COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 91Z
1ère chambre
1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 MAI 2010
R.G. N° 09/00973
AFFAIRE :
[P] [X]
C/
LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DES YVELINES
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Janvier 2009 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° chambre : 1
N° Section :
N° RG : 08/371
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- SCP BOITEAU PEDROLETTI
- SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE SIX MAI DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [P] [X]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 6]
exerçant la profession de Président du [Adresse 5] demeurant [Adresse 2]
représenté par la SCP BOITEAU PEDROLETTI - N° du dossier 00019151
rep/assistant : Me Maud DUCEUX (avocat au barreau de PARIS)
APPELANT
****************
Monsieur LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DES YVELINES
élisant domicile en ses bureaux [Adresse 3] agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques
représenté par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD - N° du dossier 0946184
INTIME
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Mars 2010, Madame Bernadette WALLON, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Bernadette WALLON, président,
Madame Evelyne LOUYS, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
A la suite du contrôle des déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune des années 1990 à 1999 de M. [X], l'administration fiscale a réintégré la valeur des comptes courants d'associé que l'intéressé détenait dans les sociétés [Adresse 5], [F] [K], [G] et dans le groupement foncier agricole [P] [X] ainsi que la quote part non professionnelle détenue par M. [X] dans le capital social de la société [Adresse 5], société anonyme exploitant pour son activité hôtelière le domaine du [Adresse 5] appartenant à son patrimoine privé.
M. [P] [X] s'est opposé aux réintégrations envisagées.
Les rappels d'impôts ont été mis en recouvrement le 10 décembre 2001.
Par acte en date du 2 mars 2006, M. [P] [X] a assigné l'administration devant le tribunal de grande instance de Versailles en vue d'obtenir l'annulation de la décision de rejet de sa réclamation et des avis de mise en recouvrement.
Par jugement en date du 7 janvier 2009, le tribunal de grande instance de Versailles a :
- pris acte de l'accord des parties concernant la décharge de l'imposition supplémentaire au titre du compte courant de M. [P] [X] dans le GFA [X] [X] et la décote de 40% à appliquer sur la valeur vénale de l'ensemble immobilier 'Domaine du [Adresse 5]' compte tenu du bail commercial,
- prononcé la décharge de M. [P] [X] de l'imposition supplémentaire au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune quant :
au compte courant de M. [P] [X] dans la société [G] pour les années 1991 et 1999,
au compte courant de M. [P] [X] dans la SA '[Adresse 5]' pour les années antérieures à 1993 et postérieures à 1996,
- dit qu'il doit être opéré un abattement de 20% sur la valeur taxable de la résidence principale de M. [P] [X] au [Adresse 5] à partir de 1995,
- débouté M. [P] [X] de ses autres demandes,
- dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties et condamné le directeur des services fiscaux à payer à M. [P] [X] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Appelant, M. [P] [X], aux termes de ses écritures signifiées le 4 juin 2009, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens, demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté,
- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
A titre principal,
- débouter la Direction des services fiscaux des Yvelines de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- prononcer la décharge des impositions supplémentaires d'ISF des années 1990 à 1995, en raison de l'irrégularité de la procédure,
- reconnaître la qualification de biens professionnels aux parts du GFA [X] [X] et prononcer en conséquence la décharge des impositions supplémentaires d'ISF de l'année 1996 relatives à ces parts,
A titre subsidiaire,
- reconnaître la qualification de biens professionnels aux parts du GFA [X] [X] et prononcer en conséquence la décharge des impositions supplémentaires d'ISF des années 1993 à 1995 relatives à ces parts, sinon admettre ces parts au bénéfice de l'exonération partielle de 50%,
- condamner la Direction des services fiscaux des Yvelines à payer à M. [P] [X]:
la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés en première instance,
et celle de 3 000€ pour ceux exposés devant la cour,
- condamner la Direction des services fiscaux des Yvelines aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés, pour ceux la concernant, directement par la SCP Boiteau & Pedroletti, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
M. le Directeur des services fiscaux des Yvelines, aux termes de ses écritures signifiées le 25 août 2009, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens, demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter M. [P] [X] de ses demandes relatives tant à l'article 700 du code de procédure civile qu'aux dépens,
- condamner M. [P] [X] à payer à M. le Directeur des services fiscaux des Yvelines la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [P] [X] aux entiers dépens,
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2010.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la régularité de la procédure engagée par l'administration fiscale au titre des années 1990 à 1995
Considérant que M. [P] [X] soulève l'irrégularité de la procédure engagée au titre des années 1990 à 1995 au motif que l'administration fiscale aurait dû lui adresser deux notifications de redressement, la première pour la période précédant son mariage et la seconde pour la période postérieure à son union avec Mme [T] ; qu'en s'abstenant de le faire, elle a méconnu son obligation de respect du secret professionnel;
Que l'administration oppose à l'appelant les dispositions de l'article 80 CA du livre des procédures fiscales et soutient que M. [X] ne peut se plaindre ni d'une violation des droits de la défense ni d'une violation du secret professionnel ;
Considérant que l'article 80 CA du livre des procédures fiscales prévoit que : 'La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substancielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes à l'exclusion des droits dûs en principal et des intérêts de retard.
Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celle pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France' ;
Considérant qu'en l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que les accusés de réception tant la notification du redressement en date du 7 décembre 1999 que la réponse aux observations du contribuable du 26 janvier 2000 ne sont signés ni par M. [X] ni par son épouse et que l'appelant ne soutient pas que la personne signataire des dits avis n'avait pas qualité pour le faire de sorte que la communication des éléments de son patrimoine avant le mariage s'il a été porté à la connaissance de Mme [X] n'a pu se faire qu'avec l'accord de M. [X] ;
Considérant qu'il s'ensuit que ce dernier ne peut valablement se plaindre d'une quelconque atteinte aux droits de la défense ni d'une violation du secret professionnel ;
Considérant que ce premier moyen sera écarté et la procédure conduite par l'administration fiscale au titre des années 1990 à 1995 déclarée parfaitement régulière ;
Sur L'exonération totale des parts détenues dans le groupement foncier agricole dénommé GFA
Considérant que M. [X] sollicite que soit reconnue la qualification de biens professionnels aux parts du GFA [X] [X] et prononcé, en conséquence, la décharge des impositions supplémentaires d'ISF de l'année 1996 relative à ces parts ;
Qu'il se fonde sur la réponse ministérielle Girod elle-même opposable à l'administration fiscale sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales qui envisage des mesures de tempérament à l'article 885 Q du code général des impôts concernant la personnalité juridique du preneur en permettant la mise à disposition d'immeubles professionnels au profit d'une société, dispositif repris par la loi du 30 décembre 2003 applicable le 1er janvier 2004 ;
Considérant que l'administration fiscale réplique qu'en tout état de cause une condition est manquante dès lors que M. [X] ne détient pas, lui-même, son conjoint, ascendants ou descendants, frères ou soeurs les parts dudit GFA ;
Considérant qu'il est constant que M. [P] [X] détient des parts d'un GFA dont le patrimoine immobilier est composé uniquement d'un domaine viticole ;
Que par acte authentique du 2 décembre 1992, le GFA a consenti un bail rural d'une durée de 18 ans à la société civile d'exploitation agricole '[Adresse 4]' ;
Que cette société est détenue à 99 % par la SA '[Adresse 5]', elle-même détenue à 99,95 % par M. [X] ;
Considérant que la nouvelle rédaction des articles 885 P et 885 Q du code général des impôts est issue de l'article 30-II de la loi du 30 décembre 2003 ; que ces articles ont légalisé la doctrine administrative exprimée dans une instruction datée du 3 janvier 2003 étant précisé que cette doctrine a pu s'appliquer sur réclamation expresse de leurs parts, aux contribuables qui remplissaient avant la parution de l'instruction les conditions pour en bénéficier (instruction du 20 janvier 2005) ;
Considérant que l'administration fiscale reconnaît que M. [X] a invoqué cette doctrine dans sa réclamation préalable du 18 janvier 2002 ;
Considérant qu'aux termes de l'instruction du 20 janvier 2005, il résulte du BOI 7 S-1-03 en date du 3 janvier 2003, qu'il est admis de retenir que, pour le bénéfice de la qualification de biens professionnels prévue par les articles 885 P et 885 Q du code général des impôts, la condition tenant à l'utilisation du bien loué par le preneur dans l'exercice d'une profession principale est remplie dans l'hypothèse de la mise à la disposition d'une société d'un bien rural si les conditions suivantes sont réunies, notamment :
'- la personne morale au profit de laquelle le bien rural est mis à disposition, doit être une société à objet principalement agricole dont au moins 50 % des titres sont détenus collectivement en pleine propriété par le bailleur ou le détenteur de parts de GFA, son conjoint, leurs ascendants ou descendants, frères ou soeurs' ;
Considérant qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que la société civile '[Adresse 4]' n'est détenue qu'indirectement par M. [X] au travers de la SA '[Adresse 5]' dont il possède 99,95 % des parts de sorte que c'est à juste titre, que l'administration fiscale a refusé la qualification de biens professionnels aux parts du GFA [X] [X] ;
Sur l'exonération partielle prévue par l'article 885 H du code général des impôts
Considérant que M. [X] s'estime, à titre subsidiaire, éligible à une exonération partielle de 50 % au visa de l'article 885 H alinéa 4 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 1er janvier des années 1990 à 1999 ;
Mais considérant que ce texte disposait : 'Sous les conditions prévues au 4° du 1 de l'article 793 du code général des impôts, les parts de groupement foncier agricole soumis aux dispositions de la loi complémentaire à la loi d'orientation agricole du 8 août 1962 et de la loi du 31 décembre 1970 relative aux groupements fonciers agricoles, qui n'entrent pas dans le champs d'application de l'article 885 Q, sont, sous réserve que ces parts soient représentatives d'apports constitués par des immeubles ou des droits immobiliers à destination agricole et que les baux à long terme ou les baux cessibles consentis par le groupement répondent aux conditions prévues au troisième alinéa, exonérées à concurrence des trois quarts, si la valeur totale des parts détenues n'excède pas 500 000 francs et pour moitié au-delà de cette limite' ;
Considérant qu'il n'est pas contesté par M. [X] que les parts du GFA sont représentatives d'apport en numéraire ;
Considérant que M. [X] ne peut donc voir sa demande tendant à voir admettre ces parts du GFA [X] [X] au bénéfice de l'exonération partielle de 50 % prospérer ;
Considérant que le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris.
Y AJOUTANT,
CONDAMNE M. [P] [X] à verser à M. le Directeur des services fiscaux des Yvelines la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Lissarrague Dupuis Boccon-Gibod, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER,Le PRESIDENT,