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30/11/2011 | FRANCE | N°06/01116

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 novembre 2011, 06/01116


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES



Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 30 NOVEMBRE 2011

R. G. No 10/ 03416

AFFAIRE :

S. A. VINCI



C/
Eliane X...




Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 31 Mai 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de NANTERRE
Section : Activités diverses
No RG : 06/ 01116



Copies exécutoires délivrées à :

Me Pascal ANQUEZ
Me Marie Sophie ROZENBERG



Copies certifi

ées conformes délivrées à :

S. A. VINCI

Eliane X...




LE TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S. A. VINC...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 30 NOVEMBRE 2011

R. G. No 10/ 03416

AFFAIRE :

S. A. VINCI

C/
Eliane X...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 31 Mai 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de NANTERRE
Section : Activités diverses
No RG : 06/ 01116

Copies exécutoires délivrées à :

Me Pascal ANQUEZ
Me Marie Sophie ROZENBERG

Copies certifiées conformes délivrées à :

S. A. VINCI

Eliane X...

LE TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S. A. VINCI
1 Cours Ferdinand De Lesseps
92850 RUEIL MALMAISON

représentée par Me Pascal ANQUEZ, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE
****************
Madame Eliane X...

...

78430 LOUVECIENNES

comparant en personne, assistée de Me Marie Sophie ROZENBERG, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE
****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 17 Octobre 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :

Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Présidente,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Monsieur Hubert DE BECDELIÈVRE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE

Mme Eliane X... a été engagée par la société GTM en qualité de secrétaire sténodactylo bilingue, le 1er août 1971.

Son contrat de travail a été repris par la société Vinci au mois de juillet 2000.
Les dernières fonctions exercées par Mme X... étaient celles de secrétaire de direction au sein du service juridique avec une rémunération de 37 506 euros par an.

Le 2 février 2006, Mme X... a été licenciée pour faute grave et le 10 février 2006, était signée une transaction entre les parties aux termes de laquelle Mme X... recevait une indemnité de 56 000 euros

Le 24 avril 2006, Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de demander que soit annulée la transaction signée le 10 février 2006 et que le licenciement soit considéré comme dénué de cause réelle et sérieuse.

Elle réclamait des rappels de salaire, les indemnités afférentes à son licenciement et des dommages-intérêts pour préjudice moral et pour manque à gagner sur le plan Epargne Entreprise.

Par jugement en date du 31 mai 2010, le conseil de prud'hommes de Nanterre section Commerce a :

annulé la transaction intervenue entre la société VINCI et Madame Eliane X..., pour absence de concessions mutuelles, comme le dispose l'article 2044 du Code civil ;

ordonné la remise des parties en l'état où elles se trouvaient avant la transaction ;

dit que la somme déjà perçue au titre de la transaction viendrait en déduction des sommes allouées à la demanderesse ;

fixé le salaire moyen mensuel de Madame Eliane X... à 2 820 euro (deux mille huit cent vingt euro) ;

condamné la société VINCI à verser à Madame Eliane X... :

-8 460 euro (huit mille quatre cent soixante euro) à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

-846 euro (huit cent quarante six euro) à titre des congés payés afférents ;

-24 337 euro (vingt quatre mille trois cent trente sept euro) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

-50 000 euro (cinquante mille euro) à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-12 500 euro (douze mille cinq cents euro) à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi ;

-39 690 euro (trente neuf mille six cent quatre vingt dix euro) à titre de rappel de salaire prime de langue ;

-3 969 euro (trois mille neuf cent soixante neuf euros) à titre des congés payés afférents ;

-20 700 euro (vingt mille sept cents euro) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manque à gagner au titre du plan d'épargne entreprise ;

-2 000 euro (deux mille euro) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

dit que ces sommes porteraient intérêts au taux légal à compter de :

- la date de la saisine du Conseil pour les salaires,
- la date de la mise à disposition du jugement pour les sommes à caractère indemnitaire ;

condamné la société VINCI à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Madame Eliane X... dans la limite de six mois, conformément à l'article L. 1235-4 du Code du travail ;

ordonné la transmission d'une copie du présent jugement aux organismes intéressés conformément à l'article R. 1235-2 du Code du travail ;

La société Vinci a régulièrement relevé appel du jugement.

Par conclusions déposées le 17 octobre 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, elle soutient que la transaction signée entre elle même et Mme X... était valable et elle en déduit que Mme X... doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Par conclusions déposées le 17 octobre 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Mme X... demande confirmation du jugement en son principe mais forme appel incident sur le montant des sommes allouées au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour réparation du préjudice subi pour manque à gagner.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la validité de la transaction

Pour considérer que la transaction signée entre la société Vinci et Mme X... devait être annulée, le premier juge a estimé que la faute grave retenue contre la salariée pour la licencier ne pouvait être établie, que la transaction devait être annulée pour défaut de concessions réciproques et que dès lors, le licenciement devait être considéré comme abusif.

La société Vinci au soutien de son appel, estime que le premier juge n'a pas motivé sa décision.

Elle fait valoir que la transaction a été régulièrement signée après la notification du licenciement, soit le 20 février 2006, les arguments de Mme X... pour établir qu'elle aurait été signée antérieurement n'étant pas probants ; elle soutient ensuite que le consentement de Mme X... a été donné en totale liberté, la preuve d'un éventuel dol ou de violence étant à la charge de la salariée.

Elle estime qu'il y a bien eu des concessions réciproques, dans la mesure où la salariée avait adressé plusieurs courriers pour négocier le montant de l'indemnité transactionnelle. Enfin, elle fait valoir que le contrôle que peut exercer le juge sur l'existence de concessions réciproques ne peut porter que sur la présentation des faits résultant de la lettre de licenciement.

Elle indique que la mention de licenciement pour faute grave et le versement d'une indemnité qui est égale à 21 mois de salaire et le fait que Mme X... s'engageait à ne pas saisir la juridiction suffit à caractériser l'existence
de concessions réciproques.

Mme X... de son côté, soutient qu'à partir de l'année 2005 la société Vinci a tout mis en oeuvre pour organiser son départ.

Après plusieurs entretiens au cours desquels la société a mis en oeuvre une procédure de licenciement pour faute grave, avec un entretien préalable le 30 janvier, l'envoi d'une lettre de licenciement datée du 2 février, postée le 6 et présentée le 7, elle a signé une transaction le 10 février qui a été datée du 20 février.

Elle estime que cette transaction a été signée de manière précipitée et sous la pression. Elle produit plusieurs attestations qui confirment la volonté déterminée de la société Vinci de la faire partir et la réalité de la signature de la transaction dès le 10 février.

Enfin, elle fait valoir qu'il n'y a pas de concessions réciproques puisque la faute grave n'est nullement établie. La somme versée par la société Vinci est inférieure à l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement et l'indemnité minimale de six mois de salaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La transaction datée du 20 février 2006, reprend le contenu de la lettre de licenciement adressée à Mme X... et explique la situation de chacune des parties, la société soutenant que la salariée avait commis des fautes graves et Mme X... contestant ces reproches et soutenant que la rupture brutale de son contrat lui causait un grave préjudice.

Il était prévu une indemnité forfaitaire et transactionnelle de 58 000 euros nette destinée à réparer le préjudice moral subi par Mme X... du fait de son licenciement.

Cette dernière s'engageait à ne formuler aucune demande contre son employeur et les parties convenaient entre elles de respecter une obligation de discrétion absolue ;

Enfin, Mme X... reconnaissait que les dispositions ci dessus avaient été arrêtées à la suite de discussions amiables survenues postérieurement à la notification de la rupture du contrat de travail.

Sur la date exacte de la signature de la transaction, il est constant que le licenciement a été prononcé par un courrier en date du 6 février 2006 et reçue par Mme X... le 7 février.

La transaction est datée du 20 février et Mme X... soutient qu'elle a été signée en réalité le 10 février.

Pour tenter de le démontrer, elle produit trois courriers adressés en recommandé par ses soins en date du 10 février contenant une attestation de sa part dans laquelle elle dit avoir signé ce jour là une transaction dont elle donne les grands traites. Elle rappelle les dates de réunions de préparation de cette transaction qui se situent toutes avant le licenciement.

Elle produit également un compte rendu d'une réunion signée de M. B..., en date du 8 février dans laquelle était finalisée la transaction et une attestation de M. B... qui confirme l'existence de nombreuses discussions avant le 30 janvier 2006 et qui précise la signature de la transaction le 10 février 2011.

La société Vinci critique le contenu de l'attestation émise par Mme X... le 10 février 2006, dans laquelle elle ne mentionne pas le montant de l'indemnité ainsi que la fiabilité de l'attestation produite par M. B... en 2008.
Pour démontrer que la transaction a bien été signée le 20 février 2008, elle ne produit que l'attestation de M. C... qui en sa qualité de directeur des ressources humaines avait signé la transaction litigieuse et qui depuis est devenu directeur général adjoint.

Il sera donc retenu que Mme X... démontre que la transaction a bien été en réalité signée le 10 février 2006 et les réunions de préparation de cet accord se sont déroulées alors que la salariée était toujours sous un lien de subordination, ce qui est d'ailleurs conforté par un courriel produit par la société Vinci émanant de Mme X... en date du 2 février sur cette même transaction.

Enfin, une attestation émanant de M. De D... témoigne des pressions exercées contre la salariée pour aboutir à la signature de cette transaction.

Il ressort de ces éléments que la transaction, si elle a été signée après la notification du licenciement a été précédée de contacts et de réunions qui ont eu lieu pendant le contrat de travail et M. B... et M. De D... confirment que Mme X... a été l'objet de pressions pour partir dans ce contexte et signer cette transaction seulement trois jours après la notification du licenciement.

Enfin, sur l'existence de concessions réciproques, le licenciement était prononcé pour faute grave et le contenu de la lettre de licenciement qui est insérée dans la transaction, soit une insuffisance professionnelle chez une salariée ayant 35 ans d'ancienneté et qui avait fait une carrière professionnelle irréprochable et une insubordination constatée dans les quelques jours précédant la convocation à l'entretien préalable au licenciement permet à lui seul de constater que ce licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse. La société en lui allouant une indemnité forfaitaire de 58 000 euros qui est donc inférieure au montant cumulé de l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement et l'indemnité minimale de six mois pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans prendre en compte les rappels de salaire dus à Mme X... n'a en réalité fait aucune concession.

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, c'est avec raison que le premier juge a déclaré nulle la transaction intervenue entre la société Vinci et Mme X... et a considéré comme recevables, les demandes qu'elle formulait.

Sur les sommes allouées, la société Vinci n'a pas développé de critiques particulières en cause d'appel.

Les dispositions du jugement ayant ordonné la restitution de l'indemnité transactionnelle par compensation avec les sommes allouées en vertu de sa décision, fixé l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement, le rappel de salaire pour prime de langue, les congés payés afférents et les dommages-intérêts pour réparation du préjudice subi du fait du manque à gagner au titre du PEE seront confirmées.

Mme X... fait appel incident sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'elle souhaite voir élever à la somme de 75 000 euros.

En raison de son ancienneté, des circonstances de la rupture de son contrat de travail, intervenue à 57 ans, des répercussions que ce licenciement a eu tant sur sa situation financière que sur sa situation personnelle, la cour a les éléments pour fixer à 65 000 euros l'indemnité due de ce chef, réformant la décision déférée sur ce point.

En revanche, en estimant à 12 500 euros les dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice moral subi par Mme X..., le premier juge a fait une exacte appréciation des éléments de fait et de droit qui lui étaient soumis.

Il ya lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise des documents rectifiés tant au titre des salaires que des modalités de rupture sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette obligation d'une astreinte.

La demande de capitalisation des intérêts échus sur les condamnations prononcées est de droit, pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; Il sera donc fait droit à la demande de Mme X... sur ce point.

L'équité commande d'allouer à Mme X... l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS
LA COUR

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions sauf à élever à la somme de 65 000 euros l'indemnité due pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Dit n'y avoir lieu à astreinte pour assurer la remise des documents de rupture et des bulletins de paie modifiés

Dit que les intérêts dus seront capitalisés selon les dispositions de l'article 1154 du code civil.

Condamne la société Vinci à verser à Mme X... une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 000 euros.

La condamne aux dépens.

Statuant, par arrêt CONTRADICTOIRE,

Arrêt-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Présidente et par, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, La PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 06/01116
Date de la décision : 30/11/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-30;06.01116 ?
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