COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70D
1ère chambre 1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 29 SEPTEMBRE 2011
R.G. N° 10/01492
AFFAIRE :
[O] [A] [D]
...
C/
[N] [R]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Décembre 2009 par le Tribunal d'Instance de NOGENT LE ROTROU
N° chambre :
N° Section :
N° RG : 11-07-174
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
SCP GAS,
SCP PEDROLETTI
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [O] [A] [D]
né le [Date naissance 9] 1955 à [Localité 15]
[Adresse 10]
[Localité 14]
représenté par la SCP GAS - N° du dossier 20100160
Rep/assistant : Me Yvan BARTHOMEUF (avocat au barreau de PARIS)
Madame [M] [G] [U] [I] épouse [D]
née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 18]
[Adresse 10]
[Localité 14]
représentée par la SCP GAS - N° du dossier 20100160
Rep/assistant : Me BARTHOMEUF (avocat au barreau de PARIS)
APPELANTS
****************
Monsieur [N] [W] [R]
né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 19]
[Adresse 17]
[Localité 8]
représenté par SCP Melina PEDROLETTI - N° du dossier 00020023
Rep/assistant : Me Virginie GATINEAU (avocat au barreau de CHARTRES)
INTIME
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue en chambre du conseil le 30 Juin 2011,, Madame Bernadette WALLON, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Bernadette WALLON, Président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
M. et Mme [D] sont propriétaires d'une maison à usage de résidence secondaire sise commune de [Localité 8] (Eure et Loir) lieudit '[Adresse 17]' cadastrée section A n° [Cadastre 12], B n° [Cadastre 3]-[Cadastre 6] & [Cadastre 7], suivant acte reçu par maître [T], notaire, le 20 novembre 2000.
Cette propriété comporte un étang qui borde au sud-ouest la propriété acquise par M. [N] [R] par acte notarié en date du 20 décembre 2001, cadastrée section A N° [Cadastre 11] et [Cadastre 13].
Les parcelles n° [Cadastre 12] et [Cadastre 13] appartenaient à l'origine indivisément à M. [P] et à Mme [H], lesquels réalisant à cette occasion la division de leur propriété, ont vendu les 12 et 13 juin 1981 aux époux [J] (époux [D]) la parcelle [Cadastre 12] et ont conservé la parcelle [Cadastre 13] qui sera ultérieurement cédée à M. [R].
Les propriétés n'étant pas bornées, M. et Mme [D] ont saisi un géomètre expert aux fins de bornage amiable.
Faute d'accord entre les parties sur la limite séparative des deux fonds, M. et Mme [D] ont saisi au visa de l'article 646 du code civil, le tribunal d'instance de Nogent le Rotrou, qui, par jugement en date du 25 janvier 2008 a désigné M. [K] en qualité d'expert.
Le rapport a été déposé par le technicien le 31 janvier 2009.
Parallèlement, M. [N] [R] s'étant plaint de fuites d'eau provenant de l'étang des époux [D], les a assignés en référé aux fins de désignation d'un expert judiciaire pour examiner les désordres, en déterminer les causes et préconiser les travaux nécessaires pour remèdier aux fuites constatées. Un rapport en l'état a été déposé le 29 mai 2009.
Par jugement en date du 28 décembre 2009, le tribunal d'instance de Nogent le Rotrou a:
- fixé la limite divisoire entre les parcelles cadastrées A [Cadastre 12] et B [Cadastre 4] appartenant à M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] et les parcelles cadastrées A [Cadastre 11] et A [Cadastre 13] appartenant à M. [N] [R] suivant la ligne brisée violette A-Ae tracée sur le plan au 1/200e figurant en annexe du rapport d'expertise judiciaire de M. [K],
- dit que le vannage répertorié sur ce plan par les points Ab, Ac et Ad est la propriété de M. [N] [R] et doit être compris dans ses parcelles,
- dit qu'une copie du plan susvisé restera annexé au présent jugement,
- ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques territorialement compétente,
- dit n'y avoir lieu à l'implantation des bornes,
- débouté M. [N] [R] de sa demande de dommages et intérêts,
- condamné in solidum M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] à payer à M. [N] [R] la somme 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] aux entiers dépens de l'instance, lesquels comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire et de publication du jugement à la conservation des hypothèques
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Appelants, M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D], aux termes de leurs conclusions signifiées le 7 juin 2011 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs moyens, demandent à la cour de :
- les dire recevables et bien fondés en leur appel,
- infirmer le jugement entrepris,
- fixer la limite divisoire entre les parcelles cadastrées A [Cadastre 12] et B [Cadastre 4] appartenant à M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] et les parcelles cadastrées A [Cadastre 11] et A [Cadastre 13] appartenant à M. [N] [R] suivant la ligne brisée violette A-Ae tracée sur le plan au 1/200e figurant en annexe du rapport d'expertise judiciaire,
- dire que le vannage figurant sur ledit plan est situé sur leur propriété,
- dire que figurant au cadastre sous les parcelles n°A [Cadastre 12], B [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] lieudit '[Localité 16]' sur la commune de [Localité 8] (28), ils bénéficient d'une servitude de vannage par destination du père de famille selon les articles 692 et suivants du code civil sur le fonds de M. [N] [R] figurant au cadastre sous les parcelles n°A [Cadastre 11] et A [Cadastre 13],
- ordonner la pose de bornes sur la limite séparative de parcelles sus désignées telle que déterminée par M. [K] aux frais de M. [N] [R] par les soins de l'expert ou de tout autre géomètre expert qui dressera le procès verbal déposé au greffe de la cour,
- dire M. [N] [R] irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter,
- condamner M. [N] [R] à leur payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel qui comprendront la totalité des frais et honoraires d'expertise judiciaire et de bornage et qui pourront être recouvrés par la SCP Gas, au titre de l'article 699 du code de procédure civile.
M. [N] [R], aux termes de ses conclusions signifiées le 20 mai 2011 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens, demande à la cour de :
- déclarer M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] irrecevables et mal fondés en leur appel,
- les en débouter,
A titre principal, confirmer le jugement entrepris,
- condamner les époux [D] à assumer les frais de bornage
-ordonner aux époux [D] de laisser passer dans le ruisseau l'Arcisse 50% de son débit normal d'étiage en cas d'attribution des vannes à leur profit,
- condamner M. [O] [D] et Mme [M] [I] épouse [D] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les frais de publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques,
- les condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Boiteau Pedroletti au titre de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 juin 2011.
MOTIFS DE L'ARRET
Considérant qu'en se fondant sur le rapport d'expertise, le tribunal a fixé la limite séparative des deux fonds selon une ligne brisée de couleur violette lettrée de A à Ae correspondant à la berge de l'étang ce qu'aucune des parties ne discutent ;
Que de ce chef, le jugement entrepris sera donc confirmé ;
Considérant que le litige persiste sur la propriété du vannage situé dans le lit de la rivière l'Arcisse, matérialisé sur le plan de M. [K] par les points Ab, Ac et Ad que l'expert a attribué aux époux [D] au motif que 'cela correspondait aux actes et à la propriété de l'étang' ;
Considérant que les époux [D] font valoir que la pièce d'eau leur appartient et qu'ils disposent seuls du droit d'eau ; que le vannage est l'accessoire de l'étang crée artificiellement par l'homme pour alimenter un moulin '[Localité 16]'; qu'ils en ont acquis et les propriétaires précédents la propriété par prescription acquisitive de bonne foi et par justes titres, la rivière l'Arcisse n'étant pas une rivière domaniale appartenant au domaine public ;
Considérant que M. [N] [R] réplique que le vannage est situé sur sa propriété et n'est manoeuvrable qu'à partir de chez lui ; qu'il conteste l'affirmation des appelants selon laquelle le vannage est l'accessoire nécessaire de l'étang et affirme que le rôle du vannage est avant tout de réguler le niveau de la rivière l'Arcisse ; que l'utilisation des vannes n'aurait pas été nécessaire si les époux [D] avaient entretenu les ouvrages hydrauliques de l'étang qui ne fonctionnent plus depuis plusieurs années ; qu'il ajoute que la prescription acquisitive est de bonne foi et par juste titre ne peut recevoir application, aucun acte ne précisant la propriété des vannes;
Considérant qu'il résulte des éléments du dossier que l'acte de vente des 12 et 13 juin 1981 portant division de la propriété appartenant aux consorts [P]-[H] et vente de la parcelle n° [Cadastre 12] au profit des auteurs des époux [D] comporte la clause suivante : ' Les vendeurs aux présentes n'auront aucun droit d'eau sur la pièce d'eau vendue de quelque sorte qu'il soit. Ladite propriété ainsi figurée sous teinte jaune au plan joint annexé aux présentes, après avoir été approuvé par les parties. Les vendeurs feront leur affaire personnelle de l'accès au surplus leur restant appartenir figurant sous teinte rouge au plan ci annexé, sur lesquelles sont édifiés 5 boxes à chevaux et un vieux bâtiment autrefois à usage de grange le tout non compris dans la présente vente ainsi que les acquéreurs le reconnaissent expressément';
Considérant que la stipulation d'un droit d'eau sur l'étang au seul profit de l'acquéreur n'est pas de nature à permettre aux époux [D] de revendiquer la propriété du vannage ; que la question n'apparaissant pas dans l'acte de 1981, les époux [D] sont mal fondés à se prévaloir de la prescription acquisitive de bonne foi et par justes titres de l'article 2265 ancien du code civil en l'absence d'acte établissant qu'en acquérant la parcelle n° [Cadastre 12], ils sont devenus propriétaires des vannes situées sur la parcelle voisine ;
Considérant que c'est tout aussi vainement qu'ils tentent de convaincre que le vannage est l'accessoire nécessaire de l'étang ; qu'en effet, il résulte tant du rapport d'expertise déposé par M. [V] que des éléments du dossier que si l'alimentation de l'étang est régulée par le vannage litigieux, cet ouvrage sert également à contrôler le débit du bras de la rivière contournant la propriété de M. [R], en particulier en période de crues de janvier à avril ;
Considérant que s'il n'est pas contesté que l'étang est la propriété des époux [D], il découle des pièces produites que le vannage est situé dans le lit de l'Arcisse ; qu'il prend appui sur la rive des berges appartenant à M. [R] suivant la limite séparative fixée par M. [K] et qui n'est pas discutée et traverse perpendiculairement le cours d'eau jusqu'en son milieu ; que les vannes ne sont manoeuvrables que de la propriété [R], la crémaillère ainsi que la passerelle de manoeuvre se trouvant de son côté ;
Considérant qu'il est ainsi avéré que c'est à bon droit que les premiers juges ont dit que le vannage est la propriété de M. [R] et doit être compris dans ses parcelles ;
Considérant que les époux [D] invoquent l'existence d'une servitude par destination du père de famille au visa des articles 692,693 et 694 du code civil, dont la propriété [R] serait le fonds servant ;
Considérant que s'il est constant que le fond originel a appartenu au même propriétaire (les consorts [P]-[H]) qui a procédé à l'aménagement qui subsiste lors de la division du fonds, les époux [D] ne démontrent pas que le propriétaire du fonds ait eu la volonté d'établir une servitude au profit d'une des parcelles et à la charge de l'autre ; qu'il n'est fait état à cet égard d'aucune circonstance même extrinsèque voire postérieure au partage du fonds de nature à caractériser cette intention de la part du propriétaire ;
Considérant dès lors qu'il ne peut être fait droit à la demande des époux [D] ;
Considérant que le jugement entrepris sera donc confirmé ;
Considérant que par application de l'article 646 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande des appelants et d'ordonner la pose de bornes sur la limite séparative des parcelles déterminée par M. [K], géomètre-expert ;
Considérant que les frais devront en être supportés par les époux [D] qui échouent dans leurs prétentions ;
Considérant que l'exercice d'une voie de recours est un droit sauf à dégénérer en un
abus ce qui en l'espèce, n'est pas démontré ; qu'il ne peut donc être fait droit à la demande de dommages et intérêts formée par M. [R] ;
PAR CES MOTIFS
La, cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort
Confirme le jugement entrepris.
Y ajoutant,
Déboute M. et Mme [D] de leur demande afférente à l'existence d'une servitude de vannage par destination de père de famille sur le fonds de M. [R] figurant au cadastre sous les n° de parcelles A [Cadastre 11] et A [Cadastre 13].
Ordonne la pose de bornes sur la limite séparative des parcelles telle que déterminée par M. [K], par ce dernier ou par tout autre géomètre-expert qui dressera le procès-verbal qui sera déposé au greffe de la cour, aux frais avancés des époux [D].
Déboute M. [R] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Condamne in solidum M. et Mme [D] à verser à M. [R] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens qui comprendront les frais de publication du présent arrêt à la Conservation des hypothèques avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Mélina Pedroletti avoué, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne LOUYS, conseiller, faisant fonction de président et par Madame RENOULT, greffier,auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,