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25/10/2007 | FRANCE | N°318

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0012, 25 octobre 2007, 318


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

12ème chambre section 2

D.C./P.G.

ARRET No Code nac : 59B

contradictoire

DU 25 OCTOBRE 2007

R.G. No 06/05242

AFFAIRE :

Société BANNEX LIMITED CO LTD

C/

S.A. FORTIS BANQUE FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mai 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

No Chambre : 7ème

No Section :

No RG : 2006F0769

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

SCP BOITEAU PEDROLETTI>
SCP DEBRAY-CHEMIN E.D.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affair...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

12ème chambre section 2

D.C./P.G.

ARRET No Code nac : 59B

contradictoire

DU 25 OCTOBRE 2007

R.G. No 06/05242

AFFAIRE :

Société BANNEX LIMITED CO LTD

C/

S.A. FORTIS BANQUE FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mai 2006 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

No Chambre : 7ème

No Section :

No RG : 2006F0769

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

SCP BOITEAU PEDROLETTI

SCP DEBRAY-CHEMIN E.D.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société BANNEX LIMITED CO LTD ayant son siège 3104-07, 31 St Floor Central Plazza 18 Harbour Road, HONG KONG, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

représentée par la SCP BOITEAU PEDROLETTI, avoués - No du dossier 017395

Rep/assistant : Me Géraldine MEDIONI de la SCP THOMAS, HERBECQ et associés, avocats au barreau de PARIS (P.318).

APPELANTE

****************

S.A. FORTIS BANQUE FRANCE ayant son siège 29/30 Quai de Dion Bouton 92800 PUTEAUX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués - No du dossier 06000663

Rep/assistant : Me Maroussia NETTER-ADLER, avocat au barreau de PARIS (R.223).

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Septembre 2007 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis COUPIN, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Françoise LAPORTE, président,

Monsieur Denis COUPIN, conseiller, (rédacteur)

Monsieur François DUCLAUD, Conseiller,

Greffier en chef, lors des débats : Madame Marie SAUVADET,

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par un crédit documentaire en date du 07 juillet 2005, la société FORTIS BANQUE FRANCE, ci-après désignée FORTIS, s'est engagée auprès de la société DELCAP à payer à la société BANNEX LIMITED CO la somme de 331.992 dollars pour une opération de commerce international d'importation.

Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société DELCAP, par un jugement du 05 septembre 2005.

Le 05 octobre suivant, la banque HSBC à Hong Kong a accusé réception des documents, remis par la société BANNEX LIMITED, requis par le crédit documentaire pour un montant de 331.586,90 euros, qu'elle a transmis à la société FORTIS.

Cette dernière, en dépit d'une confirmation de la société DELCAP, a refusé de régler les sommes demandées au motif d'une non-conformité stricte des documents.

La société BANNEX LIMITED a assigné la société FORTIS devant le tribunal de commerce de Nanterre en paiement de la somme de 331.586,90 euros avec intérêts de droit, 30.000 euros de dommages et intérêts et 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement du 24 mai 2006, cette juridiction a retenu qu'en dépit de la confirmation du donneur d'ordre, DELCAP, les erreurs constatées sur les documents transmis autorisaient la société FORTIS à se dégager de son obligation de payer. Elle a débouté la société BANNEX LIMITED de ses demandes, la condamnant à payer à la banque 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'en tous dépens.

La société BANNEX LIMITED, qui a interjeté appel de cette décision, rappelle les pratiques bancaires actuelles relativement au contrôle formel de la conformité des documents.

Elle discute la pertinence des prétendues irrégularités relevées par la société FORTIS quant aux termes portés sur le connaissement et quant à l'erreur de désignation du port d'embarquement.

Elle relève que la société FORTIS n'a pas cherché à consulter son donneur d'ordre et a persisté, après l'intervention de ce dernier, à refuser le règlement en dépit des instructions de DELCAP.

Elle explique que le réel motif de ce refus est la procédure de redressement judiciaire de la société DELCAP et considère que cette circonstance n'autorisait pas la banque à révoquer le crédit qui constitue un engagement ferme et autonome.

Elle observe que la société FORTIS a produit au passif du redressement judiciaire pour une créance correspondant au crédit documentaire qu'elle refuse d'honorer.

Elle demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement, de condamner la société FORTIS à lui payer la somme de 275.245,11 euros augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 30 décembre 2005, date de la mise en demeure, et capitalisés, celle de 50.000 euros de dommages et intérêts pour mauvaise foi et résistance abusive, ainsi que 15.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société FORTIS réplique que, comme l'a retenu le tribunal, les erreurs affectant les documents, dont elle dénie le prétendu caractère minime, lui permettaient de refuser le paiement.

Rappelant les règles qui régissent les opérations de crédits documentaires et relevant la non-conformité des documents, qui lui étaient présentés, à la lettre de crédit, elle considère s'être strictement conformée à la pratique bancaire. Elle ajoute qu'elle n'avait aucune obligation de consulter son donneur d'ordre.

Elle ne discute pas le caractère autonome de l'engagement résultant d'un crédit documentaire et dénie avoir jamais excipé de l'ouverture de la procédure collective de la société DELCAP pour justifier son refus de payer.

Elle conclut à la confirmation du jugement et au débouté de la société BANNEX LIMITED de l'ensemble de ses demandes. Elle réclame 4.000 euros pour ses frais irrépétibles.

La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 juin 2007.

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que le bénéficiaire d'un crédit documentaire irrévocable a le droit d'en recevoir le montant dès lors qu'il présente à la banque chargée de le réaliser, dans les conditions définies dans la lettre de crédit, des documents apparemment conformes aux énonciations du crédit ;

Considérant que lorsqu'il constate une non-conformité, le banquier peut rejeter les documents ; que ce rejet empêche toute réalisation du crédit à charge pour la banque de notifier au bénéficiaire ce refus et d'indiquer les irrégularités qui le motivent ;

Considérant, en l'espèce, qu'à la réception des documents adressés par la banque HSBC à Hong Kong, le 14 octobre 2005, pour des montants réclamés de 69.686,40 $ US et de 261.900,50 $ US, la société FORTIS a constaté que sur l'un d'entre eux le port de HONG KONG était mentionné comme lieu d'embarquement à la place de celui de SHENZHEN et que sur les deux avait été portée la mention "CONSIGNEE FORTIS BANQUE" au lieu de "TO THE ORDER OF FORTIS BANQUE" ;

Considérant que, par telex du 19 octobre 2005, la société FORTIS a avisé son correspondant de son refus en en précisant les raisons ;

Considérant que le contrôle de la conformité des documents à la lettre de crédit est une vérification formelle qui n'inclut pas l'appréciation de l'importance ou de la gravité des anomalies relevées et des conséquences pour les intérêts du donneur d'ordre ;

Considérant qu'en l'espèce, le port de HONG KONG n'est, à l'évidence, pas celui de SHENZHEN ; que les parties s'accordent à traduire le terme CONSIGNEE en celui de destinataire qui a un sens différent de celui de "A L'ordre de" ainsi que la société FORTIS en justifie par les pratiques bancaires internationales standard approuvées par la Chambre de Commerce Internationale ; que cet organisme confirme que lorsqu'un crédit prévoit que les marchandises sont à consigner "à l'ordre" d'une partie nommément indiquée, le connaissement ne doit pas les indiquer comme directement consignées à cette partie ;

Considérant ainsi que, constatant la non-conformité formelle des documents qui lui étaient présentés aux stipulations de la lettre de crédit, le refus de la société FORTIS de payer les sommes réclamées s'avère parfaitement justifié par les règles applicables et les usages des opérations de financement du commerce international ;

Considérant que la société FORTIS n'était pas tenue de consulter son donneur d'ordre, la société DELCAP, avant de procéder au rejet des documents, lequel doit intervenir dans un délai maximum de sept jours ; qu'elle n'était pas davantage contrainte d'accepter les documents et de réaliser le crédit sous réserve de régularisation ;

Considérant que la société BANNEX ne saurait reprocher à la société FORTIS d'avoir persisté dans son refus en dépit des instructions formelles de la société DELCAP dès lors que celles-ci ont été formulées auprès de la banque par une lettre du 25 octobre 2005, au delà du délai de sept jours imparti à cette dernière pour décider de refuser les documents ;

Considérant que les considérations et arguments développés sur l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société DELCAP sont sans portée au regard du caractère autonome, reconnu par les deux parties, de l'engagement de crédit documentaire ;

Considérant, à cet égard, que les premiers juges ne pouvaient motiver leur décision en retenant que la banque avait légitimement estimé excessif son risque de crédit en raison de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

Considérant ainsi que le jugement doit recevoir confirmation par substitution partielle de motifs ;

Considérant que la société BANNEX, qui échoue dans son recours, ne démontre pas le caractère abusif de la résistance de la société FORTIS, ni ne justifie du préjudice qu'elle allègue ; que sa demande en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société FORTIS la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que la société BANNEX sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer des sommes sur le fondement du même texte à l'appelante qui succombe et qui doit, donc, être condamnée aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme par substitution partielle de motifs le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Déboute la société BANNEX LIMITED CO LTD de sa demande en paiement de dommages et intérêts,

Condamne la société BANNEX LIMITED CO LTD à payer à la SA FORTIS BANQUE FRANCE la somme complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application du même texte au bénéfice de la société BANNEX LIMITED CO LTD,

Condamne cette dernière aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP DEBRAY CHEMIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, président et par Madame Marie-Thérèse GENISSEL, greffier, présent lors du prononcé

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0012
Numéro d'arrêt : 318
Date de la décision : 25/10/2007

Analyses

BANQUE - Crédit documentaire - Obligations du banquier

En application des règles et usages du commerce international, la banque, chargée par une société d'effectuer un paiement à une autre société, est fondée à le refuser dès lors qu'elle constate la non conformité formelle des documents qui lui sont présentés pour une opération d'importation avec les énonciations du crédit documentaire, concernant en l'espèce la désignation du port d'embarquement et l'indication du destinataire, ce en dépit de la confirmation trop tardive du donneur d'ordre.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Nanterre


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2007-10-25;318 ?
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