les époux [G], commis M. [K] [J] en qualité d'expert pour évaluer l'immeuble situé à [Adresse 19] commune de [Localité 20], ordonné la licitation à la barre du tribunal de grande instance de Chartres de la parcelle de terre sise lieudit [Localité 16] sur le territoire de la commune de [Localité 20] cadastrée section ZA n° [Cadastre 1] pour 17a 28 ca sur une mise à prix de 500€, enjoint aux centres CNP d'[Localité 15] et d'[Localité 14] de communiquer au greffe les deux contrats d'assurance vis souscrits par [P] [G], rejeté la demande à fin de rapport des fermages et condamné la succession de [T] [G] à payer à l'indivision successorale une indemnité d'occupation mensuelle de 244€ du mois de mars 2004 au 21 décembre 2006, dispositions non contestées,
- confirmé également le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du testament du 1er juillet 1996 et débouté les demandeurs de leur demande de communication du dossier médical,
- infirmé le jugement déféré en ce qu'il a fixé à la somme de 244 euros l'indemnité mensuelle d'occupation due par la succession de [T] [G] de l'année 1992 jusqu'au mois de juillet 2001,
Statuant à nouveau,
- dit que la succession de [T] [G] doit rapporter à la succession de [P] [V] veuve [G] la somme de 21 000 euros au titre de l'avantage indirect résultant de la jouissance à titre gratuit de l'immeuble indivis par [T] [G],
- sursis à statuer sur les autres demandes de rapports à succession , de recel et de dommages-intérêts,
- avant dire droit, a ordonné une mesure d'expertise et désigné pour y procéder :
M [R] [X] expert-comptable, avec pour mission de :
- se faire remettre par les parties l'ensemble des documents bancaires et toutes les pièces permettant d'effectuer les comptes,
- déterminer les prélèvements effectués par Mme [B] [G] sur les comptes de la défunte grâce aux procurations dont elle disposait en recherchant si ces prélèvements ont profité à la défunte et ce entre 1992 et son décès le 23 juillet 2003,
- rechercher si des sommes ont été remises par la défunte pendant cette période à Mme [B] [G] et leur montant, si des sommes ont été remises à [T] [G] et leur
montant, si des sommes ont été remises à Mme [C] [G] et leur montant,
- rechercher, à partir des comptes bancaires de la défunte, si, pendant la période de 1987à 1992, Mme [Z] [G] et M. [M] [G] ont bénéficié de la part de leur mère de remises de fonds et en fixer le montant,
- dit n'y avoir lieu de statuer sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile
- réservé les dépens.
Appelants, M. [M] et Mme [Z] [G], aux termes de leurs écritures signifiées le 4 octobre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs moyens, demandent à la cour de :
- réformer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté les demandes portant sur la reddition des comptes, le rapport partiel aux successions, le recel de succession et les demandes en dommages et intérêts et en indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
- constater que Mme [B] [G], au mépris de l'article 1993 du code civil, n'a pas rendu compte de l'utilisation des fonds retirés sur les comptes de [P] [G] où elle disposait d'une procuration pour la période de 1992 à 2003,
- constater qu'elle ne justifie que de l'emploi de 2 786,27€,
- dire qu'en application des articles 843 et suivants du code civil, Mmes [C], [B] [G] et la succession de [T] [G] devront rapporter à la succession de [N] [G] et de [P] [G] l'intégralité des avantages dont ils ont bénéficié en chèques, en retraits à vue ou en avantages indirects, et ce, en vertu de l'article 856 du code civil, avec intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession de [N] [G] et subsidiairement à compter de celle de [P] [G], soit les sommes suivantes :
en chèques dont ils ont été directement bénéficiaires
Mme [C] [G] 6 860,20€
Mme [B] [G] 9 181,25€
Succession de [T] [G] 2 439,25€
en retraits à vue
Mme [B] [G] 37 984€ soit la totalité des retraits à vue de 1992 à 2003,
en avantages indirects autres que l'occupation du bien
Mme [B] [G] 98 263,14€,
en chèques tirés sur les CCP et sur le CA dont la destination est inconnue
19 518,43€,
en agios et frais bancaires abusifs
416,31€,
en dépenses qui ont profité à [B]
52 664,73€,
dont à déduire les seules dépenses justifiées de 2 786,27€
- fixer le total des rapports dus à [B] à 130 290,50€
Succession de [T] : 7 198,11€
- rejeter la demande en reddition de comptes dirigée contre eux,
- juger en application de l'article 792 du code civil que [T] [G], Mmes [C] et [B] [G] ont recelé les effets de la succession de leur père et de leur mère et en conséquence dire que ni Mmes [C], ni [B] [G], ni la succession de [T] [G] ne peuvent prétendre à aucune part dans les objets divertis ou recelés et qu'en vertu de l'article 856 du même code ils doivent les intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession de [N] [G] et subsidiairement à compter de celle de [P] [G],
- condamner Mme [B] [G] à régler à Mme [Z] [G] et à M. [M] [G] à titre de dommages et intérêts, en réparation de leur préjudice moral consécutif au recel de succession, la somme de 50 000€,
- déclarer non fondée la nouvelle demande de condamnation en dommages et intérêts de 10 000€ et la rejeter,
- condamner Mmes [B], [C] [G] et la succession de [T] [G] aux entiers dépens d'instance et d'appel que pour ceux-ci la SCP Jullien Lecharny Rol Fertier sera autorisée à recouvrer directement conformément à l'article 699 du code de procédure civile ainsi qu'à une indemnité de 5 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mmes [C] et [B] [G], aux termes de leurs conclusions signifiées le 5 octobre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs moyens, demandent à la cour de :
- déclarer M. [M] et Mme [Z] [G] irrecevables en leurs demandes à l'encontre de la succession de leur frère [T], qui n'est pas représentée dans la présente cause,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions concernant les rapports, les dommages et intérêts,
- dire n'y avoir lieu à retenir la sanction de recel à leur égard, lequel recel n'est constitué ni sur le plan matériel, ni sur le plan moral,
- dire que Mme [Z] et M. [M] [G] seront tenus de remettre au notaire chargé des opérations de liquidation, partage de tous les documents bancaires ayant appartenu à [N] et à [P] [G], à titre personnel, concernant les comptes de 1987 à 1992,
- les condamner à rapporter aux successions toutes les sommes reçues de leur mère de 1987 à 1992,
- les débouter de toutes leurs demandes déjà rejetées par le tribunal en les disant non fondés, faute d'avoir fait la preuve des faits allégués par eux, d'une part, et d'avoir refusé de faire diligenter l'expertise qui avait été ordonnée par la cour, d'autre part,
- les condamner in solidum à payer une somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts,
- les condamner in solidum à payer une somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner in solidum aux entiers dépens et autoriser la SCP Lefevre Tardy Hongre Boyeldieu, avoués, à recouvrer directement ceux la concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 octobre 2011.
MOTIFS DE L'ARRET
Considérant que l'article 1993 du code civil prévoit que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ;
Considérant que M. [M] [G] et Mme [Z] [G], soutenant que leur soeur ne justifie pas que toutes les sommes prélevées ont été utilisées dans l'intérêt de[P] [V], sollicitent qu'elle soit condamnée à rapporter à la succession de cette dernière une somme de 130 290,50 € ce, au visa de l'article 843 du code civil ;
Qu'ils demandent également le rapport par Mme [C] [G] d'une somme de
6. 860,20€ au titre de chèques dont elle a été bénéficiaire et de celle de 7.198,11 € par la succession de [T] [G] pour des chèques à son ordre et paiement de diverses factures;
Considérant qu'une lettre en date du 1er avril 2008 adressée par la banque Postale à Mme [Z] [G] démontre que [T] [G] et Mme [B] [G] étaient titulaires d'une procuration sur les trois comptes ouverts au nom de [P] [V] veuve [G] ; que Mme [B] [G] disposait également d'une procuration sur le compte ouvert au nom de sa mère dans les livres du Crédit Agricole ;
Considérant qu'il est constant qu'il incombe au bénéficiaire d'une procuration de rendre compte de l'utilisation des fonds et les juges du fond fixent souverainement après déduction des dépenses estimées pour les besoins de la défunte, le montant des retraits non justifiés ;
Considérant encore que faute de justifier de la destination des sommes retirées, l'héritier titulaire d'une procuration à qui incombe la charge de la preuve, est reconnu implicitement en avoir été le bénéficiaire ;
Sur les demandes à l'égard de Mme [B] [G]
Considérant qu'à la demande des appelants, Mme [B] [G] a procédé à une très volumineuse communication de pièces consistant en des tableaux, plusieurs cahiers sur lesquels elle a noté différents prélèvements et leur destination, des talons de chèques, des relevés de compte ainsi que beaucoup d'autres documents afférents à la période 1992 à 2003, dont l'ensemble est pratiquement inexploitable ;
Considérant que de leur côté, M. [M] [G] et Mme [Z] [G] font état de détournements de fonds dont force est de constater que les montants varient selon les écritures et réclament dans leurs dernières conclusions les sommes suivantes :
- 9.818,25 € : chèques dont elle a été directement bénéficiaire
- 37.984 € : retraits à vue de 1992 à 2003
- 98.263,14 € : avantages indirects autre que l'occupation du bien
- 19.518,43 € : chèques tirés sur les CCP et sur le CA dont la destination est inconnue
- 416,31 € : agios et frais bancaires abusifs
- 52.664,73 € : dépenses qui ont profité à [B]
dont à déduire les seules dépenses justifiées de 2 786,27 € pour finalement solliciter le rapport de la somme de 130 290,50 € qui ne correspond pas au total des montants qui précèdent ;
Considérant qu'au vu des pièces produites par les parties, l'arrêt de ce siège du 10 juin 2010 a, avant dire droit, sur la reddition des comptes et les demandes de rapport à succession, ordonné une expertise comptable laquelle était au surplus demandé par les appelants afin de déterminer les montants prélevés par Mme [B] [G] sur les comptes de la défunte au moyen de ses procurations ;
Considérant que M. [M] [G] et Mme [Z] [G] n'ont pas consigné la somme mise à leur charge de telle sorte que la désignation du technicien a été frappée de caducité ;
Considérant que l'affaire revient donc en l'état sans que les pièces aient pu être examinées par un professionnel et que des montants précis et vérifiés aient pu être fixés ;
Considérant qu'il s'ensuit que le quantum des prélèvements effectués par Mme [B] [G] ne peut résulter des tableaux récapitulatifs (pièces 92 à 99, 102, 103, 104) établis par Mme [Z] [G] c'est à dire par une partie au procès qui n'ont aucune force probante ;
Considérant que ceci étant, la Cour retient que le total des chèques débités du mois de juin 1992 au mois de juillet 2003 des comptes de [P] [V] représente une somme de 122 508,66 € ;
Considérant qu'il incombe donc à Mme [B] [G] de justifier de l'utilisation de ce montant dans l'intérêt de sa mère ;
Considérant qu'il est avéré que Mme [B] [G] a assisté sa mère de son entrée en maison de retraite en 1992 jusqu'à son décès en 2003 ; que dans son cahier intime, la défunte fait état à plusieurs reprises de la présence de sa fille [B] à ses côtés et de son dévouement et se plaint de l'abandon matériel et affectif de Monsieur [M] [G] et de Madame [Z] [G] ;
Qu'ainsi on peut notamment lire sous la plume de [P] [G], (pièce 3 annexe 3) ce qui n'est pas contesté :
'Je paie régulièrement ma pension au [Localité 17]. Fait acheter mes vêtements par ma fille [B] avec mes chèques. Celle-ci s'occupe beaucoup de moi, visites régulières, entretien du linge, cadeaux de Noel ou anniversaire.....Entretient aussi ma chambre s'il le faut' ou 'Mais ça ne donnera pas beaucoup plus à [T] et surtout à [B] qui a tant fait pour moi et pour [T]' ou encore 'règle entièrement ma pension au [Localité 17], mes vêtements sont achetés par [B] à qui j'ai donné mon carnet de chèques, elle a tous mes papiers, me fait des cadeaux, gâteaux, bonbons, fruits et autres à mon compte, m'aide énormément moralement, lave mon linge et me conduit au docteur pour ma vue' ;
Considérant ainsi que pendant 11 années, Mme [B] [G] a géré les biens de [P] [V], pourvu à ses besoins et réglé ses charges ;
Considérant que les appelants indiquent qu'en 1994, le cumul des retraites perçues par leur mère s'élevait à 6 900 francs par mois ; qu'ils déduisent d'un décompte contestable qu'ils dressent dans leurs écritures que cette pension couvrait l'intégralité des dépenses et des charges supportées par [P] [G], laissant même annuellement un solde positif ;
Mais considérant qu'il ressort de courriers et de relevés émanant du centre hospitalier général de [Localité 9] produits par Mme [B] [G] que le prix de l'hébergement de [P] [G] au [Localité 17] était supérieur à sa retraite et n'a fait qu'augmenter pour être au cours de l'année 2000 de 8 227 francs ;
Considérant qu'il est tout autant établi par les pièces communiquées, que [P] [V] avait conservé la maison familiale de [Localité 20] (Eure et Loir) de telle sorte qu'il a fallu acquitter l'ensemble des charges afférentes à ce bien notamment les impôts, les assurances, les frais de chauffage minimum, EDF et d'entretien ;
Considérant encore que, contrairement aux allégations des appelants qui contestent le dépenses personnelles de leur mère au motif que cette dernière aurait perdu la vue entre 1995 et 1996 et serait devenue grabataire à compter de 2000, allégations démenties par les éléments du dossier, Mme [B] [G] a satisfait aux besoins de sa mère liés à un état de santé ayant nécessité plusieurs interventions et hospitalisations ainsi que divers soins ou frais divers (kinésithérapie, pharmacie, lunettes .........) ; qu'il faut ajouter les dépenses courantes d'hygiène, produits de toilette, de vêtements, coiffeur et autres achats exposés dans la vie quotidienne ainsi que l'argent de poche ;
Considérant enfin, que la défunte était parfaitement en droit de faire des présents d'usage et cadeaux qui ne sont pas rapportables ;
Considérant que les affirmations des appelants aux termes desquelles la défunte aurait participé à l'achat fait par Mme [B] [G] en 1990 d'un appartement à [Localité 9] et à l'installation de cette dernière, ne sont pas étayées par des pièces probantes et ne reposent que sur des déductions ;
Considérant que l'indemnité versée par le de cujus en rémunération de l'aide et de l'assistance apportées par l'un de ses enfants, n'est pas rapportable dès lors que cette assistance a excédé les exigences de la piété filiale ; qu'en raison des soins portés à sa mère, du temps consacré pendant 11 ans à faire face à l'ensemble de ses besoins et tenter de lui améliorer et adoucir sa fin de vie, la somme de 1 500 francs (230 €) par mois prélevée par Mme [B] [G] avec l'autorisation du notaire à titre de rétribution est parfaitement justifiée, soit un total de 30.360€ (230€ x 12 x11) ;
Considérant qu'en tenant compte des ressources de la défunte à savoir des retraites de [P] [V], des loyers perçus durant une période de Noel [G] et de ses dépenses, la cour dispose des éléments d'appréciation lui permettant de retenir que Mme [B] [G] prélevait chaque mois sur les comptes de sa mère une somme de 400 € pour régler l'ensemble des charges de cette dernière, soit sur 11 années, un total des dépenses justifiées de 52 800 € ;
Considérant que Mme [B] [G] ayant prélevé une somme totale de 122 508€ dont il convient de déduire celles de 52 800 € et 30 360 €, elle doit rapporter à la succession de sa mère un montant arrondi de 25 548 € à laquelle doit être ajoutée une somme de 8 780€ au titre des chèques dont elle a été la bénéficiaire, soit 39 348 € arrondis à 40 000 € ;
Considérant que M. [M] [G] et Mme [Z] [G] demandent aussi le rapport d'une somme de 37 984 € représentant la totalité des retraits à vue que leur soeur aurait effectués sur les comptes de leur mère (tableau récapitulatif pièce 81) estimant qu'il s'agit de dons déguisés ;
Considérant que Mme [B] [G] conteste ces affirmations et explique qu'il s'agit en fait de retraits et de versements de compte à compte ou virements de compte à compte c'est à dire en fait de mouvements de fonds ;
Considérant que faute de rapporter la preuve de ce qu'il s'agit de sommes données par [P] [V] à sa fille [B], la demande de rapport des appelants de ce chef sera rejetée ;
Sur les demandes formées à l'égard de la succession de [T] [G]
Considérant que l'arrêt du 10 juin 2010 a statué sur la recevabilité des demandes formées à l'encontre de la succession de [T] [G] en rejetant la fin de recevoir soulevée;
Considérant qu'au vu des pièces du dossier, seule la somme de 5 000 francs ou 762,25 € correspond à un chèque, le surplus n'étant pas suffisamment établi selon le tableau récapitulatif rédigé par les appelants (pièce 79) ;
Sur les demandes formées à l'égard de [C] [G]
Considérant que la somme sollicitée de 6 860,20 € n'est pas justifiée au vu de la pièce 19 qui est visée par les appelants ; qu'il sera fait droit à la demande de rapport à hauteur de 3 811,23 € ;
Considérant que lesdites sommes (40.000€ , 762,25€ et 3811,23€) devront être rapportées avec intérêts au taux légal à compter de la date d'ouverture de la succession de [P] [V] veuve [G] ;
Sur le recel
Considérant que Mme [B] [G] dénie les accusations de recel dont elle fait l'objet de la part des appelants qui font valoir que cette dernière a fait preuve de réticences successives qui attestent de sa volonté de dissimuler les sommes perçues dans le but de rompre l'égalité du partage ;
Mais considérant qu'il est démontré que devant le notaire, Mme [B] [G] n'a pas déclaré être titulaire de procurations sur les comptes de sa mère ; que devant tribunal, dans ses conclusions datées du 4 mars 2008 elle a indiqué 'qu'il est faux de prétendre qu'elle-même et [T] disposaient d'une procuration sur les comptes et qu'à partir de 1998, elle a signé tous les chèques sur les comptes de [P] [V]' ;
Considérant que ce n'est que devant la Cour et après la lettre de la banque Postale du 1er avril 2008 qu'elle a admis avoir bénéficié de procurations ;
Considérant que la réticence de Mme [B] [G] à déclarer l'existence de procurations caractérise sa volonté de dissimuler et de rompre l'égalité du partage de sorte que l'élément matériel du recel et l'élément intentionnel sont bien réunis au sens de l'article 792 ancien du code civil applicable ;
Considérant qu'il importe peu que le recel ait été l'oeuvre du défunt ou ait été commis avec sa complicité d'autant qu'en l'espèce, [P] [G] était usufruitière des fonds de la succession de [N] [G] et devait donc les restituer à son décès ;
Considérant qu'il y a donc lieu de dire que Mme [B] [G] ne pourra prétendre à aucune part dans la somme recelée soit 40 000 € ;
Considérant que les faits de recel ne sont pas démontrés à l'égard de [T] [G] et de [C] [G] ; que M. [M] [G] et Mme [Z] [G] seront déboutés de leur demande ;
Considérant que Mme [B] [G] demande que [Z] et [M] [G] soient tenus de remettre du notaire tous les documents bancaires ayant appartenu à [N] et à [P] [G], à titre personnel, concernant les comptes de 1987 à 1992 et de les condamner à rapporter aux successions toutes les sommes reçues de leur mère durant cette période ;
Mais considérant que cette demande ne peut prospérer ; que Mme [B] [G] ne fait plus état d'une procuration de Mme [Z] [G] sur les comptes ou de M. [M] [G] ; qu'aucun élément ne permet de retenir l'existence de dons qu'aurait fait la défunte à cette époque au profit de ses deux enfants de sorte qu'il n'y a pas lieu à renvoi devant le notaire de ce chef ;
Considérant que les appelants reprennent leur demande de dommages et intérêts, cette fois pour préjudice moral lié au recel ;
Mais considérant qu'il n'est véritablement justifié eu égard au contexte familial de l'existence d'un préjudice moral subi par M. [M] [G] et Mme [Z] [G] ;
Qu'ils seront déboutés de leur prétention ;
Considérant qu'il en sera de même de la demande faite par Mme [B] [G] qui sollicite l'allocation d'une somme indemnitaire de 10 000 € en réparation de son préjudice en raison de l'issue du litige ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Après l'arrêt avant dire droit du 10 juin 2010, sur les demandes de rapports à succession, de recel et de dommages et intérêts,
Confirme le jugement du 9 juillet 2008 en ce qu'il a dit que seront rapportées à la succession la somme de 3 811,23 € par Mme [C] [G] et celle de 762,25 € par la succession de [T] [G], débouté M. [M] [G] et Mme [Z] [G] de leur demande tendant à voir prononcer les sanctions du recel contre Mme [C] [G] et la succession de [T] [G] ainsi que de leur demande de dommages et intérêts.
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Dit que Mme [B] [G] devra rapporter aux successions de [N] et [P] [G] la somme de 40 000 € avec intérêts au taux légal à compter de l'ouverture de la succession de [P] [V] veuve [G].
Dit que Mme [B] [G] s'est rendue coupable de recel.
Dit que Mme [B] [G] ne pourra prétendre à aucune part dans la somme recélée de 40 000 €.
Dit que les intérêts sur les sommes devant être rapportées par Mme [C] [G] et par la succession de [T] [G] courront à compter de l'ouverture de la succession de [P] [V] veuve [G].
Déboute Mme [B] [G] de sa demande de reddition des comptes formée contre M. [M] [G] et Mme [Z] [G].
Déboute Mme [B] [G] de sa demande de dommages et intérêts.
Rejette le surplus des demandes.
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage et dit que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par les avoués de la cause pouvant y prétendre conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne LOUYS, conseiller faisant fonction de président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,