COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 26 OCTOBRE 2011
R. G. No 10/ 02822
AFFAIRE :
Kamel A...
C/
S. A. S. COMPAGNIE EUROPEENNE D'ACCUMULATEURS C. E. A. C EXIDE TECHNOLOGIES
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 10 Mars 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de NANTERRE
Section : Encadrement
No RG : 08/ 02326
Copies exécutoires délivrées à :
Me Sabrina GENEBRIER
Me Nicolas CAPILLON
Copies certifiées conformes délivrées à :
Kamel A...
S. A. S. COMPAGNIE EUROPEENNE D'ACCUMULATEURS C. E. A. C EXIDE TECHNOLOGIES
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX OCTOBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Kamel A...
né le 21 Août 1975 à BLIDA (ALGERIE)
...
75013 PARIS
comparant en personne,
assisté de Me Sabrina GENEBRIER, avocat au barreau de PARIS
APPELANT
****************
S. A. S. COMPAGNIE EUROPEENNE D'ACCUMULATEURS C. E. A. C EXIDE TECHNOLOGIES
...
92636 GENNEVILLIERS
représentée par Me Nicolas CAPILLON, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 19 Septembre 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :
Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Présidente,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Monsieur Hubert DE BECDELIÈVRE, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
Monsieur Kamel A...a été engagé comme auditeur interne senior le 5 mars 2007 par la Société EXIDE TECHNOLOGIES CEAC qui a pour activité la fabrication des accumulateurs et des batteries, lors du licenciement elle employait plus de 11 salariés ;
La convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;
Monsieur
A...
a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettre du 6 février 2008 ; contestant ce licenciement, il a saisi le Conseil de Prud'hommes de Nanterre le 23 juillet 2008 pour demander une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et un rappel de prime.
Par jugement en date du 10 mars 2010, le conseil de prud'hommes de Nanterre a dit le licenciement de monsieur Kamel A...fondé sur des causes réelles et sérieuses,
Il a fixé le salaire moyen mensuel à 4 584 euros,
Il a dit que la prime d'objectifs était due, et il a condamné la SAS COMPAGNIE EUROPÉENNE D'ACCUMULATEURS (CEAC) EXIDE TECHNOLOGIES à payer à monsieur Kamel A...au titre de :
- la prime d'objectifs : 5 500, 00 euros (cinq mille cinq cent euros),
- l'article 700 du Code de procédure civile : 1 000 euros (mille euros),
M
A...
a régulièrement relevé appel de la décision.
Par conclusions déposées le 19 septembre 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, il demande la réformation du jugement, le licenciement devant être considéré comme dénué de cause réelle et sérieuse et il réclame une somme de 24 000 euros de ce chef.
Il demande également que la prime annuelle soit fixée à 11 000 euros et enfin, Il sollicite une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 19 septembre 2011, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la Société demande confirmation du jugement en ce qu'il a considéré le licenciement comme fondé sur une cause réelle et sérieuse et elle forme appel incident pour que M.
A...
soit débouté de sa demande de prime.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement
La lettre de licenciement adressée le 6 février 2008 à M
A...
dont les termes fixent les limites du litige est longuement motivée et fait état d'une insuffisance professionnelle.
L'employeur s'est fondé essentiellement sur les résultats d'une revue de dossiers en date du 10 janvier 2008 qui confirmait les constatations faites lors d'un compte rendu d'évaluation du 13 décembre 2007.
Etaient ensuite listés sept points de faiblesse dans les prestations de travail de M
A...
et il était indiqué qu'il ne délèguait pas suffisamment de responsabilités à ses collaborateurs.
Pour retenir que le licenciement était justifié le premier juge a relevé que les points retenus se fondaient sur l'entretien du mois de décembre 2007 et les explications données par M
A...
ne pouvaient être considérées comme suffisantes, émanant d'un auditeur sénior.
Pour critiquer le jugement, M
A...
rappelle que l'insuffisance professionnelle doit être établie par des faits objectifs et que l'employeur ne peut se fournir de preuve à lui même. Il s'est expliqué en détail sur l'ensemble des points retenus par la lettre de licenciement.
Il fait état également de divers incidents désagréables au moment de son licenciement,
L'insuffisance professionnelle peut constituer un motif de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.
En l'espèce il sera rappelé que M
A...
avait été engagé le 5 mars 2007 et qu'il avait eu une période d'essai de trois mois renouvelée une fois au bout de laquelle il avait été confirmé danss es fonctions.
Cette période d'essai a donc pris fin au mois de septembre 2007.
La lecture de la lettre de licenciement permet de retenir que l'employeur a situé les premiers éléments de l'insuffisance professionnelle constatée chez M
A...
lors d'un entretien d'évaluation en date du 13 décembre, soit à peine trois mois après la fin de la période d'essai.
Le compte rendu du 13 décembre contient une liste de compétences qui s'équilibrent entre celles qui sont au niveau des attentes, 10 et celles qui sont au dessous des attentes, 12. Sur les différents points abordés, si M
A...
reconnaît la réalité de quelques reproches notamment dans la présentation des documents ou dans l'envoi des rapports, il fait valoir sur l'ensemble des autres points présentés comme insuffisants, des arguments solides pour contester les allégations de l'employeur.
Il est également rappelé à plusieurs reprises dans l'évaluation, des erreurs ou des manquements antérieurs à la fin de la période d'essai.
Les sept points reprochés dans la lettre de licenciement ainsi que le grief tiré du manque de délégation sont repris exactement à partir d'une sorte de rapport de son supérieur hiérarchique, M X...qui a pris connaissance de l'ensemble des dossiers de M
A...
le 11 janvier 2008.
En dehors de ces deux documents, la seule attestation produite par un autre salarié M B..., indique qu'une erreur aurait été commise lors de l'évaluation d'un ensemble immobilier à Nanterre mais aucun élément ne permet de démontrer que cette erreur soit imputable à M
A...
.
La lettre de licenciement ne repose donc que sur des documents établis par le supérieur hiérarchique de M
A...
, M. X....
Ces éléments ne peuvent à eux seuls, établir l'existence de faits précis et objectifs notamment, l'employeur ne produit aucun document extérieur pour démontrer la réalité des insuffisances de M
A...
.
En outre, il ressort d'un courriel de M X... en date du 10 janvier 2008 que la liste des points qui ont été intégrés in extenso dans la lettre de licenciement était adressée à M
A...
et que M X... se réserve d'en discuter avec l'intéressé.
Cette situation ne permettait donc pas d'anticiper la mise en oeuvre d'un licenciement sur les mêmes motifs.
Le doute devant profiter au salarié, c'est à tort que le premier juge a estimé que le licenciement de M
A...
était fondé et le jugement sera réformé, l'insuffisance professionnelle du salarié n'étant pas démontrée.
En raison de l'ancienneté du salarié, et des circonstances de la rupture, la Cour dispose des éléments suffisants pour évaluer à 15 000 euros, les dommages intérêts dus à M
A...
de ce chef.
Sur la prime annuelle
Le contrat de travail du 16 février 2007 contenait une clause ainsi rédigée :
« vous bénéficierez en outre d'un montant variable de prime lié à la réalisation d'objectifs individuels ou collectifs précisés par note annuelle... le montant pouvant atteindre 10 % de votre rémunération annuelle brute si les objectifs sont atteints »,
Les termes du contrat ne permettent pas de considérer que le paiement de cette prime implique la présence du salarié dans l'entreprise au moment de son paiement.
Par un courrier en date du 25 octobre 2007, il était indiqué aux salariés qu'ils pourraient bénéficier d'une prime de 10 % sur les résultats de l'année fiscale en cours.
La Société ne conteste pas que les salariés de l'entreprise pouaient percevoir cette prime mais elle soutient que le versement ne pouvait être fait qu'aux salariés présents dans l'entreprise au moment du versement.
Il ressort des pièces du dossier que la prime est calculée sur un exercice fiscal du 1er avril au 31 mars. Sur la période 2007, 2008, les salariés ont eu droit à une prime sur la période du 1er avril 2007 au 31 mars 2008. Cette période correspond au temps de présence de M.
A...
dans l'entreprise, le temps du préavis devant être pris en compte, même si ce préavis n'a pas été exécuté.
Elle doit donc être versée à M.
A...
, l'argument de l'employeur qui soutient que la prime ne doit être versée qu'aux salariés présents dans l'entreprise au moment du versement ne pouvant être retenu.
D'une part, cet élément ne figure pas dans le contrat et les termes de la lettre adressés aux salariés qui font état de la nécessité de la présence du salarié au moment du paiement, n'ont pas valeur contractuelle. En outre, la date du paiement étant à la seule diligence de l'employeur, est inopposable au salarié, faute d'éléments précis dans le contrat de travail.
Il sera retenu que M.
A...
a bien été dans l'entreprise sur l'ensemble de la période fiscale ayant donné droit au bonus et il doit donc recevoir cette prime.
Sur son montant, le premier juge a avec raison retenu la somme de 5 500 euros soit 10 % de sa rémunération, les éléments produits par M.
A...
au soutien d'un calcul de 20 % n'étant pas suffisants pour étayer sa demande.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
L'équité commande d'allouer à M.
A...
une indemnité de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 200 euros.
PAR CES MOTIFS
La COUR
Confirme partiellement le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Société Compagnie Européenne d'Accumulateurs Exide Technologies à verser à M.
A...
une prime de 5 500 euros et une indemnité de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 000 euros.
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau, condamne la Société Compagnie Européenne d'Accumulateurs Exide Technologies à verser à M.
A...
une indemnité de 15 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Y ajoutant,
Condamne la Société à une indemnité de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 1 200 euros.
Dit que les dépens de la procédure d'appel seront à la charge de la Société Compagnie Européenne d'Accumulateurs Exide Technologies.
Arrêt-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule DESCARD-MAZABRAUD, Présidente et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,