COUR D'APPEL DE VERSAILLES
Code nac : 53B
13ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 21 FEVRIER 2008
R.G. No 06/04581
AFFAIRE :
X...
C/
BPVF
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Juin 2006 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLESNo chambre : 2No Section : No RG : 2005F4033
Expéditions exécutoiresExpéditionsCopiesdélivrées le : à :
SCP FIEVET-LAFON
SCP KEIME GUTTINJARRY
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE HUIT,La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Guy X...né le 05 Août 1943 à PARIS (75014)...92140 CLAMARTreprésenté par la SCP FIEVET-LAFON - No du dossier 260653assisté de Maître FOURNIER LA TOURAILLE, avocat au barreau de Versailles
APPELANT
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SA BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE4 place Hoche78000 VERSAILLESreprésentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués- No du dossier 06000639assistée de Maître ANHALT-HUET, avocat au barreau de Versailles
INTIMEE
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Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Janvier 2008, Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Jean BESSE, président,Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller,Madame Annie DABOSVILLE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER
Monsieur Guy X... a interjeté appel le 21 juin 2006 d'un jugement rendu le 14 juin 2006 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES qui l'a débouté de l'action principale en responsabilité qu'il avait engagée contre la BANQUE POPULAIRE REGION OUEST DE PARIS, devenue la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE, par assignation du 15 juin 2005, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, pour manquement à son obligation d'information et de modération lors de la souscription de son engagement de caution. Le Tribunal l'a également débouté de sa demande subsidiaire tendant à voir constater, sur le fondement de l'article L.341-4 du Code de la consommation, la déchéance de la banque à se prévaloir de son engagement de caution pour un montant disproportionné par rapport à son patrimoine de l'époque. Il l'a enfin condamné au paiement d'une indemnité de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par acte notarié du 21 octobre 1999, Monsieur X... s'était porté caution solidaire de la SCI JEAN BRICE envers sa banque qui lui consentait un prêt de 564.061 €. La SCI a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 23 novembre 2001. La BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE s'est alors retournée contre la caution, faisant notamment procéder à une saisie dont le contentieux est pendant devant le Tribunal d'instance de VANVES qui, par jugement du 12 septembre 2005, a prononcé le sursis à statuer. Monsieur X... avait en effet par assignation du 15 juin 2005, engagé entre temps la présente instance visant à contester le principe de sa dette.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 17 octobre 2007, Monsieur Guy X... invoque à nouveau, mais dans l'ordre inverse de celui présenté en première instance, les dispositions de l'article L.341-4 du Code de la consommation et subsidiairement celles de l'article 1382 du Code civil. Il prétend à cet effet être en droit d'opposer à la banque, en vertu des nouvelles dispositions du Code de la consommation issue de la loi du 1er août 2003, le caractère manifestement disproportionné de son engagement souscrit le 21 octobre 1999 à hauteur de 564.061 €, par rapport à ses biens et revenus de l'époque. Il fait à cet égard état d'un salaire de 4.878 € par mois, outre des revenus fonciers de 2.130 €, et d'un patrimoine immobilier de l'ordre de 175.000 €. Enfin, son patrimoine actuel ne lui permettrait pas de faire face à son obligation. Monsieur X... engage subsidiairement la responsabilité de la banque en ce qu'elle a octroyé à la SCI JEAN BRICE un prêt destiné pour l'essentiel à opérer un remboursement anticipé du prêt initial, alors que sa trésorerie était équilibrée. Enfin, estimant qu'il n'avait aucun intérêt dans la SCI en cause, Monsieur X... prétend que la banque s'est fiée à tort à des informations erronées sur sa situation patrimoniale, dont la réalité démontrerait le caractère disproportionné de l'engagement de caution. Il demande donc à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau :
- de constater qu'en raison du caractère manifestement disproportionné de son cautionnement, la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE ne peut s'en prévaloir à son encontre ;- subsidiairement de condamner la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE à lui payer la somme de 440.000 € de dommages-intérêts ;- d'ordonner la compensation avec ce qu'il restait devoir ;- et de condamner la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE à payer à Monsieur A... (pour signifier certainement X...), une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions signifiées le 19 novembre 2007, la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE poursuit au contraire la confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu'il a déclaré que Monsieur X... pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L.341-4 du Code de la consommation qui n'est pas applicable aux cautionnements souscrits antérieurement à son entrée en vigueur. Pour le surplus, la banque considère que Monsieur X... entre dans la catégorie des cautions averties, et qu'il avait lui-même fourni des informations sur sa situation patrimoniale démontrant que son cautionnement n'était pas disproportionné et que la banque a respecté ses obligations d'information ou de modération. Enfin la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE sollicite la condamnation de Monsieur X... au paiement d'une indemnité supplémentaire de 2.000 € pour frais irrépétibles.
MOTIFS
L'article L.341-4 du Code de la consommation est issu de la loi du 1er août 2003, entrée en vigueur le 7. En vertu du principe de non rétroactivité des lois, il n'est pas applicable aux cautionnements souscrits antérieurement à son entrée en vigueur. Le cautionnement de Monsieur Guy X... a été souscrit le 21 octobre 1999. Il ne relève donc pas des dispositions de l'article L.341-4 précité. A cet égard, le dispositif du jugement déféré ne déclare pas, comme le prétend la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE, que Monsieur Guy X... pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L.341-4 du Code de la consommation. En revanche, il déboute Monsieur X... de sa demande tendant à voir constater, sur le fondement de l'article L.341-4 du Code de la consommation, la déchéance de la banque à se prévaloir de son engagement de caution, en disant " que la caution de Monsieur X... a été recueillie valablement " par la banque. Cette disposition est la conséquence logique de ce qui précède. Elle doit donc être confirmée.
A l'époque de la souscription de son engagement de caution destiné à garantir un prêt de 564.061 € consenti à la SCI JEAN BRICE détenue à 99 % par une société CMC, Monsieur X... était le directeur général de cette dernière et associé à 27 %. Dès lors que la situation financière de la SCI était globalement équilibrée, le montage financier lié à la souscription d'un nouveau prêt, avait pour but essentiel de procéder au remboursement anticipé du prêt initial, et de la dette de compte courant de la SCI à l'égard de la société mère, qui disposerait en plus du fruit des revenus fonciers désormais réalisés par sa filiale. Considérée dans son ensemble, l'opération était donc commerciale. Monsieur X... l'a d'ailleurs implicitement admis en portant l'action en contestation de son cautionnement accessoire à un acte de commerce, devant la juridiction consulaire. Compte tenu de ses fonctions et de son intérêt dans la société commerciale CMC, Monsieur X... doit être considéré comme une caution avertie, à l'égard de laquelle les banques ne sont pas débitrices d'un devoir de conseil ou de mise en garde.
Par ailleurs Monsieur X..., caution avertie, ne démontre pas que la banque aurait eu sur sa situation et sur ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération entreprise, des informations que lui même aurait ignorées. Ainsi Monsieur X... détenait toutes les informations utiles pour lui permettre d'apprécier la portée des engagements qu'il souscrivait, sachant au surplus que la banque disposait à son égard d'une fiche de renseignements laissant apparaître une situation patrimoniale largement excédentaire par rapport au montant cautionné. C'est donc également à bon droit que les premiers juges ont débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour cautionnement disproportionné et manquement de la banque à ses obligations d'information, de modération, plus généralement dénommées devoir de mise en garde.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a engagés dans le cadre de la présente procédure. Il convient donc de faire droit à sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à hauteur de 1.000 €, indépendamment de l'indemnisation déjà accordée au même titre en première instance, et qui mérite également confirmation. Corrélativement, la demande formée par Monsieur X... au même titre doit être rejetée. Enfin, les dépens incombent à la partie succombante.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 juin 2006 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES,
Condamne Monsieur Guy X... au paiement, au profit de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE, d'une indemnité supplémentaire de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit des avoués à la cause qui peuvent y prétendre, par application des dispositions de l'article 699 du même code.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean BESSE, président et par Monsieur Jean-François MONASSIER, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,