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04/11/2010 | FRANCE | N°08/1245

France | France, Cour d'appel de Versailles, 04 novembre 2010, 08/1245


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



2ème chambre 1ère section







ARRÊT No





CONTRADICTOIRE

CODE NAC : 20J





DU 04 NOVEMBRE 2010



R.G. No 09/06167





AFFAIRE :



Hélène X... épouse Y...


C/

Philippe, Frédéric, Edouard Y...










Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

No Chambre : 3ème

No cabinet : 7 JAF.



No RG : 08/1245







Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :







à :







la SCP FIEVET

la SCP GAS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

2ème chambre 1ère section

ARRÊT No

CONTRADICTOIRE

CODE NAC : 20J

DU 04 NOVEMBRE 2010

R.G. No 09/06167

AFFAIRE :

Hélène X... épouse Y...

C/

Philippe, Frédéric, Edouard Y...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 mai 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

No Chambre : 3ème

No cabinet : 7 JAF.

No RG : 08/1245

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

la SCP FIEVET

la SCP GAS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Hélène X... épouse Y...

née le 07 mars 1969 à NANCY (54000), de nationalité française

...

92200 NEUILLY SUR SEINE

représentée par la SCP FIEVET-LAFON, avoué - No du dossier 290667

assistée de Me Geoffroy BOSSELMEYER (avocat au barreau de NANCY)

APPELANTE

****************

Monsieur Philippe, Frédéric, Edouard Y...

né le 18 mai 1961 à ALGER (ALGÉRIE)

...

69005 LYON

représenté par la SCP GAS, avoué - No du dossier 20090671

assisté de Me Rosa VALLEROTONDA (avocat au barreau de LYON)

INTIMÉ

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 septembre 2010 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Xavier RAGUIN, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Xavier RAGUIN, Président,

Mme Florence LAGEMI, Conseiller,

Monsieur François NIVET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Denise VAILLANT,

FAITS ET PROCÉDURE

Hélène X... et Frédéric Y... se sont mariés le 17 avril 1999 à NEUILLY SUR SEINE (92), sans contrat préalable.

Aucun enfant n'est issu de cette union.

Une ordonnance de non conciliation a été rendue le 27 mai 2008 attribuant à l'épouse la jouissance gratuite du logement situé à NEUILLY SUR SEINE, bien propre de l'époux.

Autorisé par cette ordonnance, Frédéric Y... a assigné son conjoint en divorce sur le fondement des articles 237 et 238 du code civil par exploit du 22 juillet 2008.

Par jugement du 14 mai 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE a notamment :

-prononcé le divorce des époux pour altération définitive du lien conjugal ;

-ordonné la liquidation et le partage des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux ;

-dit que Hélène X... cesse de faire usage du nom marital ;

-rappelé que le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui prennent effet à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort ;

-rejeté toutes autres demandes des parties ;

-partagé les dépens par moitié entre les parties.

*

Par déclaration du 17 juillet 2009, Hélène X... a formé contre cette décision un appel de portée générale. Dans ses dernières conclusions signifiées le7 juillet 2010, elle demande à la cour de :

-déclarer nulle la clause de non divorce contenue dans l'acte de donation du 28 juillet 2006 relatif au droit d'usage et d'habitation du bien sis à NEUILLY SUR SEINE ;

-dire que la donation n'est pas révoquée de plein droit par le divorce ;

A titre subsidiaire,

-condamner Frédéric Y... à lui verser une prestation compensatoire en capital constituée par un droit viager d'usage et d'habitation des droits et biens immobiliers sis à NEUILLY-sur-SEINE (Hauts-de-Seine), 27, 29, 31 et 33 rue Chauveau et 30 boulevard du Château, dans un ensemble immobilier en copropriété cadastré P64 pour 83 ares et 59 centiares et constitué des lots no 39, 540 et 331 de ladite copropriété, outre les 459/100 000èmes des parties communes générales de l'ensemble immobiliers, le toute pour une valeur de 100 000 euros ;

En tout état de cause,

-condamner Frédéric Y... à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; le condamner aux entiers dépens.

*

Dans ses conclusions signifiées le 11 juin 2010, Frédéric Y... demande à la cour de :

-dire que la clause de non divorce est licite et trouve sa pleine application en l'espèce ;

Subsidiairement,

-dire que la donation du 28 juillet 2006 est résolue de plein droit ;

En toute hypothèse,

-dire que Hélène X... devra quitter l'appartement sis à NEUILLY SUR SEINE dans les trois mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir à peine d'être expulsée ;

-rejeter la demande de prestation compensatoire de Hélène X... ;

-condamner Hélène X... aux entiers dépens.

La clôture du dossier a été prononcée le 31 août 2010.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Sur la validité de la clause de non divorce

Considérant que le divorce met fin au devoir de secours entre les époux ; que l'article 270 du code civil prévoit cependant que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ;

Que l'article 271 du même code invite le juge, pour apprécier la situation de chaque époux, à prendre en considération notamment le patrimoine estimé ou prévisible des époux après la liquidation du régime matrimonial ;

Considérant que les époux se sont mariés sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts ; que par acte authentique du 28 juillet 2006, Philippe Y... a fait donation à Hélène X... qui l'a acceptée expressément, d'un droit viager d'usage et d'habitation portant sur un appartement, une cave et un parking situés 27, rue Chauveau à NEUILLY, constituant un bien propre de Philippe Y... ;

Que cet acte comportant une clause intitulée condition de non divorce prévoyant qu'en cas de divorce ou de séparation de corps, ou, si une telle instance était en cours au jour du décès du donateur, la présente donation sera résolue de plein droit et anéantie , Philippe Y... a souhaité reprendre les lieux à son profit et en expulser Hélène X... ;

Considérant que les parties s'opposent sur la validité de cette clause, point sur lequel il appartient à la cour de statuer, la réponse donnée à cette question étant de nature à influer sur l'appréciation de la situation de chaque époux dans le cadre du débat sur la prestation compensatoire ;

Considérant qu'il est soutenu par Hélène X... que la clause de non divorce est illicite comme contraire aux dispositions d'ordre public des articles 1096 et 265 1o alinéa du code civil dont il résulte que la donation entre époux de biens présents est irrévocable ; qu'elle ajoute qu'à supposer cette clause licite au regard de ces textes, elle n'en insère pas moins dans la donation une condition purement potestative prohibée, ce qui la prive d'effet ; qu'elle fait enfin valoir que la condition insérée dans l'acte doit s'apprécier au jour du décès du donateur et qu'elle n'a pu produire d'effet antérieurement ;

Considérant que l'article 1096 du code civil énonce le principe de l'irrévocabilité des donations de biens présents prenant effet au cours du mariage faites entre époux, sauf dans le cas d'inexécution des charges, d'ingratitude ou de survenance d'enfants ;

Considérant que l'article 265 du même code, spécifique au divorce, prévoit dans son 1o alinéa que le divorce est sans incidence sur les donations de biens présents quelle que soit leur forme ;

Que ce texte n'interdit cependant pas aux époux de déroger par convention expresse à ce principe général, dont le caractère d'ordre public revendiqué par Hélène X... ne ressort d'aucun élément ;

Considérant que s'il est exact que la condition de non divorce est purement potestative en présence des dispositions des articles 237 et 238 du code civil instituant comme cause de divorce l'altération définitive du lien conjugal, cette nature ne condamne cependant pas la validité de cette clause qui échappe, selon l'article 947 du code civil à la sanction de la nullité édictée par l'article 944 du même code envers toutes les donation entre vifs sous des conditions dont l'exécution dépend de la seule volonté du donateur ;

Considérant qu'il résulte enfin des termes clairs et sans équivoque de la clause rappelée ci-dessus que la donation est résolue en cas de divorce ou de séparation de corps, sans réserver son application au seul jour du décès du donateur ;

Qu'ainsi, la clause de non divorce apparaît licite et que le prononcé du divorce des époux n'étant pas remis en cause devant la cour, la clause résolutoire de la donation est acquise et cette dernière privée de tout effet ;

Qu'il convient donc d'ordonner à Hélène X... de libérer les lieux dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, faute de quoi son expulsion pourra être poursuivie ;

Sur la prestation compensatoire

Considérant que Hélène X... sollicite au titre de cette prestation l'attribution d'un droit viager d'usage et d'habitation sur l'immeuble de la rue Chauveau à NEUILLY, évalué à 100.000 euros ;

Considérant que la situation des parties est la suivante :

-Hélène X... est âgée de 41 ans et n'exerce pas d'activité ; elle est placée en invalidité depuis fin 1999 et est suivie médicalement notamment par un psychiatre en raison d'un état d'anorexie ; elle indique percevoir des pensions pour un montant global de 3.051 euros par mois et possède une épargne pour un montant de 24.000 euros environ ; elle ne fait état d'aucun patrimoine immobilier ; elle ne donne pas d'indication précise concernant ses droits à la retraite ; elle supporte les charges habituelles de la vie courante et ne paye pas de loyer en raison de la donation dont elle a bénéficié jusqu'à présent ;

-Philippe Y... est âgé de 49 ans ; il a connu une excellente situation jusqu'en 2004 lui procurant des revenus mensuels de l'ordre de 7.000 euros puis a connu des périodes de chômage et de difficultés ; il justifie que ses revenus se sont dégradés régulièrement depuis 2006 passant de 4.000 euros par mois à 1.000 euros par mois en 2009 selon son bulletin de paie de décembre 2009 alors qu'il est salarié de la société TENNANT en qualité de technico-commercial ; il estime ses revenus à 1.800 euros en 2010 selon sa déclaration sur l'honneur et fait état d'avantages en nature équivalents à 284 euros par mois ; il est propriétaire de l'appartement situé 27, rue Chauveau à NEUILLY qu'il estime à 270.000 euros et qui faisait l'objet d'un prêt soldé en septembre 2008 ; il déclare détenir une épargne personnel de 2.700 euros; il supporte les charges usuelles de la vie courante qu'il partage avec sa nouvelle compagne dont il indique sans en justifier qu'elle est en fin de droits ASSEDIC ; il a eu avec elle un enfant en janvier 2010 ;

Considérant que la rupture du mariage va entraîner une disparité entre le niveau de vie respectif des époux compte tenu notamment du fait que Hélène X... perd le bénéfice de la donation qui lui assurait un logement à caractère viager dans un très bel environnement et que Philippe Y... détient un patrimoine immobilier conséquent ;

Que compte tenu d'une durée du mariage de 11 ans, de l' âge des époux, de l'état de santé de Hélène X..., du fait que Philippe Y... indique dans sa déclaration sur l'honneur que les époux ont des biens mobiliers communs à hauteur de 26.500 euros qui vont se trouver partagés, il convient de compenser cette disparité par l'octroi, au bénéfice de Hélène X... d'une prestation de 20.000 euros sous la forme d'un capital net de frais et de droits ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, chacune conservera la charge de ses propres dépens ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en raison de la nature familiale du litige ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil,

CONFIRME le jugement rendu le 14 mai 2009 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE ;

Y AJOUTANT,

-DÉCLARE LICITE la clause de non divorce insérée dans l'acte de donation du 28 juillet 2006 ;

-DIT que la donation du 28 juillet 2006 est privée d'effet du fait du divorce des époux ;

-ORDONNE à Hélène X... de libérer les lieux qu'elle occupe 27, rue Chauveau à NEUILLY (Hauts-de-Seine) dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt ;

-à défaut, ORDONNE son expulsion avec le concours de la force publique, si besoin est ;

-FIXE à la somme de 20.000 euros le capital net de frais et de droits que Philippe Y... doit à Hélène X... à titre de prestation compensatoire et, en tant que de besoin, le CONDAMNE à lui payer cette somme ;

REJETTE toute autre demande des parties ;

DIT que chacune des parties conservera les dépens par elle engagés dans le cadre de la procédure d'appel.

arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Xavier RAGUIN, président, et par Denise VAILLANT, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 08/1245
Date de la décision : 04/11/2010

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nanterre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-04;08.1245 ?
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