La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/09/2006 | FRANCE | N°447/02

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 septembre 2006, 447/02


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 3ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 08 SEPTEMBRE 2006 R.G. No 05/03193 AFFAIRE : Jean François X... C/ Association "CFBP" Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE No chambre : 6 No RG : 447/02 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP KEIME GUTTIN JARRY SCP TUSET-CHOUTEAU

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur

Jean François X... 3 rue de Mennetou 94500 CHAMPIGNY SUR MARNE repr...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 3ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 08 SEPTEMBRE 2006 R.G. No 05/03193 AFFAIRE : Jean François X... C/ Association "CFBP" Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE No chambre : 6 No RG : 447/02 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP KEIME GUTTIN JARRY SCP TUSET-CHOUTEAU

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Jean François X... 3 rue de Mennetou 94500 CHAMPIGNY SUR MARNE représenté par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués - N du dossier 05000359 plaidant par Me DESANDRE NAVARRE, avocat au barreau de PARIS APPELANT [****************] Association COMITE FRANCAIS DU BUTANE ET DU PROPANE "CFBP" Tour Arago 8 Terrasse Bellini 92806 PUTEAUX CEDEX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP TUSET-CHOUTEAU, avoués - N du dossier 20050260 plaidant par Me MAHL de la SCP OLTRAMARE-FOURCAULT et associés avocats au barreau de PARIS (R.32) INTIMEE [****************] Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Juin 2006 devant la cour composée de :

Madame Bernadette WALLON, président,

Monsieur Marc REGIMBEAU, conseiller,

Madame Marie-Claude CALOT, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par arrêté en date du 15 janvier 1985, le ministère des transports a habilité deux organismes, l'Association nationale pour le développement de la formation professionnelle du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle, aux droits de laquelle se trouve le Groupement national pour la formation automobile (G.N.F.A.) et le Comité professionnel du butane et du propane devenu le Comité français du butane et du propane (C.F.B.P.), pour délivrer les agréments nécessaires pour la transformation des véhicules automobiles en vue de leur fonctionnement au gaz de pétrole liquéfié (G.P.L.)

Le 25 mars 1998, M. X... mécanicien automobile exerçant sous l'enseigne "SOLEIL AUTO" a, en application de l'arrêté précité, été agréé par le C.F.B.P. sous le no 3885P0398 pour cette activité de transformation.

Le 23 novembre 1998, M. Y..., exerçant sous l'enseigne "SOLEIL AUTO EVOLUTION G.P.L.", a été agrée par le C.F.B.P. sous le no C 4242P1198 pour cette même activité.

Le 15 février 2001 le C.F.B.P. lui a adressé un courrier rappelant un précédent courrier du 18 décembre 2000 et lui réclamant la

déclaration annuelle du nombre de véhicules transformés au G.P.L.C. dans ses ateliers.

Puis, par courrier du 27 avril 2001, le C.F.B.P. l'a informé qu'il retirait son agrément "pour non paiement de la redevance 2000, manque déclaration annuelle regroupant le nombre de véhicules transformés pour l'exercice 2000, refus des audits", en indiquant que cette situation déclenche immédiatement la suppression de votre agrément d'entreprise tel que cela est précisé dans le document réf.109" ;

C'est dans ces conditions que par acte du 26 décembre 2001, M. X... a fait assigner le C.F.B.P. en réparation du préjudice qu'il estime subir du fait de ce retrait d'agrément.

[*****]

Le 21 avril 2005, M. Jean-François X... a relevé appel du jugement rendu le 24 mars 2005 par le tribunal de grande instance de NANTERRE qui a : - rejeté la demande de sursis à statuer du C.F.B.P.,Q - débouté M. X... de ses demandes, - débouté le C.F.B.P. de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, - débouté le C.F.B.P. de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamné M. X... aux dépens.

[*****] M. X..., appelant, demande dans ses conclusions signifiées le 11 mai 2006, par infirmation du jugement entrepris, de : ô

condamner le C.F.B.P. à lui payer la somme de 228.695 euros à titre de dommages-intérêts tous préjudices confondus, ô

à titre subsidiaire, ô

ordonner une expertise en vue de déterminer tous les préjudices subis par lui résultant du retrait par le C.F.B.P. de son agrément d'installateur/transformateur GPL, ô

condamner le C.F.B.P. au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

M. X... indique que : - du fait du retrait de son agrément, il a perdu toute la clientèle attachée à son activité de transformation au GPL, ce qui a mis en péril son entreprise, - depuis un arrêté du 10 novembre 2004 du ministre de l'équipement et des transports, toute procédure d'agrément a été supprimée pour les installateurs GPL qui doivent désormais justifier simplement d'une assurance de responsabilité civile spécifique, - en le privant le 27 avril 2001 de l'agrément indispensable à l'exercice de son activité de transformation de véhicules fonctionnant au GPL, le C.F.B.P. s'était arrogé des pouvoirs de réglementation dont il n'était pas titulaire, - outre un préjudice commercial, il a subi un réel préjudice professionnel, ayant perdu toute sa clientèle attachée à l'activité de transformation. [*****]

Le COMITE FRANCAIS DU BUTANE et DU PROPANE dit C.F.B.P., intimé, par conclusions signifiées le 17 mai 2006, demande de : ô

dire que la chose à juger dans le contentieux administratif constitue une question préjudicielle dans la présente instance et surseoir à statuer en l'attente d'une décision définitive dans ce contentieux, ô

subsidiairement, ô

dire que par principe, l'édiction d'une procédure d'agrément actualisée ne pouvait être imputée à faute au C.F.B.P. pour les

motifs évoqués, ô

dire en tout état de cause, que l'appelant ne justifie, que ce soit sur le principe et que ce soit sur le quantum, d'aucun préjudice matériellement établi et susceptible d'être uni par un lien de causalité et adéquat aux faits imputés à faute au C.F.B.P., ô

débouter l'appelant de ses prétentions et le condamner au paiement de la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le C.F.B.P. prétend que : - M. X... a méconnu à compter de l'an 2001 les engagements pris, conduisant à la délivrance d'une injonction le 15 février 2001, de la notification faite le 27 avril 2001, puis le 26 novembre 2001 (notification de la DRIRE), - l'appréciation de la légalité des décisions à caractère réglementaire et individuel qui sont en cause constitue bien une question préjudicielle au développement de la présente instance, puisque de la solution qui lui sera donnée par la juridiction compétente, dépendra la reconnaissance ou l'exclusion de l'un des fondements de l'action en responsabilité engagée devant ce tribunal, en l'occurrence l'éventuelle faute, - sur le fond, M. X... ne justifie pas de la perte d'une chance de bénéfice, alors que l'entreprise accumulait des pertes et non des profits dès l'exercice 2000, dans le droit fil de la paupérisation globale du marché de la transformation au GPL, - les procédures nouvelles ont été mises en oeuvre avec l'assentiment des autorités de contrôle, - les refus limités de réception à titre individuel lui ayant été notifiés par la DRIRE l'ont été pour des causes étrangères au C.F.B.P., alors en outre qu'il n'y aurait aucun lien entre les faits évoqués imputés au C.F.B.P. et les résultats de l'entreprise au demeurant gravement déficitaires dès l'exercice 2000.

[*****]

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 31 mai 2006.

MOTIFS DE LA DECISION - SUR L'EXCEPTION DE SURSIS A STATUER

Conformément aux dispositions de l'article 8 de l'arrêté du 15 janvier 1985 du Ministère de l'urbanisme, du logement et des transports, relatif à l'équipement des véhicules automobiles utilisant comme source d'énergie les gaz de pétrole liquéfiés, l'annexe VI désigne notamment le COMITE PROFESSIONNEL DU BUTANE ET DU PROPANE, devenu le COMITE FRANCAIS DU BUTANE ET DU PROPANE (C.F.B.P.) comme organisme habilité à délivrer les agréments aux entreprises chargées de réaliser les transformations des véhicules concernés ;

Les actes unilatéraux de caractère réglementaire ou individuel pris par un organisme privé pour l'exécution d'un service public administratif relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;

Cette compétence demeure limitée aux actes unilatéraux comportant l'usage de prérogatives de puissance publique ; elle ne s'étend en revanche ni à leurs actes de gestion courante ni aux contrats qu'ils passent avec d'autres personnes privées, même lorsque ces contrats se rattachent à l'exécution du service public qui leur est confiée et comportant des clauses exorbitantes du droit commun ;

En l'espèce, les règles de délivrance et de retrait de l'agrément d'entreprise mentionnées dans le document intitulé " Transformation des véhicules pour le fonctionnement au GPL Carburant -conditions d'agrément des entreprises transformatrices" (référence 109)", prévoyant notamment une procédure de retrait de l'attestation de qualification en cas de non-respect des normes ainsi qu'une procédure

de retrait d'agrément, temporaire ou définitif pour les cas graves ou le non respect répétitif des obligations découlant de la présente procédure, ne relèvent pas d'un accord contractuel entre les parties ;

Dès lors que le C.F.B.P., association de droit privé, investi concurremment avec le G.N.F.A. en vertu de l'art 8 de l'arrêté du 15 janvier 1985 d'une mission de service public consistant notamment à délivrer des agréments techniques aux entreprises chargées de transformer les véhicules automobiles en vue de l'utilisation du GPL, exerce les pouvoirs que la réglementation leur confie, celui-ci accomplit des actes administratifs qui relèvent de la juridiction administrative compétente tant pour en apprécier la légalité que pour se prononcer sur leurs conséquences dommageables ;

M. X... invoque à tort une voie de fait pouvant justifier la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, au motif que le retrait d'agrément émanant du C.F.B.P. dont il a été l'objet le 27 avril 2001, serait intervenu sur le fondement d'une réglementation illégalement prise par une autorité incompétente, par analogie à la décision prononcée par la Cour administrative d'appel de Marseille en date du 3 juin 2003 qui a rejeté le recours contre la décision du tribunal administratif de Nice (qui a, à la requête d'une entreprise transformatrice, annulé la décision du G.N.F.A. de refus de renouvellement d'agrément qui lui avait été donné, par suite de la perte de l'attestation de qualification), considéré que l'habilitation décernée au G.N.F.A. et au C.F.B.P. ne comportait pas le pouvoir d'édicter et/ou de faire évoluer les règles concernant la délivrance et le retrait des agrément accordés pour tenir compte de l'évolution des techniques et des normes de sécurité ;

Cette interprétation a été validée par arrêts du Conseil d'Etat en

date du 9 avril 2004 (non admission des requêtes pour défaut de moyen sérieux au

Cette interprétation a été validée par arrêts du Conseil d'Etat en date du 9 avril 2004 (non admission des requêtes pour défaut de moyen sérieux au visa de l'article L 822-1 du code de justice administrative) ;

En effet, il y a voie de fait notamment lorsqu'une décision administrative portant atteinte à une liberté fondamentale est en elle-même et indépendamment des conditions dans lesquelles elle est exécutée, manifestement insusceptible d'être rattachée à l'exécution d'un texte législatif ou réglementaire ;

En l'espèce, il résulte du courrier adressé le 3 octobre 1996 au C.F.B.P. par la Direction de la sécurité et de la circulation routière relevant du Ministère de l'Equipement, du logement et du transport, que le C.F.B.P. a mis en oeuvre la nouvelle procédure d'agrément destinée aux entreprises transformatrices en sa qualité de délégataire d'une mission de service public en vertu de l'arrêté du 15 janvier 1985 ;

La décision de retrait de l'agrément d'entreprise de M. X... prise par le C.F.B.P. portant atteinte à la liberté du commerce, étant susceptible d'être rattachée à l'exécution de l'arrêté du 15 janvier 1985 habilitant cet organisme à délivrer des agréments, ne peut être qualifiée de voie de fait, qui seule peut, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, justifier la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Dès lors, seuls les tribunaux administratifs sont compétents tant pour apprécier la légalité que pour se prononcer sur les conséquences dommageables du retrait d'agrément décidé par le C.F.B.P. au préjudice de M. X..., acte unilatéral comportant l'usage de prérogatives de puissance publique ;

L'exception d'incompétence au profit des juridictions administratives sera donc accueillie ;

Cependant, la question de l'appréciation de la légalité de la décision de retrait ne constitue pas en l'espèce une question préjudicielle, dès lors que M. X... ne conteste pas ne pas avoir saisi les juridictions administratives, alors que la décision faisant grief est en date du 27 avril 2001 ;

Le jugement sera confirmé, mais par substitution de motifs, en ce qu'il rejeté la demande de sursis à statuer et débouté le C.F.B.P. de sa demande reconventionnelle ;

Que l'équité commande de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit du C.F.B.P. en cause d'appel, ainsi que précisé au présent dispositif ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME par substitution de motifs le jugement entrepris en ce qu'il a : - rejeté la demande de sursis à statuer du C.F.B.P., - débouté le C.F.B.P. de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, - débouté le C.F.B.P. de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

L'infirmant pour le surplus

Et statuant à nouveau,

Se déclare incompétent au profit des juridictions administratives pour apprécier la légalité et pour se prononcer sur les conséquences dommageables du retrait d'agrément décidé par le C.F.B.P. au préjudice de M. X...,

Rejette le moyen tiré de l'existence d'une question préjudicielle,

Rejette le moyen tiré de l'existence d'une voie de fait,

CONDAMNE M. X... à verser au C.F.B.P. la somme de 2.500 euros en

application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne M. X... aux dépens de première instance et d'appel et admet la SCP TUSET CHOUTEAU, avoués, au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile. - signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame THEODOSE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 447/02
Date de la décision : 08/09/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-09-08;447.02 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award