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27/05/2010 | FRANCE | N°08/04760

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 27 mai 2010, 08/04760


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 74Z



1ère chambre

1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 27 MAI 2010



R.G. N° 08/04760



AFFAIRE :



[B] [W]

...

C/



Jean Pascal [F] [M]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Mai 2008 par le Tribunal d'Instance de POISSY

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-06-0050



Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



- SCP BOITEAU PEDROLETTI



- SCP JUPIN & ALGRIN



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE VINGT SEPT MAI DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affair...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 74Z

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 27 MAI 2010

R.G. N° 08/04760

AFFAIRE :

[B] [W]

...

C/

Jean Pascal [F] [M]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Mai 2008 par le Tribunal d'Instance de POISSY

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-06-0050

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

- SCP BOITEAU PEDROLETTI

- SCP JUPIN & ALGRIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SEPT MAI DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [B] [Y] [D] [W]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 14] (78)

Madame [H] [U] [V] [W] née [S]

le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 10] (78)

tous deux [Adresse 13]

représentés par la SCP BOITEAU PEDROLETTI - N° du dossier 18734

Rep/assistant : Me Danielle BOBICHON (avocat au barreau de VERSAILLES)

APPELANTS

****************

Monsieur Jean Pascal [F] [M]

né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 11] (78)

Madame [L] [N] [M] née [O]

le 25 Mars 1965 à [Localité 11] (78)

tous deux [Adresse 13]

représentés par la SCP JUPIN & ALGRIN - N° du dossier 0024720

Rep/assistant : cabinet KOERFER-BOULAN (avocats au barreau de VERSAILLES)

INTIMES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Avril 2010, Madame Bernadette WALLON, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Bernadette WALLON, président,

Madame Evelyne LOUYS, conseiller,

Madame Dominique LONNE, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Par acte du 21 février 1995, passé par devant la SCP [G], notaires associés à [Localité 11], les consorts [I] et [K] [C] ont vendu à M [A] [F] [M] et à [L] [O] son épouse un terrain à bâtir, sis [Adresse 13], cadastré section [Cadastre 8] pour 2ares 90 centiares et section [Cadastre 9] pour 1are 70 centiares.

Aux termes de cet acte, il est créé :

1) une servitude de cour commune, consentie au profit des parcelles vendues [Cadastre 8] et [Cadastre 9] sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 6] et [Cadastre 5], restant la propriété des consorts [C], l'acte précisant " ladite servitude figurant sous teinte verte au plan ci-annexé".

2) une servitude d'accès et de passage de canalisations consentie également au profit des parcelles vendues [Cadastre 8] et [Cadastre 9] sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 6] restant à l'époque la propriété des consorts [C], l'acte précisant " ladite servitude figure sous teinte jaune du plan sus-visé".

Par deux actes passés en la même étude notariale le 12 août 2002,

* les consorts [K] et [I] [C] ont vendu à M.[B] [W] et à Mme [H] [S] son épouse la propriété bâtie cadastrée section [Cadastre 6], sise [Adresse 13] et grevée des servitudes sus-visées,

* le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à [Adresse 13] a vendu aux époux [W] la parcelle section [Cadastre 7] de 39 centiares (parcelle issue de la division en deux parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 7] de la parcelle sus-visée [Cadastre 5] grevée de la servitude de cour commune ).

Faisant valoir que durant l'été 2005, les époux [W] avaient détruit un mur en moellon donnant sur la rue puis en octobre 2005 posé des poteaux scellés sur l'assiette de la servitude de passage entraînant des difficultés pour accéder à leur garage, un grillage entre les poteaux et des canisses sur le grillage, que ces modifications ne respectaient pas le plan contractuel annexé à l'acte d'acquisition de 2002 des époux [W], les époux [M] ont, le 12 janvier 2006, assigné les époux [W] devant le tribunal d'instance de Poissy , sur le fondement des articles 647,701 et 1382 du code civil pour voir enjoindre aux époux [W] de restituer l'assiette de la servitude dans son état originel résultant du plan de bornage réalisé le 28 juin 1994 et en paiement de dommages-intérêts.

Par jugement du 16 janvier 2007, le tribunal d'instance de Poissy a débouté les époux [W] de leur exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Versailles, eu égard à la nature possessoire de l'action, en retenant que l'existence de la servitude était avérée et avait été constatée à l'occasion du plan en date du 28 juin 1994 et avant dire droit, a ordonné une mesure d'expertise confiée à M.[T] [R] avec mission notamment de procéder au bornage de la servitude entre les fonds, de dire si la servitude actuelle de passage respecte le plan de bornage de la servitude réalisé le 28 juin 1994, de dire si l'ouverture actuelle et la dimension de la servitude de passage porte atteinte au droit de passage des époux [M] ou en rend l'exercice plus incommode, de donner son avis sur l'éventuel préjudice des époux [M] ainsi que sur divers points ayant fait l'objet de demandes reconventionnelles de la part des époux [W].

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 18 octobre 2007.

Par jugement du 6 mai 2008, le tribunal d'instance de Poissy a :

- débouté M. et Mme [W] de leur demande de voir écarter des débats la pièce n°3,

- constaté que le tribunal d'instance n'a pas à se prononcer sur les demandes formulées par M. et Mme [M] devant la juridiction administrative,

- constaté que M. et Mme [M] ont produit l'original de l'acte de vente établi le 21 février 1995 par la SCP [G],

- dit que la servitude de passage entre les fonds appartenant à M. et Mme [W] et les fonds appartenant à M. et Mme [M] est définie selon le pointillé dessiné sur le plan établi en 1994 par l'expert géomètre M. [J] et visé à l'acte de vente du 21 février 1995,

- ordonné à M. et Mme [W] de restituer l'assiette de servitude telle que dessinée par le plan précité et de remettre en état la portion de passage qu'ils ont annexée, par démontage du grillage et stabilisation de 20 mètres carrés de voie automobile et par la pose d'un grave ciment sur vingt centimètres de profondeur après décapage, et ce, sous astreinte de 50€ par jour de retard une fois expiré le délai de deux mois à compter du jugement,

- rappelé que M. et Mme [W] n'ont pas l'obligation de clore à nouveau leur propriété qui longe la servitude,

- ordonné à M. et Mme [M] de planter une haie vive de 1,90 mètres de haut à 50 centimètres de la limite de propriété avec pose d'une palissade opaque provisoire dans l'attente de la pousse des végétaux, et ce sous astreinte de 50€ par jour de retard une fois expiré le délai de deux mois à compter du jugement,

- débouté M. et Mme [M] de leur demande d'allocation de dommages- intérêts,

- débouté M. et Mme [W] de leur demande de raccordement des eaux usées de M. et Mme [M] directement à l'égout public, de leur demande tendant à effectuer des travaux pour résorption des eaux pluviales en provenance du fonds [M], de leur demande au titre des troubles de jouissance et des troubles de voisinage,

- débouté les parties de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné solidairement M. et Mme [W] aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

Par déclaration du 24 juin 2008, M et Mme [W] ont interjeté appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions de M. et Mme [W], en date du 15 septembre 2009 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de leurs moyens, et par lesquelles ils demandent à la cour de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- infirmer la décision déférée

Avant dire droit sur la servitude d'accès et de passage :

- ordonner à Me [Z] [G], notaire à [Localité 11], de produire une expédition complète annexes et plan inclus :

* de la promesse de vente du 7 septembre 1994 par les consorts [C] au profit des époux [M],

* de l'acte de vente du 21 février 1995,

* de l'acte de régularisation du certificat d'urbanisme en date du 4 octobre 1993 entre les consorts [C] et les consorts [M],

- en outre, demander à Me [Z] [G] de préciser, dans l'hypothèse où il existerait plusieurs plans, quel est le plan ayant servi à la servitude d'accès et de passage, et quel est le plan ayant servi à la servitude de cour commune,

A défaut,

- constater que l'acte du 21 février 1995 ne comporte aucun plan et qu'il y a lieu de statuer selon les règles posées par le code civil pour déterminer un passage nécessaire et suffisant,

- juger que le projet, pour lequel les époux [W] ont obtenu l'accord de la mairie, assurait au fonds dominant un passage nécessaire et suffisant, selon les règles du code civil et la réglementation en vigueur,

- constater que la mauvaise implantation de la maison des époux [M] cause un préjudice certain aux époux [W],

en conséquence, vu l'article 1142 du code civil,

- condamner les époux [M] à payer aux époux [W] la somme de 10. 000€  à titre de dommages-intérêts,

vu le constat de Me [P] du 24 septembre 1998,

- constater que M. et Mme [W] ont restitué l'assiette de la servitude en application de la décision du premier juge,

- dire n'y avoir lieu en conséquence au prononcé d'une astreinte à leur égard,

- constater que les époux [M] n'ont toujours pas posé de palissade opaque en l'attente de plantations,

Y ajoutant,

- porter le montant de l'astreinte à la somme de 1 500€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner aux époux [M] de faire cesser les troubles liés au raccordement des eaux usées en se raccordant à l'égout public et ce sous astreinte de 500€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner les époux [M] à réaliser les travaux nécessaires pour que les eaux pluviales soient résorbées à l'intérieur de leur propriété, et ce, sous astreinte de 500€ par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

vu l'article 1382 du code civil,

- condamner les époux [M] à payer aux époux [W] la somme de 5.000€ en réparation du préjudice subi,

- débouter les époux [M] de toute demande plus ample ou contraire,

- les condamner à payer aux époux [W] la somme de 6.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens lesquels comprendront également les frais liés à l'expertise de M. [R], et les frais liés au constat de M. [P], avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Boiteau -Pedroletti, avoués.

XXX

Vu les dernières conclusions en date du 03 février 2009 de M et Mme [M], aux quelles il est renvoyé pour plus ample exposé de leurs moyens, et par lesquelles ils demandent à la cour, au visa des articles 647, 701 et 1382 du code civil, de :

- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Poissy du 6 mai 2008 en ce qu'il a :

* constaté que M. et Mme [M] ont produit l'original de l'acte de vente établi le 21 février 1995 par la SCP [G],

* dit que la servitude de passage entre les fonds appartenant à M. et Mme [W] et les fonds appartenant à M. et Mme [M] est définie selon le pointillé dessiné sur le plan établi en 1994 par l'expert géomètre M. [J] et visé à l'acte de vente du 21 février 1995,

* ordonné à M. et Mme [W] de restituer l'assiette de servitude telle que dessinée par le plan précité et de remettre en état la portion de passage qu'ils ont annexée par démontage du grillage et stabilisation de 20 mètres carrés de voie automobile et par la pose d'un grave ciment sur vingt centimètres de profondeur après décapage, et ce, sous astreinte de 50€ par jour de retard une fois expiré le délai de deux mois à compter du jugement,

* débouté M. et Mme [W] de leur demande de raccordement des eaux usées de M. et Mme [M] directement à l'égout public,

* débouté M. et Mme [W] de leur demande visant à effectuer des travaux pour résorption des eaux pluviales,

* débouté M. et Mme [W] de leur demande au titre des troubles de jouissance,

* débouté M. et Mme [W] de leur demande au titre des troubles de voisinage,

* débouté M et Mme [W] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné solidairement M. et Mme [W] aux dépens y compris les frais d'expertise,

- infirmer le jugement pour le surplus,

- débouter M. et Mme [W] de toutes leurs demandes,

- condamner conjointement et solidairement M. et Mme [W] à payer à M. et Mme [M] :

* la somme de 4 000€ au titre du préjudice moral subi,

* la somme de 5 000€ au titre du préjudice de jouissance subi ,

* la somme de 5 000€ à titre de dommages- intérêts pour résistance abusive,

- donner acte aux époux [M] de ce qu'ils ont bien posé une palissade opaque et planté une haie vive en limite de propriété conformément aux préconisations du tribunal d'instance de Poissy dans son jugement du 6 mai 2008,

- condamner conjointement et solidairement M. et Mme [W] à payer à M. et Mme [M] la somme de 5.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertise, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Jupin et Algrin.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 novembre 2009.

MOTIFS DE LA DECISION

S'agissant de la servitude d'accès et de passage, les époux [W] font valoir que leurs deux actes notariés ne comportent pas le même plan, que l'original de l'acte du 21 février 1995, produit par les époux [M], ne comporte pas de plan et ne permet pas de dire que le plan qui y était annexé est le plan de bornage réalisé le 28 juin 1994, en sorte que, ni l'acte du 12 août 2002 ni les lettres du notaire et les plans annexés ou prétendument annexés à celles-ci n'étant constitutifs de servitudes , il y a lieu de se reporter aux règles posées par le code civil pour déterminer "une servitude de passage nécessaire et suffisante".

Les époux [M] ont régulièrement communiqué aux débats en original l'expédition de leur titre de propriété établi le 21 février 1995 par la SCP [G], non seulement devant le premier juge ainsi que celui-ci le constate mais également dans le cadre de l'incident à nouveau diligenté sur ce point devant le conseiller de la mise en état.

Si l'original de cet acte de vente des parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 9] par les consorts [C] aux époux [M] avec constitution de servitude de cour commune et d'une servitude d'accès et de passage de canalisations ne comporte aucun plan annexé, les époux [M] versent cependant aux débats un courrier en date du 25 octobre 1994 qui leur a été adressé par la SCP [G] et qui indique :

"Je vous confirme bien volontiers que lors de la vente par les consorts [C] à votre profit du terrain sis à[Adresse 13], ayant fait l'objet d'une promesse de vente régularisée en l'étude le 7 septembre 1994, il sera établi dans l'acte la constitution d'une servitude de cour commune grevant la propriété restant appartenir aux consorts [C] au profit du terrain que vous devez acquérir ; le tout conformément au plan ci-joint.

Dans l'attente de la régularisation de cette affaire... "

A ce courrier est joint un plan établi le 28 juin 1994 qui fait apparaître l'assiette de la servitude de passage sur la parcelle section [Cadastre 6] selon un pointillé . Ce plan est signé par les consorts [C] qui indiquent accepter, "conformément au plan, la servitude de passage qui sera authentifiée dans l'acte de vente".

Les époux [W] versent aux débats une seconde lettre du même jour, adressée par le notaire aux époux [M] dans les mêmes termes mais en ce qui concerne la servitude de passage, sans toutefois qu'y soit joint un plan, en sorte que rien ne corrobore l'existence en 1994 de deux plans différents, alléguée par les appelants.

Au contraire, les époux [M] versent également aux débats un courrier du 30 mai 2006 de la SCP [J], géomètres-experts, auquel est joint un plan strictement identique à celui joint au courrier sus-visé du 25 octobre 1994 produit par les époux [M]. Ce courrier du géomètre-expert, choisi par les consorts [C] pour effectuer les différents documents d'arpentage et plans en 1994, explique :

- qu'il s'agit du plan établi en 1994 pour l'acquisition des parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 9] et pour la création de la servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 6],

-que ce plan a également servi en 2002 à la mise en copropriété des parcelles [Cadastre 6] et des parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 7].

La Cour ne peut que constater que le seul plan annexé à l'acte d'acquisition des époux [W] du 12 août 2002 portant sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 6] (qui est la seule grevée de la servitude d'accès et de passage de canalisations selon l'acte du 21 février 1995), plan signé par les époux [W], et donc contractualisé, est le même plan, comportant les mêmes cotes, que celui annexé aux deux courriers sus-visés produits par les époux [M].

Ce plan ne peut qu'être celui de 1994 puisqu'il comporte la signature non seulement des consorts [C] mais également de Mme [E] dont il résulte du dossier qu'elle était la locataire de M.[I] [C], ce dernier attestant qu'en tenant compte du plan de M.[J], il avait posé un grillage séparatif pour protéger cette locataire âgée qui souhaitait être en sécurité et avoir un terrain clos.

Ce même acte du 12 août 2002 rappelle également qu'à l'acte de vente par les consorts [C] aux époux [M] ont été créées les servitudes de cour commune, d'accès et de passage des canalisations, et reprend dans des termes strictement identiques à ceux de l'acte du 21 février 1995 tant la description des servitudes que les mêmes références aux teintes verte et jaune du plan.

Les servitudes et leur assiette étant établies de façon identique dans le titre des époux [M] et dans celui des époux [W], par référence dans le titre des époux [M] à un plan repris dans le titre des époux [W], il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de communication de pièces demandée par les époux [W] ni à leur demande d'interrogation du notaire rédacteur.Il n'y a pas lieu non plus, comme le demandent les appelants, de rechercher une issue nécessaire et suffisante.

Dans ses conclusions, l'expert judiciaire indique sans ambiguïté que la solution qu'il propose est "que soit rétablie la limite de servitude inscrite sur l'annexe 1 et signé des parties lors de acquisition. Observation faite que le notaire Maître [G] confirme lui-même cette limite comme celle établies dans ces actes (annexe1)", en sorte qu'il ne commet aucune confusion entre deux plans, celui figurant en annexe 1 de son rapport étant le même plan que celui joint à la fois aux deux courriers sus-visés de Me [G] et de M.[J] ainsi qu'à l'acte de propriété des époux [W] du 12 août 2002 portant acquisition de la parcelle bâtie section [Cadastre 6].

Le plan figurant en annexe 2 du rapport de l'expert judiciaire correspond à un autre plan, établi en 2002, qui a été contractualisé dans le cadre de l' autre acte notarié également signé le 12 août 2002 entre les époux [W] et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à [Adresse 13], acte par lequel les époux [W] ont acquis le terrain nu cadastré section [Cadastre 7], issu de l'ancienne parcelle [Cadastre 5], grevée de la servitude de cour commune. Sur ce point, l'expert judiciaire précise que c'est M.[C] qui a construit la maison des époux [M], qu'à cette occasion il a modifié d'environ 18 centimètres l'implantation de ce pavillon et ainsi grevé son propre terrain, qu'il avait alors conservé, d'une extension de servitude de cour commune de 1,80m2, que le plan annexé à la vente [W]-syndicat des copropriétaires, signé par les parties à cet acte, correspond à cet état des lieux après travaux.

Faisant en conséquence une exacte application des éléments de la cause à nouveau débattus en cause d'appel, le premier juge a à juste titre constaté que la servitude de passage dont bénéficie le fonds [M] sur le fonds [W] est définie selon le pointillé dessiné sur le plan établi en 1994 par l'expert géomètre M. [J], visé à l'acte de vente du 21 février 1995 et annexé à l'acte de vente entre les consorts [C] et les époux [W].

L'expert judiciaire a constaté :

- que la clôture dressée unilatéralement par les époux [W] ne respecte pas le plan contractuel annexé à leur acte d'acquisition de 2002 en réduisant de près d'un mètre la largeur d'accès des époux [M],

- que le projet d'ouverture sur rue sollicité par les époux [W] et les premiers travaux de pose d'une nouvelle clôture rendent l'exercice du droit de passage des époux [M] plus incommode car ils diminuent l'angle entre la voie de sortie et la voie publique en réduisant le rayon de braquage des véhicules dans une rue déjà étroite ; que la sortie devient plus incommode et plus dangereuse,

- que la réduction d'un mètre supplémentaire sur la rue oblige à des manoeuvres moins commodes et plus dangereuses.

En réduisant de près d'un mètre l'assiette de la servitude de passage telle qu'elle résulte du plan contractuel annexé à leur acte d'acquisition du 12 août 2002 de la parcelle cadastrée [Cadastre 6] sur laquelle s'exerce la servitude de passage , les époux [W] ont enfreint les dispositions des articles 647 et 701 du code civil, aux termes desquelles d'une part tout propriétaire peut clore son héritage à condition de ne pas porter atteinte au droit de passage et de ne pas en rendre l'exercice plus incommode, d'autre part le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à la rendre plus incommode.

Dans le dispositif de leurs conclusions, les époux [W] demandent à la cour de constater qu'ils ont restitué l'assiette de la servitude en application de la décision du premier juge, dont on rappellera qu'elle n'était pas assortie de l'exécution provisoire, et de ne pas prononcer d'astreinte à leur encontre.

Mais cette thèse est contestée par les époux [M] qui répliquent que si les époux [W] ont déplacé leur clôture, ils l'ont fait sans respecter les préconisations du tribunal et de l'expert judiciaire et sans tenir compte du plan du 28 juin 1994, qu'en outre la portion de passage n'a pas été remise en état conformément au jugement entrepris.

Il convient de relever que l'expert judiciaire a noté en fin de rapport qu'il avait matérialisé la limite sur rue de la servitude par une marque rouge en présence des parties. Le constat de Maître [P], huissier de justice, établi le 24 septembre 2008 et produit par les époux [W], contient des constatations qui ne permettent pas de justifier du respect intégral des dispositions du jugement déféré quant à l'obligation des époux [W] de restituer l'assiette de la servitude et à ses modalités.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à M. et Mme [W] de restituer l'assiette de servitude telle que dessinée par le plan précité et de remettre en état la portion de passage qu'ils ont annexée conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, à savoir : démontage du grillage et stabilisation de 20 mètres carrés de voie automobile et par la pose d'un grave ciment sur vingt centimètres de profondeur après décapage, et ce, sous astreinte de 50€ par jour de retard une fois expiré le délai de deux mois à compter du jugement.

Relativement à la servitude de cour commune, les époux [W] ne peuvent se plaindre d'une mauvaise implantation de la maison des époux [M] ni solliciter de ce chef un somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts, alors qu'ils ont signé et accepté le plan annexé à l'acte de vente du 12 août 2002 conclu avec le syndicat des copropriétaires, ce plan mentionnant les modifications apportées par M.[C] ainsi qu'il a été exposé ci-dessus.

Sur le raccordement des eaux usées et sur la résorption des eaux pluviales

Les époux [W] demandent à la cour d'ordonner sous astreinte aux époux [M] de 'faire cesser les troubles liés au raccordement des eaux usées en se raccordant à l'égout public' et de les condamner également à réaliser les travaux nécessaires pour que les eaux pluviales soient résorbées à l'intérieur de leur propriété.

Les époux [W] se plaignant de ce que, contrairement aux dispositions de leur arrêté de permis de construire en date du 29 novembre 1994, les eaux usées des époux [M] ne sont pas évacuées à l'égoût public, les époux [M] justifient par une attestation de la mairie de [Localité 12] que leur propriété est raccordée au réseau communal d'assainissement.

Les époux [W] soutiennent également que le raccordement des eaux usées a été effectué en dehors de l'assiette de la servitude de passage au lieu de passer entièrement sous la servitude de passage pour se raccorder directement à l'égoût public.

Mais cette affirmation est contredite par l'expertise judiciaire dont il résulte que les canalisations d'eaux usées ont bien été posées en 1995 par M.[C], constructeur du pavillon des époux [M], en partie sur l'assiette de servitude, donc sur le lot bâti qu'il conservait et qu'il vendra en 2002 aux époux [W].

Les appelants ne démontrent ni la non conformité des canalisations d'eaux usées ni les troubles qu'ils invoquent.

En deuxième lieu, les époux [W] soutiennent que les eaux pluviales en provenance du fonds des époux [M] se déversent sur leur propriété, laquelle se trouve en contrebas, et provoquent des retenues d'eau.

Mais l'expert judiciaire a conclu que les désordres invoqués par les époux [W], les jours de gros orages, proviennent du diamètre insuffisant du réseau public et de l'absence de clapet anti-retour.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté les époux [W] de ces chefs de demande.

Sur la plantation de la haie vive

Le terrain des époux [M] étant situé à 2m 50 au dessus de celui des époux [W], l'expert judiciaire a préconisé l'implantation par les époux [M] d'une haie vive de 1,90 mètre de haut à 50 centimètres de la limite de propriété pour interdire toute vue directe en surplomb dans le jardin des époux [W], avec pose d'une palissade opaque provisoire dans l'attente de la pousse des végétaux.

Les époux [M], qui ne contestent pas la disposition du jugement entrepris entérinant cette proposition de l'expert judiciaire, justifient, par un constat d'huissier du 10 juillet 2008 qu'ils ont simplement fait poser deux panneaux opaque en bois et, par deux factures des Pépinières Sausset des 29 novembre et 20 décembre 2008, qu'ils ont acheté des végétaux sans que leur destination soit véritablement établie. Il ne résulte pas de ces justificatifs qu'il a été satisfait aux mesures demandées par le tribunal, pour interdire la vue plongeante directe sur le jardin des époux [W].

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qui concerne la haie vive, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande des époux [W] tendant à voir augmenter l'astreinte prononcée par le premier juge.

Sur les troubles de jouissance et voisinage invoqués par les époux [W]

Leur demande étant infondée quant à l'absence de branchement des eaux usées sur le réseau public et quant aux eaux pluviales, ils ne sont pas fondés à se prévaloir d'un trouble de jouissance de ce chef.

Quant à l'implantation de la haie vive entre les deux fonds, il convient de relever qu'elle était déjà prévue et visée dans le plan du 28 juin 1994, annexé à leur acte d'acquisition de la parcelle [Cadastre 6] du 12 août 2002 et qu'ils ont attendu l'assignation du 12 janvier 2006 délivrée à la requête des époux [M] pour reconventionnellement se plaindre de l'absence de haie vive suffisamment haute.

La demande en dommages-intérêts de ce chef n'est pas sérieuse.

Les époux [W] ne justifient pas davantage que les conditions d'utilisation de la servitude de passage par les époux [M] crée pour eux un trouble anormal de voisinage, notamment dans le stationnement des véhicules, reproche qui ne repose que sur quelques photographies .

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les époux [W] de leur demande en dommages-intérêts au titre de troubles de jouissance et de troubles de voisinage.

Sur les autres demandes

Les époux [M] reprennent devant la cour leur demande en dommages-intérêts pour préjudice moral à hauteur de 4.000 € et pour préjudice de jouissance à hauteur de 5.000 €.

Si le préjudice moral n'est pas justifié, en revanche il y a lieu de leur allouer la somme de 4.000€ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance issu de la gêne accrue, depuis octobre 2005, pour accéder en voiture à leur propriété en raison de la modification de l'assiette de la servitude de passage.

Par ailleurs, l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol ou, à tout le moins, de légèreté blâmable ; que, tel n'étant pas le cas en l'espèce, la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive présentée par les époux [M] ne peut être accueillie.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

DÉBOUTE les époux [W] de leur demande tendant à la communication de pièces par Me [G], notaire, et de leur demande tendant à voir interroger ce dernier,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf celle rejetant entièrement la demande d'allocation en dommages-intérêts des époux [M],

STATUANT À NOUVEAU sur ce point réformé,

CONDAMNE in solidum les époux [W] à payer aux époux [M] la somme de 4.000€ à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE les époux [W] de leur demande de nouvelle astreinte s'agissant de la haie vive, ainsi que de leur demande en paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts relative à la servitude de cour commune,

DÉBOUTE les époux [M] de leur demande en dommages-intérêts pour préjudice moral et pour résistance abusive,

CONDAMNE in solidum les époux [W] à payer aux époux [M] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE in solidum les époux [W] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP Jupin-Algrin, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 08/04760
Date de la décision : 27/05/2010

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°08/04760 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-27;08.04760 ?
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