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22/11/2007 | FRANCE | N°351

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0012, 22 novembre 2007, 351


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

12ème chambre section 2

D. C. / P. G.
ARRET No Code nac : 59C

contradictoire

DU 22 NOVEMBRE 2007

R. G. No 06 / 05375

AFFAIRE :

M. Pascal HERNANDEZ-Mandataire ad'hoc de S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES
...

C /
S. A. S. FMC AUTOMOBILES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Avril 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
No Chambre : 4
No Section :
No RG : 2004F3797

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :


SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD
SCP BOMMART MINAULTE. D.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE S...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

12ème chambre section 2

D. C. / P. G.
ARRET No Code nac : 59C

contradictoire

DU 22 NOVEMBRE 2007

R. G. No 06 / 05375

AFFAIRE :

M. Pascal HERNANDEZ-Mandataire ad'hoc de S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES
...

C /
S. A. S. FMC AUTOMOBILES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Avril 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
No Chambre : 4
No Section :
No RG : 2004F3797

Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD
SCP BOMMART MINAULTE. D.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES Immatriculée au registre du commerce et des sociétés 087 120 176 RCS ALBI, ayant son siège 22 avenue Albert Thomas 81000 ALBI, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Monsieur Pascal HERNANDEZ-Mandataire ad'hoc de S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES demeurant 22, avenue Albert Thomas 81000 ALBI.

Intervenant

Me Fabrice C...-Représentant des créanciers de S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES demeurant 5 rue Mathieu Cros 81090 VALDURENQUE.

Me Jean-Jacques A..., mandataire judiciaire, ès-qualités de Commissaire à l'exécution du plan de cession de S. A. R. L. GARAGE ALBI AUTOMOBILES demeurant 10 rue de la Croix Blanche 81000 ALBI.

représentés par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD-No du dossier 0642939
Rep / assistant : Me J. Louis PORTALANO, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE.

APPELANTS
****************
S. A. S. FMC AUTOMOBILES Immatriculée au registre du commerce et des sociétés 425 127 362 RCS VERSAILLES, ayant son siège 34 rue de la Croix de Fer 78100 SAINT GERMAIN EN LAYE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués-No du dossier 00033472
Rep / assistant : Me Paul COCCHIELLO, avocat au barreau de PARIS.

INTIMEE-Appelante incidemment
****************
Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 Octobre 2007 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis COUPIN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Françoise LAPORTE, président,
Monsieur Denis COUPIN, conseiller, (rédacteur)
Monsieur François DUCLAUD, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Thérèse GENISSEL,
FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société à responsabilité limitée GARAGE ALBI AUTOMOBILES, ci-après désignée ALBI AUTOMOBILES, était, depuis 1973, concessionnaire pour la distribution des véhicules FORD selon plusieurs contrats successifs dont le plus tardif a été signé le 02 octobre 1996, à durée indéterminée et résiliable sous un préavis de deux ans.

Usant de cette faculté, la société FORD, aujourd'hui société par actions simplifiée dénommée FMC AUTOMOBILES, en a notifié à son concessionnaire, le 06 mai 2002 la résiliation à effet du 12 mai 2004.

Se prévalant du nouveau règlement d'exemption no1400 / 2002 relatif aux accords de distribution automobile, publié le 31 juillet 2002 par la Commission Européenne et applicable au 1er octobre 2003, estimant que ce texte avait pour effet de rendre caduque le contrat de concession de 1996 auquel se substituait un nouveau contrat " de fait " de distributeur et réparateur agréé, et considérant alors abusive la décision de résiliation maintenue et exécutée le 12 mai 2004, la société ALBI AUTOMOBILES a assigné la société FMC AUTOMOBILES, le 19 août 2004, devant le tribunal de commerce de Nanterre pour lui réclamer 41. 146,92 euros pour solde de son compte courant,1. 183. 260 euros correspondant à deux années de marge brute pour défaut de préavis à la dénonciation du contrat de fait, ainsi que 18. 000 euros pour ses frais irrépétibles.

La société FMC AUTOMOBILES a discuté ces prétentions et a réclamé, reconventionnellement,15. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et pareille somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le 03 mai 2005, le tribunal de commerce d'Albi a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société ALBI AUTOMOBILES, nommant maître A... aux fonctions d'administrateur judiciaire.

Ce dernier est intervenu à l'instance et a soulevé une exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce d'Albi à laquelle la société FMC AUTOMOBILES s'est opposée.

Au cours de cette procédure, le tribunal de commerce d'Albi, par un jugement rendu le 27 décembre 2005, a arrêté un plan de redressement par cession de la société ALBI AUTOMOBILES, nommant maître A... aux fonctions de commissaire à l'exécution du plan.

Par jugement rendu le 28 avril 2006, le tribunal de commerce de Nanterre a rejeté l'exception et s'est déclaré compétent. Il a débouté la société ALBI AUTOMOBILES et son administrateur judiciaire de toutes leurs demandes et a alloué à la société FMC AUTOMOBILES 10. 000 euros pour ses frais irrépétibles.

La société ALBI AUTOMOBILES, maître A... en qualité de commissaire à l'exécution du plan et maître Fabrice C... en celle de représentant des créanciers, ont interjeté appel de cette décision.

Monsieur Pascal HERNANDEZ est intervenu volontairement en cause d'appel en qualité de mandataire ad'hoc de la société ALBI AUTOMOBILES et demande à la cour de lui en donner acte.

La société ALBI AUTOMOBILES, maîtres A... et C... et monsieur HERNANDEZ concluent ensemble en soutenant la recevabilité de l'action. Ils discutent l'affirmation de la société FMC AUTOMOBILES selon laquelle maître A... ne serait plus commissaire à l'exécution du plan et soutiennent qu'en l'espèce, la mission de ce dernier se poursuivra jusqu'à la clôture de la procédure collective sans pouvoir excéder 10 ans.

Ils ajoutent que, par jugement du 10 janvier 2006, le tribunal de commerce d'Albi a désigné monsieur HERNANDEZ en qualité de mandataire ad hoc avec mission de substituer la personne morale dans toutes les actions et procédures n'entrant pas dans celle du commissaire à l'exécution du plan.

Au fond, ils rappellent les dispositions et les conséquences de l'article 81 du traité d'Amsterdam et le mécanisme d'exemption et exposent les modifications résultant de l'application du règlement no1400 / 2002 du 31 juillet 2002 ainsi que les effets du défaut de mise en conformité des contrats en cours à partir du 1er octobre 2003.

Ils indiquent qu'en l'espèce, la société FMC AUTOMOBILES ayant opté pour un système de distribution exclusive et sélective, restrictif de concurrence, et n'ayant pas modifié les clauses du contrat avant le 1er octobre 2003, a choisi de laisser la nullité produire ses effets sur les clauses non conformes au règlement et, donc, au contrat lui-même puisque la mise en place du système de distribution cumulant l'exclusivité et la sélectivité en constituait, selon eux, une condition essentielle sans laquelle les parties n'auraient pas contracté.

Ils en infèrent que le contrat était nul de plein droit dès le 1er octobre 2003 et que, compte tenu de la continuation des relations au-delà de cette date, un nouveau contrat s'est formé qui, par application du nouveau règlement, imposait, à toute résiliation, un écrit motivé et le respect d'un délai de deux ans.

Ils estiment que le concédant a résilié sans motif et de manière brutale le nouveau contrat de fait né entre les parties, causant à la société ALBI AUTOMOBILES un préjudice considérable.

Subsidiairement, invoquant les dispositions de l'article 1134 du code civil, ils font à la société FMC AUTOMOBILES le grief d'avoir manqué à son obligation d'assistance au cours de l'exécution du préavis, et d'avoir développé une stratégie fautive visant à l'éliminer du réseau FORD en montrant une mauvaise volonté dans l'examen des repreneurs potentiels de la concession et en l'empêchant de devenir réparateur agréé.

Ils soulignent le lien de causalité entre la faute commise et le préjudice supporté par la société ALBI AUTOMOBILES qu'ils chiffrent à un montant total de 1. 183. 260 euros correspondant à deux années de marge brute moyenne.

Ils discutent l'appel incident articulé par la société FMC AUTOMOBILES pour procédure abusive en relevant l'absence de tout préjudice.

Ils demandent en conséquence à la cour d'infirmer le jugement, de condamner la société FMC AUTOMOBILES à leur payer les sommes de 41. 146,92 euros pour le solde du compte courant, de 1. 183. 260 euros d'indemnisation du préjudice, et de 10. 000 euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, de débouter la société FMC AUTOMOBILES de toutes ses demandes et de la condamner aux dépens.

La société FMC AUTOMOBILES réplique en rappelant les difficultés rencontrées avec la société ALBI AUTOMOBILES pendant la période de préavis et postérieurement au 12 mai 2004.

Elle tient pour irrecevable l'action en observant que le commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société ALBI AUTOMOBILES a été désigné par un jugement du tribunal de commerce d'Albi du 27 décembre 2005, en expliquant que le plan de cession a été exécuté et le prix payé et en soutenant que la mission de ce commissaire a pris fin.

Elle en déduit que faute de mandataire spécialement désigné, maître A... n'est pas recevable en son action, n'ayant ni qualité, ni intérêt à agir. Elle expose qu'il en est de même de maître C..., représentant des créanciers et de la société ALBI AUTOMOBILES elle-même.

Sur le fond, elle soutient la parfaite validité de la résiliation notifiée le 06 mai 2002 et considère que l'argumentation tirée de la nullité du contrat est dénuée de toute pertinence.

Elle rappelle que la résiliation d'un contrat de concession obéit aux seules modalités en vigueur au jour où elle est notifiée et explique que le nouveau règlement d'exemption ne peut avoir pour effet de remettre en cause une résiliation régulièrement intervenue.

Elle ajoute qu'à supposer que certaines clauses du contrat ont pu avoir un effet anticoncurrentiel, elles ne sont pas nulles de plein droit et qu'à cet égard la société ALBI AUTOMOBILES n'établit pas que les stipulations contractuelles porteraient une atteinte sensible, avérée ou potentielle au jeu de la concurrence à l'intérieur du marché et affectant le commerce entre Etats membres qui pourrait justifier leur annulation.

Elle explique aussi que la société ALBI AUTOMOBILES, contrairement à la faculté contractuelle dont elle disposait à cet égard, n'a pas sollicité l'aménagement des clauses, selon elle, litigieuses.

Elle discute, point par point, la réalité des griefs allégués par les appelants à l'appui de la demande d'indemnisation en raison d'une prétendue mauvaise foi du concédant dans l'exécution du contrat.

Aussi conclut-elle à l'irrecevabilité de la société ALBI AUTOMOBILES et de maîtres C... et A... en leur appel et leur action, subsidiairement, à la confirmation du jugement et au débouté de la société ALBI AUTOMOBILES. Formant, en revanche, un appel incident partiel elle réclame la condamnation de la société ALBI AUTOMOBILES à lui payer 15. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive. Elle sollicite enfin pareille somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 10 mai 2007.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'action

Considérant que la société FMC AUTOMOBILES soutient un défaut d'intérêt à agir de la société ALBI AUTOMOBILES, de maître C... et de maître A... au motif que la mission de ce dernier a pris fin avec la réalisation du plan de cession et le paiement du prix de la vente et, ce, à défaut d'un mandataire spécialement désigné ;

Considérant que l'intérêt à agir s'apprécie au moment où l'action est engagée ; que le tribunal de commerce d'Albi a désigné maître A... par un jugement rendu le 27 décembre 2005 sans fixer à sa mission de durée ; que c'est en sa nouvelle qualité et aux côtés de la société ALBI AUTOMOBILES que le commissaire à l'exécution du plan a interjeté appel, selon déclaration en date du 12 juillet 2006 ;

Considérant que c'est sans produire le moindre élément probant que la société FMC AUTOMOBILES affirme que le plan aurait, à cette date, été exécuté et le prix payé ;

Considérant, de surcroît que, par un jugement rendu le 10 janvier 2006, antérieur à la décision critiquée, le tribunal de commerce d'Albi a désigné monsieur Pascal HERNANDEZ en qualité de mandataire avec mission de substituer la personne morale dans toutes les actions et formalités de la procédure n'entrant pas dans la mission du commissaire à l'exécution du plan ;

Considérant que monsieur HERNANDEZ est régulièrement intervenu volontairement en cause d'appel ; qu'il convient de lui en donner acte ;

Considérant enfin que maître C... dispose à l'évidence, en sa qualité de représentant des créanciers, d'un intérêt à agir, aux côtés de la société ALBI AUTOMOBILES, dès lors que l'issue du litige est de nature à entraîner, par l'effet des demandes reconventionnelles, antérieures au jugement d'ouverture du redressement judiciaire, une incidence sur le passif de la société ;

Considérant que maître C... est intervenu, à la déclaration d'appel, alors pourtant qu'il n'est pas partie à la procédure de première instance ; que cette irrégularité de la procédure n'est pas relevée par la société FMC AUTOMOBILES ; que maître C... conclut aux côtés de la société ALBI AUTOMOBILES, de maître A... et de monsieur HERNANDEZ ;

Considérant qu'il convient en conséquence de débouter la société FMC AUTOMOBILES de la fin de non-recevoir qu'elle soulève, tirée du prétendu défaut d'intérêt à agir de la société ALBI AUTOMOBILES, de maître A... et de maître C... ;

Sur la nullité alléguée du contrat

Considérant qu'aux termes de l'article 81 du traité d'Amsterdam, sont prohibés, sous la sanction de leur nullité, tous accords entre entreprises qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Union Européenne ;

Considérant qu'un régime d'exemption à ce principe a été organisé par les règlements no123 / 85 et 1475 / 95 ; qu'il n'est pas discuté que le contrat de concession automobile renouvelé le 02 octobre 1996 entre la société FMC AUTOMOBILES et la société ALBI AUTOMOBILES l'a été en conformité de ce dernier texte ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES ne discute pas la validité et la portée de la résiliation dudit contrat, telle que la société FMC AUTOMOBILES lui a notifié le 06 mai 2002 sous un préavis de deux ans devant s'achever le 12 mai 2004 ;

Considérant que, pendant l'exécution de ce préavis de résiliation, un nouveau Règlement CE de la commission, publié le 31 juillet 2002 sous le numéro 1400 / 2002 et entré en vigueur le 1er octobre de la même année, a modifié le régime d'exemption aux disposions de l'article 81 du traité ;

Considérant que le Règlement du 31 juillet 2002 précise, en son article 10, que l'interdiction énoncée à l'article 81 du traité ne s'applique pas pendant la période du 1er octobre 2002 au 30 septembre 2003, aux accords déjà existants, antérieurs à l'entrée en vigueur, qui ne remplissent pas les nouvelles conditions d'exemption ;

Considérant que par lettre du 09 avril 2003, la société FMC AUTOMOBILES a rappelé à la société ALBI AUTOMOBILES la nécessité d'ajuster le contrat en cours afin de se conformer au nouveau règlement d'exemption et de permettre la poursuite de l'activité de vente de véhicules neufs et de réparateur agréé jusqu'à l'expiration du préavis ;

Considérant que, par une seconde lettre du 25 septembre 2003, la société FMC AUTOMOBILES rappelait la nécessité de mettre en conformité le contrat de concession afin d'accorder à la société ALBI AUTOMOBILES le bénéfice des dispositions du nouveau Règlement ; qu'elle confirmait ainsi que toute disposition contractuelle non conforme était réputée nulle et ne devrait plus s'appliquer après la date du 1er octobre 2003 ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES n'allègue ni ne démontre avoir répondu à ces courriers ; qu'il n'est pas discuté qu'aucun document contractuel modificatif n'a été signé entre les cocontractants relativement à cette mise en conformité ;

Considérant qu'il s'ensuit que, comme l'expliquait exactement la société FMC AUTOMOBILES dans sa lettre du 25 septembre 2003, cette mise en conformité est intervenue, en l'espèce, par défaut, les clauses contraires au nouveau Règlement étant de plein droit frappées de nullité ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES se prévaut d'une jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes précisant que la nullité de plein droit dont il s'agit s'applique aux seuls éléments de l'accord frappés par l'interdiction, ou à l'accord dans son ensemble si ces éléments n'apparaissent pas séparables de l'accord lui-même ;

Considérant que les parties s'accordent à inférer de ces jurisprudences qu'il appartient à la juridiction nationale d'apprécier, en vertu du droit national applicable, les conséquences d'une éventuelle nullité de certaines clauses contractuelles ;

Considérant que, pour démontrer la nullité du contrat à la date du 1er octobre 2003, il appartient à la société ALBI AUTOMOBILES d'apporter la démonstration que les dispositions de l'article 81 du traité s'appliquent au cas d'espèce et que la nullité de certaines clauses contractuelles visent des éléments inséparables du contrat ;

Considérant que les interdictions et nullités édictées par le Traité d'Amsterdam visent les accords qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Union Européenne ;

Considérant que, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la société ALBI AUTOMOBILES ne démontre pas, ni même ne cherche à démontrer que le contrat litigieux ou l'une seulement de ses clauses emporterait un effet quelconque sur le commerce entre les Etats membres de l'Union Européenne ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES ne peut étendre à l'ensemble du réseau français de distribution et de commercialisation des véhicules et services FORD, tel qu'il est animé par la société FMC AUTOMOBILES, les griefs qu'elle articule et qui sont seulement fondés sur le défaut de mise à jour du contrat initial, conforme aux dispositions anciennes ;

Considérant, en effet, qu'elle n'allègue, ni ne démontre que la société FMC AUTOMOBILES aurait maintenu l'ensemble des autres concessionnaires de son réseau dans des dispositions contractuelles non mises en conformité ; qu'au contraire, les lettres des 09 avril et 23 septembre 2003 établissent que cette mise en conformité du réseau au nouveau Règlement était un processus, nécessaire à la poursuite des activités commerciales, que la société FMC AUTOMOBILES avait engagé et dont elle poursuivait la réalisation ;

Considérant ainsi que le contrat non-conforme subsistant entre la société FMC AUTOMOBILES et la société ALBI AUTOMOBILES ne pouvait, à lui seul, affecter le commerce entre Etats membres et empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Union ;

Considérant, de surcroît, que la société ALBI AUTOMOBILES n'indique pas précisément quelles étaient les clauses contractuelles qui encourraient la nullité en raison de l'entrée en vigueur du nouveau Règlement et de l'achèvement de la période intermédiaire ;

Considérant qu'elle se borne à affirmer qu'il était structurellement impossible d'ajuster un contrat fondé sur une distribution exclusive et sélective ;

Considérant que, par cette affirmation de principe, elle n'apporte pas la preuve dont elle a la charge que les clauses contractuelles relatives à la distribution sélective ou exclusive constituaient un élément non-séparable du contrat dont l'objet principal était le droit, pour la société ALBI AUTOMOBILES, de commercialiser des véhicules neufs et de réaliser des prestations d'entretien et de réparations sous le panonceau FORD pour les véhicules de cette marque ; que le maintien de cette collaboration de distributeur n'empêchait aucunement l'application des critères de quantité et de qualité que le nouveau Règlement substituait à ceux d'exclusivité ;

Qu'il s'ensuit que la société ALBI AUTOMOBILES doit être déboutée de sa demande de voir constater la nullité du contrat à la date du 1er octobre 2003 et la continuation des relations commerciales dans le cadre d'un contrat de fait qui aurait été ultérieurement résilié sans respect du préavis de deux ans ; que le jugement recevra donc confirmation de ce chef ;

Sur les conditions d'exécution du préavis

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES affirme que la société FMC AUTOMOBILES a multiplié, pendant la période de préavis, du 06 mai 2002 au 12 mai 2004, les agissements déloyaux dans son obligation contractuelle d'assistance, sans toutefois en préciser la nature exacte et l'ampleur ;

Considérant que le 11 juin 2002 la société FORD CREDIT a expliqué à la société ALBI AUTOMOBILES que la caution bancaire ayant été dénoncée, elle était conduite à réclamer le règlement comptant des pièces de rechange au-delà d'un encours de 28. 000 euros ; que par lettre du 25 juin 2002, la société ALBI AUTOMOBILES s'est bornée à constater cette réduction sans protester contre cette décision, sollicitant, en revanche, l'octroi d'un escompte de 2 % sur les règlements comptants ;

Considérant qu'en réponse et par une lettre du 04 juillet suivant, la société FMC AUTOMOBILES a rappelé qu'aux termes de l'article 14 du contrat de concession, les véhicules et les pièces étaient payables comptant sans faculté d'escompte ; qu'il suit de là que la décision, non discutée, était donc parfaitement conforme aux stipulations contractuelles ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES ajoute que la société FMC AUTOMOBILES a fixé des objectifs de ventes à un niveau trop important ; que, sont produites aux débats des correspondances échangées relativement à la fixation des prévisions pour l'année 2003 ; qu'à la proposition de 180 véhicules articulée par la société ALBI AUTOMOBILES dans ses lettres des 23 décembre 2002 et 21 mars 2003, la société FMC AUTOMOBILES a opposé un objectif de 248 véhicules ; que cet échange argumenté de part et d'autre, démontre la réalité d'une concertation ;

Considérant que le contrat prévoit, en cas de désaccord, une procédure de recours à un expert indépendant ; que la société ALBI AUTOMOBILES n'allègue, ni ne démontre avoir sollicité une telle intervention ;

Considérant, au surplus, que par une ultime lettre du 16 mars 2004, la société FMC AUTOMOBILES a exposé à la société ALBI AUTOMOBILES qu'elle acceptait de prendre en compte le nombre de 205 correspondant aux ventes réalisées plutôt que l'objectif initialement retenu ;

Considérant que cette proposition de compromis ne correspond ni à une mauvaise exécution du contrat, ni à un comportement déloyal ;

Considérant qu'il est établi que la société FMC AUTOMOBILES a adressé à la société ALBI AUTOMOBILES deux notes de débit de 762,25 euros chacune relatives à l'utilisation d'un logiciel pour une prestation à laquelle la société ALBI AUTOMOBILES n'avait pas souscrit ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES, qui n'allègue ni ne démontre qu'elle aurait effectivement réglé ces factures qui ont été seulement inscrites au débit du compte courant, ne discute pas qu'elles ont été, ultérieurement, contre-passées par la société FMC AUTOMOBILES ;

Considérant que cette erreur redressée n'établit pas la preuve d'une inexécution fautive du contrat de concession de la part de la société FMC AUTOMOBILES ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES reproche encore à la société FMC AUTOMOBILES d'avoir bloqué l'immatriculation des véhicules vendus aux clients mais ne produit aux débats aucun élément de nature à justifier de cette affirmation ;

Considérant ainsi qu'aucun manquement de la société FMC AUTOMOBILES à son obligation d'assistance de son concessionnaire comme aucun des agissements déloyaux allégués ne sont démontrés ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES reproche, par ailleurs, à la société FMC AUTOMOBILES une stratégie fautive visant à l'éliminer du réseau FORD ;

Considérant toutefois que la notification de la décision unilatérale de résilier le contrat de concessionnaire a respecté les dispositions contractuelles et légales et n'est pas fautive ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES ne peut articuler à l'encontre de la société FMC AUTOMOBILES le grief d'avoir marqué de la mauvaise volonté dans l'examen des repreneurs potentiels de la concession ; que la société FMC AUTOMOBILES n'était, à cet égard, tenue à aucune obligation et pouvait librement retenir ou écarter les candidats pour l'exploitation d'une concession dont la société ALBI AUTOMOBILES elle-même, dans ses correspondances, a souligné la position fortement concurrencée par des mandataires et revendeurs hors réseau ;

Considérant, de surcroît, qu'un refus est seulement établi, par les pièces produites, relatif à la candidature de monsieur MAURIES, que la société FMC AUTOMOBILES a écartée après en avoir examiné la pertinence ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES articule en outre, à l'encontre de la société FMC AUTOMOBILES, le grief d'avoir tout mis en œ uvre pour l'empêcher de devenir réparateur agréé ;

Considérant qu'aucune disposition du contrat de concession ne prévoit une quelconque poursuite des relations commerciales postérieurement à son achèvement ; qu'à plusieurs reprises, la société FMC AUTOMOBILES a confirmé à la société ALBI AUTOMOBILES, pendant l'exécution du préavis, la possibilité qui demeurait pour elle de devenir réparateur agréé, postérieurement au 12 mai 2004 ; qu'elle a cependant rappelé la nécessité, pour une telle candidature, de remplir les critères déterminés ;

Considérant que par lettre du 07 mai 2004 la société FMC AUTOMOBILES a envoyé à la société ALBI AUTOMOBILES deux exemplaires du contrat de réparateur agréé en lui demandant le retour après signature mais en soulignant que les horaires d'ouverture ne remplissaient pas les conditions standard exigées ;

Considérant que, parallèlement, des difficultés surgissaient entre la société FMC AUTOMOBILES et son ancien concessionnaire relativement à la vérification des stocks de véhicules neufs et la restitution de ceux non encore réglés ; que l'huissier chargé de procéder à ces vérifications a été empêché par la société ALBI AUTOMOBILES d'intervenir ; que cet officier ministériel, agissant sur ordonnance du président du tribunal de commerce d'Albi, s'est heurté à une importante résistance du représentant légal de la société ALBI AUTOMOBILES à obtempérer, ainsi qu'en fait foi le procès-verbal dressé le 14 mai 2004 ;

Considérant que par lettre du 19 mai la société FMC AUTOMOBILES protestait de l'attitude de la société ALBI AUTOMOBILES, et tirait de ces circonstances la conséquence qu'elle refusait de renvoyer le contrat de réparateur agréé, comme de poursuivre toute relation commerciale avec elle ;

Considérant que les échanges de correspondances postérieures démontrent les dissensions persistantes entre la société FMC AUTOMOBILES et la société ALBI AUTOMOBILES pour solder les conséquences de la résiliation du contrat de concession, notamment quant aux sommes encore dues au titre de la livraison de véhicules FORD neufs et quant à la dépose des panonceaux à cette marque ;

Considérant que, dans ce climat conflictuel dont l'évolution défavorable a conduit la société ALBI AUTOMOBILES à délivrer l'acte introductif de la présente instance devant le tribunal de commerce de Nanterre, il ne saurait être reproché à la société FMC AUTOMOBILES d'avoir souhaité ne pas rétablir de relations commerciales avec la société ALBI AUTOMOBILES et d'avoir ainsi refusé de signer le contrat de Réparateur agréé ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES a sollicité du juge des référés du tribunal de commerce d'Albi que la société FMC AUTOMOBILES soit condamnée, sous astreinte, à lui renvoyer le contrat de réparateur agréé ; que par ordonnance du 21 juin 2006, ce magistrat a fait droit à cette demande ; que, sans être contredite, la société FMC AUTOMOBILES expose qu'elle a immédiatement obtempéré à cette décision, mais que la société ALBI AUTOMOBILES n'a jamais demandé sa connexion informatique lui permettant de commander les pièces et n'a jamais participé aux séances de formation ni commandé aucune pièce ;

Considérant ainsi que la résistance de la société FMC AUTOMOBILES à conférer à la société ALBI AUTOMOBILES la position de Réparateur agréé, ne présentait pas le caractère fautif qu'allègue la société ALBI AUTOMOBILES ;

Qu'il résulte de ce qui précède que la société ALBI AUTOMOBILES, maîtres A... et C... et monsieur HERNANDEZ, es-qualités, ne sont pas fondés dans leur appel ; que n'établissant ni le caractère fautif d'une résiliation prématurée du prétendu contrat " de fait ", ni la déloyauté du comportement de la société FMC AUTOMOBILES, ils doivent être déboutés de leur demande indemnitaire ;

Que le jugement doit en conséquence recevoir confirmation de ce chef ;

Sur la demande en paiement

Considérant que le dispositif des écritures des appelants comporte une demande de condamner la société FMC AUTOMOBILES à leur payer une somme de 41. 146,92 euros qualifiée de " montant du solde du compte courant généré par les opérations commerciales des parties " ;

Considérant que cette prétention n'est appuyée par aucune motivation, ni aucune pièce justificative ; qu'elle ne peut en conséquence prospérer ;

Sur l'appel incident de la société FMC AUTOMOBILES

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES, maîtres A... ET C..., es-qualités, en engageant la procédure comme en interjetant appel et monsieur HERNANDEZ en intervenant volontairement, ont exercé des droits que la loi leur réserve ; que la société FMC AUTOMOBILES ne produit aucun élément de nature à démontrer que cet exercice aurait dégénéré en abus ;

Que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont débouté la société FMC AUTOMOBILES de sa demande en paiement de dommages et intérêts ; que cette dernière doit être déboutée de son appel incident et le jugement confirmé de ce chef ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société FMC AUTOMOBILES la charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que la société ALBI AUTOMOBILES sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 5. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer des sommes sur le fondement du même texte à la société ALBI AUTOMOBILES, maîtres A... ET C... et monsieur HERNANDEZ, es-qualités ;

Considérant que la société ALBI AUTOMOBILES qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,

Donne acte à monsieur Pascal HERNANDEZ de son intervention volontaire, es qualités de mandataire ad'hoc,

Déboute la SAS FMC AUTOMOBILES de la fin de non-recevoir qu'elle soulève, tirée du prétendu défaut d'intérêt à agir de la SARL GARAGE ALBI AUTOMOBILES, de maître Jean-Jacques A... et de maître Fabrice C...,

Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la SARL GARAGE ALBI AUTOMOBILES, maîtres Jean-Jacques A... et Fabrice C... et monsieur Pascal HERNANDEZ, es-qualités, de leur demande en paiement de la somme de 41. 146,92 euros comme de celle formulée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne la SARL GARAGE ALBI AUTOMOBILES à payer à la SAS FMC AUTOMOBILES la somme complémentaire de 5. 000 euros sur le fondement de ce même texte,

Condamne la SARL GARAGE ALBI AUTOMOBILES aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP BOMMART-MINAULT, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, président et par Madame Marie-Thérèse GENISSEL, greffier, présent lors du prononcé

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0012
Numéro d'arrêt : 351
Date de la décision : 22/11/2007

Analyses

CONTRATS DE DISTRIBUTION

Le Règlement de la Commission nº1400/2002 du 31 juillet 2002, modifiant le régime des exemptions, précise dans son article 10 que jusqu'au 30 septembre 2003 l'interdiction énoncée à l'article 81 du Traité d'Amsterdam ne s'applique pas aux accords entre entreprises antérieurs au 1er octobre 2002, date de son entrée en vigueur . La société appelante, concessionnaire pour la distribution d'une marque de véhicules automobiles, dont le contrat de concession a été, en l'espèce, régulièrement résilié le 6 mai 2002 avec préavis à effet du 12 mai 2004, ne peut se prévaloir, pour invoquer sa nullité et la poursuite ¿de fait¿ des relations commerciales, de ce qu'il n'a pas été mis en conformité avec le Règlement nº1400/2002 à la date limite du 1er octobre 2003, alors qu'elle n'apporte pas la preuve que les clauses contractuelles relatives à la distribution exclusive ou sélective constituaient un élément inséparable dudit contrat, dont l'objet principal était le droit pour elle de commercialiser des véhicules neufs et de réaliser des prestations de réparation et d'entretien sous le panonceau de la marque.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Nanterre, 28 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2007-11-22;351 ?
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