COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 04 MAI 2011
R. G. No 10/ 01190
AFFAIRE :
Elodie, Sylvie, Sophie X...
C/
Société GARAGE STEPHANE Y...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 07 Avril 2009 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de CHARTRES
Section : Commerce
No RG : 08/ 00075
Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-Christophe LEDUC
Me Christine BORDET-LESUEUR
Copies certifiées conformes délivrées à :
Elodie, Sylvie, Sophie X...
Société GARAGE STEPHANE Y...
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATRE MAI DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame Elodie, Sylvie, Sophie X...
née le 01 Août 1983 à CHARTRES (28630)
...
28110 LUCE
représentée par Me Jean-Christophe LEDUC, avocat au barreau de CHARTRES
APPELANT
****************
Société GARAGE STEPHANE Y...
53 rue de Chartres
28120 ILLIERS COMBRAY
représentée par Me Christine BORDET-LESUEUR, avocat au barreau de CHARTRES
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2011, en audience publique, devant la cour composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
PROCEDURE
Mlle Elodie X... a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 17 avril 2009, l'appel portant sur l'ensemble des dispositions du jugement.
Suite à l'ordonnance de retrait du rôle prononcée le 24 mars 2010, le conseil de Mlle Elodie X... a sollicité le rétablissement de l'affaire
FAITS
Mlle Elodie X..., née le 1er août 1983, a été engagée à compter du 1er mars 2007 jusqu'au 28 février 2009, par la société Carosserie du Patis, dénommée par la suite Garage Stéphane Y..., en qualité de secrétaire, échelon 1, niveau 1, coefficient hiérarchique 140, par contrat à durée déterminée à temps partiel en date du 22 janvier 2007 (20 h par semaine) dit " contrat initiative emploi ", moyennant une rémunération de 716, 76 €.
Un avenant au contrat de travail était conclu le 30 avril 2007 portant l'horaire hebdomadaire à 28 heures.
La salariée faisait l'objet d'un avertissement le 26 septembre 2007 et elle était convoquée à un entretien préalable au licenciement le 6 novembre 2007, fixé au 16 novembre 2007.
Il était mis fin à son contrat par courrier en date du 22 novembre 2007, alors que la fin des relations de travail était prévue le 28 février 2009.
Elle a bénéficié du RMI fin novembre 2008 et a été admise au bénéfice de l'ARE à compter du 29 mars 2009.
Elle a conclu un CDD du 13 août 2009 au 13 décembre 2009 en qualité d'hôtesse de caisse.
Stéphane Y..., gérant de la société, est décédé le 4 avril 2008 et par ordonnance en date du 14 avril 2008, le président du tribunal de commerce de Chartres a désigné Me Guy Z... en qualité d'administrateur provisoire de la SARL GARAGE STEPHANE Y....
Par décision en date du 18 septembre 2008, le juge des tutelles de Chartres a désigné M. Pascal A... en qualité d'administrateur ad hoc chargé de représenter les enfants mineurs de Stéphane Y... au sein de l'EURL Garage Stéphane Y....
Le nouveau gérant de la société, depuis le 15 décembre 2008, est Mme Alexandra Y..., veuve de Stéphane Y....
La convention collective applicable est celle des services de l'automobile.
Mlle Elodie X... a saisi le C. P. H de demandes tendant à obtenir des dommages-intérêts pour rupture anticipée du CDD.
DECISION
Par jugement rendu le 7 avril 2009, le C. P. H de Chartres (section Commerce) en formation de départage, a :
- condamné la société Garage Stéphane Y... à payer à Mlle Elodie X... la somme de 9. 216, 18 € en indemnisation du préjudice subi du fait de la rupture de son contrat de travail
-ordonné à la société Garage Stéphane Y... de remettre à Mlle Elodie X... une attestation Assedic conforme
-condamné la société Garage Stéphane Y... à payer à Mlle Elodie X... la somme de 500 € en application des dispositions de l'article 700 du CPC
-ordonné l'exécution provisoire
-dit qu'une copie de la décision sera adressée au juge des tutelles du tribunal d'instance de Chartres chargé du suivi du dossier des enfants mineurs de Stéphane Y...
- rejeté toute autre demande
-condamné la société Garage Stéphane Y... aux dépens
DEMANDES
Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement parMlle Elodie X..., appelante, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer la somme de 500 € en application de l'article 700 du du Code de Procédure Civile
-infirmer le jugement pour le surplus
-condamner le Société garage
Y...
à lui verser les sommes suivantes :
* 20. 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture anticipée abusive
* 3. 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile
-condamner la société à lui remettre sous astreinte journalière de 100 € qui courra passé un délai de huitaine suivant la notification de l'arrêt, une attestation Pôle Emploi conforme
-condamner la société aux entiers dépens
Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement l'EURL garage
Y...
, intimée à titre principal et appelante à titre incident, par lesquelles elle demande de :
- A titre principal, infirmer le jugement
-A titre infiniment subsidiaire
-en tout état de cause,
- confirmer le jugement et débouter Mlle X... de ses plus amples demandes
-condamner Mlle Elodie X... au paiement d'une indemnité de procédure de 3. 000 € ainsi qu'aux entiers dépens
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur la requalification du contrat de travail
Considérant que Mlle Elodie X... soutient que la rupture est abusive et ouvre droit à l'indemnisation minimum visée par l'article L 1243-4 du code du travail, que seul le salarié peut se prévaloir de la requalification du contrat à l'encontre de son employeur ;
Que la Société garage
Y...
réplique que le C. I. E n'a fait l'objet d'aucune homologation par l'Etat et n'a donc pu trouver application, que les règles du CDD s'appliquent lors de la conclusion d'un tel contrat et l'ancien article L 122-1-2 applicable à l'époque, fixait la durée maximale du CDD à 18 mois, que s'agissant de dispositions d'ordre public, la requalification du CDD en CDI s'impose aux parties, que la rupture du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse ;
Considérant qu'il ressort des pièces produites aux débats, en particulier de l'attestation établie par la directrice de l'unité Pôle Emploi de Chartres, qu'aucune convention contrat initiative emploi n'a été mise en oeuvre avec le garage
Y...
par Mlle X..., que le garage
Y...
n'a bénéficié d'aucune aide dans le cadre de l'embauche de cette salariée le 1er mars 2007 ;
Que dès lors, en dépit des termes de la convention conclue entre les parties " contrat à durée déterminée-contrat initiative emploi ", le contrat litigieux qui n'est pas un contrat tripartite, comme l'exige le contrat initiative emploi, doit être réputé conclu à durée indéterminée, par application des dispositions des articles L 122-3-1 et L 122-3-13 du code du travail, alors applicables (nouvellement codifiées à l'article L 1245-1) ;
Mais considérant que cette disposition ayant été édictée dans un souci de protection du salarié, seul celui-ci peut se prévaloir de cette sanction civile à l'encontre de son employeur ;
Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que le contrat litigieux doit être considéré comme obéissant aux règles d'un contrat à durée déterminée ;
- Sur la rupture du contrat de travail
Considérant selon l'article L. 1232-6 alinéas 1 et 2 du code du travail (anciens articles L. 122-14-1, alinéa 1 et L. 122-14-2, alinéa 1) que " lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur " ;
Considérant selon l'article L. 1232-1 du même code (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ;
Considérant enfin selon l'article L. 1235-1 (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) " qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié " ;
Que par lettre du 22 novembre 2007, la société notifiait à la salariée son licenciement pour insuffisance professionelle, alléguant des erreurs répétées dans l'exécution de son travail de nature à perturber le fonctionnement interne de l'entreprise et lui accordait un préavis d'un mois à compter du 23 novembre 2007 jusqu'au 22 décembre 2007 ;
Considérant que c'est par des motifs pertinents que les premiers juges, après avoir relevé que l'employeur avait prévu l'exécution d'un préavis d'un mois au profit de la salariée, ont dit que celui-ci ne pouvait se prévaloir de l'existence d'une faute grave justifiant la rupture anticipée du contrat de travail ;
- Sur les demandes indemnitaires de Mlle Elodie X...
Considérant que Mlle Elodie X... se déclare fondée à réclamer une indemnité correspondant au montant des salaires qu'elle aurait dû percevoir jusqu'à l'échéance normale du terme, soit la somme de 14. 506, 95 €, que néanmoins, elle fait valoir que compte tenu du préjudice subi conséquent résultant de la perte injustifiée de son emploi et d'une absence de prise en charge par les Assedic jusqu'au 29 mars 2009, elle sollicite une somme de 20. 000 € ;
Que la société intimée conclut à titre subsidiaire au rejet de la demande complémentaire ;
Considérant que par application des anciennes dispositions de l'article L 122-1-2 du code du travail, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a calculé le montant de l'indemnité à allouer à la salariée jusqu'à la date du 1er septembre 2008, correspondant à la durée restant à courir jusqu'à 18 mois et alloué à Mlle X... la somme de 9. 216, 18 € ;
Que toutefois, cette indemnité constitue une réparation forfaitaire minimale incompressible et indépendante du préjudice subi ;
Qu'au vu des pièces justificatives produites, le montant du préjudice complémentaire subi par la salariée du fait de cette rupture, sera évalué à la somme de 2. 500 € et le jugement déféré sera réformé de ce chef ;
- Sur la remise d'une attestation Pôle Emploi conforme
Considérant qu'il sera fait droit à cette demande, avec la prévision d'une astreinte ;
- Sur l'article 700 du CPC
Considérant qu'il sera alloué à l'appelante une indemnité de procédure en complément de celle allouée par les premiers juges ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf au titre de la demande complémentaire en réparation du préjudice subi résultant de la rupture anticipée du contrat et de la remise des documents sociaux
Et statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne le Société garage
Y...
à payer à Mlle Elodie X... la somme complémentaire de 2. 500 € à titre de dommages-intérêts
Ordonne à la société Garage Stéphane Y... de remettre à Mlle Elodie X... une attestation Pôle Emploi conforme sous astreinte de 40 € à compter d'un délai de 15 jours suivant la notification du présent arrêt
Y ajoutant,
Condamne la Société garage
Y...
à verser à Mlle Elodie X... la somme de 1. 300 € au titre de l'article 700 CPC
Rejette toute autre demande
Condamne la Société garage
Y...
aux entiers dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat.