COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 02 MARS 2011
R. G. No 10/ 02218
AFFAIRE :
Emad X...
C/
S. A. R. L. TRIANGLE PEINTURE STP
Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 17 Septembre 2008 par le Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Activités diverses
No RG : 07/ 00273
Copies exécutoires délivrées à :
Me Véronique LEMERCIER-HENNON
Copies certifiées conformes délivrées à :
Emad X...
S. A. R. L. TRIANGLE PEINTURE STP
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX MARS DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Emad X...
...
93800 EPINAY SUR SEINE
représenté par M. Christophe Y... (Délégué syndical ouvrier)
APPELANT
****************
S. A. R. L. TRIANGLE PEINTURE STP
124 bld henri Barbusse
78500 SARTROUVILLE
représentée par Me Véronique LEMERCIER-HENNON, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Nicole BURKEL, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,
PROCEDURE
L'appel a régulièrement été interjeté par M. X... le 21 octobre 2008.
La partie appelante a déclaré faire appel du jugement déféré en toutes ses dispositions.
Suite à l'ordonnance de retrait du rôle prononcée le 27 janvier 2010, le conseil de l'appelant a sollicité le rétablissement de l'affaire par courrier du 10 mai 2010.
FAITS
M. Emad X... a été embauché par la société TRIANGLE PEINTURE exerçant sous l'enseigne " Au plaisir de rénover ", en qualité de peintre, ouvrier pofessionnel, niveau II coefficient 185, en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 10 octobre 2000 et dépendant de la convention collective du bâtiment de la région parisienne.
Le 12 janvier 2007, la société TRIANGLE PEINTURE a notifié à M. Emad X... un avertissement suite à un abandon de poste, des insultes et des menaces proférées à l'encontre de son supérieur hiérarchique et employeur, M. Z....
Le salarié a formé des réclamations au titre de son salaire (heures supplémentaires, carte orange) le 15 janvier 2007 et a contesté l'avertissement qui lui avait été notifié par courrier du 17 janvier 2007 en invoquant des pressions exercées par l'employeur et des faits de harcèlement.
L'employeur a régularisé sur le salaire de janvier 2007 la somme due au titre du salaire minimum et des heures supplémentaires majorées à 25 % (2. 516, 95 €), en rappelant dans un courrier du 6 février 2007 que le remboursement de la carte orange est subordonné à la remise des titres.
L'employeur a régularisé sur le salaire de février 2007 la somme due au titre de la prise en charge de la carte orange (86, 10 €).
Le 8 mars 2007, la société TRIANGLE PEINTURE a notifié à M. Emad X... un second avertissement pour non-respect des ordres donnés par la hiérachie et lenteur dans l'accomplissement de son travail.
Le 18 avril 2007, le salarié a notifié à son employeur sa prise d'acte de rupture de son contrat de travail pour non paiement de la moitié de la carte orange et régularisation opérée en janvier 2007 insuffisante par rapport à la somme qui lui serait due au titre des indemnités de trajet et des reliquats de salaire.
La société emploie moins de 11 salariés.
Sa rémunération brute mensuelle s'élevait à la somme de 1. 629, 33 €.
Il a saisi le C. P. H le 20 avril 2007 de demandes tendant à obtenir des dommages-intérêts pour la résolution judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur avec effets de droit à condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre.
DECISION DEFEREE :
Par jugement rendu le 17 septembre 2008, le CPH d'Argenteuil (section Industrie) a :
- dit que selon les éléments produits par les parties, les conséquences de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du salarié doivent s'analyser comme une démission
-débouté M. Emad X... de l'intégralité de ses demandes
-débouté la SARL TRIANGLE PEINTURE de sa demande reconventionnelle
-mis les dépens à la charge de M. Emad X...
DEMANDES
Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier et non soutenues oralement à l'audience, M. Emad X..., appelant, demande à la cour, de :
-. infirmer le jugement du C. P. H en ce qu'il l'a débouté de ses demandes
-statuant à nouveau,
- ordonner que la SARL TRIANGLE PEINTURE lui règle " les sommes de... " et la-somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du CPC
M. Emad X... soutient que les obligations nées de la convention collective doivent être appliquées, que l'employeur n'a pas appliqué les majorations des bonifications des heures supplémentaires et le paiement des salaires conventionnels, ni les indemnités conventionnelles de trajet auxquelles il pouvait prétendre, que les manquements sont avérés et justifient la qualification de la prise d'acte de rupture en un licenciement abusif, que la société a tenté de le faire démissionner moyennant le paiement de certaines régularisations qui lui étaient dues (projet de lettre du 13 avril 2007 et lettre du 18 avril), que l'employeur a voulu abuser de sa fragilité, ne sachant pas lire le français et le lisant très difficilement ;
Il demande le paiement de la somme de 9. 775, 98 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, la somme de 955, 97 € au titre du paiement des rappels conventionnels des salaires et de 95, 60 € au titre des congés y afférents, la somme de 4. 444, 30 € au titre du paiement du rappel de la carte orange, la somme de 1. 609, 03 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la somme de 3. 258, 66 € au titre de l'indemnité de préavis et 325, 87 € au titre des congés y afférents, la remise des documents sociaux ainsi qu'une indemnité de procédure de 1. 500 €.
Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience, la SARL TRIANGLE PEINTURE, intimée, demande à la cour, de :
• confirmer le jugement en toutes ses dispositions
• constater que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. Emad X... produit les effets d'une démission
• débouter M. Emad X... de l'intégralité de ses demandes
• lui donner acte de son offre de régler la somme de 1. 221, 15 € au titre du remboursement des frais de transport
• le condamner au paiement de la somme de 2. 500 € au titre de l'article 700 CPC
La société TRIANGLE PEINTURE réplique que les griefs invoqués par le salarié à l'appui de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail étant totalement infondés, celle-ci produit nécessairement les effets d'une démission, que ce n'est qu'à partir du mois de février 2005 et par erreur, que le salaire de l'appelant n'a pas été réajusté en fonction de minima conventionnels, qu'elle a procédé aux régularisations au titre des heures supplémentaires, que ce n'est qu'à compter du mois de janvier 2007, que le salarié lui a transmis son coupon de carte orange, lui permettant de procéder au remboursement de la moitié de la carte orange, qu'elle conteste avoir exercé des pressions sur le salarié, que les avertissements ne visaient pas à l'acculer à la démission, mais à modifier son comportement dans le souci de poursuivre la relation contractuelle dans de bonnes conditions, que le salarié a fait preuve de mauvaise foi, qu'elle objecte que le salarié a retrouvé un emploi immédiatement après avoir pris acte de la rupture de son contrat de travail et qu'il ne justifie pas du préjudice qu'il allègue.
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur la requalification de la démission en licenciement aux torts de l'employeur
Considérant que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ;
Que lorsque le salarié, sans invoquer un vice de consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission ;
Considérant en l'espèce que le 18 avril 2007, le salarié a notifié à son employeur sa prise d'acte de rupture de son contrat de travail pour non paiement de la moitié de la carte orange et régularisation opérée en janvier 2007 insuffisante par rapport à la somme qui lui serait due au titre des indemnités de trajet et des reliquats de salaire ;
Considérant que c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont dit que le salarié a été rempli de ses droits au moment de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail et que cette prise d'acte doit produire les effets d'une démission ;
Considérant en effet, que l'employeur, suite aux réclamations faites par le salarié par courrier du 15 janvier 2007, a immédiatement procédé aux régularisations qui étaient justifiées dès qu'elle a eu connaissance des anomalies ;
Que ces régularisations effectuées courant février 2007 ont été effectuées deux mois avant que le salarié ne prenne acte de la rupture de son contrat de travail ;
Que ces manquements, immédiatement régularisés par l'employeur, n'étaient pas suffisamment graves pour justifier que la prise d'acte de la rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Qu'en conséquence et par application des dispositions de l'article 1134 du code civil et de l'article L. 1231-1 du code du travail, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. Emad X... de l'ensemble de ses demandes ;
- Sur les demandes indemnitaires du salarié
Considérant que le salarié sera débouté du surplus de ses demandes qui ne sont pas justifiées au vu des pièces produites ;
Que toutefois, il sera donné acte à l'employeur de son offre de régler la somme de 1. 221, 15 € au titre du remboursement des frais de transport (moitié des frais engagés) au vu des relevés de compte produits par le salarié le 24 juillet 2009 justifiant des frais engagés au titre de ses frais de transport ;
- Sur l'article 700 du CPC
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du CPC pour des considérations liées à l'équité ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
DONNE acte à la SARL TRIANGLE PEINTURE de son offre de régler à M. Emad X... la somme de 1. 221, 15 € au titre du remboursement des frais de transport
REJETTE toute autre demande
Laisse les entiers dépens à la charge de M. Emad X....
Arrët-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Monsieur LANE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,