COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88EH. L. / I. O.
5ème Chambre
ARRET No
RÉPUTÉ
CONTRADICTOIRE
DU 21 JANVIER 2010
R. G. No 08 / 02774
AFFAIRE :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES SAINT QUENTIN EN YVELINES
C /
Ismael X...
DRASSIF
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juillet 2008 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES
No RG : 07 / 1584
Copies exécutoires délivrées à :
Me Ingeborg TROMBEN
Copies certifiées conformes délivrées à :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES SAINT QUENTIN EN YVELINES
Ismael X...
DRASSIF
le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT ET UN JANVIER DEUX MILLE DIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES SAINT QUENTIN EN YVELINES
2, Avenue des Prés
BP 17
78184 SAINT-QUENTIN EN YVELINES
représenté par Mme Y... en vertu d'un pouvoir général
APPELANTE
****************
Monsieur Ismael X...
...
...
représenté par Me Ingeborg TROMBEN (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C535)
INTIMÉ
****************
DRASSIF
57 / 62 rue de la Mouzaia
75019 PARIS
non représentée
PARTIE INTERVENANTE
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Novembre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle OLLAT, Conseiller chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé (e) de :
Madame Jeanne MININI, président,
Madame Sabine FAIVRE, conseiller,
Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Christiane PINOT,
FAITS ET PROCÉDURE,
M. Ismaël X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable de la Caisse d'allocations familiales en date du 4 octobre 2007 lui ayant refusé le bénéfice des prestations familiales en faveur de ses enfants Federico, Julieta et Natalia.
Par jugement du 23 juillet 2008 le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines a infirmé partiellement la décision de la commission de recours amiable, a condamné la Caisse d'allocations familiales des Yvelines à verser à compter du 23 mai 2007 à M. X... les prestations familiales pour les enfants Federico X... né le 13 septembre 1990, Julieta X... née le 2 août 1993 et Natalia X... née le 21 septembre 1997 et a rejeté le surplus des demandes de M. X....
Le 8 août 2008, la Caisse d'allocations familiales des Yvelines a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 25 juillet 2008.
Elle conclut à l'infirmation du jugement et au rejet des prétentions de M. X... aux termes de conclusions datées du 29 octobre 2009 reprises oralement le 3 novembre 2009.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
- si M. X... de nationalité argentine et titulaire d'une carte de séjour temporaire valable du 31 août 2006 au 30 août 2007, du 31 août 2007 au 30 août 2008 et du 31 août 2008 au 30 août 2009 remplit jusqu'au mois de juillet 2009 les conditions fixées pour sa part aux articles L. 512-1 et D. 512-1 du code de la sécurité sociale pour demander les prestations familiales, les enfants Julieta et Natalia ne sont titulaires d'aucun des documents figurant à l'article D. 512-2 du même code mais seulement de documents de circulation pour étranger mineur et Federico est titulaire de ce même document puis d'une carte de séjour temporaire du 31 août 2008 au 30 août 2009,
- l'application des articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de la sécurité sociale se cumule avec celle des articles D. 512- 1et D. 512-2 ; dès lors, la régularité du séjour de la personne étrangère qui sollicite le bénéfice des prestations n'est pas suffisante ; il faut que les enfants pour lesquels les prestations sont demandées, soient eux-mêmes entrés mais séjournent de façon régulière.
M. X... conclut à la confirmation du jugement sauf en sa disposition relative au point de départ du paiement des prestations familiales qu'il demande à la cour de fixer à compter du mois de janvier 2007 et non à compter du mois de mai 2007 ; il demande à la cour de condamner la Caisse d'allocations familiales au paiement du différentiel ainsi qu'à une indemnité de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile suivant les conclusions datées du 3 novembre 2009 développées oralement.
Il reprend les même explications que celles formulées en première instance et estime qu'au regard des dispositions européennes des droits de l'Homme, le refus du versement des prestations familiales pour défaut de production d'un certificat ANAEM est discriminatoire alors même que ce certificat exigé par la caisse d'allocations familiales n'existe plus.
La Drassif, régulièrement convoquée, n'a pas comparu ni personne pour elle.
SUR CE,
Considérant que M. X... a sollicité au mois de janvier 2007 l'attribution des prestations familiales en faveur de ses enfants Federico X... né le 13 septembre 1990, Julieta X... née le 2 août 1993 et Natalia X... née le 21 septembre 1997 ; qu'un rejet de ses demandes lui a été notifié par la Caisse d'allocations familiales des Yvelines au motif que ses enfants ne disposaient d'aucun des documents figurant à l'article D. 512-2 du Code de la sécurité sociale,
Considérant que la loi du 19 décembre 2005, dite loi de financement de la sécurité sociale, pour 2006 a modifié l'article L. 512-2 du Code de la sécurité sociale, lequel est désormais rédigé comme suit : " bénéficient de plein droit des prestations familiales dans les conditions fixées par le présent livre les étrangers titulaires d'un titre exigé d'eux, en vertu, soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités internationaux pour résider régulièrement en France ; ces étrangers bénéficient des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de l'une des situations suivantes qui sont énumérées par le texte ",
Considérant qu'en application de ce texte, le décret no 2006-234 du 27 février 2006 a abrogé le chapitre I du Titre I du Livre 5 du Code de la sécurité sociale relatif aux prestations familiales comportant les articles D. 511-1 et D. 511-2 et a créé les articles D. 512-1 et D. 512-2 qui énumèrent les titres et documents nécessaires pour justifier de la régularité de l'entrée et du séjour des requérants en France et pour justifier de la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers à leur charge et au titre desquels ils sollicitent le bénéfice des prestations ; que ces textes visent des situations familiales différentes comme celles notamment des enfants nés en France, de ceux de familles de réfugiés ou de parents bénéficiant de la protection subsidiaire, des enfants entrés régulièrement dans le cadre de la procédure de regroupement familial ou de ceux entrés au plus tard en même temps que le parent titulaire d'une carte de séjour,
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. Ismaël X... de nationalité argentine est titulaire d'un titre de séjour l'autorisant à résider et à travailler en France pour la période du 31 août 2006 au 30 août 2009 ; qu'il remplit donc les conditions fixées aux articles L. 512-1 et D. 512-1 pour solliciter le bénéfice des prestations familiales ; qu'il assume la charge effective de ses trois enfants arrivés en France au mois de janvier 2007 lesquels disposent seulement de documents de circulation pour étranger mineur, Federico étant titulaire de ce même document puis d'une carte de séjour temporaire du 31 août 2008 au 30 août 2009 ; que M. X... justifie, par la production des certificats de scolarité délivrés par le lycée international de Saint-Germain en Laye, de la présence de ses trois enfants en France à la date du 10 janvier 2007 ;
Considérant que l'article D. 512-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 27 février 2006, pris en application de la loi du 19 décembre 2005 dispose dorénavant que la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à sa charge et au titre desquels il sollicite le bénéfice des prestations familiales est justifiée par la production de l'un des documents qu'il énumère ; qu'est ainsi exigé de l'enfant même mineur un certificat de contrôle médical délivré par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial,
Considérant toutefois que cette réglementation qui subordonne le bénéfice des prestations familiales à la régularité du séjour des enfants mineurs portent en l'espèce une atteinte disproportionnée au principe de non-discrimination en raison de l'origine nationale et au droit à la protection de la vie privée et familiale garantis par les articles 8 et 14 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, M. X... a été recruté en France par une entreprise française d'envergure nationale dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée lui permettant d'assurer la vie matérielle de sa famille ; que l'entrée en France des membres de la famille s'est faite de manière quasi simultanée ; qu'en raison de l'activité professionnelle du père, le centre d'intérêts de la famille X... a été fixé en France pendant trois ans ; que dans ces conditions, il convient de dire que M. X... qui assume avec son épouse la charge effective et permanente de ses trois enfants, a droit aux prestations familiales sans qu'il puisse lui être reproché de ne pas produire le certificat de contrôle médical délivré par l'Anaem ; qu'il y a lieu à confirmation du jugement qui a fait droit à sa demande sauf en sa disposition relative au point de départ des prestations familiales qui doit être fixée au 10 janvier 2007 ;
Considérant que l'équité ne commande pas en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'appelant ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
STATUANT publiquement et par arrêt RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en sa disposition relative au point de départ du versement des prestations familiales qui est fixé à compter du 10 janvier 2007,
DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Arrêt prononcé par Mme Jeanne MININI, président, et signé par Mme Jeanne MININI, président et par Mme Christiane PINOT, Greffier présent lors du prononcé.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,