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29/06/2011 | FRANCE | N°08/00501

France | France, Cour d'appel de Versailles, 29 juin 2011, 08/00501


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES



Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2011

R. G. No 10/ 02650

AFFAIRE :

Bernard X...




C/
S. A. GUNNEBO FRANCE



Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 07 Avril 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES

No RG : 08/ 00501



Copies exécutoires délivrées à :

Me Catherine CHATEL
Me Frédéric ZUNZ



Copies certifiées conformes délivrÃ

©es à :

Bernard X...


S. A. GUNNEBO FRANCE

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt su...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2011

R. G. No 10/ 02650

AFFAIRE :

Bernard X...

C/
S. A. GUNNEBO FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 07 Avril 2010 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de VERSAILLES

No RG : 08/ 00501

Copies exécutoires délivrées à :

Me Catherine CHATEL
Me Frédéric ZUNZ

Copies certifiées conformes délivrées à :

Bernard X...

S. A. GUNNEBO FRANCE

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Bernard X...

né le 30 Mars 1948 à

...

83390 PUGET VILLE
comparant en personne, assisté de Me Catherine CHATEL, avocat au barreau de PARIS

APPELANT
****************
S. A. GUNNEBO FRANCE
15/ 17 avenue Morane Saulnier
78140 VELIZY VILLACOUBLAY
représentée par Me Frédéric ZUNZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 28 Mars 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE

PROCEDURE

M. Bernard X... a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 6 mai 2010, l'appel portant sur la totalité du jugement.

FAITS

M.. Bernard X..., né le 30 mars 1948, a été engagé en qualité d'assistant du chef de marché, par CDI à compter du 30 octobre 1989, par la société FICHET BAUCHE, devenue GUNNEBO FRANCE.
Un avenant à son contrat de travail était signé le 7 juin 2006.
Le 30 juin 2007, son contrat de travail était transféré à la société GUNNEBO FRANCE, selon l'article L 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article L 1224-2
Au dernier état de la relation contractuelle, M. X... exerçait les fonctions de responsable Point Services, position cadre, C3 A, de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie.
Suivant courrier du 21 novembre 2007, la société GUNNEBO FRANCE convoquait le salarié pour un entretien le 4 décembre suivant pour lui faire part de la mesure de mise à la retraite envisagée à son égard, en application de l'article 31-2 de la convention collective.
Suivant courrier du 14 décembre 2007 (présenté le 17 décembre et distribué le 21 décembre), la société GUNNEBO FRANCE adressait un courrier au salarié l'informant de sa mise à la retraite, à compter du 31 mars 2008, correspondant au 60ème anniversaire du salarié.
Après contestation du calcul de sa rémunération variable et après avoir reproché à la société de le mettre à la retraite de manière anticipée, un protocole d'accord transactionnel était signé le 26 décembre 2007 visant à mettre fin au litige portant sur le calcul de sa rémunération variable et sur les conditions de la rupture de son contrat de travail, lui allouant une indemnité de 30. 000 € à titre d'indemnité transactionnelle forfaitaire et définitive en réparation de son préjudice moral et professionnel.
Une somme de 27. 672 € était adressée au salarié par chèque daté du 7 janvier 2008.
M. Bernard X... bénéficiait de plus de 2 ans d'ancienneté et la société compte plus de 11 salariés.
M. Bernard X... a saisi le C. P. H le 23 mai 2008 de demandes tendant à voir prononcer la nullité du protocole d'accord transactionnel signé le 26 décembre 2007, requalifier sa mise à la retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre.

DECISION

Par jugement rendu le 7 avril 2010, le C. P. H de Versailles (section Encadrement) a :

- constaté la validité du protocole d'accord signé le 26 décembre 2007
- dit que la mise à la retraite de M. Bernard X... est licite
-dit qu'il n'y a pas de requalification en licenciement pour cause réelle et sérieuse
-condamné la société GUNNEBO FRANCE à payer à M. Bernard X... la somme de 17. 286 € à titre de complément d'indemnité de préavis
-débouté M. Bernard X... du surplus de ses demandes
-débouté la société GUNNEBO FRANCE de sa demande reconventionnelle
-rappelé qu'en application de l'article R 1454-28 du code du travail, l'exécution provisoire est de droit pour les sommes dues au titre des rémunérations et indemnités mentionnées aux articles R 1454-14 et 15 du code du travail dans la limite maximum de 9 mois de salaire
-dit que la moyenne des trois derniers salaires est de 6. 513 €
- dit que les intérêts de droit courent à partir de la notification de la présente décision
-condamné la société GUNNEBO FRANCE à payer à M. Bernard X... la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du CPC
-condamné la société GUNNEBO FRANCE aux dépens

DEMANDES

Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par M. Bernard X..., appelant, aux termes desquelles il demande à la cour, de :
Vu les articles 27, 29, 30 et 31-2 de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie,

Vu les article L1237-7, L1237-8 et R1454-28 du Nouveau Code du travail, et l'article L122-14-13 de l'Ancien Code du Travail,

Vu les articles 1116 et 2053 du Code Civil,

Il est demandé à la Cour de :

- constater la violation par la société GUNNEBO des conditions d'ordre public de mise à la retraite avant 65 ans édictées par l'article 31-2 alinéa 2 et 5 de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadre de la Métallurgie :

- Non respect du délai de prévenance de six mois,

- Non versement de la totalité de l'indemnité conventionnelle de mise à la retraite,

- Absence d'avenant de cessation partielle d'activité à défaut d'embauche compensatrice,

- Absence de justification de la réalité d'une embauche compensatrice de la mise à la retraite de Monsieur X....

- constater l'absence de toute concession réelle par la société GUNNEBO dans le cadre du protocole transactionnel du 26 décembre 2007 ;

- constater les manoeuvres dolosives employées par la société GUNNEBO pour obtenir le consentement de Monsieur Bernard X... au protocole transactionnel du 26 décembre 2007 ;

- constater que le protocole du 27 décembre 2007 a été soumis à la signature de Monsieur X... alors qu'il était sous le lien de subordination avec la société GUNNEBO jusqu'au 31 mars 2008 ;
En conséquence :

- confirmer le jugement du Conseil des Prud'hommes de VERSAILLES du 7 avril 2010 en ce qu'il a :

- condamné la société GUNNEBO à payer à Monsieur Bernard X... la somme de 17. 286 € à titre de complément d'indemnité de préavis ;

- condamné la société GUNNEBO à payer à Monsieur Bernard X... la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- infirmer le jugement du Conseil des Prud'hommes de VERSAILLES du 7 avril 2010 dans toutes ses autres dispositions ;

- prononcer la nullité du protocole d'accord transactionnel du 26 décembre 2007 : le dire nul et de nul effet ;

- requalifier la mise à la retraite de Monsieur Bernard X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société GUNNEBO à payer à Monsieur X... :

- la somme de 47. 852, 78 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, après déduction de la somme de 19. 889, 18 € reçue par Monsieur X... le 31 mars 2008 au titre de l'indemnité de mise à la retraite,

- la somme de 25. 703, 38 € au titre de l'indemnité de préavis et de congés payés y afférents, après déduction de la somme de 17. 286 € reçue en execution du jugement du 7 avril 2010 ;

- la somme de 222. 184, 20 € au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- la somme de 249. 215 € en réparation du préjudice professionnel ;

- la somme de 39. 081, 90 € à titre d'indemnité pour préjudice moral en raison du caractère vexatoire du licenciement ;

- la somme de 1. 459 € à titre de solde de l'indemnité pour le préjudice subi du fait de la perte de la rémunération variable ;

- ordonner que les indemnités allouées à Monsieur X... soient assorties des intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance par demande en date du 20 mai 2008 avec capitalisation jusqu'au parfait paiement ;

- ordonner l'édition par la société GUNNEBO des bulletins de salaire pour les mois d'avril à septembre 2008, correspondant au préavis conventionnel de 6 mois ;

- condamner la société GUNNEBO au paiement de la somme de 6. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre subsidiaire :

Dans l'hypothèse où la Cour ne prononcerait pas la nullité du protocole transactionnel du 26 décembre 2007 et ne requalifierait pas la mise à la retraite de Monsieur Bernard X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA GUNNEBO à payer 17. 286 € au titre du préavis ;

- condamner la société GUNNEBO à honorer les engagements souscrits dans le protocole transactionnel du 26 décembre 2007 ;

En conséquence :

- la condamner à payer la somme de 47. 852, 78 € restant due au titre de l'indemnité de mise à la retraite conventionnelle ;

- la condamner à payer la somme de 1. 459 € nette restant due sur l'indemnité transactionnelle de 30. 000 €.

- condamner la société GUNNEBO au paiement de la somme de 6. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il soutient que l'employeur n'a respecté aucune des conditions édictées par la connvention collective pour valider la mise à la retraite d'un cadre : privation du délai de prévenance de 6 mois (réduit à 3 mois), des salaires et congés payés dus sur la période du 31 mars au 17 juin 2008, la société n'a procédé à aucune embauche compensatrice, il n'a pu bénéficier d'un avenant de cessation partielle d'activité, l'indemnité de mise à la retraite est inférieure aux montants dus selon le contrat de travail et la convention collective, à un cadre de plus de 55 ans et 18 ans d'ancienneté.
Il fait valoir :
- l'absence de concessions réciproques de la part de l'employeur, le fait que celui-ci l'a privé des droits et indemnités résultant de sa mise à la retraite anticipée, la circonstance que l'employeur ne lui a pas versé l'intégralité de l'indemnité transactionnelle (manque à hauteur de 1. 458 €), que la concession de la société n'est que de 10. 386 €, qu'il a été lésé de 47. 842, 78 € au titre de l'indemnité de mise à la retraite
-les manoeuvres dolosives don't il a été victime : la société lui a dissimulé l'étendue réelle de ses droits et des indemnités auxquelles il pouvait prétendre du fait de sa mise à la retraite anticipée, le caractère involontaire de l'erreur commise par la société sur le contenu de la convention collective n'est pas crédible
-le maintien du lien de subordination lors de la signature de la transaction
-l'objet de la transaction était de couvrir la fraude aux dispositions d'ordre public

Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par la société GUNNEBO FRANCE, intimée, par lesquelles elle demande à la cour, de :

- A titre principal,
- constater la validité du protocole transactionnel signé le 26 décembre 2007
- débouter M. Bernard X... de l'ensemble de ses demandes
-A titre subsidiaire,
- constater que la société n'est redevable que d'une indemnité compensatrice de préavis du 1er avril 2008 au 17 juin 2008, soit la somme de 14. 165, 08 €
- constater que la société n'est redevable que d'une indemnité conventionnelle de licenciement s'élevant à la somme de 35. 831, 37 € venant en déduction de l'indemnité de retraite perçue
-constater que M. Bernard X... ne justifie pas du préjudice qu'il aurait subi du fait de la rupture de la relation contractuelle
-constater que les demandes de réparation de préjudices distincts ne sont pas fondées et sont surabondantes
-constater que M. Bernard X... ne justifie pas de sa demande au titre de sa rémunération variable
-condamner M. Bernard X... à lui rembourser la somme de 3. 120, 92 € à titre de trop perçu d'indemnités compensatrice de préavis
-limiter la condamnation de la société au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis du 1er avril 2008 au 17 juin 2008, soit la somme de 14. 165, 08 €
- limiter la condamnation de la société au paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement s'élevant à la somme de 35. 831, 37 €
- réduire à de plus justes proportions la condamnation de la société pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-débouter M. Bernard X... de ses demandes au titre du préjudice professionnel et du préjudice moral
-débouter M. Bernard X... de sa demande de dommages-intérêts liée à sa rémunération variable
-ordonner le remboursement par M. Bernard X... de la somme qui lui a été versée au titre du protocole transactionnel du 26 décembre 2007
- En tout état de cause,
- condamner M. Bernard X... à lui payer la somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du CPC et aux dépens

La société réplique que la rupture du contrat de travail avait été notifiée le 14 décembre 2007 et reçue le 17 décembre suivant, soit antérieurement à la signature du protocole transactionnel, que le délai de préavis exécuté a été négocié entre les parties, que la transaction avait pour objet de régler le différend opposant les parties sur la mise à la retraite du salarié et sur sa rémunération variable, qu'elle reconnait avoir commis une erreur involontaire sur le respect du délai de préavis au regard de la convention collective, que l'indemnité de retraite n'a pas été chiffrée dans le protocole, que l'indemnité de retraite versée est supérieure à l'indemnité conventionnelle de retraite.

MOTIFS DE LA DECISION

-Sur la nullité de la transaction

Considérant que l'article 2052 du code civil énonce que " les transactions ont entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.
Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion " ;

Que l'article 2053 ajoute : " Néanmoins, une transaction peut être rescindée, lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation.
Elle peut l'être dans tous les cas où il y a dol ou violence " ;

Considérant que l'article 1116 du code civil énonce que " Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une ou l'autre des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie, n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas, et doit être prouvé " ;

Considérant que le dol défini à l'article 1116 du code civil, peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait, qui s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter ;

Que selon l'article 2048 du code civil, " les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu " ;

Que l'article 2049 ajoute que, " les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé " ;

Que l'article L 1231-4 du code du travail dispose que : " L'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles prévues par le présent titre " ;

Considérant qu'il résulte de ces textes qu'une transaction, ayant pour objet de mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture du contrat de travail, ne peut être valablement conclue qu'après notification du licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
Considérant en l'espèce, que M. X... a signé un protocole d'accord transactionnel daté du 26 décembre 2007 en vertu duquel il lui était versé une somme de 27. 672 € (après déduction des cotisations CRDS et CSG) à titre d'indemnité forfaitaire (soit environ 4 mois de salaire, la moyenne des trois derniers mois étant de 6. 513, 65 €) ;
Considérant que l'objet de la transaction litigieuse portait sur la réparation de l'intégralité des préjudices invoqués par le salarié à l'occasion de sa mise à la retraite et ceux relatifs aux éléments de calcul de sa rémunération variable, et l'indemnité était versée à titre de dommages et intérêts comme en contrepartie de sa renonciation à toute action que ce soit au titre de la rupture de l'ensemble des relations salariales ou autres ayant pu le lier avec l'une quelconque des sociétés du groupe GUNNEBO ;

Considérant que pour déclarer valable la transaction et rejeter les demandes du salarié, le jugement déféré énonce qu'aucune pièce ne vient prouver que la volonté du salarié n'ait été viciée, que rien dans les pièces ne vient prouver que des concessions réciproques n'ont pas existé, que ce dernier a reçu le versement de l'indemnité de mise à la retraite prévue par la convention collective ;
Mais considérant que si la rupture du contrat de travail se situe au 17 décembre 2007, date de présentation de la lettre de mise à la retraite, la prise d'effet de celle-ci était contractuellement fixée à compter du 31 mars 2008, étant ajouté que le salarié est resté à son poste jusqu'au 31 janvier 2008 ;
Qu'ainsi à la date de la signature du protocole transactionnel, le 26 décembre 2007, le salarié était encore sous la subordination de son employeur et ne se trouvait pas pleinement au courant de sa situation de fait et des conséquences juridiques qui en découlaient, élément s'analysant comme un moyen de pression pour le déterminer à accepter la transaction et de nature à donner à la mise à la retraite une apparence de régularité ;
Qu'en effet, comme le soutient M. X..., l'employeur lui a dissimulé que selon la convention collective, il devait bénéficier du délai de prévenance de 6 mois à compter du 17 décembre 2007, qu'il devait être rémunéré, salaires et congés payés, jusqu'au 17 juin 2008, qu'il devait bénéficier d'un avenant de cessation partielle d'activité avant sa retraite effective sauf en cas d'embauche compensatrice par la société Gunnebo (ce qui n'est pas le cas), qu'il devait recevoir une indemnité de mise à la retraite calculée dans les mêmes conditions que l'indemnité de licenciement pour un cadre d'au moins 5 ans d'ancienneté et âgé de 55 ans à 60 ans ;
Qu'en application des dispositions de la convention collective, le salarié devait percevoir une indemnité conventionnelle de mise à la retraite d'un montant de 67. 741, 96 €, alors qu'il n'a perçu que la somme de 19. 889, 18 € de ce chef, soit un manque à gagner de 47. 852, 78 € ;
Considérant en conséquence, que l'accord intervenu entre les parties ne résulte pas de concessions réciproques en l'absence de discussion intervenue entre les parties sur le montant de l'indemnité versée et de contre-proposition émise par le salarié sur la fixation des 3 mois de préavis qui lui ont été octroyés au lieu des 6 mois ;
Considérant comme le soutient le salarié, le caractère involontaire de l'erreur commise par la société sur le contenu de la convention collective n'est pas crédible, dès lors que c'est la directrice des ressources humaines de la société Gunnebo qui a élaboré et signé la transaction, professionnelle du droit du travail, ce qui exclut toute suspicion de faiblesse ou d'incompétence de la part de ce service ;
Considérant que la nullité du protocole d'accord transactionnel sera donc prononcée et le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;

- Sur la requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse

Considérant que selon l'article L 122-14-13 de l'ancien code du travail, devenu l'article L 1237-8, si les conditions de la mise à la retraite ne sont pas réunies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement ;

Considérant qu'il est établi que l'employeur n'a jamais remplacé le salarié par une embauche compensatrice, en violation de l'article 31-2-2 de la convention collective des cadres de la métallurgie, dès lors que, contrairement à ce que soutient l'employeur, M. A..., embauché en février 2008, ne remplaçait pas M. X... dans son poste, son embauche consistant à remplacer un autre ingénieur commercial muté, M. de B... ;
Que les responsabilités de M. X... ont été transférées à M. C..., qui était déjà le manager de la division Retail ;
Considérant que les conditions de mise à la retraite imposées par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie n'ayant pas été respectées par l'employeur, la mise à la retraite de M. X... doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Sur les demandes indemnitaires de M. Bernard X...

Considérant que la nullité de la transaction a pour effet de replacer les parties dans leur situation antérieure ;
Qu'en conséquence, il convient d'ordonner à M. X... de rembourser à la société Gunnebo, l'indemnité qui lui a été versée au titre du protocole transactionnel du 26 décembre 2007, soit la somme de 27. 672 € ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de déduire l'indemnité de retraite perçue par le salarié, soit la somme de 19. 889, 18 € dans le cadre de la transaction ;
Considérant qu'en application des dispositions de la convention collective, il sera fait droit à la demande au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement (67. 741, 96 €), au titre de l'indemnité de préavis (17. 286 €) et de congés payés (1. 728, 60 €) ;

Que l'employeur ayant déjà versé la somme de 17. 286 € au titre de l'exécution provisoire du chef de l'indemnité de préavis, l'employeur reste devoir la somme de 1. 728, 60 € ;

Considérant que le salarié sollicite au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 156. 327, 60 € représentant 24 mois de salaire du fait de la perte de 5 années d'activité professionnelle et celle de 65. 856, 60 € au titre de la perte des points de retraite sur 15 ans (perte de points Arrco et Agirc, prise en compte de son espérance de vie), soit une somme globale de 222. 184, 20 € ;

Qu'il lui sera alloué la somme de 140. 000 € de ce chef ;

Considérant que le salarié sollicite la somme de 249. 215 € au titre d'une indemnité pour préjudice professionnel causé par la cessation brutale de son contrat de travail (calcul de la perte de revenus jusqu'à 65 ans moins retraite/ 5 ans) ;

Que ce préjudice n'étant pas suffisamment caractérisé, sera rejeté ;

Considérant que le salarié sollicite la somme de 39. 081, 90 € (correspondant à six mois de salaire moyen des trois dernièrs mois) pour préjudice moral en raison des circonstances humilantes du licenciement après 20 ans de carrière ;

Qu'il lui sera alloué la somme de 3. 000 € de ce chef ;

Considérant que le salarié sollicite la somme de 1. 459 € au titre du solde de l'indemnité pour la perte de rémunération variable ;

Que la nullité du protocole ayant pour conséquence la restitution des sommes versées, le salaré sera débouté de ce chef de demande ;

- Sur l'article 700 du CPC

Considérant qu'il sera alloué au salarié une indemnité au titre des frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que la moyenne des trois derniers salaires est de 6. 513 €
- condamné la société GUNNEBO FRANCE à payer à M. Bernard X... la somme de 17. 286 € à titre de complément d'indemnité de préavis, 1. 000 € au titre de l'article 700 du CPC
-débouté la société GUNNEBO FRANCE de sa demande reconventionnelle
-condamné la société GUNNEBO FRANCE aux dépens

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du protocole transactionnel intervenu entre M. X... et la société GUNNEBO FRANCE le 26 décembre 2007
Déclare le protocole transactionnel intervenu entre M. X... et la société GUNNEBO FRANCE le 26 décembre 2007 nul et de nul effet
Ordonne le remboursement par M. X... de la somme qui lui a été versée au titre du protocole transactionnel, soit la somme de 27. 672 €

Requalifie la mise à la retraite de M. Bernard X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse

En conséquence,

Condamne la société GUNNEBO FRANCE à verser à M. Bernard X... les sommes suivantes :

- au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement : 67. 741, 96 €
avec intérêts au taux légal à compter de la demande avec capitalisation des intérêts
-au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis : 1. 728, 60 €
- au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse : 140. 000 €
- pour préjudice moral : la somme de 3. 000 €
avec intérêts de droit à compter du présent arrêt

Ordonne la compensation entre les dettes et créances réciproques

Enjoint à la société GUNNEBO FRANCE de remettre à M. Bernard X... des bulletins de paie régularisés pour les mois d'avril au 17 juin 2008

Condamne la société GUNNEBO FRANCE à payer à M. Bernard X... la somme de 4. 000 € au titre de l'article 700 CPC
Rejette toute autre demande

Condamne la société GUNNEBO FRANCE aux entiers dépens.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 08/00501
Date de la décision : 29/06/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-29;08.00501 ?
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