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11/03/2010 | FRANCE | N°08/09499

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 11 mars 2010, 08/09499


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 70E



1ère chambre

1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 11 MARS 2010



R.G. N° 08/09499



AFFAIRE :



[N] [T]



C/



[V] [S]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Octobre 2008 par le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11 - 08 - 132



Expéditions exécuto

ires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



- SCP DEBRAY-CHEMIN



- SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER



REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE ONZE MARS DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affa...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 70E

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 11 MARS 2010

R.G. N° 08/09499

AFFAIRE :

[N] [T]

C/

[V] [S]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Octobre 2008 par le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11 - 08 - 132

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

- SCP DEBRAY-CHEMIN

- SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE ONZE MARS DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [N] [T]

[Adresse 3]

représenté par la SCP DEBRAY-CHEMIN - N° du dossier 081007

Rep/assistant : Me Marie-Noël LYON (avocat au barreau du VAL DOISE)

APPELANT

****************

Monsieur [V] [S]

né le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 5] (Algérie)

[Adresse 1]

représenté par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER - N° du dossier 20090277

Rep/assistant : Me Philippe RAOULT (avocat au barreau de VERSAILLES)

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Janvier 2010, Madame Bernadette WALLON, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Bernadette WALLON, président,

Madame Evelyne LOUYS, conseiller,

Madame Dominique LONNE, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

M.[N] [T] est propriétaire du bien immobilier situé à [Adresse 3], tandis que les époux [S] sont propriétaires du fonds voisin situé [Adresse 1].

Faisant grief à son voisin de ne pas entretenir les haies et arbres plantés sur son terrain conformément aux dispositions du code civil, M.[N] [T] a saisi le tribunal d'instance de Montmorency pour obtenir notamment la condamnation de celui-ci à l'élagage des haies de thuyas et troènes plantées en limite séparative, à l'élagage des noisetiers et autres arbres plantés à moins de deux mètres de la limite séparative, à l'enlèvement des plaques de fibrociment, le tout sous astreinte.

Par jugement du 10 octobre 2008, le tribunal d'instance de Montmorency l'a débouté de ses demandes, lui a ordonné de procéder à l'élagage des haies et branches d'arbres dépassant de son fonds et ce annuellement, l'a condamné à payer à M.[V] [S] la somme de 200 euros pour procédure abusive.

Appelant, M.[N] [T], par dernières conclusions signifiées le 6 janvier 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

statuant à nouveau,

- ordonner à M.[S] de procéder à l'élagage de sa haie de thuyas et de sa haie de troènes se trouvant en limite séparative de sorte qu'elle ne dépasse pas le faîte des poteaux en béton soit 1,80 à 1,85 mètres et ne déborde en épaisseur sur son fonds et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un mois après la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner à M.[S] de procéder à l'élagage des noisetiers ayant plus de quatre mètres de hauteur et autres arbres et arbustes se trouvant à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un mois après la signification de l'arrêt à intervenir,

- lui donner acte de ce qu'il a dès à présent taillé et élagué se propre haie de thuyas et de ce qu'il s'en rapporte à ,justice sur le mérite de cette demande,

- débouter M.[S] de ses autres demandes,

- le décharger de toute condamnation à des dommages-intérêts,

- condamner M.[S] à lui payer la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M.[S] aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Debray Chemin, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées en dernier lieu le 7 janvier 2010 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, M.[V] [S] demande à la cour de :

- donner acte à M.[T] de l'enlèvement des plaques de fibrociment et rejeter la demande d'infirmation du jugement de ce chef,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M.[T] de ses demandes, ordonné qu'il procède à l'élagage des branches d'arbres dépassant de son fonds et ce annuellement et en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts,

- l'infirmer pour le surplus,

- condamner M.[T] à se conformer à 'l'élagage de sa haie de thuyas du fonds n°29 en bordure du fonds n°25 ceci tant en hauteur de quatre mètres tel qu'il s'est octroyé que pour la totalité des branches de ses plantations qui dépassent sur le fonds du concluant, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard dès la première infraction constatée et après signification d'un commandement d'exécuter',

- condamner M.[T] en application de l'article 599 du code de procédure civile à lui payer la somme de 6000 euros à titre de dommages-intérêts 'pour non observation de la taille annuelle en hauteur de quatre mètres et branches de ses thuyas qui dépassent chez son voisin',

- condamner M.[T] à l'autoriser, conformément aux dispositions de l'article 673 du code civil, à pénétrer sur son fonds, en présence d'un huissier de justice ou expert judiciaire, pour qu'il procède à l'élagage de ses plantations dépassant sur le fonds de l'appelant et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner M.[T] à lui payer la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour abus du droit de propriété et en réparation des troubles dépassant les inconvénients normaux de voisinage occasionnés et voies de fait, avec enlèvement des dépôts et effaroucheurs sur le fonds n°27 en limite du fonds n°25 pour trouble anormal de voisinage consécutif à la visibilité établie entre les deux fonds avec astreinte de 50 euros par jour un mois après la signification de l'arrêt,

- condamner M.[T] au paiement de la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamner M.[T] à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M.[T] aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Jullien Lecharny Rol Fertier, avoués, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2010.

MOTIFS

M.[T] a procédé à l'enlèvement des plaques de fibrociment qui lui appartiennent. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M.[T] de sa demande de condamnation de M.[S] à l'enlèvement desdites plaques.

sur la demande d'élagage des haies de thuyas et de troènes situées sur le fonds des époux [S] en limite séparative du fonds de M.[T]

Selon l'article 671 du code civil, il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite séparative de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus, et à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de ligne séparative de leurs héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations.

L'article 672 du même code dispose que le voisin peut exiger que les arbres, arbrisseaux et arbustes plantés à une distance moindre que la distance légale, soient arrachés ou réduits à la hauteur déterminée dans l'article précédent, à moins qu'il n'y ait titre, destination du père de famille ou prescription trentenaire.

M.[S] se prévaut des usages parisiens qui permettent de planter des arbres, arbustes et arbrisseaux à moins de cinquante centimètres de la limite séparative des fonds sous réserve de ne pas causer un gêne excessive au propriétaire du fonds voisin et de procéder à l'élagage réglementaire.

Il est constant que les haies de thuyas et de troènes plantées sur le fonds de M.[S] en limite séparative du fonds de M.[T] ne respectent pas la distance réglementaire de 50 centimètres par rapport à cette limite.

Toutefois, dès lors que M.[T] ne sollicite pas l'arrachage de ces haies, il est indifférent de savoir si les usage de la banlieue parisienne sont ou non applicables à la commune de [Localité 4], ce que le maire conteste, puisqu'en tout état de cause, la hauteur de la haie ne peut dépasser la limite de 2 mètres.

Il ressort de plusieurs constats d'huissier produits aux débats que les haies litigieuses ne sont pas maintenues par M.[S] en permanence à la hauteur limite de deux mètres ce qui caractérise le non respect des dispositions légales, et ce même en l'absence de tout préjudice engendré par l'implantation illicite. Le droit du voisin d'obtenir le maintien des haies à la hauteur réglementaire ne souffre aucun tempérament même tiré de l'équité ou de l'esthétique.

En conséquence, c'est à tort que le tribunal, qui avait constaté que la hauteur des haies dépassaient la limite autorisée, a néanmoins débouté M.[T] de sa demande au motif qu'il ne subissait aucune gêne ni aucune perte d'ensoleillement.

M.[S] ne se prévalant ni d'un titre ni de la destination de père de famille et ne justifiant pas d'une prescription trentenaire dont le point de départ est la date à laquelle les végétaux ont dépassé la hauteur maximum permise, le jugement déféré sera infirmé de ce chef et M.[S] sera condamné à procéder à la taille régulière de ses haies afin qu'elles soient maintenues en permanence à la hauteur maximum de deux mètres calculée à partir du sol de plantation et non de celui de la propriété voisine surélevée.

En application de l'article 673 du code civil, celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres arbrisseaux et arbustes du voisin peut contraindre celui-ci à les couper.

Il est constant que le propriétaire voisin ne peut procéder lui-même à la coupe des branches qui le gênent.

Les dispositions de l'article 673 susvisé s'appliquent y compris lorsque les usages locaux autorisent la plantation en limite des propriétés.

Il ressort des procès-verbaux de constat produits par M.[T] que des branches de la haie de thuyas dépassent à travers le grillage sur le fonds de ce dernier. Il convient en conséquence de condamner M.[S] à procéder à la coupe de ces branches ou à mettre en place tout protection adaptée pour faire cesser ce dépassement des branches.

Faute pour M.[S] de démontrer que ces travaux nécessitent le passage impérieux sur le fonds de M.[T] , qu'aucun autre moyen ne permet d'y procéder à partir de son fonds, même si ce moyen serait moins commode et plus onéreux, alors que M.[T] produit aux débats deux devis d'entreprise qui indiquent pouvoir procéder aux travaux à partie du fonds sur lequel les arbustes sont plantés, il n'y a pas lieu d'autoriser l'intimé à pénétrer sur le fonds voisin pour couper les branches litigieuses.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a débouté M.[T] de sa demande de suppression des branches dépassant sur son fonds.

sur l'élagage des noisetiers et arbres se trouvant à moins de deux mètres de la limite séparative sur le fonds des époux [S]

En application des dispositions des articles 671 et 672 du code civil, et pour les motifs ci-dessus exposés, il convient de condamner M.[S] à maintenir les arbres plantés à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds à hauteur de deux mètres maximum.

sur l'élagage de la haie sur le propriété de M.[T]

M.[T] ne conteste pas devoir maintenir la hauteur de cette haie plantée à la distance réglementaire à une hauteur n'excédant pas deux mètres . Il convient de lui en donner acte et de le condamner, en tant que de besoin, à maintenir en permanence la hauteur maximum de la haie à deux mètres.

Il devra également veiller à maintenir à la hauteur de deux mètres toutes les plantations situées à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds et élaguer les branches des arbres qui surplombent la propriété des époux [S].

sur le trouble anormal de voisinage

Nul ne doit causer à son voisin un trouble qui dépasse les inconvénients normaux de voisinage.

Il ne peut être reproché à M.[T] d'entreposer du matériel divers sur son terrain, chacun pouvant jouir de sa propriété comme il l'entend, dès lors qu'il ne cause aucun grief à son voisin. Tel est bien le cas en l'espèce puisque M.[S] ne peut exiger de son voisin qu'il l'utilise uniquement à usage de jardin.

En revanche, il ressort des procès-verbaux de constat que M.[T] a installé sur un poteau de plusieurs mètres de haut, à proximité du fonds voisin, des CD et des effaroucheurs sonores destinés à éloigner les oiseaux. Cette installation provoque la réverbération du soleil en direction du fonds des époux [S] et nuit à la tranquillité de ces derniers . Les nuisances visuelles et sonores ainsi imposées aux intimés excèdent les inconvénients normaux de voisinage. Il sera en conséquence fait droit à leur demande de dépose de cette installation.

sur les demandes en dommages-intérêts

Il est établi que les deux parties ont méconnu les règles du code civil ce qui est à l'origine de leur conflit de voisinage. Elles sont toutes deux responsables de cette situation. M.[S] est donc mal fondé à se prévaloir d'un préjudice causé par la seule faute de M.[T].

Dès lors qu'il est partiellement fait droit aux demandes de l'une et l'autre partie, cette procédure ne peut être considérée comme abusive . Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné M.[T] au paiement de dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné M.[N] [T] à procéder à l'élagage des haies et des branches d'arbres dépassant sur le fonds des époux [S] et ce annuellement,

L'INFIRME pour le surplus,

STATUANT À NOUVEAU,

CONDAMNE M.[S] à procéder à l'élagage de ses haies de thuyas et de troènes se trouvant en limite séparative de sorte qu'elles ne dépassent pas la hauteur de deux mètres à partir du pied et ne débordent en épaisseur sur le fonds voisin et ce sous astreinte de 50 euros par infraction constatée passé un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt,

CONDAMNE M.[S] à procéder à l'élagage des noisetiers et autres arbres et arbustes se trouvant à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds pour les maintenir à une hauteur de deux mètres et ce sous astreinte de 50 euros par infraction constatée passé un délai de trois mois après la signification de l'arrêt,

DÉBOUTE M.[S] de sa demande d'autorisation de pénétrer sur le fonds voisin,

CONDAMNE M.[N] [T] à élaguer les haies en limite séparative des fonds afin de les maintenir à la hauteur maximum de deux mètres, à élaguer les arbustes et arbres plantés à moins de deux mètres de la limite séparative des fonds afin que leur hauteur soit maintenue à deux mètres maximum , et à couper les branches des arbres qui dépassent sur le fonds voisin, sous peine d'astreinte de 50 euros par infraction constatée passé un délai de trois mois après la signification de l'arrêt

CONDAMNE M.[N] [T] à enlever le poteau comportant des effaroucheurs pour les oiseaux dans les deux mois de la signification de l'arrêt sous peine d'astreinte de 50 euros par jour de retard

DÉBOUTE M.[S] de ses demandes en dommages-intérêts

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

PARTAGE les dépens par moitié et dit qu'ils pourront être recouvrés directement par les avoués de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 08/09499
Date de la décision : 11/03/2010

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°08/09499 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-03-11;08.09499 ?
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