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04/05/2006 | FRANCE | N°5828/04

France | France, Cour d'appel de Versailles, 04 mai 2006, 5828/04


COUR D'APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 14A

1ère chambre 1ère section

ARRET No CONTRADICTOIRE DU 04 MAI 2006

R.G. No 05/02765 AFFAIRE :

Valérie X... C/ Société CONCEPTION DE PRESSE ET D'EDITION "SCPE"

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE No chambre : 1 No Section : A No RG : 5828/04

Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP JUPIN SCP LEFEVRE

LE QUATRE MAI DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant

dans l'affaire entre :

Mademoiselle Valérie X... née le 20 Décembre 1974 à LAGNY SUR MARNE (77) ... - 92200 N...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 14A

1ère chambre 1ère section

ARRET No CONTRADICTOIRE DU 04 MAI 2006

R.G. No 05/02765 AFFAIRE :

Valérie X... C/ Société CONCEPTION DE PRESSE ET D'EDITION "SCPE"

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE No chambre : 1 No Section : A No RG : 5828/04

Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP JUPIN SCP LEFEVRE

LE QUATRE MAI DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Mademoiselle Valérie X... née le 20 Décembre 1974 à LAGNY SUR MARNE (77) ... - 92200 NEUILLY SUR SEINE représentée par la SCP JUPIN ALGRIN Avoués -

N du dossier 21359 Rep/assistant : Me Jean Marc GUAZZINI (avocat au barreau de PARIS) APPELANTE

Société CONCEPTION DE PRESSE ET D'EDITION "SCPE" 149 rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS PERRET CEDEX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP LEFEVRE TARDY HONGRE BOYELDIEU Avoués - N du dossier 250365 Rep/assistant : Me Marie-Christine DE PERCIN (avocat au barreau de PARIS)

INTIMEE

Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Mars 2006 devant la cour composée de :

Madame Francine BARDY, président,

Madame Lysiane LIAUZUN, conseiller,

Madame Françoise SIMONNOT, conseiller, qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Valérie X..., qui exerce la profession de mannequin, a effectué en octobre 2003 une séance de poses photographiques ayant pour objet la réalisation de photographies libertines avec une autre jeune femme qui devaient être exploitées jusqu'au 28 février 2004 sur deux sites internet et dans le magazine UNION.

Faisant grief à la société de conception de presse et d'édition (SCPE) d'avoir publié sans son autorisation dans le no 140 du magazine mensuel ENTREVUE du mois de mars 2004 en pages 90 et 91 cinq photographies de ladite séance, dont quatre déjà reproduites dans UNION, accompagnées de commentaires dégradants et d'avoir ainsi porté atteinte à son droit à l'image, Valérie X... a fait assigner par acte du 5 mai 2004 ladite société devant le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE en paiement, sur le fondement des articles 9 et 1382 du code civil, de la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, sollicitant en outre une mesure de publicité et le paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement du 16 mars 2005, le Tribunal a rejeté toutes ses demandes et l'a condamnée à payer à la SCPE la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens.

Appelante, Valérie X..., aux termes de ses dernières écritures signifiées le 26 juillet 2005 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, visant les articles 9 et 1382 du code civil, conclut à l'infirmation de la décision entreprise et demande à la Cour, en statuant à nouveau, de :

- dire qu'en représentant les photographies la représentant accompagnées de commentaires dégradants dans le magazine ENTREVUE no140 de mars 2004 sans son autorisation, la SCPE a gravement porté atteinte à son droit à l'image et à sa vie privée,

- condamner la SCPE à lui payer la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé,

- ordonner la publication du jugement dans 3 journaux ou publications similaires dont ENTREVUE au frais de la SCPE sans que le coût de chaque insertion puisse excéder la somme de 3.800 € HT, soit la somme totale de 11.400 €,

- condamner la SCPE à lui payer la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 8 février 2006 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, la SCPE, visant les articles 9 et 1382 du code civil et 10 de la Convention Européenne des droits de l'Homme, conclut à la confirmation de la décision entreprise en toutes ses dispositions en ce qu'elle a considéré que la publication des photographies incriminées correspondait à une légitime information du public et ne constituait pas une atteinte au droit à l'image et à la vie privée de l'appelante et demande à la Cour, de :

- en conséquence, dire que la publication incriminée procède de la liberté d'informer de manière critique sur un événement d'actualité et débouter l'appelante de toutes ses demandes,

- subsidiairement, dire que l'appelante n'a pas subi de préjudice du fait de la publication incriminée et , la débouter de toute ses demandes, - en tout état de cause, la condamner au paiement de la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

SUR CE

Considérant que chacun dispose sur son image d'un droit lui permettant de s'opposer à sa fixation, à sa reproduction ou à son utilisation sans son autorisation préalable, étant observé qu'il est de principe que la publication des photographies doit respecter la finalité de l'autorisation donnée ;

Considérant qu'il est constant que Valérie X... a, selon acte sous seing privé du 23 octobre 2003, autorisé l'exploitation des photographies sur les sites internet www.maitresse-patricia.com et www.maitresse-patricia.net jusqu'au 28 février 2004 et "dans tout magazine lié de près ou de loin au domaine libertin au niveau national avec son accord" ;

que par acte sous seing privé du 24 octobre 2003, elle a autorisé la société MONTREUX PUBLICATIONS à reproduire gracieusement dans le magazine UNION les photographies la représentant, ajoutant de sa main "J'en accepte l'utilisation exclusivement sur le magazine UNION et ce jusqu'au 28 février 2004" après avoir rayé la mention "j'en accepte l'utilisation sur tout autre support destiné à sa promotion ou sa publicité" ;

qu'il s'ensuit qu'elle a entendu limiter strictement la publication des photographies litigieuses tant en ce qui concerne le support que la durée ;

Considérant que la SCPE ne justifie pas avoir obtenu, ni même ne prétend avoir sollicité, l'autorisation de publier lesdites photographies, mais se prévaut de la liberté d'informer sur un événement d'actualité ;

que, certes, l'article illustré des photographies litigieuses a pour objet d'éclairer les lecteurs sur la véritable personnalité des participantes à l'émission télévisée "Bachelor" dont le dernier épisode venait d'être diffusé le 26 février 2004 et est conforme à la ligne éditoriale de la revue ENTREVUE qui a pour but de dénoncer, notamment, "les supercheries de la téléréalité" ;

que toutefois, les photographies litigieuses n'ont pas été prises au cours du tournage ou à l'occasion de la diffusion de l'émission critiquée et n'ont pas de rapport direct avec l'événement d'actualité qu'elles sont sensées illustrer;

qu'il s'agit de photographies professionnelles détournées de leur objet, dont la reproduction n'a été autorisée que dans un contexte strictement déterminé et qui ont été publiées dans la revue ENTREVUE malgré l'opposition expresse de la personne représentée;

que cette publication constitue une atteinte au droit à l'image de Valérie X..., la décision entreprise étant de ce chef infirmée ;

Considérant que la seule constatation de l'atteinte au respect dû au droit à l'image ouvre droit à réparation, le montant de l'indemnisation étant souverainement apprécié par le juge du fond ;

Considérant que la publication de ces photographies dans le journal ENTREVUE leur a donné une notoriété qu'elles n'auraient jamais dû avoir eu égard à la diffusion limitée voulue par Valérie X... ;

que le préjudice subi par celle-ci du fait de la publication non autorisée des photographies dans ENTREVUE est d'ordre moral, mais également professionnel eu égard à sa profession de mannequin et à l'image qui est donnée d'elle ;

que toutefois, Valérie X..., dont la séance de pose a été rémunérée 150 €, ne produit aucun contrat qui justifierait de sa notoriété et de ce qu'elle représente des grandes marques de prêt à porter ou de haute couture et qu'elle a subi un préjudice spécifique dans ce domaine ;

que son préjudice sera estimé à la somme de 5.000 € ;

qu'en outre, elle sera indemnisée des fais non répétibles exposés dans la présente instance à concurrence de la somme de 2.000 € ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,

DÉCLARE l'appel recevable,

INFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions,

ET STATUANT À NOUVEAU,

DIT qu'en reproduisant sans l'autorisation de Valérie X... les photographies la représentant dans le no 140 du mois de mars 2004 du magazine ENTREVUE, la société conception de presse et d'édition a porté atteinte à son droit à l'image,

CONDAMNE la société conception de presse et d'édition à payer à Valérie X... la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice et celle de 2.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

CONDAMNE la société conception de presse et d'édition aux entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Madame Francine BARDY, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 5828/04
Date de la décision : 04/05/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-05-04;5828.04 ?
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