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14/02/2008 | FRANCE | N°06/07090

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0013, 14 février 2008, 06/07090


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 38Z

13ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 14 FEVRIER 2008

R.G. No 06/07090

AFFAIRE :

FORTIS BANQUE

FRANCE

C/

SNVB

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Septembre 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

No chambre : 7

No Section :

No RG : 2005F04451

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP DEBRAY-CHEMIN

SCP JULLIEN,

LECHARNY,

ROL

ET FERTIER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. FORTIS BANQUE FRANC...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 38Z

13ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 14 FEVRIER 2008

R.G. No 06/07090

AFFAIRE :

FORTIS BANQUE

FRANCE

C/

SNVB

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Septembre 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

No chambre : 7

No Section :

No RG : 2005F04451

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP DEBRAY-CHEMIN

SCP JULLIEN,

LECHARNY, ROL

ET FERTIER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE HUIT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. FORTIS BANQUE FRANCE

30 quai de Dion Bouton

92824 PUTEAUX CEDEX

représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN - No du dossier 06000862

assistée de Maître DE CHAUVERON-RAMBAUD, avocat au barreau de Paris

APPELANTE

****************

Société anonyme SNVB (SOCIETE NANCEIENNE VARIN BERNIER)

4 place André Maginot

54000 NANCY

représentée par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués - No du dossier 20061305

assistée de Maître FOURNIER, avocat au barreau de Paris

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Janvier 2008, Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean BESSE, président,

Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller,

Madame Annie DABOSVILLE, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER

La société CTH a émis le 24 juin 2005 un chèque de 10.000 € tiré sur la FORTIS BANQUE FRANCE à l'ordre d'une société J3G qui l'a porté le jour même à l'encaissement à sa propre banque, la SOCIETE NANCEIENNE VARIN BERNIER, dite la SNVB, qui en a crédité son compte le lendemain. Le chèque a ensuite été transmis à la banque tirée pour paiement, suivant les modalités applicables entre banques. La FORTIS BANQUE FRANCE a alors émis le 29 juin 2005 un avis de rejet pour " compte indisponible, redressement judiciaire, Code 40 ". De fait, le Tribunal de Commerce de MELUN avait ouvert le 27 juin 2005 une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société CTH. Pour mémoire, le même tribunal avait également ouvert une autre procédure à l'égard de la société J3G, qui avait le même dirigeant. A réception des contestations de la SNVB sur le motif illégitime du rejet au regard des dispositions combinées des articles L.131-20 du Code monétaire et financier et L.621-24 du Code de commerce, selon lesquelles la date du transfert de provision était celle de l'émission du chèque mis en circulation, de sorte que l'ouverture subséquente d'une procédure collective était indifférente, la FORTIS BANQUE FRANCE émettait alors le 5 août 2005 un certificat de non paiement avec un nouveau motif de rejet pour " défaut de provision suffisante ".

Saisi par la SNVB suivant assignation du 3 octobre 2005, d'une action principale en paiement d'un chèque rejeté pour un motif infondé, le Tribunal de Commerce de NANTERRE a, par jugement du 13 septembre 2006, condamné la FORTIS BANQUE FRANCE à lui payer la somme de 10.000 € correspondant au montant du chèque rejeté, avec intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2005, outre celle de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que la SNVB avait la qualité de porteur du chèque dont l'endos lui permettait d'en réclamer le paiement pour son propre compte. Il a également retenu la responsabilité délictuelle de la FORTIS BANQUE FRANCE qui ne pouvait se prévaloir du motif illégitime de son rejet tenant au redressement judiciaire de sa cliente. N'ayant dès lors pas informé la SNVB de l'existence d'une provision, même partielle, elle l'avait empêchée de prendre toutes dispositions pour percevoir le paiement en temps utile.

La FORTIS BANQUE FRANCE a interjeté appel le 6 octobre 2006 de ce jugement. Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 23 octobre 2007, elle soulève à nouveau l'irrecevabilité de l'action engagée par la SNVB qui aurait débité sur le compte de sa cliente, après le rejet, le montant du chèque qu'elle avait précédemment crédité. D'autre part elle ne pourrait se prévaloir du transfert à son profit des droits résultant du chèque qui, en définitive n'a pas été endossé. La FORTIS BANQUE FRANCE conteste enfin sa responsabilité estimant notamment :

- que son erreur sur le motif du rejet ne serait pas préjudiciable ;

- que le compte de sa cliente n'était pas approvisionné, sachant qu'un prêt avait été consenti à la société CTH pour mettre fin à son autorisation tacite de découvert ;

- que compte tenu des délais, la SNVB n'aurait pas été en mesure de contre passer le chèque litigieux avant la survenance du redressement judiciaire ;

- et que son préjudice résulte de son propre fait pour ne pas avoir procédé à une déclaration de créance correspondant au montant du chèque litigieux.

La FORTIS BANQUE FRANCE demande donc à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau de débouter la SNVB de toutes ses demandes et de la condamner à lui restituer la somme de 10.271,47 € qu'elle lui a réglée en vertu de l'exécution provisoire du jugement, avec intérêts au taux légal à compter du 13 octobre 2006 et capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du Code civil et à lui payer une indemnité de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 7 février 2007, la SNVB poursuit au contraire la confirmation du jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, demandant à la cour, statuant à nouveau de ce chef de condamner la FORTIS BANQUE FRANCE à lui payer la somme de 4.000 € et y ajoutant, de la condamner également au paiement d'une indemnité supplémentaire de 4.000 € pour frais irrépétibles. Elle fait notamment valoir qu'elle n'a jamais débité du compte de sa cliente J3G le montant du chèque dont le bénéfice est donc resté acquis à sa procédure collective ; que sur le fondement des dispositions de l'article L.131-20 du Code monétaire et financier, et ayant la qualité de porteur du chèque, l'endos lui permet d'en réclamer le paiement pour son propre compte ; qu'en tout état de cause, la FORTIS BANQUE FRANCE a bien commis une faute engageant sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil en rejetant le chèque pour un motif illégitime ; et que contrairement aux allégations adverses, la provision du compte bancaire de la société CTH dans les livres de la FORTIS BANQUE FRANCE était suffisante car elle bénéficiait d'une autorisation de découvert pour un montant bien supérieur au plafond d'une convention dont les limites n'étaient pas respectées.

MOTIFS

Il résulte de l'examen des déclarations de créance, et de celui des relevés bancaires de la société J3G, que le montant du chèque émis le 24 juin 2005 à son ordre par la société CTH a bien été crédité le lendemain sur son compte bancaire qui ne mentionne aucune contre écriture susceptible de correspondre à l'annulation de cette opération avant l'ouverture de la procédure collective.

En revanche, il s'avère qu'à la suite de la production en cause d'appel de sa copie recto verso, le chèque litigieux ne comporte pas d'endos. La SNVB n'a donc pas la qualité de porteur. Elle n'est dès lors pas fondée à se prévaloir du rapport cambiaire qu'elle invoquait à titre principal pour obtenir le paiement du chèque pour son propre compte en vertu des dispositions du Code monétaire et financier.

Il n'en demeure pas moins que la FORTIS BANQUE FRANCE a commis une erreur, qu'elle reconnaît désormais, en motivant son rejet pour indisponibilité du compte bancaire du fait de la survenance d'un procédure collective, alors qu'au regard des dispositions combinées des articles L.131-20 du Code monétaire et financier et L.621-24 du Code de commerce, la date du transfert de provision était celle de l'émission du chèque mis en circulation, de sorte que l'ouverture subséquente d'une procédure collective était indifférente. Son caractère fautif est d'ailleurs corroboré par la rectification du motif illégitime du rejet, à réception des contestations émises par la SNVB. La responsabilité de la FORTIS BANQUE FRANCE est donc bien susceptible d'être engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, si la SNVB prouve au titre du préjudice, que le compte de la société CTH était suffisamment provisionné le 25 juin 2005 et si, au titre du lien de causalité, elle n'aurait pas, comme le prétend la FORTIS BANQUE FRANCE, concouru elle-même à la réalisation de son propre dommage.

La FORTIS BANQUE FRANCE ne conteste pas le fait que sa cliente CTH disposait d'une autorisation tacite de découvert, à laquelle elle avait cependant renoncé le 26 mai 2005. Elle s'engageait alors à faire fonctionner son compte exclusivement en lignes créditrices, obtenant en contrepartie le 6 juin 2005 un prêt de 10.000 € amortissable en 6 mois. Mais le dernier relevé bancaire de la société CTH mentionne un solde toujours négatif allant jusqu'à - 6.887,55€ du 15 au 20 juin 2005, puis - 22.029,33 € le 21, - 35.487,27 € le 24 et - 65.595,70 € le 27. Force est donc de constater que la CTH disposait toujours d'une autorisation tacite de découvert et que son chèque de 10.000 € émis le 24 juin 2005 à l'ordre de J3G était encore suffisamment provisionné à cette date.

La FORTIS BANQUE FRANCE prétend enfin que la SNVB aurait concouru elle-même à la réalisation de son propre dommage en s'abstenant de déclarer sa créance de 10.000 € au passif de la société J3G, par suite de l'impossibilité de passer avant le jugement d'ouverture une contre écriture correspondant au rejet du chèque que CTH avait émis à son ordre sans provision. Mais dès lors que le motif du rejet était infondé, la SNVB n'avait aucune créance à faire valoir à l'égard sa cliente J3G à ce titre. C'est au contraire la FORTIS BANQUE FRANCE qui devait honorer le chèque de sa cliente CTH et déclarer sa créance au passif de son redressement judiciaire. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont fait droit à la demande de la SNVB sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

A l'appui de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, la SNVB ne prouve pas en quoi l'exercice par la FORTIS BANQUE FRANCE des voies ordinaires de droit aurait dégénéré en un abus. De même, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses propres frais irrépétibles en cause d'appel, indépendamment de la décision prise au titre de l'article 700 du Code de procédure civile par les premiers juges, et qui mérite encore confirmation. Enfin les dépens incombent à la partie succombante.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 septembre 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE,

Y ajoutant,

Déboute la SNVB de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la FORTIS BANQUE FRANCE aux entiers dépens, dont distraction au profit des avoués à la cause qui peuvent y prétendre, par application des dispositions de l'article 699 du même code.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Monsieur Jean BESSE, président et par Monsieur Jean-François MONASSIER, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0013
Numéro d'arrêt : 06/07090
Date de la décision : 14/02/2008

Analyses

BANQUE

1) Dès lors que la production de sa copie recto-verso démontre que le chèque litigieux ne comporte pas d'endos, la banque, qui l'a reçu de son client et l'a simplement transmis pour paiement à la banque tirée, ne peut se prévaloir de l'article L.131-20 du code monétaire et financier et soutenir qu'elle a la qualité de porteur pour en réclamer paiement pour son propre compte. 2) Commet une faute et s'oblige à la réparer sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la banque qui rejette un chèque au motif, illégitime, que le compte bancaire de son client est indisponible en raison de l'ouverture d'une procédure collective à son encontre, alors qu'au regard des dispositions combinées des articles L.131-20 du code monétaire et financier et L.621-24 du code commerce, la date du transfert de provision est celle de l'émission du chèque, l'ouverture de la procédure collective quelques jours plus tard étant indifférente, le compte du client étant de plus suffisamment provisionné.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Nanterre


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2008-02-14;06.07090 ?
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