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25/05/2011 | FRANCE | N°07/775

France | France, Cour d'appel de Versailles, 25 mai 2011, 07/775


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES








Code nac : 80C


15ème chambre


ARRET No


CONTRADICTOIRE


DU 25 MAI 2011


R. G. No 09/ 03918


AFFAIRE :


Eric X...





C/
S. A. CHABE LIMOUSINES en la personne de son représentant légal, son P. D. G.








Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 17 Août 2009 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de BOULOGNE BILLANCOURT
Section : Activités diverses
No R

G : 07/ 775




Copies exécutoires délivrées à :


Me Cédric SEGUIN
Me Jean-Michel PERARD




Copies certifiées conformes délivrées à :


Eric X...



S. A. CHABE LIMOUSINES en la personne de son représ...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80C

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 25 MAI 2011

R. G. No 09/ 03918

AFFAIRE :

Eric X...

C/
S. A. CHABE LIMOUSINES en la personne de son représentant légal, son P. D. G.

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 17 Août 2009 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de BOULOGNE BILLANCOURT
Section : Activités diverses
No RG : 07/ 775

Copies exécutoires délivrées à :

Me Cédric SEGUIN
Me Jean-Michel PERARD

Copies certifiées conformes délivrées à :

Eric X...

S. A. CHABE LIMOUSINES en la personne de son représentant légal, son P. D. G.

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Eric X...

né le 09 Septembre 1948 à PARIS (75014)

...

85540 ST AVAUGOURD DES LANDES
comparant en personne, assisté de Me Cédric SEGUIN, avocat au barreau de PARIS

APPELANT
****************
S. A. CHABE LIMOUSINES en la personne de son représentant légal, son P. D. G.
91/ 99 Avenue Jules Quentin
92000 NANTERRE
représentée par Me Jean-Michel PERARD, avocat au barreau de PARIS

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 11 Mars 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE

M. X... a été engagé par la société SA CHABE VERJAT aujourd'hui dénommée SA CHABE LIMOUSINES en qualité de chauffeur de grande remise suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 16 mai 1997 ayant pris effet le 8 mai précédent.

La convention collective des transports routiers est applicable aux relations contractuelles.

Il a été désigné en qualité de délégué syndical le 2 mai 2001.

Reprochant à son employeur l'absence de prise en compte des temps d'attente comme temps de travail effectif et le non-paiement des salaires correspondants, le non respect de la réglementation afférente au temps de trajet ainsi que des agissements de harcèlement moral et syndical, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 30 avril 2007 d'une demande dirigée à l'encontre de la société CHABE LIMOUSINE tendant à la résolution judiciaire de son contrat de travail et à sa condamnation au paiement de diverses sommes.

Le 19 mai 2008, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a modifié ses prétentions en conséquence.

Au dernier état de la relation contractuelle, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 2443, 78 €.

Aux termes d'un jugement rendu le 17 août 2009, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt sous la présidence du juge départiteur a :
- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par monsieur X... à la date du 19 mai 2008 produit les effets d'une démission,
- débouté monsieur X... de ses demandes et la société CHABE LIMOUSINES de sa demande reconventionnelle,
- condamné monsieur X... aux dépens.

M. X... a régulièrement interjeté appel le 30 septembre 2009 de ce jugement qui lui a été notifié le 23 septembre 2009.

Vu les conclusions datées du 11 mars 2011 reprises oralement tendant à l'infirmation du jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 17 août 2009 ; il demande à la cour de :
- juger que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail est imputable aux torts de la société CHABE LIMOUSINE,
- condamner la société CHABE LIMOUSINES à lui verser les sommes suivantes :
sur la base d'un décompte hebdomadaire :
* 93. 818 € au titre du rappel d'heures supplémentaires,
* 9. 381, 80 € au titre des congés payés afférents aux heure s
supplémentaires,
subsidiairement sur la base d'un décompte à la quatorzaine,
* 87 397, 79 € au titre du rappel d'heures supplémentaires,
* 8739, 78 € au titre des congés payés afférents,
dans tous les cas :
* 45. 476 € au titre du repos compensateur afférent aux heures supplémentaires,
* 4. 547, 60 € au titre des congés payés afférents au repos compensateur,
* 14. 662 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
* 5. 294 € à titre d'indemnité de licenciement,
* 58. 651 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 29. 325 € à titre d'indemnité correspondant à la violation du statut protecteur,
* 15. 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et syndical,
* 4. 887, 56 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 488, 76 € au titre des congés payés afférents au préavis,
* 2. 875, 63 € au titre des congés payés acquis et non pris à la date du 8 janvier 2008, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud " hommes de Boulogne-Billancourt avec capitalisation par année entière,
En outre,
- annuler la mise à pied à titre conservatoire prononcée contre lui le 11 juillet 2007,
- condamner la société CHABE LIMOUSINES au paiement de la somme de 1692 € à titre de dommages et intérêts pour on prise de congés payés,
- annuler la mise à pied à titre disciplinaire prononcée contre lui le 23 novembre 2007,
- condamner la société CHABE LIMOUSINES au paiement d ela somme de 2. 586 € à titre de rappel de salaire couvrant la période du 11 juillet au 24 août 2007, outre 258, 66 € à titre de congés payés afférents,
En tout état de cause,
- condamner la société CHABE LIMOUSINES à verser à monsieur X... la somme de 5. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- ordonner la remise des documents conformes au titre de la rupture du contrat de travail, à savoir : reçu pour solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle emploi, sous astreinte de 100 € par jour de retard.
Il fait essentiellement valoir que sa désignation en qualité de délégué syndical a entraîné la dégradation de ses conditions de travail, la société ayant mis en place à compter de cette date un véritable harcèlement syndical en le bafouant dans ses droits et en lui infligeant de nombreuses sanctions injustifiées, détournant ainsi son pouvoir disciplinaire ; il lui reproche également son de rémunérer comme du temps de travail effectif le temps d'attente posté aux ordres de la société et du client.

Vu les conclusions de la société CHABE LIMOUSINE datées du 11 mars 2011 soutenues oralement tendant au rejet des débats des pièces no74 à 80 produites le 4 mars 2011, à la confirmation du jugement et à la condamnation de M. X... au paiement de la somme de 515, 33 € au titre de l'indemnisation du préavis non effectué et de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle conteste tout harcèlement moral et syndical mis en oeuvre à compter de la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical le 2 mai 2001 en faisant observer qu'il avait fait l'objet de reproches avant cette date et qu'une mesure de licenciement avait été envisagée en1998 ; elle explique que son comportement inacceptable est à l'origine des procédures et qu'en agissant ainsi, l'employeur n'a fait qu'exercer son pouvoir disciplinaire ; elle rappelle que le temps de trajet et que le temps d'inaction pendant lequel il n'est plus à la disposition de son employeur ne peuvent pas être pris en compte comme un temps de travail effectif.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 11 mars 2011.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le rappel de salaires et congés payés :

Considérant suivant les dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée et que c'est au vu de ces documents et de ceux fournis par la salariée, à l'appui de sa demande, que le juge forme sa conviction ;

Considérant que M. X... réclame la réintégration dans le temps de travail effectif des temps de trajet et des temps d'attente postée et le paiement des salaires ; qu'il explique que son emploi de conducteur de grande remise implique de nombreux temps d'attente durant lesquels il est toujours à la disposition des clients et donc de son employeur et ne peut vaquer librement à ses occupations personnelles ; qu'il doit notamment demeurer à proximité de son véhicule et être joignable à tout moment ; qu'il fait observer que l'employeur exerce son pouvoir disciplinaire pendant ces temps d'attente et qu'il a notamment reçu un avertissement le 22 septembre 2004 au motif qu'il n'avait pas pu être joint alors qu'il était en stand by ; qu'il met aux débats le décompte de ses heures de travail depuis l'année 2002 correspondant à la totalité de l'amplitude journalière ;

Considérant que le conseil de prud'hommes a déjà énoncé les textes applicables au temps de travail dans le domaine des transports, si bien qu'il n'y a pas lieu de les reprendre ici ; qu'il convient simplement de rappeler que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de son employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;

* sur le temps de trajet :

Considérant qu'il appartient au salarié qui sollicite la prise en compte du temps de trajet au titre du temps de travail effectif d'apporter la preuve qu'il est à la disposition de son employeur préalablement à son départ vers son lieu de travail,

Considérant au cas présent que M. X... qui réclame le paiement d'un rappel de salaires au titre du temps de trajet pour la période d'avril 2002 au mois de décembre 2007 fait valoir que l'employeur impose aux salariés d'être présents sur place quinze minutes avant l'heure de rendez-vous et peut également leur imposer de se présenter au garage avant d'aller chercher le client ; qu'il rappelle qu'il a été sanctionné le 17 mai 2005 pour s'être présenté avec retard au garage, ce qui tend, selon lui, à démontrer qu'il demeure à la disposition de son employeur ; que la société réplique qu'on ne peut inclure le temps de trajet dans le temps de travail effectif ;

Considérant suivant les dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif, sauf si le salarié est à la disposition de l'employeur et ne peut vaquer à ses obligations personnelles ; qu'en l'espèce, M. X... se contente de procéder par voie d'affirmations mais ne démontre pas que ce temps de déplacement est contraint par l'employeur ; que l'avertissement délivré par l'employeur au salarié le 17 mai 2005, seule pièce produite aux débats pour démontrer l'existence du lien de subordination pendant le temps de trajet, n'établit pas que M. X... était à disposition de l'employeur pendant ce temps de déplacement mais uniquement qu'il s'est présenté tardivement sur son lieu de travail ; qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le temps de trajet ne constitue pas un temps de travail effectif et a débouté le salarié de ses demandes subséquentes ;

* sur les temps d'attente postés :

Considérant que M. X... sollicite la prise en compte de ces temps d'attente entre deux missions ou entre deux temps de conduite comme du temps de travail effectif dans la mesure où il reste à la disposition de son employeur ou de son client et ne peut vaquer à ses occupations personnelles et réclame un rappel de salaire pour la période de 2002 à 2007 ; qu'il fait valoir que la société lui impose de rester à proximité de son véhicule et d'être joignable pour recevoir des directives des dispatchers et rappelle à cet effet qu'il a été sanctionné le 23 septembre 2004 au motif qu'il n'était pas joignable et qu'il n'était pas resté en stand by au pied de l'hotel Plaza ;

Considérant que le temps d'attente ne peut être qualifié de temps de travail effectif qu'à partir du moment où le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que ni la brièveté du temps de pause ni la circonstance que le salarié doit pouvoir être joint à tout moment ne permettent de considérer qu'il demeure à la disposition de son employeur et ne peut vaquer à ses occupations personnelles ; qu'en l'espèce, M. X... ne démontre pas qu'il devait exécuter des tâches liées à ses obligations contractuelles pendant ces temps d'attente ; qu'enfin la seule interdiction de ne pas s'éloigner du site où il a déposé son client n'est pas de nature à conférer au temps d'attente le caractère de temps de travail effectif ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges, à l'issue d'une analyse pertinente des éléments objectifs portés à leur connaissance, ont dit que le temps d'attente posté ne constitue pas un temps de travail effectif ; que le jugement doit également être confirmé sur ce point ainsi qu'en sa disposition ayant rejeté les demandes de rappel de salaires, de repos compensateur et au titre du travail dissimulé ;

Sur la rupture du contrat de travail :

Considérant que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail, en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la résiliation judiciaire du contrat de travail introduite auparavant,

Considérant que les manquements de l'employeur invoqués par le salarié à l'appui de sa prise d'acte sont les suivants : harcèlement moral et syndical à compter de sa désignation en qualité de délégué syndical et non paiement des temps de trajet et des temps d'attente postés comme des temps de travail effectif ;

* sur la discrimination syndicale :
Considérant que M. X... qui a été désigné en qualité de délégué syndical le 2 mai 2001 expose avoir été victime d'une discrimination en raison de son mandat et de son engagement au soutien de la défense des droits des salariés, ce que conteste la société qui fait valoir que des difficultés avaient émaillé la relation contractuelle dès l'année 1998, soit bien avant sa désignation en qualité de délégué syndical ;

Considérant que la simple chronologie des faits permet d'exclure toute discrimination syndicale à l'encontre de M. X... qui fait remonter ses difficultés avec son employeur à l'année 2005 alors qu'il exerce son mandat syndical depuis quatre ans ; que la preuve est par ailleurs rapportés par l'employeur de l'existence des difficultés ayant émaillé la relation contractuelle dès l'année 1998, soit trois ans avant sa désignation en qualité de délégué syndical ;

* sur le harcèlement moral :

Considérant qu'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Que selon l'article L. 1154-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement,
Considérant au cas présent que M. X... établit les faits suivants :
- au mois de janvier 2006, il réclame le paiement de salaires er la société attend deux mois avant de régulariser sa situation,
- convocation à un entretien préalable fixé au 5 février 2007 alors que dans le même temps la société lui impose des tâches l'empêchant de se rendre à cette convocation,
- diminution de son temps de travail effectif lui imposant une baisse de rémunération,
- engagement d'une procédure de licenciement le 13 juin 2007 assortie d'une mise à pied conservatoire pour des motifs fallacieux ; nonobstant le refus de l'inspecteur du travail du 21 août 2007 confirmé par le ministre du travail le 14 avril 2008, la société va saisir le tribunal administratif d'une demande d'annulation de cette décision, demande qui va être rejetée par jugement du 14 octobre 2010,
- refus de lui payer les salaires afférents à la période de mise à pied conservatoire,
- mise à pied disciplinaire de 23 jours prononcée le 5 novembre 2007 de manière injustifiée,
- engagement d'une deuxième procédure de licenciement le 26 octobre 2007,

Qu'il met également aux débats le certificat médical établi par le docteur A... le 6 juillet 2007 ainsi que les nombreux courriers qu'il a adressés à son employeur ;

Que ces faits permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à l'origine de l'altération de sa santé physique ; qu'il incombe dès lors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ;

* sur le paiement tardif des salaires en 2006 :

Considérant que M. X... explique avoir formulé une réclamation auprès de son employeur au mois de janvier 2006 après avoir constaté qu'il n'avait pas été rémunéré conformément à ses heures de travail réalisées tant de jour que de nuit et que la société a mis deux mois pour régulariser la situation ; qu'il produit aux débats la lettre que lui a adressée la société le 27 mars 2006 contenant les explications concernant la régularisation des 13 heures de jour et des 5h30 de nuit manquantes du mois de janvier 2006 ; que si le retard dans le paiement du salaire du mois de janvier est établi, la cour ne trouve en la circonstance aucun élément de nature à dire que ce retard s'inscrit dans une stratégie de harcèlement ;

* sur la convocation à entretien préalable du 5 février 2007 :

Considérant que M. X... a été convoqué le 5 février 2007 à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire fixé au 13 février suivant à 17 heures ; qu'il soutient ne pas avoir été en mesure de se rendre à cette convocation en raison des tâches qui lui ont été imposées par l'entreprise, attitude qu'il a dénoncée dans une correspondance datée du 13 avril 2007 en ajoutant qu'il n'avait pas de nouvelles de cette convocation ; qu'il a conclu sa missive en indiquant qu'il s'agit d'un cas avéré de harcèlement ; que la société réplique que l'engagement d'une telle procédure constitue l'exercice d'un droit et qu'elle était justifiée par le non-respect par le salarié des consignes relatives au carnet chauffeur ;

Considérant que M. X... ne conteste pas avoir refusé de renseigner le carnet chauffeur alors que cette directive de l'employeur figure dans la note interne du 29 janvier 2007 ; que ce refus est la cause de la convocation à l'entretien préalable du 13 février 2007 dont le salarié n'a pas sollicité le report ; qu'en l'absence de suite donnée par l'employeur à cette procédure, celle-ci ne peut être assimilée à un agissement de harcèlement moral ;

* sur la convocation à entretien préalable du 11 juillet 2007 :

Considérant que M. X... a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué le 11 juillet 2007 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 19 juillet ; qu'il considère que cette convocation s'inscrit dans une stratégie de harcèlement mise en place par l'employeur ; que la société CHABE LIMOUSINE soutient qu'elle n'a fait qu'exercer son pouvoir disciplinaire à l'égard d'un salarié auquel elle reprochait des malversations pour obtenir le paiement d'heures auxquelles il n'avait pas droit, notamment par l'indication au dispatch d'heure de fin de travail ne correspondant pas à la réalité,

Considérant que l'inspecteur a refusé l'autorisation de licencier le salarié après avoir retenu que le grief d'utilisation à des fins personnelles du véhicule et le grief de falsification des horaires n'étaient pas établis et qu'il existait un lien avec les mandats de l'intéressé ; que cette décision a été annulée par le ministre qui a cependant maintenu le refus d'autorisation mais pour d'autres motifs ; qu'il a retenu que le grief tenant à l'utilisation personnelle du véhicule est établi et non prescrit, et constitutif d'un comportement fautif, il n'est pas suffisamment grave pour fonder le licenciement, que le ministre a également retenu l'existence des discordances entre les horaires consignés par les chauffeurs dans leurs carnets, ceux relevés par les dispatchers et ceux collectés par le système GPS mais que dit les divergences entre les diverses informations ne peuvent être retenus pour établir une intention frauduleuse de M. X... ; qu'enfin, le ministre n'a pas exclu l'existence d'un lien avec le mandat détenu par le salarié ; que le tribunal administratif a débouté la société CHABE LIMOUSINES du recours qu'elle avait interjeté à l'encontre de la décision du ministre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les faits invoqués par l'employeur sont réels, objectifs et étrangers à un harcèlement moral ; que M. X... ne fournit d'ailleurs aucune explication sur les discordances relevées dans les relevés d'horaires ; que compte tenu des éléments dont il avait connaissance, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir mis en oeuvre au mois de juillet 2007 une procédure disciplinaire à l'encontre de M. X..., d'avoir prononcé à son encontre une mesure de mise à pied conservatoire qu'il n'y a pas lieu d'annuler et d'avoir ensuite exercé les voies de recours qui lui étaient ouvertes à l'encontre des décisions administratives refusant de faire droit à sa demande d'autorisation de licencier ;

* sur les salaires pendant la mise à pied conservatoire :

Considérant que M. X... soutient que les salaires afférents à la période de mise à pied conservatoire du 11 juillet au 24 août 2007 n'ont pas été payés alors que l'autorisation administrative de licenciement a été refusée ; qu'il conclut en conséquence à la condamnation de la société CHABE LIMOUSINES à lui payer la somme de 2586, 64 € outre celle de 258, 66 € au titre des congés payés ; qu'il fait valoir qu'il n'a pas pu prendre ses congés payés du fait de sa mise à pied ; que la société CHABE LIMOUSINES s'oppose à cette demande en faisant valoir qu'il a été réglé de l'intégralité des sommes qui lui étaient dues, salaires et indemnités de congés payés ;

Considérant que la mesure de mise à pied conservatoire ne fait pas obstacle à la prise de congés payés préalablement arrêtées entre l'employeur et le salarié ainsi que l'a retenu le conseil de prud'hommes dans sa motivation pertinente que la cour adopte ;

Considérant qu'il ressort de l'examen du bulletin de paie du mois d'août 2007 que M. X... a été réglé de son salaires pour la période du 11 au 28 juillet et du 21 au 23 août 2007 à hauteur de 1335, 06 € er de la somme de 1744, 38 € à titre d'indemnité de congés payés pour la période du 30 juillet au 18 août 2007 ; qu'il a été ainsi rempli de ses droits ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande ;

* sur la procédure disciplinaire engagée le 26 octobre 2007 :

Considérant qu'après convocation du 26 octobre 2007 à un entretien préalable fixé au 7 novembre 2007, la société CHABE LIMOUSINES a prononcé une mise à pied disciplinaire du 29 octobre au 18 novembre 2007 à l'encontre de M. X... en raison de son absence injustifiée pour la période du 15 au 29 octobre 2007 alors qu'elle avait refusé sa demande de congés payés pour la période du 15 octobre au 2 novembre 2007 puis sa demande de repos pour la période du 12 octobre au 5 novembre 2007 ;

Considérant que M. X... conteste cette sanction qui constitue selon lui une nouvelle manifestation de l'acharnement de l'employeur à son encontre ; qu'il expose avoir déposé régulièrement une demande de congés le 20 septembre 2007 pour la période du 15 octobre au 2 novembre 2007 ; que cette demande étant demeurée sans réponse, il a considéré que l'autorisation lui était accordée tacitement ; que la mise à pied disciplinaire d'une durée de 23 jours privative du salaire pendant la même durée est manifestement disproportionnée ; que la société réplique que la demande de congés a été refusée dans la mesure où la période du 15 octobre au 2 novembre qui est celle où se déroule la coupe du monde de rugby correspond une période de forte activité ;

Considérant qu'il résulte des pièces mises aux débats que M. X... a sollicité la prise de ses congés payés pour la période du 15 octobre 2007 au 2 novembre 2007 par lettre recommandée en date du 20 septembre 2007 reçue par son employeur le 24 septembre 2007 et non le 3 octobre 2007 ainsi que cela ressort de l'attestation établie par M. Y... ; que si les salariés avaient été avisés par SMS dès le 24 août 2007 de l'impossibilité de prendre des repos pendant tout le mois de septembre, ils n'ont été avisés de l'impossibilité de prendre des congés ou des repos les 7, 13 et 14 octobre que par SMS du 2 octobre 2007 ; qu'en tout état de cause, il appartient à l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, de fixer la date de congés payés ; que M. X... a commis une faute en passant outre le refus de l'employeur de lui accorder les congés ; qu'il ne peut se prévaloir d'une autorisation tacite de la part de celui-ci dès lors que le règlement intérieur qui lui est opposable prévoit que la demande de congés payés doit être effectuée sur un formulaire devant être validé par le supérieur en fonction des disponibilités et du volume de l'entreprise ; qu'en l'absence d'autorisation expresse matérialisée par la validation du formulaire, il ne pouvait prendre ses congés payés à compter du 15 octobre ; que le refus de la société de lui accorder des congés ou un repos est justifié en l'espèce par l'augmentation de son activité pendant la période considérée compte tenu de l'existence d'un événement sportif ; que cette directive a d'ailleurs concerné tous les salariés et non M. X... seul ; que la sanction de mise à pied d'une durée de 21 jours et non de 23 jours et le non-paiement du salaire, fondée par l'absence injustifiée du salarié, a été valablement prononcée et ne constitue pas un acte de harcèlement dirigé à son encontre ;

* sur la vérification de son état de santé le 10 octobre 2007 :

Considérant que M. X... reproche encore à la société CHABE LIMOUSINES d'avoir mandaté un médecin afin de vérifier son état de santé après deux jours d'absence alors qu'il est interdit à tout employeur de procéder à une telle contre visite avant l'expiration du délai de carence de dix jours ; qu'il n'a pas accepté cette contre visite et que l'employeur a suspendu le versement des indemnités complémentaires ;

Considérant que pour établir la validité médicale d'un arrêt en cours, l'employeur peut faire procéder à une contre-visite sur la base de la loi du 19 janvier 1978 relative à la mensualisation ; que ce droit reconnu à l'employeur constitue une des conditions substantielles de l'engagement pris par lui de verser des indemnités complémentaires de l'assurance maladie ; que le refus par le salarié de la contre-visite autorise l'employeur à suspendre le versement des indemnités ; qu'il n'existe aucun délai de carence contrairement à l'affirmation de M. X... ;

Considérant au cas présent que M. X... a été en arrêt de travail du 8 au 14 octobre 2007 alors que employeur venait de refuser sa demande de repos et sa demande de congés payés ; que le contexte particulier dans lequel cet arrêt pour maladie est intervenu autorisait l'employeur à soumettre le salarié à ce contrôle médical ; qu'en l'état du refus du salarié de subir cette contre-visite, l'employeur a pu suspendre le versement des indemnités complémentaires conformément aux dispositions de la loi ; que les éléments objectifs mis aux débats par la société CHABE LIMOUSINES permettent à la cour de retenir que la mise en oeuvre de la contre-visite et la suspension du versement des indemnités complémentaires ne constituent pas des agissements de harcèlement moral ;

Considérant que si les procédures disciplinaires engagées à l'encontre de M. X... ont pu faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre, l'employeur a apporté des éléments objectifs et s'est expliqué sur les motifs ayant présidé à l'engagement de celles-ci, ce qui conduit à exclure le harcèlement moral ; que si les problèmes de santé de M. X... peuvent s'expliquer par les tensions professionnelles, ceux-ci-ci ne sont pas imputables à des agissements de harcèlement moral ;

Considérant qu'aucun des manquements invoqués par l'appelant ne pouvant être retenu, la prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. X... de l'ensemble de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail ;

Sur la demande reconventionnelle de la société CHABE LIMOUSINES au titre du préavis :

Considérant que la société CHABE LIMOUSINES conclut à la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 515, 33 € au titre du préavis de sept jours non effectué, ce à quoi le salarié s'oppose ;

Considérant que sa demande doit être rejetée comme non fondée, la société CHABE LIMOUSINES n'ayant pas sollicité du salarié l'exécution de son préavis ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que l'équité ne commande pas en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et par ARRÊT CONTRADICTOIRE,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 17 août 2009,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties,

CONDAMNE M. X... aux dépens afférents à la procédure d'appel.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean Michel LIMOUJOUX Président et par Monsieur LANE Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat.

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 07/775
Date de la décision : 25/05/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-25;07.775 ?
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