COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
16ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 21 JUIN 2007
R.G. No 05/09377
AFFAIRE :
Melle Héloise Florence Y... Représentée par sa mère Mme Z... veuve Y...
et autres....
C/
Société EDF Etablissement Industriel et Commercial
et autres.....
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2005 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
No Chambre : 2ème
No RG : 04/4102
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me RICARD
SCP BOMMART
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE SEPT, après prorogation,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu publiquement l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame Catherine Hélène Sabine Z... veuve Y... agissant en son nom personnel et ès qualité de représentant légal de son enfant mineur Héloïse
née le 20 Novembre 1952 à STRASBOURG (67000) de nationalité FRANCAISE
...
Mademoiselle Héloise Florence Y... , représentée par sa mère Madame Z... veuve Y..., es qualités d'administratrice légale, sous contrôle judiciaire,
née le 03 Juin 1991 à POISSY (78300), de nationalité FRANCAISE
...
Mademoiselle Aurélia Clémence Y...
née le 21 Février 1987 à CRETEIL (94000), de nationalité française
...
Monsieur Victor Cyril Y...
né le 21 Février 1987 à CRETEIL (94), de nationalité FRANCAISE
...
Monsieur Alexandre Eric Y...
né le 18 Juillet 1982 à SCHILTIGHEIM (67300) de nationalité FRANCAISE
...
Monsieur Maxime Xavier Y...
né le 02 Janvier 1984 à SURESNES (92150) de nationalité FRANCAISE
...
représentés par Me Claire RICARD - No du dossier 250838
assistés de Me Isabelle DURAND (avocat au barreau de PARIS)
APPELANTS
****************
Société EDF Etablissement Industriel et Commercial
1 Place des Degrés
Tour Voltaire
92059 PARIS LA DEFENSE
Société GDF Etablissement Industriel et Commercial
...
75311 PARIS
ETS EDF ELECTRICITE DE FRANCE
...
75311 PARIS
représentés par la SCP BOMMART MINAULT - No du dossier 00032676
assistés de Me Francis MARTIN (avocat au barreau de PARIS)
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Mars 2007, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marion BRYLINSKI, Conseiller, et Monsieur Philippe BOIFFIN, Conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Simone GABORIAU, Présidente,
Madame Marion BRYLINSKI, Conseiller,
Monsieur Philippe BOIFFIN, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,
*****************
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant offre acceptée le 11 Mai 1998, EDF GDF ont consenti à Monsieur Patrick Y... employé en qualité d'ingénieur par EDF, désigné comme emprunteur, un prêt d'un montant de 1 044 000 F remboursable en 15 ans au TEG de 3,69% destiné à l'acquisition du domicile familial à ANDILLY ; Madame Catherine Y... a signé l'acte en qualité de débiteur solidaire. Le couple a engagé une procédure de divorce et, suivant ordonnance de non conciliation en date du 7 Février 2002, Madame Catherine Y... s'est vu attribuer la jouissance du domicile conjugal, Monsieur Patrick Y... ayant trouvé un autre logement dès le début du même mois.
Monsieur Patrick Y... est décédé le 15 juillet 2003, et toutes les échéances du prêt ont été régulièrement payées, par prélèvement sur son salaire, jusqu'au mois de Juillet 2003 inclus.
Se prévalant de plusieurs causes d'exigibilité, EDF GDF ont assigné les Consorts Y... en paiement de sommes au titre du solde de prêt et d'indemnité contractuelle.
Le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE, par jugement rendu le 28 Novembre 2005, a :
- déclaré le Tribunal de grande instance de PONTOISE compétent,
- constaté la résiliation du prêt antérieurement au décès de Monsieur Y...,
- condamne solidairement Madame Catherine Z..., épouse Y..., Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... à payer à EDF-GDF la somme de 113.920,55 € au titre du solde du prêt au 31 juillet 2003 avec intérêts au taux contractuel de 3,69 % à compter du 1er août 2003,
- condamné solidairement Madame Catherine Z..., épouse Y..., Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... à payer à EDF-GDF la somme de 3 417,62 € à titre d'indemnité contractuelle,
- débouté les consorts Y... de leur demande reconventionnelle,
- condamné les consorts Y... au paiement, à EDF GDF, de la somme de 750 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
***
Madame Catherine Z... veuve Y... et ses 5 enfants, Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... ont interjeté appel de ce jugement, et, aux termes de ses écritures en date du 30 Janvier 2007, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens développés, demandent à la Cour de :
- accueillir Madame Catherine Z... veuve Y... et ses 5 enfants, Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... en leur appel et les y déclarer bien fondés,
- réformer en toutes ses dispositions le jugement de la 2ème chambre civile du Tribunal de Grande Instance de Pontoise en date du 28 novembre 2005 et statuant à nouveau,
- débouter les établissements EDF-GDF devenus les SA EDF et GDF de leur demande de résiliation du contrat de prêt en date du 11 mai 1998 ainsi que de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- en conséquence accorder à Madame Catherine Z... veuve Y... et à ses 5 enfants, Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... le bénéfice des dispositions de l'article 11 de l'offre de prêt en date du 11 mai 1998 et juger que les sociétés EDF-GDF doivent leur accorder la remise du capital de l'emprunt restant du, à la date du décès de Monsieur Patrick Y... soit 113 920,55 €, ainsi que des intérêts et indemnités contractuels y afférents,
- condamner solidairement les sociétés EDF et GDF à payer à Madame Catherine Z... veuve Y... et à ses 5 enfants, Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... 6000 € à titre de dommages et intérêts, soit 1000 € à chacun en réparation de leur préjudice moral,
- condamner solidairement les sociétés EDF et GDF, à payer aux appelants 1 200 € à chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et les condamner sous la même solidarité aux entiers dépens.
***
ELECTRICITE DE FRANCE (EDF) et GAZ DE FRANCE (GDF), aux termes de leurs écritures en date du 30 Janvier 2007, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens développés, demandent à la Cour de :
- déclarer Madame Catherine Z... veuve Y..., et Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... recevables mais mal fondés en leur appel, et les débouter de l'ensemble de leurs prétentions,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, au besoin en prononçant la nullité du contrat de prêt pour dol,
- condamner in solidum Madame Catherine Z... veuve Y..., et Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... au paiement de la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
DISCUSSION
Pour prétendre à la résiliation du prêt, EDF GDF se fondent sur l'article 7 du contrat, aux termes duquel "le contrat de prêt est résilié de plein droit, à la date d'effet de la survenance de l'événement, sans mise en demeure préalable et sans qu'il soit nécessaire d'accomplir aucune formalité de quelque nature que ce soit, dans les cas suivants : cessation d'occupation à titre d'habitation principale et continue par l'emprunteur lui même, inexactitude ou falsification des renseignements ou documents fournis par l'emprunteur...".
Le premier juge a fait droit aux prétentions de EDF GDF, retenant que les deux conditions étaient réalisées, les époux Y... ayant déclaré, dans leur demande d'aide ne supporter aucun autre prêt alors qu'ils remboursaient un prêt immobilier se rapportant à une maison à DOZULE, et que Monsieur Patrick Y... avait établi sa résidence principale à COURBEVOIE, ayant quitté le domicile conjugal.
Par arrêt avant dire droit en date du 14 décembre 2006, la Cour a invité les parties à s'expliquer sur la différence, en droit, entre "agent emprunteur" et co-débiteur solidaire , s'agissant de l'épouse du premier, mariée sous le régime de la communauté, de surcroît, et d'un prêt destiné à financer l'acquisition du domicile familial, et sur la possibilité de fonder une clause résolutoire sur des faits antérieurs à la signature du contrat, pouvant toucher au consentement même des parties.
***
La demande d'aide a été établie au nom de Monsieur Patrick Y... qualifié d'emprunteur et de Madame Catherine Y... qualifiée de conjoint de l'emprunteur ; l'offre de prêt a été établie au nom de Monsieur Patrick Y... désigné comme emprunteur, ou "agent emprunteur", et de Madame Catherine Y... désignée comme "débiteur solidaire".
Madame Catherine Y... est "débiteur solidaire" du prêt, qui a été consenti pour financer l'acquisition d'un immeuble destiné à constituer le domicile familial, commune aux deux époux. Bénéficiaire comme son conjoint du prêt, et solidairement tenue avec lui au remboursement de celui-ci, elle ne peut avoir d'autre qualité juridique, quelle que soit sa désignation dans les documents de EDF GDF, de co-emprunteur solidaire, et ce même si dans le contrat de prêt, Monsieur Patrick Y... apparaît comme l'emprunteur déterminant de ce prêt consenti à raison de sa qualité d'agent EDF.
Madame Catherine Y... en cette qualité, comme Monsieur Patrick Y..., a signé la demande d'aide et les informations qu'elle contient, avec la mention "lu et approuvé". Il importe peu que dans le paragraphe de l'offre intitulé "acceptation de l'offre de prêt par", les emplacements réservés au nom des emprunteurs n'aient pas été remplis, dès lors que sur la même page figure, sous la mention "l'offre acceptée vaut offre de prêt" figure clairement la signature de Monsieur Patrick Y... et Madame Catherine Y..., que l'identité des emprunteurs est clairement indiquée en tête du document, et que Monsieur Patrick Y... comme Madame Catherine Y... ont paraphé toutes les pages de ce document.
Dans ces conditions, Madame Catherine Y..., en sa qualité de co-emprunteur solidaire, et dans les mêmes conditions que Monsieur Patrick Y..., est tenue au respect de l'ensemble des clauses de l'offre acceptée valant prêt, qui constitue la loi des parties et comme telle doit être exécutée.
La résiliation du contrat de prêt peut être poursuivie à son encontre, même après le décès de Monsieur Patrick Y....
***
L'article 7 "RESILIATION DU CONTRAT DE PRET - EXIGIBILITE" dispose que le contrat de prêt est résilié de plein droit, à la date d'effet de la survenance de l'événement, sans mise en demeure préalable et sans qu'il soit nécessaire d'accomplir d'autre formalité de quelque nature que ce soit, notamment en cas de cessation d'occupation à titre d'habitation principale et continue par l'emprunteur lui même, indépendamment des cas prévus à l'article 8, l'article 8 visant la mutation géographique.
Aux termes de cette clause, aucune mise en demeure préalable n'est exigée pour la résiliation du prêt, qui prend effet non pas à la date à laquelle elle est notifiée, mais à la date à laquelle survient l'événement qui en est la cause.
"L'emprunteur lui même" est très clairement Monsieur Patrick Y..., du chef duquel le prêt a été accordé ; le simple fait que l'immeuble financé ne soit plus sa résidence effective suffit à constituer une cause de résiliation du contrat de prêt, sans qu'il y ait lieu de tenir compte des circonstances et des causes de ce changement de résidence si légitimes soient elles, dès lors qu'il n'est pas la conséquence d'une mutation.
Il est constant que Monsieur Patrick Y... a transféré sa résidence à compter du 1er Février 2002, et n'est jamais revenu habiter personnellement dans l'immeuble financé grâce au prêt.
Le logement ayant constitué le nouveau domicile de Monsieur Patrick Y... à compter de Février 2002 lui a été donné en location par la société EGMO, agence immobilière d'EDF. Monsieur Patrick Y... a fait usage d'une attestation de location délivrée par cette agence pour qu'il soit procédé à son changement d'adresse sur son bulletin de paie, en l'adressant à son établissement, EDF division production nucléaire.
L'offre de prêt porte en en-tête les indications suivantes "EDF GDF - secrétariat général - Service Immobilier Accession à la Propriété", la gestion du prêt a été assurée par la "Direction de l'immobilier, division accession à la propriété".
Le fait que la société EGMO, gestionnaire de la location consentie à Monsieur Patrick Y..., et la direction de l'immobilier division accession à la propriété, aient leurs bureaux dans la même tour de la Défense n'implique pas une interconnection entre ces deux entités de gestion distinctes.
La preuve n'est pas rapportée de ce que la direction de l'immobilier division accession à la propriété d''EDF GDF ait reçu notification par quelque moyen ou de qui que ce soit, de ce que Monsieur Y... avait transféré son domicile hors de l'immeuble financé grâce au prêt, avant de recevoir la transmission de son entier dossier à la suite de son décès ; dès lors le fait que "EDF GDF" ne se soit pas manifestée avant le 1er Août pour se prévaloir de la condition résolutoire prévue à l'article 7 du prêt ne permet pas d'établir une renonciation par "EDF GDF", qui ne peut se présumer, à se prévaloir, avant le décès de Monsieur Patrick Y..., du bénéfice de la résolution du prêt contractuellement prévue.
Dans ces conditions, en application de l'article 7 du contrat de prêt, qui s'impose aux parties comme au juge, la résiliation du contrat de prêt était acquise au 1er Février 2002, même si postérieurement les échéances du prêt ont été réglées jusqu'au décès de Monsieur Patrick Y..., "EDF GDF" n'ayant pas été en mesure de se prévaloir de la résiliation avant ce denier événement.
Il en résulte d'une part que la totalité du prêt étant devenue exigible avant le décès de Monsieur Patrick Y..., les consorts Y... ne peuvent se prévaloir du bénéfice de la remise du montant du solde de prêt au décès, telle que prévue par l'article 11 de l'offre de prêt acceptée, et que les héritiers de Monsieur Patrick Y..., et Madame Catherine Y... en sa qualité de co-emprunteur solidaire, sont tenus solidairement, en application de l'article 10 de la même offre, au remboursement des sommes dues au titre du solde du prêt.
Pour ces raisons, il convient de confirmer le jugement entrepris, en toutes ses dispositions, sans même qu'il soit utile de se prononcer sur la résiliation du prêt pour inexactitude ou falsification des renseignements ou documents fournis par l'emprunteur, qui telle que la clause est rédigée, aurait pour conséquence impossible d'aboutir à la résiliation du prêt à une date à laquelle le contrat n'était pas formé.
Le solde restant dû au titre du prêt, tel que retenu par le jugement entrepris, ne fait en lui même l'objet d'aucune critique, serai-ce même à titre subsidiaire par les consorts Y....
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Les consorts Y... in solidum supporteront les dépens, mais il n'y a pas lieu de prévoir l'allocation d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris, en toutes ses dispositions,
Dit n'y avoir lieu à allocation d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne in solidum Madame Catherine Z... veuve Y..., et Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... aux dépens, et autorise la SCP BOMMART MINAULT, Avoué, sur sa demande, à recouvrer directement contre eux, ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans recevoir provision.
- arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, en application de l'article 450, deuxième alinéa, du nouveau code de procédure civile,
- signé par Madame Marion BRYLINSKI, Conseiller, et par Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER Le CONSEILLER
16ème chambre
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 21 JUIN 2007
R.G. No 05/09377
AFFAIRE :
Melle Héloise Florence Y... Représentée par Me RICARD
sa mère Mme Z... veuve Y...
et autres....
C/
Société EDF Etablissement Industriel et Commercial SCP BOMMART
et autres.....
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris, en toutes ses dispositions,
Dit n'y avoir lieu à allocation d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne in solidum Madame Catherine Z... veuve Y..., et Alexandre, Maxime, Victor, Aurélia et Héloïse Y... aux dépens, et autorise la SCP BOMMART MINAULT, Avoué, sur sa demande, à recouvrer directement contre eux, ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans recevoir provision.
- arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, en application de l'article 450, deuxième alinéa, du nouveau code de procédure civile,
- signé par Madame Marion BRYLINSKI, Conseiller, et par Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER Le CONSEILLER