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09/02/2011 | FRANCE | N°09/038518

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15, 09 février 2011, 09/038518


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2011

R.G. No 09/03851

AFFAIRE :

Kathryn X...

C/

SAS ACE SERVICES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 27 Avril 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

Section : Encadrement

No RG : 07/00627

Copies exécutoires délivrées à :

Me Stéphane BEURTHERET

Me Pierre BESSARD DU PARC

Copies certifiées conformes délivrées à :



Kathryn X...

SAS ACE SERVICES

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE ONZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 09 FEVRIER 2011

R.G. No 09/03851

AFFAIRE :

Kathryn X...

C/

SAS ACE SERVICES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 27 Avril 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERSAILLES

Section : Encadrement

No RG : 07/00627

Copies exécutoires délivrées à :

Me Stéphane BEURTHERET

Me Pierre BESSARD DU PARC

Copies certifiées conformes délivrées à :

Kathryn X...

SAS ACE SERVICES

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE ONZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Kathryn X...

...

78790 SEPTEUIL

représentée par Me Stéphane BEURTHERET, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

SAS ACE SERVICES VENANT AUX DROITS DE SNC ACE SERVICES

1 bis avenue du 8 mai 1945

Saint Quentin en Yvelines

78284 GUYANCOURT CEDEX

représentée par Me Pierre BESSARD DU PARC, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 13 Décembre 2010, en audience publique, devant la cour composé(e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,

Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE

PROCEDURE

Le 25 septembre 2009, Mme Kathryn X... a régulièrement interjeté appel du jugement déféré le 27 juillet 2009, l'appel visant la totalité des dispositions du jugement.

FAITS

Madame Kathryn X... a été engagée par la société ACE SERVICES par contrat à durée indéterminée, en date du 23 septembre 2005, à compter du 2 novembre 2005, en qualité d'auditeur interne, statut cadre, position III A, coefficient 135.

Le contrat de travail prévoyait une clause de mobilité, la salariée devant effectuer tous les déplacements nécessaires à son activité tant en France qu'à l'étranger.

La société ACE SERVICES est une filiale du groupe AIRWELL, lui-même appartenant au groupe israélien ELCO HOLDING LTD par le biais d'une société hollandaise, nommée Airwell Air Conditionning BV.

La salariée a fait l'objet le 3 mai 2007 d'une convocation à entretien préalable à licenciement, tenu le 11 mai 2007, et a été licenciée le 21 mai 2007 pour "insuffisance professionnelle" .

L'entreprise emploie plus de onze salariés ; la convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Le salaire mensuel brut moyen était de 5.000 euros.

Par jugement rendu le 27 juillet 2009, le conseil de prud'hommes de Versailles, section Encadrement, a :

- condamné la société ACE SERVICES à payer à madame X... les sommes suivantes :

* 7.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société ACE SERVICES de sa demande reconventionnelle,

- condamné la société ACE SERVICES aux éventuels dépens de l'instance

Madame X..., appelante, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :

- infirmer partiellement le jugement du 27 juillet 2009,

- dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société ACE SERVICES à lui payer les sommes suivantes :

* 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive

* 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

La société ACE SAS venant aux droits de la société SNC ACE SERVICES, intimée et appelante incidemment, par écritures visées par le greffier et soutenues oralement, demande à la cour de :

- infirmer la décision des premiers juges en ce que la mesure de licenciement notifiée à madame X... a été déclarée abusive

- en conséquence, dire n'y avoir lieu à versement d'une indemnité quelconque au profit de madame X...

- condamner madame X... à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la rupture du contrat de travail

Considérant selon l'article L.1232-6 alinéas 1 et 2 du code du travail (anciens articles L.122-14-1, alinéa 1 et L.122-14-2, alinéa 1) que "lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur" ;

Considérant selon l'article L.1232-1 du même code (ancien article L.122-14-3, alinéa 1 phrase 1) que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse; qu'ainsi les faits invoqués et les griefs articulés à l'encontre du salarié doivent être exacts et établis et suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ;

Considérant enfin selon l'article L.1235-1 (ancien article L.122-14-3, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2) "qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié" ;

Considérant en l'espèce, que Mme X... a été licenciée le 21 mai 2007 pour insuffisance professionnelle, le courrier de licenciement étant fondé essentiellement sur des critiques concernant le contenu des rapports d'audit des entités italiennes (Itelco) et chinoises (en Chine et à Hong-Kong), rédigées par la salariée ;

Que celle-ci a saisi le 15 juin 2007 le C.P.H de demandes tendant à voir déclarer abusive la rupture de son contrat de travail et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre ;

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, se fonde sur une insuffisance professionnelle, qui constitue un motif qui doit être matériellement vérifiable ;

Considérant que la salariée sollicite la confirmation du jugement du chef du mal-fondé du licenciement, qu'elle soutient que les critiques de ses rapports d'audit (tardiveté, inexactitude) ne sont pas justifiés, que l'employeur n'établit pas d'une part, le prétendu non-respect des missions générales de l'auditeur interne, qu'au contraire, elle produit des e-mails satisfecit transmis par des managers multi-nationaux avec lesquels elle a été amenée à collaborer, relatifs à des rapports d'audits qu'elle a rendus, d'autre part, l'absence d'insuffisance alléguée dans la production de rapports d'audit, alors qu'elle a accompli les rapports d'audit programmés et que ses amplitudes journalières de travail étaient importantes, qu'elle fait observer que l'employeur a entendu externaliser son activité d'audit, son poste n'ayant pas été remplacé après son départ ;

Considérant que l'employeur réplique que lors du recrutement de la salariée, il s'agissait d'une création de poste, que celle-ci a tenté d'échapper à l'exécution normale de son préavis, qu'il fait observer que le rôle confié à la salariée était très important, que sa mission s'exerçait sous la seule autorité de M. Z..., directeur de l'audit interne du groupe Elco Holdings, ce qui lui garantissait une grande autonomie et indépendance dans le cadre de ses relations avec les différents intervenants des sociétés filiales, qu'il ajoute qu'aucune amélioration n'a été constatée après la première année d'expérience et que des erreurs graves ont été décelées, que la salariée n'a pas démontré ses prétendues qualités d'initiative et d'autonomie, que les rapports réalisés ont manqué d'intérêt profitable pour l'entreprise, qu'en 2006, seuls 5 rapports d'audit ont été rédigés et 2 notes d'audit établies, qu'en 2007, la salariée n'a rédigé sur une période de quatre mois, que des pré-rapports sur les entités chinoises ;

Qu'il souligne que la salariée limitait ses déplacements professionnels, alors que les visites in situ constituaient pourtant un aspect primordial de ses fonctions pour apprécier la situation des sociétés dans leur environnement ;

Considérant qu'il appartient à l'employeur d'établir les griefs d'insuffisance professionnelle qu'il invoque contre la salariée pour justifier son licenciement ;

Considérant que l'insuffisance professionnelle se définit comme étant l'inaptitude du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante, par manque de compétences fondée sur des éléments quantitatifs ou qualitatifs ;

Considérant en l'espèce, que la salariée qui disposait d'une grande autonomie et qui devait faire preuve d'un esprit d'initiative, devait réaliser des missions d'audit financier, opérationnel et de conformité, dans un environnement industriel et de distribution, intervenir sur tous les cycles de l'entreprise dans un périmètre français et en Europe, mettre en place et assurer le suivi des procédures groupe et des recommandations auprès des responsables de zones et ce, moyennant une rémunération brute mensuelle de 5. 000 € ;

Considérant que le supérieur hiérarchique de la salariée, M. Z..., a établi un rapport en avril 2007 relevant selon lui, des lacunes dans le rapport d'audit établi par Mme X... pour la filiale italienne en décembre 2006 (ampleur exacte des risques financiers encourus par les filiales mal appréciée, relativement aux graves difficultés de recouvrement des créances clients, comportant une erreur d'évaluation de 4 millions d'euros), puis d'insuffisance manifeste concernant les rapports d'audit réalisés pour le compte de filiales chinoises en 2007 (absence totale d'analyse, sans valeur ajoutée) ;

Que ces reproches sont repris dans la lettre de licenciement du 21 mai 2007 ;

Mais considérant que le grief principal de faible niveau de performance professionnelle reproché à la salariée par son supérieur hiérarchique, au regard de ses compétences mentionnées sur son C.V, résulte d'attestations émanant de salariés proches de la direction (M. de A..., M. B..., Mme C...) qui sont contredites par celles versées aux débats par la salariée, émanant de managers multi-nationaux avec lesquels elle était en relation professionnelle, qui sont élogieuses quant au contenu des rapports d'audit élaborés par Mme X... ;

Qu'il convient de rappeler que le poste donné à la salariée était une création de poste, que selon les stipulations insérées à son contrat de travail en date du 23 septembre 2005, les trois premiers mois d'exécution valant période d'essai, cette période était renouvelable une fois par avenant ;

Qu'en tout état de cause, l'employeur disposait d'une période de 6 mois, soit jusqu'au 30 mai 2005 pour apprécier la valeur professionnelle attendue de la salariée nouvellement embauchée et mettre fin à son contrat, alors que pendant cette période, la salariée avait rédigé des rapports d'audit ;

Que l'employeur se borne à critiquer le contenu de deux rapports d'audit élaborés par la salariée, alors que celle-ci, selon les termes de la lettre de licenciement, a rédigé en un an et demi, sept rapports d'audit, ainsi que selon les pièces produites aux débats, deux notes d'audit ;

Considérant que l'employeur reproche à la salariée dans sa lettre de licenciement, l'absence d'amélioration de sa performance et de modification de son comportement, sans produire de courrier adressé à la salariée, préalablement à la procédure de licenciement, pointant ses erreurs ou ses faiblesses, de nature à lui permettre de s'améliorer ou de changer son comportement professionnel, conformément à l'attente de son employeur ;

Considérant qu'à la lecture des pièces produites, c'est à juste titre que le jugement déféré a dit que l'insuffisance professionnelle alléguée contre la salariée n'est pas établie et déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Sur la demande indemnitaire de la salariée

Considérant que la salariée demande de réformer le jugement en ce qu'il a limité les dommages-intérêts alloués pour rupture abusive, du fait de son préjudice matériel (n'a retrouvé du travail que le 7 janvier 2008), moral (brutalité du licenciement, modalités d'exécution du préavis), professionnel et de réputation ;

Que l'employeur demande à titre subsidiaire, d'allouer une indemnité symbolique à la salariée, faisant remarquer que celle-ci a une ancienneté de moins de 2 ans (18 mois), que l'indemnité pouvant être allouée, doit correspondre au préjudice subi, conformément aux dispositions de l'article L 1235-5 du code du travail ;

Considérant que l'appelant sollicite la somme de 50. 000 €, la société intimée rétorquant que Mme X... ne produit aucune pièce sur sa situation postérieure au licenciement ;

Considérant que la salariée ne conteste pas avoir retrouvé du travail en janvier 2008, soit 4 mois après son licenciement, mais ne fournit aucune pièce à ce sujet ;

Qu'elle justifie, alors qu'elle est célibataire, avoir fait l'acquisition d'un bien immobilier en janvier 2007 à l'aide d'un prêt ;

Qu'en conséquence, il lui sera alloué la somme de 12. 000 € ;

- Sur l'article 700 du CPC

Considérant qu'il sera alloué une indemnité au titre des frais irrépétibles à Mme X..., en complément de celle allouée par les premiers juges, ainsi que précisé au présent dispositif ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf au titre du quantum alloué à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société ACE SAS venant aux droits de la société SNC ACE SERVICES à payer à madame X... la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Y ajoutant,

Condamne la société ACE SAS venant aux droits de la société SNC ACE SERVICES à payer à madame X... la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Rejette toute autre demande

Condamne la société ACE SERVICES aux entiers dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean Michel LIMOUJOUX Président et par Monsieur LANE Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat .

Le GREFFIER Le PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15
Numéro d'arrêt : 09/038518
Date de la décision : 09/02/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2011-02-09;09.038518 ?
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