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12/01/2011 | FRANCE | N°08/00269

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12 janvier 2011, 08/00269


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES


Code nac : 80A
15ème chambre


ARRET No


CONTRADICTOIRE


DU 12 JANVIER 2011


R.G. No 09/04464


AFFAIRE :


Christophe X...





C/
S.A.R.L. CIARALDI


Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 06 Octobre 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Encadrement
No RG : 08/00269




Copies exécutoires délivrées à :


Me Michèle DUBUC
Me Marie-Estelle TAUDOU




Copies certifiées conformes délivrées à :


Christophe X...



S.A.R.L. CIARALDI






le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE DOUZE JANVIER DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, ...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80A
15ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 12 JANVIER 2011

R.G. No 09/04464

AFFAIRE :

Christophe X...

C/
S.A.R.L. CIARALDI

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 06 Octobre 2009 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL
Section : Encadrement
No RG : 08/00269

Copies exécutoires délivrées à :

Me Michèle DUBUC
Me Marie-Estelle TAUDOU

Copies certifiées conformes délivrées à :

Christophe X...

S.A.R.L. CIARALDI

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE JANVIER DEUX MILLE ONZE,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Christophe X...

...

75019 PARIS

comparant en personne, assisté de Me Michèle DUBUC, avocat au barreau de PARIS

****************
S.A.R.L. CIARALDI
Impasse Massenet
95100 ARGENTEUIL

représentée par Me Marie-Estelle TAUDOU, avocat au barreau de PARIS

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Novembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président chargé(e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,
Madame Nicole BURKEL, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur Christophe X... a été engagé par la société CIARALDI, spécialisée dans le commerce de gros de fruits et légumes, par contrat verbal en qualité de directeur commercial, ce qui n'est pas contesté à compter du 5 août 1991.

Monsieur Christophe X... était propriétaire de 10 % du capital de la société.

La société CIARALDI ayant connu des difficultés économiques, cette dernière devait être cédée, par acte sous seing privé du 16 janvier 2007 à la société SCF représenté par son gérant Monsieur Z... qui à compter de cette date devenait donc le nouveau gérant de la société CIARALDI .

Le contrat de travail de Monsieur Christophe X... était alors régularisé par écrit le 2 janvier 2007.

Il exerçait les fonctions de commercial, statut cadre, classification vendeur qualifié, niveau 5, la convention collective applicable étant celle du commerce du détail et de gros à prédominance alimentaire. Il percevait un salaire fixe mensuel de 3.811 € et une prime variable de 0,50 % calculé sur le chiffre d'affaires existant de la société CIARALDI hors clients MALYS et clients marchés publics et de 2 % sur le chiffre d'affaires de nouveaux clients.

Le 21 septembre 2007 Monsieur Christophe X... se voyait toutefois convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 28 septembre suivant avec mise à pied à titre conservatoire a effet immédiat.

Son licenciement pour faute grave lui était notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 octobre 2007 libellée dans les termes suivants :

"Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs d'une faute grave, ce dont nous vous avons fait part lors de notre entretien du 28 septembre 2007.

En effet, nous avons découvert que, depuis plusieurs mois, vous manipulez les données informatiques de la société afin de fausser vos résultats mensuels et augmenter ainsi, indûment la part variable de vos revenus.

Pour mémoire, au sein de notre société, vos deux principales missions sont, en tant que commercial classé cadre vendeur qualifié niveau 5, l'acquisition et la fidélisation de la clientèle de la société. En contrepartie de l'accomplissement de vos fonctions, vous percevrez un salaire fixe mensuel brut auquel s'ajoute une prime variable calculée comme suit :

- 0,50 % sur le chiffre d'affaires existant de la société,

- 2 % sur le chiffre d'affaires de nouveaux clients (hors clients MALYS et clients Marchés Publics).

Or, suite à une vérification informatique dans le courant du mois de septembre dernier, nous avons découvert que, régulièrement, depuis des mois, vous vous êtes attribué de prétendus nouveaux clients qui , en réalité, sont des clients existants de la société.

En procédant de la sorte, vous avez sciemment faussé les modalités de calcul de votre prime variable et avez ainsi perçu des primes qui, en partie, n'auraient pas dû vous être versées.

Outre la découverte de ces agissements d'une particulière gravité, nous avons à déplorer, de votre part, d'importants manquements dans le cadre de votre mission de suivi de la clientèle existante.

Vous êtes en effet censé rendre visite régulièrement (quatre visites minimum par an) à chacun des clients vous étant affectés.

Or, certains de vos clients manifestent leur mécontentement s'agissant de leur suivi en indiquant que vous ne les avez pas visités depuis plus de 8 mois voire une année pour d'autres.

Enfin, toujours dans le cadre de votre mission de suivi de la clientèle existante, vous être également censé assurer le recouvrement des créances en cas de retard de paiement par les clients. Or, nombre des clients vous étant affectés sont débiteurs depuis des mois.

Comme vous le savez, notamment du fait notamment de vos fonctions passées de Directeur commercial de la société, il pèse sur les acteurs de notre secteur d'activité une obligation légale de régulariser les créances au plus tard 30 jours après la fin de la décade de livraison.

Vos manquements dans le cadre de cette mission de recouvrements des créances des clients font donc peser un sérieux risque sur la société.

Vos agissements et votre conduite mettent en cause la bonne marche de la société.

Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 28 septembre 2007 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.

En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité de celle-ci et de ses conséquences, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible.

Nous vous confirmons pour les mêmes raisons la mise à pied à titre conservatoire dont vous faites l'objet depuis le 21 septembre 2007.

Votre licenciement prend donc effet immédiatement à la date de première présentation de cette lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis ni de licenciement.

Nous vous informons également qu'en raison de la gravité de la faute qui vous est reprochée, vous perdrez vos droits acquis au titre de votre droit individuel à la formation.

Vous pourrez vous présenter le même jour au service du personnel pour percevoir les sommes vous restant dues au titre de salaire et d'indemnité de congés payés acquise à ce jour et retirer votre certificat de travail et votre attestation ASSEDIC, qui sont à votre disposition.

Enfin, nous vous confirmons faire toutes réserves quant au préjudice subi par la société s'agissant notamment des montants des primes que vous avez indûment perçus."

C'est dans ces circonstances que Monsieur Christophe X... devait saisir le Conseil de Prud'hommes d'ARGENTEUIL par acte du 8 novembre 2007 aux fins de contester la légitimité de la rupture et de voir allouer les diverses indemnités en résultant et notamment une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 63.524,52 €.

Le Conseil de Prud'hommes par jugement contradictoirement prononcé le 6 octobre 2009 a considéré parfaitement fondé le licenciement pour faute grave et a en conséquence débouté Monsieur Christophe X... de toutes ses demandes.

Ce dernier a régulièrement relevé appel de cette décision.

Par conclusions déposées au greffe et soutenues oralement l'appelant a demandé l'infirmation du jugement déféré et la condamnation de la société CIARALDI au paiement des sommes suivantes :

- rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied : 408,96 €

- congés payés y afférents : 408,29 €

- indemnité compensatrice de préavis :15.881,13 €

- congés payés y afférents : 1.588,11 €

- indemnité conventionnelle de licenciement : 29.584,36 €

- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :63.524,52 €

- dommages-intérêts pour non respect des dispositions
relatives au droit individuel à la formation : 5.293,71 €

- indemnité fondée sur l'article l'article
700 du Code de procédure civile : 4.000 €

En réplique la société CIARALDI a fait conclure et soutenir oralement à l'audience la confirmation du jugement la faute grave étant à son avis largement prononcé.

Elle a en outre sollicité l'allocation de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile .

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que la faute grave "résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis" ;

Que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur qui l'invoque au soutien de la mesure de licenciement alors exclusive de toute indemnité ; que les termes de la lettre de licenciement fixent les limites du litige ;

Considérant que dans le cas présent il est fait grief à Monsieur Christophe X... d'avoir d'abord manipulé les données informatiques de l'entreprise pour s'attribuer de nouveaux clients et ainsi augmenter indûment la part variable de son salaire, ensuite de ne pas avoir respecté la fréquence de visite de ses clients, soit quatre visites minimum par an, et enfin de ne pas avoir recouvrer les créances clients depuis plusieurs mois alors qu'il connaissait les difficultés de la société ;

I. Sur l'attribution de nouveaux clients :

Considérant qu'il résulte des pièces produites au débat que les sociétés Le Cap, Sophie A..., Tabac du Chatelet, Chez Francis, Gourbi Palace et le Bistrot de Marius étaient des "clients existants" de la société CIARALDI qui avaient passé des commandes aux mois de novembre et décembre 2006 et qui devaient donc se voir appliquer le coefficient d'intéressement de 0,5 % alors que Monsieur Christophe X... se les est attribué en tant que "nouveaux clients" donnant lieu à un intéressement de 2 % ; que la conscience qu'il avait du caractère frauduleux de cette attribution de "clients existants" en tant que "nouveaux clients" résulte notamment d'un tableau versé au débat qu'il avait lui même intitulé "tableau client litigieux" faisant apparaître 4 des 6 clients qu'il s'est indûment attribués à savoir :
Le Cap, Sophie A..., Chez Francis et le Bistrot de Marius ;

Que conscient des difficultés, il a tenté de faire peser sur la secrétaire les erreurs qu'il admet, mais dont, selon lui, il n'avait pas la maîtrise ;

Que cependant il y a lieu de constater que la secrétaire n'assurait qu'une simple fonction administrative d'enregistrement de déclarations effectuées par le commercial, et que compte tenu de son ancienneté et de ses fonctions passées de dirigeant cette dernière ne pouvaient remettre en cause les déclarations de Monsieur Christophe X... ;

Qu'il reconnaît d'ailleurs s'être attribué des "clients existants" en tant que "nouveau client", mais justifie son attitude au motif que leurs commandes mensuelles sur les derniers mois étaient "insignifiantes" ; que cette tentative de justification est inopérante dans la mesure où il ne lui appartenait pas d'introduire une appréciation de caractère subjectif à l'égard d'une notion parfaitement objective;

II. L'absence de visite régulière de la clientèle et recouvrement des créances :

Considérant qu'il est établi que Monsieur Christophe X... avait l'obligation contractuelle de procéder à des visites régulières de chacun de ses clients au minimum quatre fois par an ;

Considérant qu'il résulte d'attestations régulières que Monsieur Christophe X... ne respectait pas cette obligation et laissait ses clients dans l'inquiétude, certains ayant même pensé qu'il avait quitté l'entreprise ; que les arguments présentés par Monsieur Christophe X... à cet égard sont inopérants;

Considérant que les créances devaient être régularisées dans les 30 jours après la fin de la décade de livraison ; qu'à cet égard Monsieur B..., commercial de la société CIARALDI a attesté régulièrement : "Depuis le départ de Monsieur Christophe X... , j'ai dû procéder au recouvrement de nombreuses créances impayées par les clients qu'il gérait" ; alors qu'il est établi que ce dernier était régulièrement alerté sur le retard de paiement de certains de ses clients ce qui était préjudiciable à l'entreprise compte tenu notamment de ses difficultés financières;

Qu'il est d'ailleurs établi qu'à chiffre d'affaires équivalent pour février 2007 et février 2009, le montant des encours clients a été diminué de moitié ;

Qu'il suit de ce qui précède que le licenciement immédiat de Monsieur Christophe X... s'imposait à l'employeur pour la saine gestion de son entreprise ; que dès lors le jugement entrepris sera confirmé ;

Considérant que Monsieur Christophe X... sera en outre débouté de sa demande de dommages-intérêts pour non information de ses droits en matière de droit individuel à la formation ;

Qu'en effet le licenciement litigieux étant du 22 octobre 2007, l'employeur n'avait pas à satisfaire à une obligation issue de la loi du 24 novembre 2009 ;

Considérant qu'il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge des parties les frais exposés en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Reçoit l'appel de Monsieur Christophe X... ;

Confirme le jugement entrepris ;

Déboute Monsieur Christophe X... de sa demande de dommages-intérêts pour non respect des dispositions relatives au droit individuel à la formation ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Christophe X... aux éventuels dépens ;

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et par Monsieur Pierre-Louis LANE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 08/00269
Date de la décision : 12/01/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-12;08.00269 ?
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