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02/03/2011 | FRANCE | N°08/00361

France | France, Cour d'appel de Versailles, 02 mars 2011, 08/00361


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES



Code nac : 80A
15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 02 MARS 2011

R. G. No 10/ 01841

AFFAIRE :

Société NOUVELLE SOFRAPAIN VENANT AUX DROITS DE LA SAS SOFRAPAIN



C/
Carlos X...




Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 09 Février 2010 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de VERSAILLES
Section : Activités diverses
No RG : 08/ 00361



Copies exécutoires délivrées à :

la SCP CABIENT YRA

MIS
Me Nicolas SANFELLE



Copies certifiées conformes délivrées à :

Société NOUVELLE SOFRAPAIN VENANT AUX DROITS DE LA SAS SOFRAPAIN

Carlos X...


le : RÉPUBLIQUE FR...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 02 MARS 2011

R. G. No 10/ 01841

AFFAIRE :

Société NOUVELLE SOFRAPAIN VENANT AUX DROITS DE LA SAS SOFRAPAIN

C/
Carlos X...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 09 Février 2010 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de VERSAILLES
Section : Activités diverses
No RG : 08/ 00361

Copies exécutoires délivrées à :

la SCP CABIENT YRAMIS
Me Nicolas SANFELLE

Copies certifiées conformes délivrées à :

Société NOUVELLE SOFRAPAIN VENANT AUX DROITS DE LA SAS SOFRAPAIN

Carlos X...

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX MARS DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société NOUVELLE SOFRAPAIN VENANT AUX DROITS DE LA SAS SOFRAPAIN
14 rue denis papin
78190 TRAPPES

représentée par me Gaelle DUC ECHAMPARD du CABIENT YRAMIS, avocats au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur Carlos X...

...

78280 GUYANCOURT

représenté par Me Nicolas SANFELLE, avocat au barreau de VERSAILLES

NTIM IE
****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle OLLAT, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,

M. Carlos X... a été engagé par la société SOFRAPAIN, spécialisée dans la fabrication industrielle du pain, en qualité d'opérateur qualifié suivant contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er mars 2002.

Il a été affecté à un poste de conducteur d'emballage sur trois lignes de production.

La convention collective de la boulangerie et de la pâtisserie industrielle est applicable aux relations contractuelles.

Il a été victime d'un accident du travail le 20 mai 2006 et a été arrêté jusqu'au 31 août 2006 ; il a été ensuite arrêté pour maladie du 1er septembre 2006 au 1er novembre 2006, la caisse primaire d'assurance maladie ayant refusé la prise en charge au titre de la législation professionnelle pour les lésions constatées le 21 juillet 2006.

Il a repris le travail le 2 novembre 2006 et affecté à un poste de trieur après ligne en sortie de surgel ; il a passé la visite médicale de reprise le 13 novembre suivant, à l'issue de laquelle le médecin du travail l'a déclaré apte au poste actuel, pas de port de charges répété supérieur à 5/ 8 kg, examen complémentaire dans un mois.

Le 31 janvier 2007, le médecin du travail a confirmé l'aptitude au poste actuel et a émis le souhait de revoir le salarié dans trois mois.

Le 10 mai 2007, un examen médical a été effectué au visa de l'article R. 211-57 du code du travail et le médecin a ainsi conclu " l'étude de poste de conducteur d'emballage a été effectué le 3 mai. En attendant l'avis spécialisé du 24 mai 2007, M. X... peut travailler à un poste assis-debout sans port de charges répété supérieur à 5/ 8kg ; il peut faire du travail administratif et peut conduire. " ; à l'issue du second examen médical qui s'est déroulé le 30 mai 2007, le médecin du travail a conclu à " l'inaptitude au poste de conducteur d'emballage, apte à son poste actuel et à tout poste lui permettant une alternance de position assis/ debout et ne nécessitant pas de port de charges répété supérieur à 8 kg ; il peut faire un travail administratif et peut conduire. "

Le 19 juin 2007, la société SOFRAPAIN lui a proposé un reclassement en qualité d'opérateur de conditionnement avec une diminution de salaire ; le salarié a refusé cette proposition ainsi que les deux offres suivantes.

Après convocation à un entretien préalable, M. X... a été licencié pour inaptitude au poste de conducteur d'emballage par lettre recommandée en date du 14 août 2007.

Au dernier état de la relation contractuelle, il percevait une rémunération mensuelle brute de 1615, 58 €.

Contestant son licenciement, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Versailles le 10 avril 2008 d'une demande dirigée à l'encontre de la société SOFRAPAIN tendant à la voir condamner au paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts.

Par jugement en date du 9 février 2010, le conseil de prud'hommes de Versailles, sous la présidence du juge départiteur a :
- dit que M. X... pouvait demander l'application des dispositions applicables au salarié victime d'un accident du travail,
- dit le licenciement illicite,
- condamné la société au paiement des sommes suivantes :

* 964 € à titre d'indemnité de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2008,
* 23 000 € à titre d'indemnité pour licenciement illicite avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement,
- rappelé les dispositions relatives à l'exécution provisoire de droit,
- ordonné en outre l'exécution provisoire,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties,
- condamné la société au paiement de la somme de 1500 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société SOFRAPAIN a régulièrement interjeté appel du jugement.

Vu les conclusions de la société NOUVELLE SOFRAPAIN venant aux droits de la société SOFRAPAIN datées du 11 janvier 2011 reprises oralement tendant à l'infirmation du jugement et à la condamnation de M. X... au remboursement des sommes qu'il a perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement et à lui payer la somme de 1500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son recours, elle fait essentiellement valoir que :
- le licenciement ne fait pas suite à une période de suspension du contrat de travail pour accident du travail mais pour maladie et elle n'avait pas à appliquer les dispositions des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail,
- l'inaptitude à son poste de conducteur d'emballage n'est pas directement lié à l'accident du travail du 20 mai 2006 mais vraisemblablement à un état pathologique préexistant,
- elle ne pouvait pas deviner, à la lecture des contre-indications médicales que celles-ci étaient la conséquence de l'accident du travail alors que le salarié souffre du dos depuis 1992,
- elle a respecté son obligation de reclassement en proposant au salarié le poste d'opérateur de conditionnement, le poste d'opérateur de fabrication, le poste de contrôleur qualité et environnement et le poste d'agent de nettoyage.

M. X... a formé appel incident.

Vu les conclusions datées du 12 janvier 2011 développées oralement par lesquelles il demande à la cour d'infirmer le jugement et de :
- constater la violation par l'employeur des dispositions des articles L. 1226-10 du code du travail et L. 4612-11 du même code,
- condamner la société SOFRAPAIN à lui payer la somme de 25 000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article L. 1226-15 du code du travail et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail,
- condamner la société SOFRAPAIN à lui payer les sommes de :
* 2000 € à titre de dommages-intérêts pour défaut de notification des motifs rendant impossible le reclassement,
* 924 € bruts correspondant au solde d'indemnité spéciale de licenciement,
* 2500 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il rappelle que les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement et soutient que ces conditions sont réunies en l'espèce.

Il reproche à la société d'avoir méconnu ces dispositions protectrices et d'avoir manqué à son obligation de reclassement.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 12 janvier 2011.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le licenciement :

Considérant que la société NOUVELLE SOFRAPAIN poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit le licenciement illicite au motif que l'employeur n'a pas fait application des dispositions protectrices applicables au salarié victime d'un accident du travail alors que l'inaptitude constatée au poste de travail n'est pas d'origine professionnelle,

Considérant que les règles protectrices applicables aux victimes d'accident du travail s'appliquent, dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement pour origine cet accident du travail, et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; que l'application de l'article L. 1226-10 du code du travail n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude

Considérant au cas présent que M. X... a été victime d'un accident du travail le 20 mai 2006 dans les circonstances suivantes ainsi que cela résulte de la déclaration d'accident du travail établie par la société : alors qu'il portait un carton pour le remettre sur le tapis de la ligne, il a ressenti une douleur dans le dos ; que le caractère professionnel de l'accident a été reconnu par la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines le 26 mai 2006 ; que les arrêts de travail au titre de l'accident du travail ont été délivrés jusqu'au 31 août 2006, le salarié étant ensuite placé sous le régime de la prise en charge pour maladie non professionnelle ; qu'il a été licencié le 14 août 2007 pour inaptitude au poste de conducteur d'emballage, poste qu'il n'occupait plus depuis le 2 novembre 2006 ayant été affecté à un poste de trieur à compter de cette date,

Considérant que le médecin spécialiste exerçant au sein de l'unité de pathologie professionnelle de santé au travail et d'insertion qui a reçu M. X... le 24 mai 2007 à la demande du médecin du travail a relevé que l'accident du travail du 20 mai 2006 est en relation avec une hernie discale diagnostiquée en 1992 ayant récidivé ; qu'il a également noté une persistance d'une lombalgie chronicisée et a conclu qu'il n'était pas raisonnable de maintenir le salarié au poste d'emballeur mais que le poste de trieur sans manipulation de charges et avec faculté de changer régulièrement de position lui semblait médicalement possible, ajoutant que les aménagements rentrent dans le cadre de l'accident du travail ; que le médecin du travail fait expressément référence à l'avis du médecin spécialiste dans l'avis émis le 30 mai 2007 à l'issue de la seconde visite médicale ; que ces documents mettent en évidence l'existence d'un lien de causalité au moins partielle avec l'accident du travail du 20 mai 2006 ainsi que l'ont dit à juste titre les premiers juges ; que la société NOUVELLE SOFRAPAIN ne met aux débats aucune pièce aux débats de nature à démentir l'existence d'un lien entre l'inaptitude à l'origine du licenciement et l'accident du 20 mai 2006 ;

Considérant qu'il convient dès lors de rechercher si l'employeur avait connaissance de ce lien au moment du licenciement ; qu'il conteste avoir en avoir eu connaissance et critique la motivation adoptée par les premiers juges qui ont considéré que ce lien était établi tant par les termes de la déclaration d'accident du travail que par les avis du médecin du travail des 13 novembre 2006 et 31 janvier 2007 prohibant le port de charges supérieures à 5/ 8 kg et la décision de l'employeur d'affecter le salarié sur un poste de reclassement provisoire ; que la société SOFRAPAIN explique que le salarié ayant mal au dos depuis 1992 et étant en arrêt pour maladie, elle ne pouvait deviner que l'inaptitude trouvait son origine dans l'accident du travail ;

Considérant que M. X... a bénéficié d'un arrêt de travail à compter du 20 mai 2006 à la suite d'un accident du travail survenu alors qu'il occupait un poste de conducteur d'emballage ; qu'il n'a plus occupé ce poste jusqu'à son licenciement prononcé le 14 août 2007, l'employeur ayant pris l'initiative de l'affecter à un poste de trieur du 2 novembre 2006, date de reprise de son travail, jusqu'à la date de son licenciement ; que le fait pour l'employeur de licencier le salarié pour une inaptitude constatée par le médecin du travail au poste qu'il occupait précisément au moment où il a été victime d'un accident du travail et sur lequel il n'a jamais été réaffecté suffit à établir qu'il avait connaissance du lien au moins partiel entre l'inaptitude et l'accident du travail ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que les dispositions des articles relatives au salarié victime d'un accident du travail sont applicables en l'espèce ;

Considérant qu'en licenciant le salarié sans avoir recueilli l'avis préalable des délégués du personnel, l'employeur a violé les dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail ; que la méconnaissance de cette formalité ouvre droit, au profit du salarié, à l'allocation d'une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaires ; qu'en tenant compte de l'ancienneté de M. X... et du fait qu'il est resté au chômage pendant une année après le licenciement, le conseil de prud'hommes a fait une exacte appréciation du préjudice en lui allouant une indemnité d'un montant de 23 000 € ; que M. X... qui conclut à l'augmentation du montant de l'indemnité, ne met aux débats aucune pièce de nature à établir que l'évaluation serait insuffisante pour réparer son préjudice ; que le jugement doit être confirmé en sa disposition relative au quantum de l'indemnisation ;

Sur les dommages-intérêts pour défaut de notification écrite des motifs d'impossibilité de reclassement :

Considérant que cette indemnité ne peut pas se cumuler avec celle allouée sur le fondement des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail ; qu'il s'en suit que le jugement doit être confirmé sur ce point ;

Sur le solde d'indemnité spéciale de licenciement :

Considérant que l'inaptitude trouvant son origine dans l'accident du travail du 20 mai 2006, le salarié a droit à une indemnité de licenciement égale au double de l'indemnité légale ; que cette indemnité ayant été exactement calculée par le conseil de prud'hommes, cette disposition sera également confirmée ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile :

Considérant que l'équité commande en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'intimée dans la mesure prévue au dispositif du présent arrêt ; que cette même demande doit être rejetée en ce qu'elle émane de la société appelante ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et par ARRÊT CONTRADICTOIRE,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Versailles le 9 février 2010,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société NOUVELLE SOFRAPAIN à payer à M. X... la somme complémentaire de 1500 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société NOUVELLE SOFRAPAIN aux dépens afférents à la procédure d'appel.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean Michel LIMOUJOUX Président et par Monsieur LANE Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat.

Le GREFFIERLe PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 08/00361
Date de la décision : 02/03/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-02;08.00361 ?
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