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18/11/2009 | FRANCE | N°04/13881

France | France, Cour d'appel de Versailles, 18 novembre 2009, 04/13881


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES




Code nac : 86D


14ème chambre


ARRET No


contradictoire


DU 18 NOVEMBRE 2009


R.G. No 09/02744


AFFAIRE :


COMITE D'ENTREPRISE DE L'UNITE ECONOMIQUE ET SOCIALE EMAP NATURE DEVENUE LA SOCIETE MONDADDORI
...


C/




S.A.S. DIANA, venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SAS LE CHASSEUR FRANCAIS, CANOPE SNC, P&C SAS, et ADJ SAS constituant ensemble l'UES EMAP NATURE




Décision déférée à la cour : Jugement rendu l

e 02 Décembre 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre :
No Section :
No RG : 04/13881


Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :


SC...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 86D

14ème chambre

ARRET No

contradictoire

DU 18 NOVEMBRE 2009

R.G. No 09/02744

AFFAIRE :

COMITE D'ENTREPRISE DE L'UNITE ECONOMIQUE ET SOCIALE EMAP NATURE DEVENUE LA SOCIETE MONDADDORI
...

C/

S.A.S. DIANA, venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SAS LE CHASSEUR FRANCAIS, CANOPE SNC, P&C SAS, et ADJ SAS constituant ensemble l'UES EMAP NATURE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Décembre 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre :
No Section :
No RG : 04/13881

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

SCP TUSET-CHOUTEAU

SCP FIEVET-LAFONREPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE NEUF,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSES devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation () du 2 décembre 2008 rectifié le10 février 2009 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles (1ère chambre A) le 15 février 2009

COMITE D'ENTREPRISE DE L'UNITE ECONOMIQUE ET SOCIALE EMAP NATURE DEVENUE LA SOCIETE MONDADDORI
39 rue du Général Félix Eboué
92130 ISSY LES MOULINEAUX
représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU - No du dossier 20090105
assisté de Me Roger KOSKAS (avocat au barreau de PARIS)

SYNDICAT NATIONAL DE L'ECRIT (CFDT)
64 rue de Saintoge
75003 PARIS
représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU
assisté de Me Roger KOSKAS (avocat au barreau de PARIS)

SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE (CFTC)
5 Avenue de la Poste
75017 PARIS
représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU
assisté de Me Roger KOSKAS (avocat au barreau de PARIS)

SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES (SNJ) REGION PARISIENNE
33 rue du Louvre
75002 PARIS
représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU
assisté de Me Roger KOSKAS (avocat au barreau de PARIS)

****************
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

S.A.S. DIANA, venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SAS LE CHASSEUR FRANCAIS, CANOPE SNC, P&C SAS, et ADJ SAS constituant ensemble l'UES EMAP NATURE
48 rue Guynemer
92865 ISSY LES MOULINEAUX CEDEX
représentée par la SCP FIEVET-LAFON - No du dossier 290383
assistée de Me Raphaël BORDIER (avocat au barreau de NANTERRE)

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2009, Madame Ingrid ANDRICH , conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-François FEDOU, président,
Madame Ingrid ANDRICH, conseiller,
Monsieur Philippe BOIFFIN, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre LOMELLINI

FAITS ET PROCEDURE,

Le 27 avril 1995, une unité économique et sociale a été reconnue entre les sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC, sociétés de presse, pour la mise en place d'institutions représentatives du personnel communes à ces quatre sociétés.

Un accord d'intéressement commun a été conclu le 31 mai 2001 avec diverses organisations syndicales, suivi d'un autre pour la période 2002 à 2004.

L' accord de participation pour l' UES a été signé le 28 juin 2002. entre les sociétés constituant l'UES et le SYNDICAT NATIONAL DE L'ÉCRIT CFDT, le SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES, le SYNDICAT CFE-CGC, enfin le SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC.

A l'occasion de l'expertise des comptes de l'année 2003, l'expert du COMITÉ D'ENTREPRISE de l'UES a relevé que les salaires de certains journalistes pigistes n'étaient pas inclus dans la masse salariale servant au calcul de la participation, alors qu'ils étaient inclus dans les déclarations sociales et fiscales des sociétés de l' UES ; de même, il est apparu que les sociétés distrayaient de cette masse salariale l'abattement de 30 % forfaitaire pour frais professionnels des journalistes.

L'expert a également relevé que la société CANOPE, filiale à 100% de la société DIANA lui avait versé lors de l'exercice 2003 des dividendes (3,5 Millions) qui n'avaient pas été pris en compte dans les résultats nets comptables de cette société pour le calcul de l'intéressement.

Le COMITÉ D'ENTREPRISE de l'UES EMAP NATURE et le SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES RÉGION PARISIENNE, le SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC et le SYNDICAT NATIONAL DE L'ÉCRIT (CFDT), ont saisi, le 26 septembre 2004, le tribunal de grande instance de Nanterre de demandes tendant à ce qu'il soit notamment jugé que l'employeur ne pouvait pas déduire de la masse salariale les salaires de certains pigistes, ainsi que l'abattement pour frais professionnels des journalistes, pour le calcul de la réserve de participation, outre d'autres demandes relatives à l'accord d'intéressement et à la subvention de fonctionnement du COMITÉ D'ENTREPRISE.

Par jugement du 2 décembre 2005, le tribunal de grande instance de Nanterre a déclaré irrecevables les demandes du COMITÉ D'ENTREPRISE en exécution des accords de participation et d'intéressement et celles des SYNDICATS s'agissant du calcul des subventions du COMITÉ D'ENTREPRISE.

Faisant droit aux demandes du COMITÉ D'ENTREPRISE relatives à la subvention de fonctionnement et à la contribution aux oeuvres sociales, dans la limite de la prescription quinquennale, il a ordonné une expertise pour calculer le montant des sommes dues mais jugé infondée la demande en réintégration des dividendes dans le résultat net de la société DIANA pour le calcul de l'intéressement.

S'agissant de l'application de l'accord de participation, il a renvoyé les parties à mieux se pourvoir en déclinant, en application de l'article L. 442-13 du code du travail, sa compétence à connaître de la demande relative au montant des salaires à prendre en compte pour le calcul de la participation.

Sur appel du COMITÉ D'ENTREPRISE et des trois SYNDICATS SNJ, CFTC et CFDT, la cour d'appel de Versailles, par un arrêt du 15 février 2007 a confirmé ce jugement, ajoutant seulement à la mission de l'expert la vérification de ce que les subventions du COMITÉ D'ENTREPRISE avaient été calculées sans déduction de l'abattement forfaitaire de 30% pour les journalistes.

Par arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 2 décembre 2008, rectifié le 10 février 2009, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles a été cassé partiellement en ce que cette juridiction s'était déclarée incompétente pour connaître des demandes relatives au calcul de la réserve de participation.

La chambre sociale de la Cour de cassation statuant au visa l'article L442-13 devenu L3326-1 du code du travail, a retenu que selon le dernier alinéa de l'article sus-visé, le juge judiciaire est en principe compétent pour tous les litiges portant sur un accord de participation et que le litige porté devant la cour d'appel de Versailles, qui ne concernait pas le montant des salaires déclarés à l'administration fiscale, relevait donc de la compétence de la juridiction judiciaire.

La cour d'appel de Versailles autrement composée, désignée comme juridiction de renvoi a été régulièrement saisie par déclaration du 30 mars 2009 enregistrée au nom du COMITÉ D'ENTREPRISE et des trois syndicats précités.

Les appelants exposent que l'expert désigné par le COMITÉ D'ENTREPRISE a relevé dans son rapport rendu le 25 octobre 2003, un certain nombre d'incohérences dans le calcul de la participation et de l'intéressement établi par la direction, précisant dans une note ultérieure pour les exercices 2001, 2002 et 2003, en ce qui concerne la participation, qu'il avait été exclu de la masse salariale, l'abattement de 30 % dont bénéficiaient les journalistes du fait d'une disposition fiscale, ainsi qu'une partie des rémunérations versées aux salariés rémunérés à la pige.

Ils dénient que les sociétés de l'UES EMAP NATURE puissent minorer la masse salariale à retenir pour le calcul de la participation, de l'abattement pour charges professionnelles spécifiques aux journalistes, exclure une partie des salaires versés aux pigistes et donc retenir une masse salariale différente pour la participation que celle déclarée aux administrations fiscales et sociales.

Ils demandent à la cour d'appel de condamner sous astreinte de 10 000 € par jour et par infraction à compter du deuxième mois suivant la signification de l'arrêt, à procéder à un nouveau calcul de la participation pour les années 2001 à 2008 et de produire les masses salariales reconstituées pour 2007 et 2008 sur la base des règles retenues par l'expert ; de désigner à nouveau l'expert aux frais des intimées pour procéder aux vérifications nécessaires.

En réponse à la fin de non recevoir soulevée, le COMITÉ D'ENTREPRISE se prévaut de la compétence spécifique du comité prévue à l'article L2323-18 du code du travail en matière d'information sur l'exécution des accords de participation et fait valoir que dans le cadre du contrôle des accords de participation, il doit être déclaré apte à se saisir de toute question portant sur le non respect des règles légales de calcul, s'agissant en l'espèce, non pas du non respect d'un accord de participation mais, d'une volonté de l'entreprise de retenir de façon erronée, un ingrédient légal du calcul de la réserve spéciale de participation, à savoir la masse salariale.

Il rappelle aussi que la loi a organisé spécialement un contrôle du comité d'entreprise qui doit disposer en application de l'article D 3323-13 d'un rapport spécifique comportant nécessairement les éléments qui servent de base au calcul du montant de la réserve de participation.

Faisant valoir qu'il n'a jamais disposé dans le cadre de ce rapport annuel, des informations lui permettant d'analyser le choix des dirigeants de la participation due aux salariés sur une base d'une masse salariale différente de celle déclarée aux administrations fiscales et sociales, il conclut qu'il doit être déclaré recevable à agir et accueilli dans sa demande tendant à voir fixé le montant des salaires à retenir pour le calcul de participation à celui déclaré aux administrations sur la base du code de la sécurité sociale.

La société DIANA SAS déclarant venir aux droits des autres sociétés incluses antérieurement dans l'UES oppose l'irrecevabilité des demandes formulées au nom du SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC qui s'est désisté de son pourvoi, l'irrecevabilité des demandes formées au nom du COMITÉ D'ENTREPRISE qui n'est pas signataire de l'accord de participation et ne justifie pas d'une atteinte à ses intérêts personnels.

Elle oppose aux demandes de deux autres syndicats, qu'ils ne sont pas fondés à solliciter un rappel de participation sur la période de 2000 à 2008 alors que l'accord a été signé en juin 2002 et que les sociétés composant l'UES ne lui sont soumises qu'à compter du 1er janvier 2001.

Sur la prétention des appelants relative à la rémunération des pigistes, elle fait valoir que seules ont été exclues pour le calcul de la participation de la période 2001, 2002 et 2003, les rémunérations versées aux journalistes qui, collaborateurs occasionnels, ne bénéficient pas de la présomption de salariat et ne remplissent pas les conditions prévues pour bénéficier de l'accord de participation.

Elle ajoute qu'ayant accepté de faire droit à la demande du COMITÉ D'ENTREPRISE de voir les rémunérations versées à l'ensemble des journalistes pigistes, intégrées dans le montant des salaires servant au calcul de la participation à compter de l'exercice 2004 ; les demandes relatives aux exercices postérieurs sont sans objet.

Sur la demande relative à l'application de l'abattement de 30% pour frais professionnels, aux salaires des journalistes retenus pour le calcul du montant de la réserve spéciale de participation, la société intimée rappelle que seuls 70 % des rémunérations versées aux journalistes sont soumis aux cotisations sociales et qu'en matière de participation, contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, les salaires servant à son calcul s'entendent du total des salaires bruts soumis aux cotisations sociales ainsi qu'en dispose l'article D 3324-1 du code du travail.

Elle soutient que le renvoi opéré par cet article aux dispositions de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale conduit à ne prendre en compte que les rémunérations brutes versées aux salariés, retenues pour être soumises aux cotisations de sécurité sociale et, en déduisant du fait que l'arrêté du 20 décembre 2002 , pris en application de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale, prévoit en son article 9 que l'employeur peut déduire de l'assiette des cotisations sociales le montant de la déduction pour frais professionnels, elle conclut que pour le calcul de la réserve spéciale de participation, il y a lieu de prendre en compte la rémunération versée aux journalistes après déduction de l'abattement de 30 %.

Elle fait valoir que ce sont les salaires diminués de l'abattement pour frais professionnels qui ont été déclarés aux organismes sociaux et elle demande à la cour d'appel de juger que les salaires servant de calcul à la participation s'entendent de ceux déclarés à l'URSSAF pour le calcul des cotisations de sécurité sociale et qui correspondent aux salaires bruts après abattement de 30 %.

Elle conclut à l'irrecevabilité des demandes du COMITÉ D'ENTREPRISE et au débouté de celles des syndicats tendant à l'établissement d'un nouveau calcul pour les années postérieures à 2003 et de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Considérant qu'il y a lieu de constater que la société DIANA SAS vient aux droits des sociétés qui ont composé l'unité économique et sociale (UES) EMAP NATURE , soit, les sociétés DIANA SA, CANOPE SNC, P&C SAS et ADJ SAS ;

Sur les fins de non recevoir soulevées par la société DIANA SAS :

1- à l'encontre du SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC :

Considérant qu'il résulte de l'arrêt la Cour de cassation prononcé le 2 décembre 2008 que le SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC qui avait formé pourvoi contre l'arrêt rendu le 15 février 2007 par la cour d'appel de Versailles autrement composée, s'en est désisté ;

Que la cassation n'implique pas que puisse être en cause, devant la cour de renvoi, une partie mise hors de cause par l'arrêt de cassation, ce qui est le cas du SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC dont le désistement a été constaté et qui n'est plus partie à l'instance ;

2- à l'encontre du COMITÉ D'ENTREPRISE de l'UES EMAP :

Considérant qu'en l'espèce, l'accord de participation des salariés a été signé le 28 juin 2002 entre trois organisations syndicales et les sociétés composant l'UES EMAP NATURE et non pas au sein du comité d'entreprise ;

Considérant que, sur le fondement de l'article L 432-3 du code du travail, le comité d'entreprise est informé et consulté sur les « problèmes généraux concernant les conditions de travail résultant de l'organisation du travail, de la technologie, des conditions d'emploi, de l'organisation du temps de travail, des qualifications et des modes de rémunération » ;

Qu'en matière d'accord sur la participation, le comité d'entreprise est nécessairement consulté avant la signature et aux termes de l'article D 3323-13 du code du travail, l'employeur lui doit rapport annuellement sur les éléments servant de base de calcul de la réserve spéciale de participation , rapport à l'occasion de l'étude duquel le comité d'entreprise a la possibilité de faire appel à un expert-comptable ;

Considérant que si, le comité d'entreprise a le pouvoir d'agir en justice pour faire sanctionner une atteinte à ses prérogatives ou attributions ou pour défendre ses intérêts propres, l'avant-dernier alinéa de l'article L 3326-1 du code du travail dispose : "Lorsqu'un accord de participation est intervenu, les juridictions ne peuvent être saisies que par les signataires de cet accord"

Que dès lors ce n'est que dans la mesure, où un comité d'entreprise qui n'a pas pour mission de représenter la somme des intérêts individuels des salariés de l'entreprise ou l'intérêt collectif de la profession, est conformément aux dispositions de l'article L 3322-1 du code du travail, signataire de l'accord de participation négocié en son sein, qu'il peut agir sur le fondement de cet accord ;

Que le comité d'entreprise non signataire de l'accord de participation, si les obligations légales de consultation et d'information ont été respectées par l'employeur, n'a pas d'autre pouvoir que celui de faire connaître aux parties à cet accord sa position, peu important que dans l'exercice de son pouvoir d'obtenir d'être informé et consulté, il soit le découvreur d'une distorsion, d'une erreur ou d' une fraude ;

Que le COMITÉ D'ENTREPRISE de l'UES EMAP NATURE devenue UES MONDADORI NATURE doit être déclaré irrecevable en sa demande relative au calcul de la réserve spéciale de participation résultant de l'accord du 28 juin 2002 ;

Considérant que, dans la mesure où la société DIANA SAS venant aux droits de l'UES EMAP NATURE ne soulève aucune fin de non recevoir à l'encontre des syndicats SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES RÉGION PARISIENNE et SYNDICAT NATIONAL DE L'ÉCRIT CFDT, dont l'intérêt et la qualité à agir ne peuvent être contestés, il convient d'examiner leurs demandes ;

Sur la demande des SYNDICATS tendant à un nouveau calcul de la participation pour les années 2001 à 2008 :

Considérant que l'accord de participation en litige a été signé entre les sociétés composant l'UES EMAP NATURE et les organisations syndicales, le 28 juin 2002 et que dès lors, ce dont conviennent les appelants, aucun droit à participation ne peut être revendiqué au titre de l'exercice de l'année 2000 ;

Considérant qu'en premier lieu, les organisations syndicales demandent la réintégration dans les salaires à retenir pour le calcul de la réserve spéciale de participation des sommes déclarées à l'administration fiscale et à l' URSSAF versées aux journalistes pigistes à titre de rémunération que la direction des sociétés composant l'UES avait retranchées des comptes ;

Qu'à cet égard si comme l'affirme la société DIANA SAS, qui indique qu'à partir de l'année 2004 les rémunérations versées aux collaborateurs occasionnels qui ne pouvaient bénéficier de la présomption de salariat ont été réintégrées, la demande est sans objet, celle relative aux années antérieures reste entière ;

Considérant que devant le premier juge, l'UES soutenait que l'exclusion était justifiée par le fait que les seuls salaires des seuls journalistes pigistes exclus, correspondaient à ceux versés à des collaborateurs qui n'étant qu'occasionnels, ne faisaient pas partie de l'électorat ;

Que cet argument, alors qu'il n'est fait appel à la notion d'appartenance à l'électorat de l'entreprise que pour les salariés mis à disposition, est en l'espèce sans efficience ;

Considérant que la société DIANA SAS indique encore que seules ont été exclues pour les années 2001, 2002 et 2003, les sommes versées aux journalistes pigistes qui ne remplissaient pas les conditions pour bénéficier de l'accord de participation, alors que seuls les pigistes ayant pour activité principale celle de journaliste et qui collaborent de façon régulière avec l'entreprise de presse peuvent être considérés comme salariés de l'entreprise ;

Considérant que selon le 16 ème alinéa de l'article L311-3 du code de la sécurité sociale doivent être déclarés " les journalistes professionnels et assimilés au sens des articles L. 761-1 et L. 761-2 du code du travail, dont les fournitures d'articles, d'informations, de reportages, de dessins ou de photographies à une agence de presse ou à une entreprise de presse quotidienne ou périodique, sont réglées à la pige, quelque soit la nature du lien juridique qui les unit à cette agence ou à cette entreprise" ;

Considérant que selon ce texte, retenu par la Cour de cassation chambre sociale (arrêt du 14 novembre 1991 Bull. Civ. No 503) comme ne visant que les journalistes professionnels, rémunérés à la pige et assimilés au sens de l'article L7111-3 du code du travail, est journaliste professionnel, celui qui a pour occupation régulière et rétribuée l'exercice de sa profession pour une ou plusieurs agences, à l'exclusion de ceux qui n'apportent à titre quelconque qu'une collaboration occasionnelle, et la convention par laquelle une société de presse s'assure contre une rémunération le concours d'un journaliste est présumée être un contrat de travail, quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties ;

Qu'en l'espèce, la société DIANA ne fournit aucune explication ni aucun élément permettant de retenir même qu'au delà de la simple affirmation figurant dans ses conclusions selon laquelle, "une collaboration entre un pigiste et une publication périodique qui n'est qu'occasionnelle et non régulière ne peut bénéficier de la présomption de salariat", elle combattrait cette présomption de salariat qu'il lui appartient de renverser en sa qualité d'employeur ;

Que rien ne justifie l'exclusion d'une partie de la rémunération versée aux journalistes pigistes pour les années 2001 à 2003, par ailleurs incluse dans la masse salariale brute et déclarée à l'administration à titre de salaire ;

Qu'il convient de faire droit à la demande des SYNDICATS sur ce point ;

Considérant en second lieu, que les organisations syndicales demandent la réintégration dans le montant des salaires à retenir pour le calcul de la réserve spéciale de participation de la partie correspondant à un abattement de 30 % dont bénéficient les journalistes ;

Que la société DIANA SAS justifie ce mode de calcul de la réserve spéciale de participation, par l'application des dispositions de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale auquel renvoie l'article D 3324-1 du code du travail pour définir les rémunérations à prendre en compte ;

Qu'elle soutient qu'un arrêté du 20 décembre 2002 , pris en application de l'article L 242-1 précité prévoit en son article 9 que l'employeur, notamment de journalistes, a la faculté de déduire de l'assiette des cotisations sociales le montant de la déduction supplémentaire pour frais professionnels applicable en matière fiscale et que dès lors, les salaires versés aux journalistes n'entrent dans l'assiette des cotisations sociales qu'après déduction de cet abattement ;

Considérant que l'ancien article R 442-2 du code du travail abrogé par le décret no2008-244 du 7 mars 2008, disposait en son 1o : " pour le calcul du montant de la réserve spéciale de participation des salariés que les salaires à retenir sont déterminés selon les règles prévues pour le calcul des rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale";

Que l'article D 3324-1 du code du travail se substituant à l'article précité dispose quant à lui que : "Les salaires à retenir pour le calcul du montant de la réserve spéciale de participation des salariés mentionnée à l'article L. 3324-1 sont les rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale" ;

Que la formule "calcul des rémunérations" s'entend de la définition de la rémunération telle que celle énoncée à l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale à laquelle s'appliquent toutes les règles et modalités de calcul des cotisations figurant aux alinéas suivant celui qui définit comme rémunération : "toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire, la compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail" ;

Que la déduction des frais professionnels ne concerne que le calcul des cotisations sociales et non pas le "calcul des rémunérations" visé par l'article R 442-1 du code du travail ni "les rémunérations au sens de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale" désormais visées dans sa rédaction simplificatrice par l'article D 3324-1 du code du travail ;

Qu'au surplus, si le montant des cotisations sociales peut être affecté par l'abattement accordé aux salariés journalistes pigistes, cet abattement, comme les cotisations patronales et salariales, est nécessairement calculé sur le montant d'un salaire brut ;

Considérant que l'intervention du juge judiciaire ne peut avoir pour effet une remise en cause du montant des salaires déclarés à l'administration fiscale ;

Qu'il résulte des travaux de l'expert commis par le premier juge que seulement pour les années 2001, 2005 et 2006, la base brute fiscale mentionnée dans les déclarations annuelles des salaires correspond à la masse salariale brute avant abattement ;

Qu'il ne peut être fait droit à la demande de réintégration de l'abattement pour frais professionnels dans la masse de rémunérations servant au calcul de la réserve spéciale de participation que pour autant qu'il n'est pas porté atteinte ou contradiction à la déclaration des salaires servant de base au calcul de l'impôt ;

Que les organisations syndicales demandent que la cour d'appel sanctionne la prise en compte d'une masse salariale différente pour la participation de celle déclarée aux administrations fiscales et sociales ;

Que dès lors, pour les années 2002, 2003 et 2004, la demande des organisations syndicales qui tend, selon le rapport de l'expert (page 6) à ce qu'en "retenant la base brute fiscale inscrite sur la DADS à laquelle est ajouté l'abattement spécifique tel que mentionné sur l'établissement de rapprochement comptabilité/DADS" , est au-delà de la limite indiquée par ses auteurs et se heurte aux règles de compétence telles que déterminées par l'arrêt de renvoi ;

Que la société DIANA SAS doit être condamnée à opérer un nouveau calcul de la réserve spéciale de participation pour les années 2001 à 2008 en prenant en compte l'ensemble des rémunérations versées aux pigistes tel que déclaré à l'administration fiscale, et avant abattement, dans les limites de cette déclaration fiscale et sans porter atteinte à la base brute fiscale inscrite sur la DADS et à soumettre ce nouveau calcul dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt passé lequel une astreinte de 1 000 € par jour de retard courra, à la consultation du comité d'entreprise conformément aux dispositions de l'article D3323-13 du code du travail ;

Considérant que la société DIANA SAS qui succombe en ses prétentions, aura la charge des dépens de l'instance incluant les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Nanterre ;

Qu'elle doit au surplus être condamnée à verser aux organisations syndicales la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

statuant sur renvoi après cassation, contradictoirement et en dernier ressort,

Donne acte à la société DIANA SAS de son intervention aux droits et obligations des sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC composant l'UES EMAP NATURE devenue UES MONDADORI ;

Déclare le SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE CFTC irrecevable ;

Déclare le COMITÉ D'ENTREPRISE de l'UES EMAP NATURE devenue UES MONDADORI irrecevable en ses demandes résiduelles à l'encontre des sociétés composant l'UES EMAP NATURE aux droits et obligations desquelles se trouve la société DIANA SAS ;

Dit que, pour le calcul de la réserve spéciale de participation, les sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC composant l'UES ne pouvaient retenir comme salaires, un montant minoré d'une partie des salaires versés aux pigistes et retenir une masse salariale différente de celle déclarée aux administrations fiscales et sociales ;

Condamne la société DIANA SAS venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC :

- à opérer un nouveau calcul de la réserve spéciale de participation pour les années 2001 à 2008 en prenant en compte l'ensemble des rémunérations versées aux pigistes tel que déclaré à l'administration fiscale, et avant abattement, dans les limites de cette déclaration fiscale et sans qu'il puisse être porté atteinte à la base brute fiscale inscrite sur les Déclarations Annuelles Des Salaires (DADS) souscrites pour les années en cause ;

- à le soumettre dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt, passé lequel une astreinte de 1 000 € (mille euros) par jour de retard courra, à la consultation du comité d'entreprise conformément aux dispositions de l'article D3323-13 du code du travail ;

Condamne la société DIANA SAS venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC à verser la somme globale de 5 000 € (cinq mille euros) au SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES RÉGION PARISIENNE et au SYNDICAT NATIONAL DE L'ECRIT CFDT ;

Condamne la société DIANA SAS venant aux droits et obligations des sociétés DIANA SA, ADJ SAS, P et C SAS et CANOPE SNC aux entiers dépens de première instance incluant les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Nanterre et d'appel, autorisation étant donnée aux avoués en la cause, de les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-François FEDOU, Président et par Madame LOMELLINI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 04/13881
Date de la décision : 18/11/2009

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nanterre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-18;04.13881 ?
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