COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 04 MAI 2011
R. G. No 09/ 04410
AFFAIRE :
Arthur, Liviu, Mihai X...
C/
S. A. S. RENAULT
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 19 Octobre 2006 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT
Section : Encadrement
No RG : 04/ 00208
Copies exécutoires délivrées à :
Me Jean-luc TISSOT
Me Catherine LE JOUAN
Copies certifiées conformes délivrées à :
Arthur, Liviu, Mihai X...
S. A. RENAULT
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATRE MAI DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Arthur, Liviu, Mihai X...
né le 12 Juin 1978 à BUCAREST (ROUMANIE)
...
75019 PARIS
comparant en personne, assisté de Me Jean-luc TISSOT, avocat au barreau de VERSAILLES
****************
S. A. S. RENAULT
13/ 15, Quai Alphonse le Gallo
92100 BOULOGNE BILLANCOURT
représentée par Me Catherine LE JOUAN, avocat au barreau de PARIS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,
PROCEDURE
M. Arthur X... a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 27 novembre 2006, l'appel portant sur la totalité de la décision.
FAITS
M. Arthur Liviu X..., né le 12 juin 1978, a été engagé à l'âge de 23 ans en qualité de responsable reporting frais et effectif par CDI en date du 2 juillet 2001, par la société RENAULT, statut cadre, position 1, indice 76.
Au 1er septembre 2002, il était chargé du back-office budgétaire de la direction commerciale France et sa dernière rémunération mensuelle brute était de 2. 865 €.
La convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie.
Une convocation à entretien préalable lui était notifiée le 16 septembre 2003, fixé au 26 septembre.
Par lettre du 29 septembre 2003, la société lui notifiait son licenciement pour insuffisance de résultats et pour refus de se conformer aux directives et process de sa hiérarchie.
Il a été dispensé d'effectuer son préavis de deux mois.
M. Arthur X... bénéficiait de plus de 2 ans d'ancienneté et la société compte plus de 11 salariés.
Après avoir demandé sa réintégration par courrier en date du 19 novembre 2003, M. Arthur X... a saisi le C. P. H le 26 janvier 2004 de demandes tendant à voir déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre.
DECISION
Par jugement rendu le 19 octobre 2006, le C. P. H de Boulogne-Billancourt (section Encadrement) a :
- débouté M. Arthur X... de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens
DEMANDES
Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par M. Arthur X..., appelant, aux termes desquelles il demande à la cour, de :
- infirmer le jugement
-dire que le licenciement prononcé dépourvu de cause réelle et sérieuse
-condamner la société RENAULT à lui verser la somme de 51. 573, 06 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2004
- constater qu'il a effectué des heures supplémentaires
-condamner la société RENAULT au paiement des heures supplémentaires d'un montant de 13. 665, 90 € avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2004
- condamner la société RENAULT à lui verser la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 CPC
Vu les conclusions écrites, visées par le greffe et soutenues oralement par la société RENAULT, intimée, par lesquelles elle demande de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions
-débouter M. Arthur X... de l'ensemble de ses demandes
-le condamner aux dépens
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur la rupture du contrat de travail
Considérant selon l'article L. 1232-6 alinéas 1 et 2 du code du travail (anciens articles L. 122-14-1, alinéa 1 et L. 122-14-2, alinéa 1) que " lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur " ;
Considérant selon l'article L. 1232-1 du même code (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ;
Considérant enfin selon l'article L. 1235-1 (ancien article L. 122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) " qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié " ;
Considérant que les motifs énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement fixent les termes et les limites du litige ;
Considérant en l'espèce, que par lettre du 29 septembre 2003, la société RENAULT notifiait à M. Arthur X... son licenciement en invoquant neuf griefs, concluant que son licenciement lui est notifié pour insuffisance de résultats et pour refus de se conformer aux directives et process de sa hiérarchie ;
Considérant que M Arthur X... soutient que lors de l'entretien préalable, Mme Y... a évoqué 14 griefs, que 9 griefs ont été retenus dans la lettre de licenciement, que toutefois aucun de ces griefs n'est suffisamment réel et sérieux pour justifier une mesure de licenciement, que la surabondance de griefs mineurs et infondés constitue en fait l'aveu de l'incapacité de l'employeur à justifier son licenciement, que son entourage professionnel s'accorde à reconnaître qu'il est performant, que sa supérieure hiérarchique, Mme Y..., contrôleur de gestion, a entravé son évolution au sein de l'entreprise, les relations s'étant tendues depuis le 17 septembre 2002, date de l'entretien d'évaluation de mi-année, alors qu'il avait exprimé le souhait de bénéficier de la mobilité en début d'année lorsque sa supérieure hiérarchique était Mme Z... ;
Que la société RENAULT réplique que le salarié ne disposait pas des compétences professionnelles auxquelles la société pouvait légitimement s'attendre compte tenu de son profil, qu'elle a régulièrement mis en garde le salarié contre les dérives et dysfonctionnements dans le cadre de points spécifiques et de ses entretiens individuels dès janvier 2002, et ce, avant l'arrivée de Mme Y... au sein de l'entreprise en mai 2002, puis par courriers du 17 décembre 2002 (manque de performance) et du 11 mars 2003 (persistance de lacunes), qu'elle verse aux débats les entretiens annuels d'évaluation démontrant l'insuffisance professionelle du salarié, qu'elle soutient que les 9 griefs sont bien justifiés et que le salarié refusait toute collaboration avec son équipe de travail ;
Considérant que les griefs d'insuffisance de résultats et de refus de se conformer aux directives et process de sa hiérarchie, justifiant le licenciement du salarié, doivent être précis et matériellement vérifiables ;
Mais considérant que le contrat de travail du salarié prévoit expressément que : " Compte tenu de la nature de ses fonctions, des responsabilités qu'il exerce et de l'autonomie qui lui est reconnue, l'activité de M. X... est exprimée en jours sur une base annuelle " conformément à un accord d'entreprise ;
Considérant que M Arthur X..., jeune salarié de 25 ans, bénéficiait d'une autonomie professionnelle expressément reconnue, en qualité de cadre, chargé de back-office budgétaire à la direction commerciale France de la société Renault ;
Que l'employeur ne démontre pas les insuffisances alléguées contre le salarié, de façon précise et manifeste, alors que ce dernier produit l'attestation circonstanciée de M. A..., ancien collègue de travail, le décrivant comme une personne " surqualifiée pour un poste administratif de suivi budgétaire, qui aurait dû le conduire rapidement à une mobilité dans l'entreprise avec de réelles responsabilités et évoquant la dégradation des relations de M Arthur X... avec Mme Y..., analysant la situation non comme la conséquence des reproches qui lui ont été adressés, mais comme les effets d'un trop grand
écart entre le niveau du salarié et celui requis par son travail, dans un secteur où la créativité et l'initiative n'ont guère leur place et concluant que sa mobilité dans un poste adpaté à sa formation initiale, aurait pu régler la question, alors qu'à l'inverse et vraisemblablement, à la suite de l'évaluation de décembre 2002, il a été décidé de se séparer de lui-les mois consacrés en 2003 à une recherche de mobilité pour lui ne pouvaient alors servir qu'à confirmer une impasse préparant son licenciement " ;
Qu'en conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
- Sur les demandes indemnitaires de M. Arthur X...
Considérant que le salarié sollicite la somme de 51. 573, 06 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit 18 mois de salaire, l'employeur répliquant que cette somme est particulièrement élevée au regard de l'ancienneté du salarié au sein de l'entreprise (2 ans et 3 mois) ;
Que le salarié ne conteste pas avoir retrouvé du travail à compter du 1er mai 2004, soit 7 mois après son licenciement ;
Qu'il lui sera alloué de ce chef, la somme de 20. 000 € ;
- Sur la demande au titre des heures supplémentaires
Considérant que c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté ce chef de demande, rappelant que l'activité du salarié, cadre soumis à un forfait, est exprimée en jours sur une base annuelle et non heures ;
- Sur l'article 700 du CPC
Considérant qu'il sera alloué au salarié une indemnité au titre des frais irrépétible ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Déclare le licenciement de M. Arthur X... dépourvu de cause réelle et sérieuse
En conséquence,
Condamne la S. A. S RENAULT à verser à M. Arthur X... la somme 20. 000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts de droit à compter du présent arrêt
Condamne la S. A. S RENAULT à payer à M. Arthur X... la somme de 1. 400 € au titre de l'article 700 CPC
Rejette toute autre demande
Condamne la S. A. S RENAULT aux entiers dépens.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat.