COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 14 SEPTEMBRE 2011
R. G. No 10/ 03406
AFFAIRE :
Deborah X...
C/
S. A. S. DIAM FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 31 Mai 2010 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de POISSY
Section : Industrie
No RG : 08/ 00044
Copies exécutoires délivrées à :
Me Eve LABALTE
Copies certifiées conformes délivrées à :
Deborah X...
S. A. S. DIAM FRANCE
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE SEPTEMBRE DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Mademoiselle Deborah X...
née le 22 Juillet 1983 à AUBERGENVILLE (78410)
...
78130 LES MUREAUX
comparant en personne, assistée de M. Stéphane DE Y... (Délégué syndical ouvrier)
APPELANT
****************
S. A. S. DIAM FRANCE
40 rue Pierre Curie
78133 LES MUREAUX CEDEX
représentée par Me Eve LABALTE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Sandra HUTTEPAIN, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 08 Juin 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Monsieur Jacques CHAUVELOT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Arnaud DERRIEN
Mademoiselle Deborah X... a été engagée par la société DIAM FRANCE à compter du 15 mars 2004 en qualité " d'opératrice montage-décor, niveau II, échelon A, moyennant un salaire de base de 1. 090, 51 € pour 151, 67 h de travail. Elle avait été embauchée précédemment par contrats à durée déterminée du 24 juin 2002 au 12 mars 2004 ; la convention collective régissant la relation de travail étant celle de la plasturgie, le nombre de salariés dans l'entreprise étant par ailleurs supérieur à onze.
Mademoiselle Deborah X... devait faire l'objet de deux avertissements pour absences injustifiées les 18 novembre 2004 et 30 mars 2005.
En 2006 elle bénéficiait d'un congé parental d'éducation qui prenait la suite de son congé maternité et s'achevait le 20 février 2007.
La salariée se voyait notifier un avertissement pour absence injustifiée les 21, 22, 23 février 2007, deux nouveaux avertissements pour absences injustifiées le 10 avril 2007 et le 11 juin 2007 ;
Après contrôle médical les arrêts de maladie correspondant étaient déclarés justifiés par les médecins contrôleurs.
Le 23 juillet 2007 elle devait déposer une plainte pour non assistance à personne en danger au motif que son supérieur hiérarchique avait refusé d'appeler les pompiers le 26 juin 2007 alors qu'elle avait eu un malaise.
Le 19 juillet 2007 le médecin du travail devait conclure à l'aptitude de la salariée " dans un atelier ne comportant pas de colle et de solvant. Apte à travailler dans un poste administratif ".
Le médecin devait renouveler ses observations. Mademoiselle Deborah X... était " apte à toute activité administrative et à toute activité manuelle ne comportant pas de colle et de solvant ou de proximité de ces substances.
Elle était convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement par lettre recommandée en date du 18 octobre 2007 fixé au 29 octobre suivant.
Elle était licenciée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 novembre 2007 libellée dans les termes suivants :
" Suite à l'entretien préalable que nous avons eu le 29 octobre 2007, au cours duquel vous avez été assisté par Thierry C..., secrétaire du Comité d'Entreprise, nous sommes au regret de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour inaptitude médicale.
Lors de cet entretien, nous vous avons indiqué les faits suivants :
Suite à votre visite médicale auprès de la médecine du travail du 10 septembre 2007, le médecin du travail a spécifié les indications suivantes : " De nouveau 1ère visite R 241-51-1-1 : Apte à toute activité administrative et à toute activité manuelle ne comportant pas de colle ou de solvant ou de proximité de ces substances ".
La visite du 24 septembre 2007 s'est concrétisé, par la spécification suivante : " 2ème visite R 241-51-1-1 " Je confirme mon certificat du 10 septembre 2007, Apte à toute activité administrative et à toute activité manuelle ne comportant pas de colle et de solvant ou à proximité de ces substances ".
Il apparaît aujourd'hui qu'en raison de la spécificité de notre activité, il n'existe pas d'atelier sans utilisation de colle ou de solvant. Pour améliorer la productivité, les opérations de collages en temps masqués ou en ligne avec l'opération précédente sont mêmes systématisées. Le médecin du travail est d'ailleurs intervenu le 19 juillet 2007 et a abouti à cette conclusion.
Nous avons recherché un reclassement possible sur un poste administratif. Malheureusement, il n'existe pas actuellement de poste disponible dans les services administratifs au sein de DIAM FRANCE. Vous savez en outre que les emplois administratifs ont été particulièrement touchés par le Plan de restructuration de l'entreprise et de licenciement économique collectifs, actuellement en vigueur au sein de l'entreprise.
Nous vous avons aussi informé que nous avons recherché des postes disponibles au sein de toutes les sociétés du groupe, en spécifiant les indications données par le médecin du travail. Malheureusement, aucune société n'est en mesure de vous offrir un poste compatible avec votre état de santé.
Compte tenu des prescriptions médicales, de l'activité de la société et du groupe, de vos compétences, et de l'impossibilité de vous reclasser dans l'entreprise ou dans le groupe, nous sommes absolument contraint de prononcer votre licenciement pour cause d'inaptitude médicale.
Du fait de votre impossibilité d'effectuer votre préavis, et de l'inexistence d'un poste de reclassement, votre préavis qui ne pourra pas être effectué, et ne vous sera pas payé. Aussi le terme de votre contrat interviendra à la date d'envoi de ce présent courrier. Nous teindrons, alors, à votre disposition, l'attestation ASSEDIC, le certificat de travail, et le reçu pour solde de tout compte. "
C'est dans ces circonstances que Mademoiselle Deborah X... devait saisir le Conseil de Prud'hommes de POISSY par acte du 24 janvier 2008 aux fins de solliciter à titre principal la somme de 17. 000 € à titre de dommages-intérêts pour nullité du licenciement ;
A titre subsidiaire la même somme pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en tout état de cause :
-20. 000 € au titre du non respect de l'article L 4624-1 du Code du travail,
-822, 37 € à titre de salaire du 24 octobre au 9 novembre 2007 outre la somme de 82, 23 € au titre des congés payés y afférents,
-1. 000 € à titre de dommages-intérêts pour non paiement des salaires du 9 octobre au 9 septembre 2007,
-109, 90 € à titre de rappel de salaire correspondant à la mise à pied disciplinaire outre la somme de 10, 99 € au titre des congés payés y afférents,
-2. 800, 50 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 280, 05 € au titre des congés payés y afférents,
-1. 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement contradictoirement prononcé le 31 mai 2010 le Conseil de Prud'hommes de POISSY a rejeté la demande de nullité du licenciement mais à considéré le licenciement litigieux sans cause réelle et sérieuse.
Il a condamné la SAS DIAM FRANCE à lui payer les sommes suivantes :
-8. 500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-2. 800, 50 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 280, 05 € au titre des congés payés y afférents,
-822, 37 € à titre de salaire du 24 octobre au 9 novembre 2007 outre la somme de 82, 23 € au titre des congés payés y afférents,
-1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il a ordonné la remise des documents sociaux et a rappelé que les condamnations emportent intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2008 pour l'indemnité compensatrice de préavis, le rappel de salaire et à compter de la décision pour toute autre somme à l'exclusion de la condamnation fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile.
Mademoiselle Deborah X... a régulièrement relevé appel de cette décision.
L'appelante par conclusions écrites déposées au Greffe de la Cour, soutenues oralement à l'audience a formulé les demandes suivantes :
Condamner la SAS DIAM FRANCE à lui payer les sommes suivantes :
-20. 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-7. 000 € au titre de dommages-intérêts pour défaut d'information sur l'impossiblité de reclassement,
-10. 000 € au titre de non respect de l'article L 4624-1 du Code du travail,
-1. 000 € à titre de dommages-intérêts pour non paiement des salaires du 9 octobre au 9 novembre 2007,
-3. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de POISSY du 31 mai 2010 sur le surplus des demandes,
Condamner la SAS DIAM FRANCE aux entiers dépens.
Par appel incident la société DIAM FRANCE a fait conclure par écrit et soutenir oralement l'infirmation du jugement entrepris et en conséquence le débouté de la salariée en toutes ses demandes et en conséquence sa condamnation au remboursement de la somme de 8. 500 € qui lui a été accordé par le premier juge.
Subsidiairement elle a sollicité la confirmation du jugement et le débouté de Mademoiselle Deborah X... du surplus de ses prétentions.
En tout état de cause :
Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à Mademoiselle Deborah X... le paiement d'une indemnité de préavis,
La condamner à rembourser à la société DIAM FRANCE la somme nette de 2. 186, 68 €,
Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mademoiselle Deborah X... de sa demande
-de dommages-intérêts pour défaut d'information sur l'impossibilité de reclassement
-de dommages-intérêts au titre de non-respect de l'article L 4624-1 du Code du travail
-de dommages-intérêts pour non paiement des salaires du 9 octobre au 9 novembre 2007
Condamner Mademoiselle Deborah X... à payer à la société DIAM FRANCE la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
Condamner Mademoiselle Deborah X... aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la cause du licenciement :
Considérant que l'appelante n'a pas remis en cause le rejet par le premier juge de la demande de nullité de son licenciement, qu'en revanche si elle a demandé la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a considéré le licenciement litigieux sans cause réelle et sérieuse, elle a toutefois sollicité que son indemnité en réparation de son préjudice soit porté à 20. 000 € ;
Considérant qu'il est constant que la salariée a été déclarée par le médecin du travail " apte à toute activité administrative et à toute activité manuelle ne comportant pas de colle et de solvant ou à proximité de ces substances " ;
Considérant que l'employeur était dans ces conditions tenu au titre de l'obligation de reclassement, obligation de moyen renforcée, soit de proposer au salarié, au besoin après réaménagement des postes de travail, un autre emploi, soit, en cas d'impossibilité de reclassement, d'en faire connaître les motifs par écrit et dans le délai d'un mois à la salariée ;
Qu'il avait en l'espèce l'obligation de proposer de manière effective à cette dernière un poste approprié à ses capacités compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail en procédant au besoin à " des mutations, transformations de postes de travail ou encore aménagement du temps de travail " ; que l'employeur doit donc rapporter la preuve que tous les efforts de recherche d'emploi, de formation et d'adaptation ont été faits en l'occurrence ;
Considérant que dans le cas présent l'employeur a prétendu avoir effectivement tenté de reclasser Mademoiselle Deborah X... à un poste de travail correspondant à l'avis du médecin du travail ;
Que cependant comme le premier juge l'a fait, la Cour ne peut que constater que la SAS DIAM FRANCE s'est contentée d'adresser le même courriel à l'ensemble des agences et n'a pas tenté d'effectuer une recherche plus précise et adaptée à la situation de la salariée alors que la société DIAM FRANCE comptait à l'époque de la rupture, plus de 300 salariés et que des possibilités d'adaptation au sein du groupe aurait certainement pu être expressément proposé à la salariée ;
Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a dit le licenciement litigieux sans cause réelle et sérieuse ;
Considérant que compte tenu de son ancienneté Mademoiselle Deborah X... est en droit de prétendre à un minimum de six mois de salaire brut sauf à rapporter la preuve d'un préjudice plus important ;
Que compte tenu des pièces justificatives produits il y a lieu de porter à 10. 000 € le montant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les autres demandes :
Considérant que la demande de rappel de salaire pour la période de rappel de salaire pour la période du 24 octobre au 10 novembre 2007 est fondé ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris de ce chef par adoption de ses motifs pertinents ;
Que sur la demande de dommages-intérêts fondée sur la prétendue violation de l'article L 4624-1 du Code du travail, le jugement entrepris sera également confirmé par adoption de ses motifs pertinents auxquels la Cour se réfère expressément ;
Considérant que devant la Cour Mademoiselle Deborah X... a demandé l'allocation d'une somme de 7. 000 € au motif qu'elle n'aurait pas été informé conformément à la loi de l'impossibilité de son reclassement ;
Que cependant il résulte de la lettre de convocation à l'entretien préalable qu'elle a été informéee conformément à la loi de l'impossibilité de son reclassement et du motif invoqué par l'employeur, que la salarié avait donc la possibilité de faire valoir ses observations à ce sujet lors de l'entretien avec son employeur ; qu'elle sera déboutée de cette demande non fondée ;
Que le jugement entrepris sera confirmé en ses autres dispositions ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la salariée la totalité des frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel, que toutefois sa demande excessive dans son montant sera réduite à la somme de 500 € ;
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Reçoit l'appel principal de Mademoiselle Deborah X... ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Le réformant partiellement pour le surplus,
Et statuant à nouveau dans la limite de la réformation ;
Condamne la
société SAS DIAM FRANCE à payer à Mademoiselle Deborah X... la somme de 12. 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions non contraires ;
Déboute Mademoiselle Deborah X... de sa demande de dommages-intérêts pour défaut d'information sur l'impossibilité de reclassement ;
Y ajoutant,
Condamne la société SAS DIAM FRANCE à verser à Mademoiselle Deborah X... la somme complémentaire de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La condamne aux dépens d'appel ;
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,