COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
DL
Code nac : 56Z
12ème chambre section 1
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 18 DECEMBRE 2007
R.G. No 06/07483
AFFAIRE :
S.A.S. LOGISTIC PACKAGING RETURN - L.P.R.
C/
S.A. CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2006 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
No chambre : 1
No RG : 2005F5897
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Claire X...
SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.S. LOGISTIC PACKAGING RETURN - L.P.R.
ayant son siège Tersud- ..., agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par Me Claire X..., avoué - No du dossier 260649
Plaidant par Me Pierre-Olivier Y..., substituant Me Bruno Z..., avocat au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
S.A. CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE, venant aux droits de la société CAFEIN YVELINES par suite de fusion absorption, anciennement dénommée DAMPIERRE ET SODABEL
ayant son siège ..., agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Concluant par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués - No du dossier 20061354
Plaidant par Me Bernard A..., avocat au barreau de VERSAILLES
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Novembre 2007, Madame Dominique LONNE, conseiller, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Sylvie MANDEL, président,
Madame Marie-José VALANTIN, conseiller,
Madame Dominique LONNE, conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE
La société LOGISTIC PACKAGING RETURN (LPR) a pour activité la location de palettes de manutention en bois à des sociétés du secteur agroalimentaire. Ces palettes sont de couleur rouge et marquées du logo LPR.
La société DAMPIERRE ET SODABEL, devenue la société CAFEIN YVELINES, a une activité de distribution et de négoce, en gros ou au détail, de toutes boissons alcoolisées ou non, café et produits alimentaires.
Dans le cadre de cette activité, la société CAFEIN YVELINES reçoit de divers fournisseurs (qui sont les clients de la société LPR, comme Heineken, Coca-Cola, Orangina, Schweppes, Saint-Louis, Nestlé Waters, etc et qui seront appelés "les chargeurs") des marchandises conditionnées sur des palettes de la société LPR.
La société LPR expose que par une déclaration de mouvement hebdomadaire, ses clients l'informent, au moyen d'un système de transmission informatique, des expéditions de palettes en précisant les quantités livrées, les adresses de livraison et le nom des destinataires, que ce reporting lui permet de connaître les destinataires finaux des palettes, de tenir le compte du stock de chacun des destinataires finaux et de déclencher des collectes afin de rendre les palettes, une fois déchargées, à nouveau disponibles pour la livraison et donc de les réintroduire dans le circuit locatif.
La société LPR fait un double reproche à la société CAFEIN YVELINES, devenue CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE :
- d'une part d'immobiliser de manière abusive ses palettes, en les réutilisant à son profit et d'empêcher leur récupération par la société LPR alors qu'elles sont déchargées de leurs marchandises en provenance des fournisseurs initiaux,
- d'autre part la perte d'un nombre important de palettes, en ne les récupérant pas après livraison chez ses propres clients ou en les affectant à d'autres utilisations.
Après avoir adressé à la société CAFEIN YVELINES un courrier du 22 octobre 2004, la société LPR, autorisée par ordonnance présidentielle, a fait établir un constat d'huissier le 26 avril 2005 ; que selon la société LPR, ce constat établit que des marchandises entreposées sur les palettes LPR proviennent de fournisseurs qui ne sont pas ses clients.
Le 14 octobre 2005, la société LPR a assigné la société DAMPIERRE ET SODABEL, sur le fondement des articles 1915, 1930, 1382 et 1383 du Code civil, en paiement de la somme de 12.995 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, en réparation du préjudice subi au cours de l'année 2004.
La société DAMPIERRE ET SODABEL a changé de dénomination sociale au profit de CAFEIN YVELINES.
La société LPR fondait son action sur la qualité de dépositaire des palettes qu'a la société CAFEIN YVELINES au sens de l'article 1915 du Code civil, sur l'obligation en résultant de garder et de restituer les palettes et sur les dispositions de l'article 1930 du Code civil lui interdisant de se servir de la chose déposée sans la permission expresse ou présumée du déposant.
La société LPR faisait valoir que les palettes lui appartenant étaient remises à la société CAFEIN YVELINES par les chargeurs initiaux au titre d'un dépôt au sens de l'article 1915 du Code civil et que celle-ci était débitrice des obligations de garde et de restitution.
Elle invoquait également le fondement combiné des articles 1382 et 1165 du Code civil, en faisant valoir que la société CAFEIN YVELINES était informée de l'obligation qui, en vertu du contrat liant la société LPR aux chargeurs, faisait peser sur les chargeurs une obligation de restitution des palettes à la société LPR et que la société CAFEIN YVELINES s'était rendue complice de l'inexécution du contrat conclu entre la société LPR et les chargeurs.
S'agissant de son préjudice, la société LPR réclamait :
* la somme de 6.212 € correspondant au coût de 611 palettes perdues,
* la somme de 6.783 € correspondant au préjudice lié à la durée d'immobilisation des palettes déclarées livrées à la société CAFEIN YVELINES et restituées avec retard, cette somme étant calculée sur une durée moyenne d'immobilisation constatée au delà de 30 jours et un nombre de palettes immobilisées de 1.597.
Par jugement du 20 septembre 2006, le tribunal de commerce de VERSAILLES a débouté la société LOGISTIC PACKAGING RETURN (LPR) de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à la société CAFEIN YVELINES la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Les premiers juges ont écarté l'existence d'une obligation contractuelle à la charge de la société CAFEIN YVELINES et résultant des dispositions contractuelles conclues entre la société LPR et ses clients, en retenant que la société LPR n'établissait pas l'existence de relations contractuelles directes avec la société CAFEIN YVELINES, ni que cette dernière était informée par ses fournisseurs, clients de la société LPR, des conditions dans lesquelles ils utilisaient les palettes de la société LPR et des conséquences qui pouvaient en découler pour la société CAFEIN YVELINES.
En revanche, ils ont considéré qu'à compter du courrier du 22 octobre 2004 dans lequel la société LPR lui indiquait qu'elle était propriétaire des palettes rouges et lui précisait le mécanisme de fonctionnement de la location des palettes par les fournisseurs et à la suite d'une réunion entre les parties ayant eu lieu le 17 novembre 2004, la société CAFEIN YVELINES ne pouvait se servir des palettes déposées sans la permission expresse ou présumée de la société LPR, conformément à l'article 1930 du Code civil et qu'elle avait engagé sa responsabilité sur la base de l'article 1383 du Code civil en utilisant à des fins propres les palettes propriété de la société LPR.
Cependant, le tribunal a jugé que la société LPR ne produisait aucun élément probant et certain permettant de calculer son préjudice, en l'absence de pièces permettant de connaître avec certitude le nombre de palettes livrées à la société CAFEIN YVELINES, le nombre de palettes utilisées par cette dernière pour ses propres besoins.
La société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE (ci-après dénommée CAFEIN PARIS IDF) vient aux droits et obligations de la société CAFEIN YVELINES par suite d'une fusion absorption.
Aux termes de ses conclusions du 25 septembre 2007, la société LPR demande à la cour, au visa des articles 1165, 1915, 1930 et 1382 du Code civil, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner la société CAFEIN YVELINES à lui payer la somme de 24.285 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2005 en réparation du préjudice subi au cours des années 2004, 2005 et 2006, ainsi que la somme de 8.000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et aux dépens de première instance et d'appel.
La société LPR ne critique pas le jugement en ce qu'il a retenu le principe de la responsabilité de la société CAFEIN PARIS IDF mais elle lui fait grief d'avoir occulté le fait que la société CAFEIN YVELINES est débitrice des obligations de garde et de restitution en vertu des contrats que cette dernière a conclus avec les chargeurs (ses fournisseurs).
Elle indique qu'elle ne prétend pas avoir la qualité de "déposant contractuel" à l'égard de la société CAFEIN PARIS IDF. Elle fait valoir cependant :
- que la société CAFEIN PARIS IDF a la qualité de dépositaire, au sens de l'article 1915 du Code civil, des palettes appartenant à la société LPR, qui lui sont remises par les chargeurs,
- que cette qualité résulte à la fois :
* des contrats conclus entre la société LPR et les chargeurs puisque ces derniers s'engagent à informer leurs clients destinataires qu'ils sont dépositaires des palettes au sens des articles 1915 et suivants du Code civil et qu'à ce titre ils doivent les restituer en bon état et dans les meilleurs délais à LPR (articles 5.2, 6.6, 9.2.5 du contrat type LPR relatifs à l'information des destinataires),
* des contrats conclus entre les chargeurs et la société CAFEIN PARIS IDF puisqu'il résulte des conditions générales de vente établies par les chargeurs que les destinataires, comme la société CAFEIN PARIS IDF, sont contractuellement informés que les palettes appartiennent à la société LPR, qu'ils en sont dépositaires et en conséquence soumis aux obligations légales du dépositaire.
Elle reprend le double reproche fait à l'encontre de la société CAFEIN PARIS IDF et soutient que sa responsabilité est engagée sur le terrain de l'article 1382 du Code civil.
Elle reprend son argumentation de première instance selon laquelle, la responsabilité de la société CAFEIN PARIS IDF est engagée sur le fondement combiné des articles 1382 et 1165 du Code civil en ce qu'elle se rend complice de l'inexécution contractuelle des contrats passés entre la société LPR et les chargeurs, ces derniers s'engageant à ce que les palettes soient restituées à leur propriétaire dans un délai de 30 jours. Elle se prévaut de la possibilité pour le tiers à un contrat d'invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que celui-ci lui a causé un dommage.
S'agissant de son préjudice, la société LPR ne demande plus que l'indemnisation du préjudice subi du fait de la perte de palettes, soit évalué à la somme globale de 24.285 €. Elle soutient que ce préjudice est fonction de la perte d'un actif d'exploitation et de la perte de marge résultant de la non disponibilité des palettes conservées par les destinataires.
Elle produit une expertise effectuée à sa demande par Monsieur B..., expert comptable.
Aux termes de ses dernières conclusions du 29 mai 2007, la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE, venant aux droits de la société CAFEIN YVELINES, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, le cas échéant par substitution de motifs, de condamner la société LPR au paiement de la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société CAFEIN PARIS IDF fait valoir qu'il appartient à la société LPR d'exercer l'action contractuelle dont elle dispose à l'encontre des fournisseurs avec lesquels elle a conclu un contrat de location des palettes, contrat auquel la société CAFEIN PARIS IDF est tiers ; qu'à cet égard, ce contrat de location prévoit les conditions d'indemnisation en cas de perte ou de restitution différée des palettes louées.
Elle ne conteste pas qu'il ressort de l'examen des conditions générales de vente de ses fournisseurs qu'elle est tenue de restituer à la société LPR les palettes louées mais elle fait valoir :
- que c'est la société LPR qui est chargée de la récupération des palettes,
- que ces conditions générales ne prévoient aucun délai ni aucune indemnité d'immobilisation,
- qu'elle ne s'est jamais opposée à la récupération des palettes par la société LPR,
- qu'aucune faute ne peut lui être reprochée au regard des conditions générales qui lui sont imposées par ses fournisseurs.
Elle conclut que la société LPR ne rapporte pas la preuve du nombre de palettes non restituées.
Elle critique également les modalités de calcul du préjudice :
- soit les palettes sont perdues et seule la perte d'actif est à prendre en compte soit elles sont restituées et dans ce cas seule la perte de marge brute correspondant à la seule période d'immobilisation doit être retenue (la société LPR ne peut pas demander le coût de remplacement des palettes perdues et la marge brute que les palettes ainsi remplacées vont dégager),
- la société LPR demande plus que l'indemnité compensatrice et la pénalité prévues dans le contrat de location des palettes,
- en toute hypothèse, les conditions générales stipulées par ses fournisseurs ne mettent à la charge de la société CAFEIN PARIS IDF aucune indemnité pour un retard de restitution et limite l'indemnisation au seul cas de la perte de palettes.
Elle soutient enfin qu'il n'y a pas de lien de causalité entre la prétendue faute et le préjudice invoqué, en raison du comportement fautif de la société LPR qui n'a pas su gérer la récupération des palettes et en raison du comportement fautif des fournisseurs dont la société CAFEIN PARIS IDF n'a pas à répondre.
SUR CE
Considérant que les sociétés LPR et CAFEIN PARIS IDF ne sont pas liées contractuellement ;
Considérant qu'il convient de rappeler à titre préliminaire qu'en revanche la société LPR est contractuellement liée aux fournisseurs de la société CAFEIN PARIS IDF (appelés les chargeurs) par un contrat de location de palettes, qui contient en ses articles 5.1, 5.2, 5.3, 5.4, 6.6, 6.7, 6.8 des obligations très précises à la charge des fournisseurs à l'égard de la société LPR qui leur loue les palettes :
article 5.1 : la mise à disposition des palettes est un contrat de location. La société locataire (le chargeur) est donc le gardien des palettes pendant la durée du contrat de location,
article 5.2 : lorsque les palettes sont expédiées chez les destinataires, la société (le chargeur) devra les informer qu'il sont dépositaires des palettes au sens des articles 1915 et suivants du Code civil et qu'à ce titre ils doivent les restituer en bon état et dans les meilleurs délais à LPR,
article 5.4 : le paiement d'une indemnité compensatrice par palette manquante est déterminé à l'article 8.3 du contrat de location, lequel renvoie aux conditions particulières du contrat de location,
article 6.6 : les destinataires doivent être informés par écrit de ce que les palettes sont la propriété exclusive de LPR à qui elles devront être restituées nombre pour nombre, en bon état, LPR se chargeant de cette restitution, de ce que LPR est autorisée à les visiter à tout moment pour déterminer avec eux les modalités de collecte, réaliser des inventaires sur les palettes en stocks ou pour tout autre motif, de ce qu'à compter de la livraison des palettes dans leurs locaux/entrepôts ils deviennent responsables des palettes qu'ils utilisent et/ou stockent en tant que dépositaire des palettes,
article 6.7 : la société contractant avec LPR devra lui fournir toute copie écrite de cette information,
article 6.8 : LPR assurera la collecte des palettes auprès des destinataires. La collecte des palettes sera effectuée uniquement par LPR ou par des prestataires agréés par LPR ;
Considérant que la société LPR n'agit pas à l'encontre de ses propres co-contractants sur des manquements aux obligations sus-visées, mais agit, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, à l'encontre de la société CAFEIN PARIS IDF, qui est un tiers aux obligations du contrat de location ci-dessus rappelé, en lui reprochant d'avoir manqué à l'obligation de garde et de restitution qu'elle a contractée vis à vis des fournisseurs-chargeurs et en soutenant que ce manquement contractuel de la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE dans le cadre des contrats la liant aux fournisseurs-chargeurs a causé à la société LPR un préjudice résultant de l'immobilisation excessive et de la perte de palettes ;
Considérant que la société LPR verse régulièrement aux débats des conditions générales liant la société CAFEIN PARIS IDF à divers fournisseurs ou chargeurs, à savoir la société C... FRANCE, SAINT LOUIS SUCRE, SAUPIQUET FURIC RHD, CSR, D...
E... FRANCE (pièces 23-1 à 23-5) ; qu'il en résulte les dispositions suivantes :
- pièce 23-1 (conditions générales C... FRANCE) : "Les supports de manutention utilisés pour la livraison de nos produits sont des palettes louées 80x100 et 80x60 estampillées et peintes à la marque de leur propriétaire.
Les palettes louées sont utilisées par des clients de notre société uniquement pour le stockage provisoire des produits vendus par notre société. Elles ne font pas l'objet d'une consignation. Après avoir été libérées de leur charge par nos clients les palettes sont gardées par le client et mises à disposition des transporteurs mandatés par le loueur concerné, dans des conditions garantissant leur sauvegarde qualitative et quantitative. Les palettes font l'objet d'un échange nombre pour nombre à niveau de qualité équivalent, à défaut les différences en qualité et en quantité seront facturées au client au prix de 6,56 € HT par palette. Les palettes étant la propriété du loueur, elles ne peuvent être ni échangées, ni cédées à titre gratuit ou onéreux à des tiers"
- pièce 23-2 (conditions générales SAINT LOUIS SUCRE) "Nos produits hors vrac sont livrables, sauf exceptions portées à la connaissance des parties, sur palettes louées à un tiers ou appartenant à l'usine livrancière, sous réserve, dans ce dernier cas, de leur échange simultané contre un nombre de palettes du même type, vides et en bon état.
SAINT LOUIS SUCRE se réserve la possibilité de ne pas charger un transporteur qui se présente sans le nombre et la qualité requise pour l'échange de palettes"
- pièce 23-3 (conditions générales SAUPIQUET FURIC RHD) : "...Les produits SAUPIQUET FURIC RDH sont livrés sur palettes normalisée en location (LPR) de format 80 x120. Il n'y a pas d'échange nombre pour nombre à la réception. Toute palette non rendue fera l'objet d'une facturation à hauteur de 9,85 € la palette"
- pièce 23-4 (conditions générales CRS) : "Palette de 80x120, 80x60, 100x120.Depuis le 5 septembre 1994, tous nos produits non consignés circulent sur des palettes 80x120 et 80x60 louées, mises à disposition gratuites, qui ne font l'objet d'aucune facturation supplémentaire ou consigne. La société prestataire restant propriétaire de ces palettes, se chargera de leur récupération sur le lieu de livraison. Toutefois, nos clients assument et conservent la garde juridique des emballages, palettes et casiers mis à leur disposition jusqu'à restitution de ces derniers"
- pièce 23-5 (conditions générales D...
E... FRANCE) : "Pour nos produits distribués sur des palettes louées auprès du loueur mentionné sur la facture, la mise à disposition des palettes n'est ni facturée ni consignée par D...
E... FRANCE aux clients agréés par le loueur.
Le loueur restant propriétaire de ces palettes se chargera de leur récupération sur le lieu de livraison, suite à l'information que nous lui aurons communiquée.
...Les clients non agréés par ce loueur sont invités à demander leur agrément à ce prestataire. Dans un cas contraire, D...
E... FRANCE peut, à son choix, décider de récupérer les palettes ou les abandonner moyennant facturation aux dits clients du prix des palettes à leur valeur à neuf" ;
Considérant qu'il en résulte que si la société CAFEIN PARIS IDF est tenue de restituer les palettes louées, c'est la société LPR qui doit en assurer la récupération, ce qui est conforme aux article 6.6 et 6.8 sus-visés du contrat de location liant par ailleurs la société LPR aux fournisseurs-chargeurs ; qu'il appartient à la société LPR d'intervenir auprès des destinataires pour vérifier la disponibilité des palettes et la nécessité de déclencher une récupération ; que la société LPR ne démontre pas que la société CAFEIN PARIS IDF a fait obstacle d'une quelconque manière à une récupération des palettes ; que la société LPR ne démontre pas davantage qu'elle ait utilisé auprès de la société CAFEIN PARIS IDF la possibilité que lui donnait l'article 6.6 du contrat de location signé avec les fournisseurs ou chargeurs de la visiter à tout moment pour déterminer avec elle les modalités de collecte et réaliser des inventaires sur les palettes en stocks ; qu'il n'est pas établi dans ces conditions que la société CAFEIN PARIS IDF soit à l'origine de l'immobilisation excessive des palettes qui lui est reprochée par la société LPR ni du retard prétendu à leur réintroduction dans le circuit locatif ;
Considérant qu'en cause d'appel, la société LPR ne prétend plus qu'à l'indemnisation du préjudice subi du fait de la perte de palettes, soit faute de la part de la société CAFEIN PARIS IDF de les récupérer après livraison chez ses propres clients, soit par réutilisation à ses propres fins de palettes, propriété de la société LPR ; qu'elle considère que ces palettes étant perdues, elle ne peut les récupérer ;
Considérant que la société LPR prétend avoir subi sur les années 2004, 2005 et 2006, la perte de 541 palettes de type PR0 80, 155 palettes de type PR 100 et 31 palettes de type DP 610 ; que Monsieur B..., expert comptable, ayant réalisé une expertise à la demande de la société LPR, a calculé le préjudice subi par palette, selon le type de palette, en additionnant la perte d'actif d'exploitation et la perte de marge brute définitive résultant du fait que les palettes conservées par les destinataires ne peuvent plus être utilisées par la société LPR pour les besoins de son activité, perte de marge brute évaluée sur une période de 5 ans ;
Considérant que la société LPR verse aux débats en cause d'appel des attestations émanant d'un certain nombre de fournisseurs de boissons, les sociétés SAINT LOUIS SUCRE, F... FRANCE, L'ABEILLE, COLA-COLA, CIDRERIE DU CALVADOS, D...
E... FRANCE (pièces 22-1 à 22-6) ; qu'il résulte du cumul du nombre de palettes transmises par ces sociétés à la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE que les chiffres s'élèvent en tout et pour tout pour les années 2004, 2005 et 2006 à 65 palettes du type PR080 et 30 palettes du type PR 100 ;
Considérant que le constat établi le 26 avril 2005 par Maître G..., huissier de justice, a comptabilisé 366 palettes de la marque LPR dans les locaux de la société DAMPIERRE et SODABEL (CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE) ; qu'il résulte de ce constat la présence de palettes vides et la présence de palettes contenant à la fois des boissons émanant des clients chargeurs de la société LPR et de clients qu'elle prétend ne pas être les siens ; que ce constat ne permet d'établir ni le nombre de palettes qui seraient définitivement perdues ni le nombre de palettes qui seraient utilisées à des fins propres par la société CAFEIN ILE DE FRANCE pour d'autres produits que ceux des clients chargeurs de la société LPR, et ce d'autant que la société LPR indique, dans ses dernières écritures devant la cour, que postérieurement à ce constat, un nombre important de palettes a été restitué ;
Considérant que s'agissant du nombre de palettes perdues, Monsieur B... s'est contenté de reprendre les chiffres fournis par la société LPR, en indiquant que "les chiffres fournis par le système d'information de l'entreprise LPR sont recevables et fiables quant au suivi du nombre de palettes", en sorte que le nombre de palettes définitivement perdues, qui ne seraient pas susceptibles de restitution par la société CAFEIN PARIE IDF, repose sur les seuls éléments fournis par la société LPR ; que le calcul du préjudice invoqué par cette dernière ne saurait être effectué sur une base fournie par la société LPR elle-même ; qu'il convient de rappeler que la société LPR peut tout autant agir sur un fondement contractuel en indemnisation de son préjudice résultant de la perte de palettes à l'encontre de ses propres co-contractants directs, les fournisseurs-chargeurs, tenus de l'indemniser des pertes de palettes par le versement d'une indemnité compensatrice par palette chiffrée aux conditions particulières du contrat de location ;
Qu'au surplus, la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE fait valoir pertinemment que dans le cas où il est justifié que les palettes sont définitivement perdues, seule la valeur nette de l'actif définitivement perdu doit être prise en compte ; qu'en outre, dans le calcul de la perte de marge brute effectué par Monsieur B... est prise en compte une période d'immobilisation des palettes que les éléments du dossier ne permettent pas d'imputer exclusivement à la société CAFEIN PARIS ILE
DE FRANCE, ainsi qu'il a été retenu ci-dessus, et à laquelle les conditions générales de vente la liant aux différents fournisseurs ne font absolument pas référence ;
Considérant que la société LPR ne démontrant pas la réalité de son préjudice, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté la société LPR de l'ensemble de ses demandes ;
Considérant qu'il convient d'attribuer à la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE la somme de 2.000 € au titre des frais non compris dans les dépens d'appel, les premiers juges ayant fait l'exacte appréciation des sommes demandées devant eux au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Considérant que la société LPR, partie perdante, doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
- CONFIRME le jugement entrepris,
- Y AJOUTANT,
- CONDAMNE la société LOGISTIC PACKAGING RETURN à payer à la société CAFEIN PARIS ILE DE FRANCE la somme de 2.000 € (deux mille euros) au titre des frais non compris dans les dépens d'appel,
- REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,
- CONDAMNE la société LOGISTIC PACKAGING RETURN aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIER, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
- signé par Sylvie MANDEL, président, et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
LE GREFFIERLE PRESIDENT