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22/06/2006 | FRANCE | N°03/00183

France | France, Cour d'appel de Versailles, 22 juin 2006, 03/00183


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80AH.L./J.C. 5ème chambre B ARRET No CONTRADICTOIRE DU 22 JUIN 2006 R.G. No 05/00813 AFFAIRE :

Raoul X... C/ S.A.R.L. LECO FRANCE en la personne de son représentant légal Décision déférée à la cour :

Jugement rendu le 02 Février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de MONTMORENCY Section : Encadrement No RG : 03/00183 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affair

e entre : Monsieur Raoul X... 1 Ter rue Roger Salengro La Longueville 59570...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80AH.L./J.C. 5ème chambre B ARRET No CONTRADICTOIRE DU 22 JUIN 2006 R.G. No 05/00813 AFFAIRE :

Raoul X... C/ S.A.R.L. LECO FRANCE en la personne de son représentant légal Décision déférée à la cour :

Jugement rendu le 02 Février 2005 par le Conseil de Prud'hommes de MONTMORENCY Section : Encadrement No RG : 03/00183 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Raoul X... 1 Ter rue Roger Salengro La Longueville 59570 BAVAY comparant en personne, assisté de Me François MORDANT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R105 APPELANT ET INTIME INCIDENT [****************] S.A.R.L. LECO FRANCE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié de droit au siège social sis : ZAC les Doucettes BP 74 95144 GARGES LES GONESSE représentée par Me Latifa BENAHJI, avocat au barreau de PONTOISE, vestiaire : 51 INTIMÉE ET APPELANTE INCIDENTE [****************] Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mai 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jacques CHAUVELOT, conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :

Madame Jeanne MININI, président,

Monsieur Jacques CHAUVELOT, conseiller,

Madame Emmanuelle Y..., vice-président placé, Greffier, lors des débats : Mme Christiane PINOT, EXPOSÉ DU LITIGE,

M. X... a été engagé par la société Léco France selon contrat à durée indéterminée du 20 janvier 1992, en qualité d'ingénieur technico-commercial.

La rémunération fixée à son contrat de travail était un salaire de base annuel de 315.000 francs (48.021,44 ç) sur treize mois pour un horaire hebdomadaire de 39 heures.

Faisant valoir que son employeur avait depuis janvier 1999 modifié sa rémunération - qui était devenue pour partie variable - et que ses heures supplémentaires n'avaient pas été rémunérées, M. X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de La société Léco France par courrier du 22 novembre 2002.

La société Léco France employait habituellement plus de onze salariés au moment du licenciement.

M. X... a saisi le conseil des prud'hommes de Montmorency le 19 février 2003 de demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, indemnité conventionnelle de licenciement, heures supplémentaires et congés payés afférents, repos compensateurs et congés payés afférents, rappel de salaire, indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, remise des documents de rupture sous astreinte, intérêts au taux légal et capitalisation.

Par jugement du 2 février 2005 le conseil des prud'hommes de Montmorency a : [* dit que M. X..., qui a pris l'initiative de rompre son contrat de travail, doit en supporter les conséquences, *] condamné M. X... à verser à la société Léco France la somme de 10.346,61 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis non effectué, [* condamné la société Léco France à verser à M. X... la somme de 1.000 ç brut à titre de rappel de salaire pour l'année 2001 ainsi que les congés payés afférents pour 10 %, *] ordonné la

compensation entre les créances indemnitaires à due concurrence de la moindre, * débouté M. X... du surplus de ses demandes, * rejeté le reliquat de la demande reconventionnelle de la société.

M. X... a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Il demande à la cour : d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, de condamner la société Léco France à lui payer :

- 13.129,74 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1.312,97 ç à titre de congés payés afférents, - 10.759 ç à titre d'indemnité de licenciement, - 26.259,48 ç à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 19.622 ç à titre de rappel de salaire et 1.962,20 ç à titre de congés payés afférents, - 14.271,14 ç à titre de rappel d'heures supplémentaires et 1.427,11 ç à titre de congés payés afférents, - 1.110,49 ç à titre de repos compensateurs et 110,04 ç à titre de congés payés afférents, d'ordonner la remise, sous astreinte de 100 ç par jour de retard à compter de l'arrêt, d'une attestation ASSEDIC conforme, d'un certificat de travail et de bulletins de paie conformes, de condamner la société Léco France à lui payer la somme de 2.500 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, de condamner la société Léco France au paiement des intérêts légaux à compter de l'introduction de la demande avec capitalisation.

La société Léco France demande à la cour de : * constater que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié emporte les conséquences d'une démission, * en conséquence confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions à l'exception des dommages et intérêts, * y ajoutant, constater que M. X... a commis une faute qui a directement engendré un préjudice pour la société, * faisant droit à son appel incident, condamner M. X... à payer la somme de 10.346,61 ç à titre de dommages et intérêts, * condamner M. X... à lui payer la somme de 3.000 ç au

titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 5 mai 2006.

MOTIFS, sur la rupture de la relation de travail

Considérant que M. X... a écrit le 22 novembre 2002 à la société Léco France dans les termes suivants : "je viens par ce présent courrier vous faire part de ma volonté de rompre judiciairement mon contrat de travail, imputable à l'employeur, pour les motifs suivants : Depuis le début de l'année 1999 vous avez unilatéralement changé mon mode de rémunération, vous m'avez fait miroiter à plusieurs reprises des augmentations qui sont toujours restées sans effet : les salaires postérieurs à cette année ont fluctué mais sont toujours restés inférieurs (voir annexe). Votre proposition pour 2003 laisse envisager un décalage négatif d'environ 15 % par rapport à 1998 (en euros constants voir barème joint au courrier). Je ne peux et n'ai jamais pu depuis 1999 concevoir cette perte de salaire. D'autant plus que mon secteur d'activité s'étant agrandi ma charge de travail est allée de pair. Un autre point d'importance est le non paiement des heures supplémentaires au regard de l'article L.212-4 du Code du travail. Je vous fais part qu'à réception de ce courrier, mon contrat se terminera, que mon préavis sera dû et j'attendrai sous huit jours : le certificat de travail, la feuille ASSEDIC, le solde de tous comptes et le paiement des heures supplémentaires que j'ai effectuées ces quatre dernières années (évaluation en annexe) Etc..." ;

Considérant que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans

le cas contraire, d'une démission ; Considérant, en ce qui concerne les heures supplémentaires, que s'il résulte de l'article L. 212-1-1 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, il appartient toutefois au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, l'employeur devant ensuite fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

Considérant que M. X... produit à l'appui de sa demande un relevé, établi par lui même, d'heures accomplies en déplacement à l'étranger ou pour des salons ;

Considérant que la société Léco France conteste les heures supplémentaires en faisant observer que le salarié, en qualité de cadre, avait la libre disposition de son temps de travail ;

qu'il pouvait organiser à sa guise ses heures de travail ;

qu'il pouvait récupérer la semaine suivante en cas de dépassement horaire (cf : attestation de M. Z..., responsable du service commercial de la société Léco France) ;

Considérant que la seule production, en dehors de tous autres éléments, d'un tableau établi par le salarié lui même est insuffisante pour établir la réalité des heures supplémentaires ;

que la demande à ce titre doit être rejetée ;

Considérant, en ce qui concerne la rémunération, que le contrat de travail de M. X... stipule une rémunération fixe annuelle de 315.000 francs soit 48.021,44 ç ;

Considérant que l'employeur ne conteste pas avoir modifié la rémunération à compter du 1er janvier 1999, introduisant une partie variable et ramenant la partie fixe annuelle à 39.636,74 ç ;

Considérant que l'employeur fait valoir que M. X... avait accepté ce mode de rémunération,

qu'il produit sur ce point une attestation de M. A..., ingénieur technico commercial, du 1er septembre 2004, qui indique qu'il avait lui même accepté ce nouveau mode de rémunération ;

que ce mode a été proposé aux autres ingénieurs, notamment M. X... ;

et qu'il n'a jamais eu connaissance d'un refus officiel de la part des autres ingénieurs MM. B..., X..., Toillier et Georg ;

Considérant que la société Léco France confirme que M. X... n'a jamais refusé ce mode de rémunération ;

qu'elle précise que la rémunération de M. X... a toujours dépassé depuis 1999 le salaire stipulé à son contrat de travail sauf en 2001 ;

Considérant que le mode de rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail, qui ne peut être modifié sans son accord ;

que l'employeur ne peut modifier unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié, même dans un sens favorable ;

Considérant que la société Léco France n'apporte pas la preuve de l'acceptation claire et non équivoque de M. X... ;

que l'attestation de M. A... est à cet égard insuffisante n'établissant pas l'acceptation formelle de M. X... ;

Considérant bien au contraire que M. X... a contesté son mode de rémunération par courrier électronique du 4 décembre 2001 sans réaction de l'employeur ;

Considérant que M. X... était en droit de prendre acte de la rupture de la relation de travail en raison de la modification unilatérale par l'employeur de son mode de rémunération ;

que la rupture, imputable à l'employeur, doit être analysée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que M. X..., cadre, est en droit de percevoir une

indemnité compensatrice de préavis de trois mois soit la somme de 12.540,51 ç outre congés payés afférents pour 1.254,05 ç, sur la base d'un salaire mensuel brut de 4.180,17 ç, moyenne des douze derniers mois ;

Considérant qu'en

Considérant qu'en application des articles 15 et 16 de la convention collective de l'import-export, des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire, d'importation-exportation de France métropolitaine, applicable en l'espèce, M. X... est en droit de percevoir, pour une ancienneté de 10 ans, 9 mois et 16 jours, une indemnité conventionnelle de licenciement de 10.759 ç conforme à sa demande ;

Considérant que M. X... a travaillé dans une société employant habituellement plus de dix salariés, qu'il avait une ancienneté de plus de deux ans lors du licenciement ;

qu'il est en droit d'obtenir en application de l'article L.122-14-4 du Code du travail une indemnité qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire, soit en l'espèce la somme de 24.645,16 ç ; Considérant que M. X... a retrouvé un emploi immédiatement après la rupture de la relation de travail ;

que la cour a les éléments suffisants pour lui accorder à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 24.650 ç ; sur le rappel de salaire

Considérant qu'il est établi, au vu des bulletins de salaire, que M. X... a perçu en 2001 une rémunération de 47.023,71 ç, inférieure à la somme de 48.021,44 ç stipulée à son contrat de travail ;

que la société doit donc être condamnée à lui payer la somme de 997,73 ç outre congés payés afférents pour 99,77 ç ; sur les autres demandes

Considérant qu'il faut ordonner la remise par la société Léco France d'un certificat de travail, d'une attestation ASSEDIC et de bulletins de salaire conformes à la présente décision, sous astreinte de 100 ç par jour de retard passé un délai d'un mois après la notification du présent arrêt ;

Considérant que les créances salariales (indemnité conventionnelle de licenciement, rappel de salaire, indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents) produisent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 20 février 2003 ;

que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter de la décision qui les prononce ;

Considérant qu'il faut ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil à compter de la demande formulée à l'audience du 22 septembre 2004 ;

Considérant qu'il faut rejeter la demande de dommages et intérêts de la société Léco France alors que la rupture de la relation de travail lui est imputable ;

Considérant qu'il est équitable de condamner la société Léco France à payer à M. X... la somme de 2.000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

La COUR,

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Montmorency du 2 février 2005 en ce qu'il a rejeté la demande de M. X... au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents ;

L'infirme pour le surplus ;

Dit que la rupture de la relation de travail, imputable à la société Léco France, doit être analysée comme un licenciement sans cause

réelle et sérieuse ;

Condamne la société Léco France à payer à M. X... les sommes de : [* 12.540,51 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés pour 1.254,05 ç, *] 10.759 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, [* 997,73 ç à titre de rappel de salaire outre congés payés afférents pour 99,77 ç, ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2003 et capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil à compter du 22 septembre 2004, *] 24.650 ç à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil ;

Ordonne à la société Léco France de remettre à M. X... un certificat de travail, une attestation ASSEDIC et des bulletins de salaire conformes à la présente décision, sous astreinte de 100 ç par jour de retard passé un délai d'un mois après notification du présent arrêt ;

Condamne la société Léco France à payer à M. X... la somme de 2.000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société Léco France aux dépens.

Arrêt prononcé par Mme Jeanne MININI, président, et signé par Mme Jeanne MININI, président et par Mme Christiane PINOT, greffier présent lors du prononcé

Le GREFFIER,

Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 03/00183
Date de la décision : 22/06/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-06-22;03.00183 ?
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