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13/09/2007 | FRANCE | N°02/9473

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13 septembre 2007, 02/9473


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES




Code nac : 63A


3ème chambre


ARRET No


CONTRADICTOIRE


DU 13 SEPTEMBRE 2007


R.G. No 06 / 05885






AFFAIRE :






Véronique X...

...
C /
SA UCB PHARMA
...






Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juin 2006 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 2
No RG : 02 / 9473








Expéditions exécutoires
Expéditions
Cop

ies
délivrées le :
à :


-SCP TUSET CHOUTEAU
-SCP KEIME GUTTIN JARRY
-SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIERREPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LE TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrê...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 63A

3ème chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 13 SEPTEMBRE 2007

R.G. No 06 / 05885

AFFAIRE :

Véronique X...

...
C /
SA UCB PHARMA
...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juin 2006 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
No Chambre : 2
No RG : 02 / 9473

Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :

-SCP TUSET CHOUTEAU
-SCP KEIME GUTTIN JARRY
-SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIERREPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Véronique Odile B... épouse X...

...

06250 MOUGINS

représentée par la SCP TUSET-CHOUTEAU, avoués-No du dossier 20060362
plaidant par Me VERDIER, avocat au barreau d'ORLEANS

APPELANTE et INTIMEE

****************

1 / SA UCB PHARMA
21 rue de Neuilly
92000 NANTERRE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués-No du dossier 06000738
plaidant par Me RAVIT du cabinet BOPS, avocat au barreau de PARIS (P. 555)
plaidant par Me SENECHAL du cabinet BOPS, avocat au barreau de PARIS (P. 555)

INTIMEE et APPELANTE

2 / Monsieur Serge X...

...

06250 MOUGINS

INTIME

3 / Madame Monique B...

4 / Monsieur Michel B...

...

17180 PERIGNY

INTIMES

représentés par la SCP TUSET-CHOUTEAU, avoués-No du dossier 20060362
plaidant par Me VERDIER, avocat au barreau d'ORLEANS

6 / CPAM DES YVELINES
92 avenue de Paris
BP 204
78014 VERSAILLES CEDEX
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués-No du dossier 20061222

INTIMEE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Juin 2007 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Mme BOURQUARD, président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Joëlle BOURQUARD, Président,
Monsieur Marc REGIMBEAU, Conseiller,
Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE,

FAITS ET PROCEDURE

Se prévalant de ce que l'adénocarcinome à cellules claires, diagnostiqué en 1981, et dont elle a souffert, à l'âge de 16 ans, était en relation directe avec la prise de la prise de distilbène par sa mère au cours de la grossesse dont elle est issue, Mme Véronique X... a, par acte du 8 juillet 2002, assigné la SA UCB PHARMA devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin de la voir déclarée responsable de son préjudice et tenue à l'indemniser.

Par ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 28 mars 2003, une expertise, confiée à un collège d'experts, a été ordonnée avant dire droit ; les Docteurs RODAT, BERSENEFF et GIRARD, experts commis ont déposé leur rapport le 22 mars 2005.

Par jugement rendu le 23 juin 2006, le tribunal a :

-rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription,

-déclaré la SA UCB PHARMA responsable sur le fondement des articles 1165,1382 et 1383 du code civil de l'adénocarcinome à cellules claires dont est atteinte Mme Véronique B... épouse X...,

-condamné la SA UCB PHARMA à payer à :

. La CPAM des Yvelines, par priorité sur le préjudice soumis à recours, la somme de 4. 268,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2006 et la somme de 700 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

. Mme Véronique B... épouse X..., la somme de 101. 000 euros au titre de son préjudice soumis à recours complémentaire, la somme de 49. 000 euros au titre de son préjudice personnel et celle de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
. Mme Monique B..., la somme de 8. 000 euros pour préjudice moral,

.M. Michel B..., la somme de 5. 000 euros au titre de son préjudice moral,

.M. Serge X..., la somme de 8. 000 euros au titre de son préjudice moral,

. Ensemble à, Mme Monique B..., M. Michel B..., M. Serge X..., la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

-débouté les parties du surplus de leurs demandes,

-prononcé l'exécution provisoire,

-condamné la SA UCB PHARMA aux dépens qui comprendraient les frais d'expertise.

Appelants de cette décision, Mme Véronique B... épouse X..., Mme Monique B..., M. Michel B..., M. Serge X..., aux termes de leurs dernières écritures déposées le 3 avril 2007, concluent, au visa des articles 1165,1382,1383 et 1353 du code civil, à sa confirmation en ce qu'il a retenu la responsabilité du laboratoire SA UCB PHARMA et fait droit à leurs demandes au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à son infirmation pour le surplus et ils demandent de :

-vu l'article 771 du nouveau code de procédure civile,

-déclarer le laboratoire SA UCB PHARMA mal fondé à soulever une exception de prescription de l'action,

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA au paiement des sommes suivantes en réparation de l'entier préjudice de Mme Véronique X...,

Frais médicaux et assimilés................ 4. 268,40 euros
ITT..................................................... 4. 000,00 euros
ITT troubles de la vie courante.......... 4. 871,52 euros
IPP incidence professionnelle............ 139. 500 euros

TOTAL des préjudices soumis à recours : 148. 371,52 euros

Préjudice de la douleur...................... 50. 000,00 euros
Préjudice esthétique........................... 5. 500,00 euros
Préjudice d'agrément.......................... 15. 000,00 euros
Préjudice sexuel................................. 45. 000,00 euros
Préjudice spécifique............................ 25. 000,00 euros

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA au paiement des sommes suivantes en réparation de l'entier préjudice de Mme Monique B..., mère :

préjudice moral propre........................ 4. 000,00 euros
préjudice d'affection par ricochet......... 6. 000,00 euros

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA au paiement de la somme de 6. 000 euros en réparation de l'entier préjudice de M. Michel B...

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA au paiement de la somme de 8. 000 euros en réparation de l'entier préjudice de M. Serge X...,

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA au paiement de la somme de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise.

Aux termes de ses écritures déposées le 04 avril 2007, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la société UCB PHARMA SA conclut :

-à titre principal, à son infirmation en ce qu'il a rejeté l'exception de prescription et demande de,

-vu les articles 38 et 46 de la loi du 5 juillet 1985,

-dire et juger que la prescription de l'action de Mme Véronique X... était en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985 et qu'il n'y a eu aucun acte suspensif ou interruptif de prescription avant le 1er janvier 1996,

-subsidiairement, que l'article 2270-1 est inapplicable aux prescriptions en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985 et que le point de départ de la prescription des actions en cours au moment de l'entrée en vigueur de cette loi ne saurait être reporté à la date de la consolidation,

-déclarer l'action introduite le 8 juillet 2002 irrecevable comme prescrite,

-déclarer l'intervention volontaire de M. et Mme B... du 18 avril 2006 irrecevable comme prescrite,

-à titre subsidiaire, fixer ainsi que suit le montant des préjudices,

-à titre subsidiaire,

A-Préjudices de Mme Véronique X...

. ITT

-dire et juger que l'indemnité allouée au titre de l'ITT ne saurait excéder 2. 000 euros,

-en toute hypothèse, déduire toute la créance que la CPAM des Yvelines pourrait déclarer au titre des indemnités journalières de toute indemnité qui pourrait être allouée à Mme Véronique X... au titre de l'ITT,

. IPP

-vu les montants alloués par la jurisprudence pour un taux d'IPP et un âge, au jour de la consolidation, correspondant à celui de l'appelante,

-dire et juger que la preuve d'un retentissement professionnel n'est pas rapportée,

-dire et juger que la valeur du point d'IPP ne saurait excéder 2. 200 euros,

-dire et juger en conséquence que l'indemnité allouée à Mme Véronique X... au titre de l'IPP ne saurait excéder 99. 000 euros,

-en toute hypothèse, déduire toute la créance de la CPAM des Yvelines d'un montant de 4. 268,40 euros au titre des frais médicaux et d'hospitalisation de toute indemnité qui pourrait être allouée à Mme Véronique X...,

B. Préjudices personnels

-vu l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985,

-dire et juger que toute analogie avec le préjudice spécifique de contamination est mal fondée,

-en conséquence, rejeter toute demande au titre d'un prétendu préjudice spécifique et dire et juger que l'évaluation des préjudices personnels de Mme Véronique X... devra se faire au regard des chefs de préjudice définis à l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985,

. Pretium doloris

-dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice, évalué à 5 / 7, ne saurait excéder 20. 000 euros,

. Préjudice esthétique

-dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice, évalué à 3 / 7, ne saurait excéder 4. 000 euros,

. Préjudice d'agrément

-dire et juger qu'il n'y a pas lieu de retenir une notion de préjudice fonctionnel d'agrément,

-en toute hypothèse, dire et juger que le préjudice allégué au titre du préjudice fonctionnel d'agrément est déjà indemnisé au titre de l'IPP,

-en conséquence, débouter Mme Véronique X... de sa demande au titre de ce chef de préjudice,

. Préjudice sexuel

-dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 25. 000 euros ;

B. Préjudice de M. et Mme B...

1 / La demande de Mme Monique B... au titre d'un préjudice moral

-dire et juger que les préjudices invoqués par Mme Monique B... constituent en réalité un seul et même préjudice moral,

-en conséquence, dire et juger que l'indemnité allouée à Mme Monique B... au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 4. 000 euros ;

2 / La demande de M. Michel B... au titre d'un préjudice moral

-dire et juger que l'indemnité allouée à M. Michel B... au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 2. 000 euros ;

C. Préjudice de M. Serge X...

-dire et juger que l'indemnité allouée à M. Serge X... au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 2. 000 euros,

-débouter M. Serge X... de toutes autres demandes,

-ramener à de plus justes proportions l'article 700 du nouveau code de procédure civile sollicité par les appelants.

La CPAM des Yvelines demande, aux termes de conclusions déposées le 28 décembre 2006, de :

-constater que sa créance s'élève à la somme de 4. 268,40 euros au titre de ses frais futurs,

-vu l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale,

-dire qu'elle a droit au remboursement prioritaire de sa créance sur l'indemnité mise à la charge du tiers réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime,

-dire et juger que cette somme doit porter intérêts de droit à compter de la première demande pour les prestations servies antérieurement à celle-ci et à partir de leur règlement pour les débours effectués postérieurement,

-en tant que de besoin, condamner le laboratoire SA UCB PHARMA à lui payer la somme globale de 4. 268,40 euros correspondant à ses frais futurs,
-lui donner acte de ses réserves pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement,

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA à lui payer 1. 200 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

-condamner le laboratoire SA UCB PHARMA à lui payer 910 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement conformément à l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale tel qu'il résulte de sa rédaction issue de l'ordonnance no 96-51 du 24 janvier 1996, après revalorisation par la loi du 19 décembre 2005.

MOTIFS ET DECISION

-Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande

Considérant que les appelants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article 771 du nouveau code de procédure civile selon lesquelles le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure et sur les incidents mettant fin à l'instance et les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement pour estimer la SA UCB PHARMA mal fondée à soulever une exception de prescription de leur action ; qu'en effet, aux termes de l'article 122 du nouveau code de procédure civile, la prescription ne constitue ni une exception de procédure ni un incident mettant fin à l'instance, mais une fin de non recevoir qui peut, conformément à l'article 123 du nouveau code de procédure civile, être proposée en tout état de cause ; que les appelants ne soutiennent ni n'allèguent que la SA UCB PHARMA, qui avait déjà, devant le premier juge, opposé le moyen d'irrecevabilité de la demande tiré de la prescription, se soit abstenue, dans une intention dilatoire de le soulever plus tôt ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2270-1 du code civil (article 38 de la loi no 85-677 du 5 juillet 1985) les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ;

Considérant qu'il résulte tant du rapport d'expertise que de la lettre adressée le 12 mai 1981 par le Docteur PETIT au Docteur DECROIX de la fondation Curie que la relation entre la survenance de l'adénocarcisme à cellules claires et l'exposition au distilbène pendant sa grossesse de la mère de Mme Véronique X... a été mis en évidence dès 1981 ; que Mme B... ne soutient pas qu'elle ignorait cette circonstance ; qu'il convient d'estimer que la mise en évidence de cette relation entre la découverte de la maladie et l'exposition au DES correspond à la manifestation du dommage subi par Mme Véronique X... ;

Qu'il est constant qu'à cette époque, cette dernière, née le 11 mai 1965, était mineure ; que le cours de la prescription n'ayant pas, conformément à l'article 2252 du code civil, couru pendant sa minorité, elle ne s'est trouvée capable d'agir afin de rechercher la responsabilité de la SA UCB PHARMA qu'à compter du 11 mai 1983 ;

Considérant que la prescription alors en cours à la date de l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985 n'a pu se trouver acquise, par application de l'article 46 de cette loi, à l'expiration d'un délai de dix ans à compter du 1er janvier 1986, date de son entrée en vigueur, soit le 1er janvier 1996 dès lors qu'en cas de préjudice corporel, c'est la date de consolidation qui fait courir le délai de

prescription ; qu'en l'espèce, les experts judiciaires ont estimé que « la consolidation pouvait être proposée au jour de l'expertise, c'est-à-dire le 25 juin 2003 », que la demande formée à l'encontre de la SA UCB PHARMA, selon assignation du 8 juillet 2002, n'est donc pas couverte par la prescription ;

Que c'est donc à juste titre que le premier juge a écarté le moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription de la demande ;

Considérant que la SA UCB PHARMA ne conteste pas le principe de sa responsabilité, que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a retenu le principe de la responsabilité de la SA UCB PHARMA sur le fondement des articles 1165,1382 et 1383 du code civil ;

Considérant compte tenu des conclusions du rapport établi par le collège d'experts qui repose sur un examen complet de Mme Véronique X..., des circonstances de la survenance de sa maladie, des pièces justificatives produites au dossier, de l'âge de la victime, née le 11 mai 1965, au jour de la consolidation fixée par les expert au 25 juin 2003, de sa situation scolaire et professionnelle, la cour possède les éléments lui permettant d'apprécier le montant de l'indemnisation des préjudices subi par elle ainsi que suit :

-Prestations pour frais médicaux futurs (consultations et pharmacie) de la CPAM des Yvelines : 4. 268,40 euros

-Incapacité temporaire totale :

Considérant que les experts ont fixé la période d'ITT du 3 mai 1981 à la fin août 1981, que c'est à juste titre que le premier juge a fixé le montant de l'indemnisation de ce poste de préjudice à 2. 000 euros ;

-Incapacité permanente partielle :

Considérant que les premiers juges en ont fixé le montant de la réparation à 99. 000 euros ; que l'appelante sollicite la somme de 139. 500 euros en se prévalant de la perte d'une chance constitutive d'un préjudice professionnel ;

Considérant les experts ont fixé le taux du déficit fonctionnel permanent subi par Mme Véronique X... incapacité à 45 %, qu'ils ont pris en compte pour ce faire, la stérilité définitive, la ménopause très précoce et la difficulté des rapports sexuels vaginaux ; qu'ils n'ont pas retenu l'incidence d'un préjudice professionnel ;

Que l'appelante ne justifie pas que son parcours scolaire à la date de la survenance de sa maladie lui aurait permis d'envisager une trajectoire professionnelle à laquelle elle aurait renoncé, que la psychothérapie qu'elle démontre avoir subi fait partie des éléments pris en compte au titre de la réparation de « la réduction de son potentiel physique et psychosensoriel » ; que dans ces conditions, ce poste de préjudice a exactement été fixé à la somme 99. 000 euros ;

-Préjudice de la douleur :

Considérant que les premiers juges ont fixé à la somme de 20. 000 euros la réparation de ce poste de préjudice en tenant compte de l'incidence des difficultés sexuelles ressenties par Mme Véronique X..., que cette dernière sollicite l'allocation d'une somme de 50. 000 euros, que l'intimée conclut à la confirmation du jugement ;

Considérant que les experts ont quantifié les souffrances physiques, sexuelles, psychiques ou morales endurées du fait de la pathologie subie à 5,5 sur une échelle de 1 à 7 en précisant que les souffrances de Mme Véronique X... tenaient d'abord à l'historique de cancer à un très jeune âge qui s'est soldé par des interventions médicochirurgicales extrêmement traumatiques (ménopause précoce dès l'âge de 16 ans, stérilité définitive) ;

Qu'il convient en considération de l'ensemble de ces éléments d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 40. 000 euros ;

-Préjudice esthétique :

Considérant que les premiers juges ont fixé à la somme de 4. 000 euros la réparation de ce poste de préjudice, que l'appelante souhaite le voir fixer à 5. 500 euros, que l'intimée sollicite la confirmation du jugement ;

Considérant que les experts ont chiffré le préjudice esthétique à 3 / 7 le décrivant comme lié principalement aux cicatrices de la colpohystérectomie et aux conséquences connues (cutanées notamment) d'une ménopause précoce ; qu'ils ont relevé l'existence d'une cicatrice transversale de 17 cm correspondant à la colpohystérectomie élargie avec lymphadénectomie et une cicatrice sous ombilicale de 1 cm de coelioscopie ;

Qu'il convient en considération de ces éléments de fixer à la somme de 5. 500 euros l'indemnisation de ce poste de préjudice ;

-préjudice d'agrément :

Considérant que les premiers juges ont fixé à 5. 000 euros le montant de la réparation de ce préjudice, que l'appelante souhaite le voir porter à 15. 000 euros, que l'intimée conclut au débouté de la demande ;

Considérant que les experts ont relevé que Mme Véronique X... n'alléguait pas de l'impossibilité de se livrer à des activités spécifiques de loisirs et n'ont pas retenu l'existence d'un préjudice d'agrément ;

Considérant que le préjudice d'agrément s'entend non seulement de l'impossibilité de se livrer à une activité ludique ou sportive mais encore de la privation des agréments normaux de l'existence ; qu'il est démontré que la pathologie subie par Mme Véronique X... a incontestablement entraîné une perte de sa qualité de vie constitutive d'un préjudice d'agrément qui doit être indemnisé par l'allocation d'une somme de 10. 000 euros ;

-préjudice sexuel :

Considérant que l'appelante réclame la somme de 45. 000 euros en réparation de ce poste de préjudice, que l'intimée offre de l'indemniser à hauteur de 25. 000 euros ;

Considérant que les experts ont conclu en l'existence d'un préjudice sexuel spécifique ; que celui-ci résulte, en l'absence de séquelle locale vaginale du traitement chirurgical et radiothérapique, dans la difficulté d'avoir des rapports qui ne sont pas complètement satisfaisants du fait de la sécheresse vaginale et du trouble psychologique engendré par la maladie et ses traitements ; que ce poste de préjudice doit être indemnisé à hauteur de la somme de 25. 000 euros ;

-préjudice spécifique :

Considérant que les premiers juges ont alloué à Mme Véronique X... la somme de 20. 000 euros en réparation de ce poste de préjudice, que l'appelante demande de voir porter le montant de son indemnisation à 25. 000 euros, que l'intimée conclut au rejet de toute demande d'indemnisation à ce titre ;

Mais considérant que les séquelles subies par Mme Véronique X... à la suite de son exposition in utero au DES ne justifie pas le recours à la notion de préjudice spécifique ;

Que le préjudice spécifique de contamination se définit comme le préjudice résultant pour une victime de la connaissance de sa contamination par un agent exogène, qu'il soit biologique, physique ou chimique, qui comporte le risque d'apparition à plus ou moins brève échéance d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ; qu'il regroupe l'ensemble des préjudices d'ordre physiologique, psychologique et moral et permet d'indemniser l'entier préjudice des victimes qui sont menacées par une maladie grave mais dont les effets se développeront au terme d'une période dont la durée, qui peut être très longue, est au départ indéterminée ; que ce préjudice, retenu pour les victimes transfusées contaminées par le virus du SIDA, inclut dès la phase de séropositivité, tous les troubles psychiques subis du fait de la contamination (réduction de l'espérance de vie, incertitude quant à l'avenir, crainte d'éventuelles souffrances physiques et morales, isolement, perturbations de la vie familiale et sociale, préjudice sexuel et de procréation), qu'il prend en compte les différents préjudices personnels apparus ou susceptibles d'apparaître comme les souffrances endurées, le préjudice esthétique et le préjudice d'agrément ;

Que son indemnisation vise à réparer un dommage spécifique tenant à la réduction de l'espérance de vie avec les angoisses liées à une mort quasiment programmée, aux perturbations affectives, familiales et sociales dans les conditions d'existence de la victime ainsi que le caractère essentiellement évolutif du dommage qui ne peut être indemnisé selon l'évaluation de droit commun qui suppose un dommage avéré et consolidé ;

Considérant que la pathologie dont est atteinte Mme Véronique X... est révélée, qu'elle a été soignée, que le processus tumoral a été considéré comme stabilisé par les experts qui ont déclaré son état consolidé même si le risque de récurrence du processus tumoral ne peut être définitivement exclu ;

Qu'il convient d'ajouter que dès lors que tous les enfants exposés in utero au DES n'ont pas été atteints de maladie ou de malformations, la notion de préjudice spécifique résultant du seul fait de l'exposition au DES ne saurait être consacrée ;

Que la demande formée par Mme Véronique X... à ce titre doit donc être rejetée ;

-Préjudice de la mère de M. et Mme B..., père et mère de l'appelante

Considérant que Mme Monique B... sollicite l'indemnisation, à hauteur de 4. 000 euros, de son préjudice propre et personnel tenant à la souffrance morale qu'elle a subi du fait de sa culpabilité ainsi que la réparation, à hauteur de 6. 000 euros, d'un préjudice moral d'affection né de la confrontation à la maladie dont sa fille s'est trouvée atteinte ;

Qu'il n'est pas contestable que Mme Monique B... a subi un préjudice personnel propre du fait de la souffrance moral qu'elle a endurée en étant confrontée à la maladie de sa fille, qu'elle ne saurait toutefois prétendre à être indemnisée à double titre dès lors que la culpabilité par elle invoquée fait partie des éléments de la souffrance endurée justifiant son droit à réparation en tant que victime par ricochet ; qu'il convient de lui allouer la somme de 6. 000 euros en réparation de son préjudice ;

Considérant que le préjudice moral par ricochet subi par le père de Mme Véronique X... doit être évalué à hauteur de la somme de 4. 000 euros ;

-Préjudice de M. Serge X..., époux de Mme Véronique ZAMY

Considérant qu'il n'est pas contesté ni contestable que M. Serge X... a subi un préjudice du fait de la stérilité de son épouse ; qu'il convient de lui allouer la somme de 2. 000 euros en réparation de son préjudice ;

Considérant que l'équité commande d'allouer une indemnité complémentaire aux appelants en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que la SA UCB PHARMA tenue à indemnisation doit supporter les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 23 juin 2006 par le tribunal de grande instance de Nanterre sur l'évaluation des préjudices subis par les consorts B...
X...,

Statuant à nouveau,
Fixe ainsi que suit l'indemnisation du préjudice subi par Mme Véronique B... épouse X... :

-Prestations pour frais médicaux futurs : 4. 268,40 euros dont à déduire la créance de la CPAM des Yvelines (4. 268,40 euros) solde : 0

-Incapacité temporaire totale : 2. 000 euros

-Incapacité permanente partielle : 99. 000 euros

-Préjudice de la douleur : 40. 000 euros

-Préjudice esthétique : 5. 500 euros

-Préjudice d'agrément : 10. 000 euros

-préjudice sexuel : 25. 000 euros

-Total du solde revenant à Mme B... : 181. 500 euros

Fixe à 6. 000 euros le préjudice moral subi par Mme Monique B..., mère de Véronique B... et à 4. 000 euros celui subi par M. Michel B..., père de celle-ci,

Fixe à 2. 000 euros le préjudice subi par M. Serge X..., époux de Mme ZAMY,

Condamne la SA UCB PHARMA à payer à :

-Mme Véronique B... épouse X... : la somme de 181. 500 euros à titre de dommages et intérêts,

-Mme Monique B..., la somme de 6. 000 euros,

-M. Michel B..., la somme de 4. 000 euros,

-M. Serge X..., celle de 2. 000 euros.

La CPAM des Yvelines la somme de 4. 268,40 euros correspondant à la capitalisation de ses frais futurs ainsi que celle de 800 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Confirme pour le surplus le jugement entrepris,

Rejette toutes autres prétentions des parties,

Condamne la SA UCB PHARMA à payer à Mme Véronique B... épouse X..., M. Serge X..., M. Michel B... et Mme Monique B..., son épouse, une indemnité complémentaire de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne la SA UCB PHARMA aux entiers dépens et autorise la SCP TUSET CHOUTEAU, avoués associés, à les recouvrer comme il est prescrit à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

-signé par Mme Joëlle BOURQUARD, Président et par Madame THEODOSE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 02/9473
Date de la décision : 13/09/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nanterre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-09-13;02.9473 ?
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