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08/11/2007 | FRANCE | N°554

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0342, 08 novembre 2007, 554


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 39H

13ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 08 NOVEMBRE 2007

R.G. No 07/01964

AFFAIRE :

ITM ENTREPRISES

C/

CARREFOUR

ADMINISTRATIF FRANCE

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance de référé rendue le 18 Novembre 2004 par le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE

No Chambre :

No Section :

No RG : 04/R01771

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

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SCP LISSARRAGUE DUPUIS

BOCCON-GIBOD

Me TREYNET

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affai...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 39H

13ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 08 NOVEMBRE 2007

R.G. No 07/01964

AFFAIRE :

ITM ENTREPRISES

C/

CARREFOUR

ADMINISTRATIF FRANCE

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance de référé rendue le 18 Novembre 2004 par le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE

No Chambre :

No Section :

No RG : 04/R01771

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LISSARRAGUE DUPUIS

BOCCON-GIBOD

Me TREYNET

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (2ème chambre civile) du 8/02/2007 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles (14ème) le 19/10/2005

S.A. ITM ENTREPRISES

24 rue Auguste Chabrières

75015 PARIS

représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD, avoués - No du dossier 0743797

assistée de Maître UTZSCHNEIDER et Maître BEAUMONT, avocats au barreau de Paris

****************

DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI

S.A.S. CARREFOUR ADMINISTRATIF FRANCE

ZI route de Paris

14120 MONDEVILLE

S.A.S. CSF

ZI route de Paris

14120 MONDEVILLE

représentées par Maître TREYNET, avoué - No du dossier 18309

assistées de Maître GUILLEMIN, avocat au barreau de Paris

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Septembre 2007, Monsieur Jean BESSE, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean BESSE, président,

Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller,

Madame Annie DABOSVILLE, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER

Vu la communication de l'affaire au Ministère Public en date du 14/05/2007, La cour est saisie sur renvoi de cassation de l'appel interjeté par la SA ITME à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 18 novembre 2004 par le Président du Tribunal de commerce de Nanterre, après cassation de l'arrêt rendu le 19 octobre 2005 par la Cour d'appel de Versailles.

La SA ITME qui anime le réseau Intermarché a constaté que de nombreux magasins passaient sous d'autres enseignes, sans qu'elle ait été en mesure de faire valoir ses droits de préemption et de préférence. Pour comprendre et établir les éventuelles manœuvres ayant pu permettre ces opérations, elle a par requête en date du 14 octobre 2004, demandé au Président du Tribunal de commerce de Nanterre, de désigner un huissier pour recueillir des documents et entendre des personnes dénommées auprès des sociétés Carrefour Administratif France (SAS C.A.S.) et Champion Supermarché France (SAS C.F.S.)

Par ordonnance en date du 20 octobre 2004 le Président du Tribunal de commerce de Nanterre a fait droit à cette requête.

Le 21 octobre 2004, l'huissier a tenté de remplir la mission qui lui était confiée, mais s'est heurté au refus de la SAS C.F.S. et de la SAS C.A.S..

Le 10 novembre 2004, la SAS C.A.S. et la SAS C.F.S. ont saisi le Président du Tribunal de commerce de Nanterre d'une demande de rétractation de l'ordonnance sur requête en date du 20 octobre 2004.

Par ordonnance de référé en date du 18 novembre 2004, le Président du Tribunal de commerce de Nanterre a rétracté l'ordonnance du 20 octobre 2004.

Sur l'appel de la SA ITME, la Cour de ce siège, par arrêt en date du 19 octobre 2005, a confirmé l'ordonnance de rétractation en date du 18 novembre 2004.

Pour statuer ainsi la Cour a notamment relevé qu'en raison de la saisine ultérieure du juge du fond, le 19 janvier 2005, les conditions de l'article 145 du Nouveau code de procédure civile n'étaient plus réunies.

Par arrêt en date du 8 février 2007, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a cassé l'arrêt en date du 19 octobre 2005 en toutes ses dispositions.

La Cour de cassation indique que l'absence d'instance au fond, qui constitue une condition de recevabilité de la demande fondée sur l'article 145, devait s'apprécier à la date de saisine du juge.

La SA ITME a régulièrement saisi la Cour, et par conclusions signifiées le 20 juin 2007, lui demande d'infirmer l'ordonnance de référé en date du 18 novembre 2004, de dire que l'ordonnance sur requête en date du 20 octobre 2004 était bien fondée, et de condamner les sociétés C.F.S. et C.A.S. à lui payer la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

La SA ITME soutient qu'elle avait un motif légitime à solliciter la désignation d'un huissier pour se faire remettre des documents, et interroger des personnes dénommées, dans le but de comprendre par quel procédé un grand nombre d'adhérents de son réseau a pu changer d'enseigne, en dépit de ses droits contractuels de préemption et de préférence. Elle fait observer que pour que la mesure conserve toute son utilité, elle devait être menée sans que les sociétés C.F.S. et C.A.S. en soient averties, et qu'elle a donc dû procéder non contradictoirement, par voie d'ordonnance sur requête. Elle relève que la mesure sollicitée est légalement admissible, alors que l'huissier n'a pas le droit de rechercher et saisir les documents, mais seulement celui d'en solliciter la communication et que s'il a pour mission de recueillir les déclarations de personnes nominativement désignées, il n'a aucun pouvoir de contrainte.

Les sociétés C.A.S. et C.F.S., par conclusions signifiées le 6 juin 2007, demandent à la Cour de confirmer l'ordonnance de référé en date du 18 novembre 2004 ayant rétracté l'ordonnance sur requête en date du 20 octobre 2004, et de condamner la SA ITME à leur payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Sur l'absence de motif légitime les sociétés intimées font notamment valoir :

- que l'enseigne Intermarché étant peu porteuse, de nombreux adhérents ont cherché à exercer leur activité sous d'autres enseignes,

- que la SA ITME a voulu endiguer ce mouvement volontaire qui lui était fortement préjudiciable,

- qu'elle a imaginé une vaste opération au niveau national, largement médiatisée, en sollicitant auprès de nombreuses juridictions des mesures d'instruction sur le fondement de l'article 145 du Nouveau code de procédure civile,

- qu'elle a ainsi voulu impressionner ses adhérents pour les dissuader de changer d'enseigne, et non pas se réserver des preuves pour un procès futur,

- que ce motif constitue une dévoiement de l'article 145 et n'est pas légitime,

- que d'ailleurs la SA ITME a déposé devant le juge du fond près de 800 pièces justificatives, et déclare elle-même qu'elle dispose de la preuve de leurs agissements prétendument fautifs.

Sur l'absence des conditions de l'article 875 du Nouveau code de procédure civile les sociétés intimées font notamment valoir :

- que la SA ITME a saisi le Président du Tribunal de commerce de Nanterre par voie de requête,

- que dans ce cas l'article 875 impose qu'il s'agisse d'une mesure urgente, et que les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement,

- que ni la requête, ni l'ordonnance ne font allusion à la condition de l'urgence,

- qu'à supposer qu'il y ait une certaine urgence, elle n'était pas incompatible avec la procédure contradictoire des référés qui se déroule dans des délais très brefs,

- que pour justifier le recours à la procédure non contradictoire de l'ordonnance sur requête, la SA ITME invoque la nécessité d'agir par surprise, alors que s'agissant de se faire communiquer des documents et de consigner des déclarations, il n'y avait pas d'inconvénient à ce qu'elles aient été averties de la venue de l'huissier par un débat contradictoire en référé.

Sur le caractère légalement admissible des mesures sollicitées, les sociétés intimées font notamment valoir :

- que le Président du Tribunal de commerce de Nanterre motive exactement son ordonnance de rétractation du 20 octobre 2004 en indiquant que " l'ampleur et la diversité de la mission confiée à l'huissier excède manifestement les prévisions et les limites de l'article 145, et qu'en ce sens, les mesures ordonnées ne sont pas légalement admissibles ",

- que la mission confiée à l'huissier de justice ne se limite pas à la communication de documents précis et identifiés, mais présente un caractère général qui impose à celui-ci de procéder à des investigations illimitées, assimilable à une véritable perquisition privée,

- que par la généralité des documents dont l'huissier est susceptible d'obtenir communication, la SA ITME est susceptible de se procurer des informations confidentielles qui portent sur le savoir-faire de leurs réseaux de distribution.

Comme elles y ont été autorisées, les parties ont adressé à la cour, chacune une note en délibéré sur la portée de l'arrêt rendu le 28 juin 2006 par la formation plénière de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation, la société appelante le 17 septembre 2007, et les sociétés intimées le 20 septembre 2007.

DISCUSSION

Considérant que l'ordonnance sur requête en date du 20 octobre 2004 donne mission à l'huissier de justice de :

1. SE RENDRE à l'adresse des établissements secondaires des sociétés Carrefour Administratif France SAS et CSF SAS, situés, l'un et l'autre, au 26. Quai Michelet à Levallois-Perret (92300).

2. SE FAIRE REMETTRE COPIE de tout document relatif à "l'action organisée vis-à-vis d'Intermarché" par les sociétés du groupe Carrefour visées par la présente requête, et plus particulièrement :

a) tout échange de correspondances, y compris électroniques, intervenu entre les sociétés Carrefour Administratif France SAS et/ou CSF SAS, d'une part, et les 38 sociétés d'exploitation listées en annexe de la requête et/ou leurs actionnaires,

d'autre part, concernant le changement d'enseigne du point de vente et/ou la cession des titres de la société d'exploitation,

b) tout projet de contrat et tout contrat de franchise/d'enseigne conclus entre les sociétés Carrefour Administratif France SAS et/ou CSF SAS, d'une part, et les 38 sociétés d'exploitation listées en annexe de la requête, d'autre part,

c) tout projet de contrat et tout contrat portant sur la cession des actions des 38 sociétés d'exploitation listées en annexe de la requête conclus entre les sociétés Carrefour Administratif France SAS et/ou CSF SAS, d'une part, et les actionnaires de ces sociétés d'exploitation, d'autre part.

3. CONSIGNER toute déclaration que souhaiteraient faire les personnes suivantes au sujet des faits visés dans la présente requête :

- Monsieur Thierry A..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004 en ses qualités de président de la société CSF SAS et de directeur exécutif de Champion ;

- Monsieur Philippe B..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004, en sa qualité de directeur général supermarché du groupe Carrefour ;

Monsieur Philippe C..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004, en sa qualité de directeur expansion de l'enseigne Champion ;

- Monsieur Alain D..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004, en sa qualité de directeur de la zone commerciale Ouest-Sud-Ouest de l'enseigne Champion;

- Monsieur Jean-Luc E..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004, en sa qualité de directeur de la zone commerciale Nord-Paris-Est de l'enseigne Champion;

- Monsieur Alain F..., interviewé dans l'article de presse du 20 septembre 2004, en sa qualité de directeur de la zone commerciale Centre-Sud-Est de l'enseigne Champion ;

- toute autre personne exerçant des fonctions de responsable juridique ou de juriste au sein des établissements secondaires des sociétés CSF SAS et Carrefour Administratif France SAS de Levallois-Perret.

CONSIGNER plus particulièrement toute déclaration de ces derniers concernant :

. "l'action organisée vis-à-vis d'Intermarché" par le groupe Carrefour et notamment les conditions de reprise des 38 points de vente listés en annexe de la requête,

. l'identité des 3 points de vente du réseau Intermarché qui doivent, selon Monsieur Thierry A..., passer sous l'enseigne Champion avant la fin de l'année 2004, les conditions de leur reprise, et notamment la date de début des pourparlers, leur état d'avancement, l'existence de tous projets de contrats et de contrats portant sur le changement d'enseigne et/ou la cession des titres de ces 3 sociétés d'exploitation en cause, et de toute convention de séquestre s'y rapportant.

4. Au cas où il serait indiqué à l'huissier que les documents requis ne sont pas disponibles dans les locaux précités, l'AUTORISER à se rendre dans l'établissement situé dans le ressort de sa compétence où ils se trouvent et/ou à demander aux sociétés Carrefour Administratif France SAS et CSF SAS de les lui transmettre.

5. DRESSER procès-verbal des opérations dans un délai de trente (30) jours à compter de la présente ordonnance et y annexer une photocopie de tout document remis.

Considérant que la demande formée sur le fondement de l'article 145 du Nouveau code de procédure civile est recevable dès lors qu'elle a été déposée avant toute instance au fond ; que l'introduction d'une instance au fond, ultérieurement, n'a pas d'influence sur la saisine de la juridiction ; qu'il convient dès lors de statuer sur la demande de la SA ITME, nonobstant l'existence de l'instance au fond ;

Considérant que la SA ITME dispose de droits de préemption et de préférence lorsque l'un des adhérents de son réseau envisage de changer d'enseigne ;

Considérant que constitue un motif légitime de demander une mesure d'instruction avant tout procès, le désir de la SA ITME d'être éclairée sur les procédés qui ont permis à de nombreux magasins de changer d'enseigne, sans qu'elle soit mise en mesure d'exercer ses droits de préemption et de préférence ;

Considérant que la mission de l'huissier a plus de chance de succès si elle est exécutée lorsque la partie adverse n'en est pas avertie, s'agissant de la remise de documents et de l'audition de plusieurs personnes pouvant se concerter ; que le recours à la procédure non contradictoire de l'ordonnance sur requête était donc justifié, étant observé que la condition d'urgence n'est pas exigée en la matière ;

Considérant que l'huissier a reçu mission de se faire remettre des documents, et d'entendre des personnes dénommées ; qu'il n'avait aucun pouvoir de contrainte ni de perquisition, que l'objet des documents et des auditions étaient limité à des opérations figurant sur un liste ; qu'une telle mesure est légalement admissible ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance sur requête rendue le 20 octobre 2004 était justifiée, et que l'ordonnance déférée qui l'a rétractée doit être infirmée ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance rendue le 18 novembre 2004,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande de rétractation de l'ordonnance rendue le 20 octobre 2004,

Rejette les demandes que les parties forment sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Condamne in solidum la SAS C.F.S. et la SAS C.A.S. à payer les dépens exposés par la SA ITME devant toutes les juridictions qui ont connu de la présente instance et accorde à la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD, titulaire d'un office d'avoué, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

Signé par Monsieur Jean BESSE, président et par Monsieur Jean-François MONASSIER, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0342
Numéro d'arrêt : 554
Date de la décision : 08/11/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de Commerce de Nanterre, 18 novembre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2007-11-08;554 ?
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